Billet invité.
En Europe, ce ne sont plus aux élections allemandes que tout est suspendu, mais à la conclusion des négociations entre les quatre partis qui explorent la formation d’une coalition gouvernementale suite à leur résultat : la CDU et la CSU, le FDP et les Verts. Celle-ci est mal partie, faisant pronostiquer à Gerhard Schröder que même si un accord finissait par être conclu, la coalition ne tiendrait pas un an, à l’échéance d’élections régionales entrainant la fin du long règne de la CSU en Bavière.
Aucun rapprochement significatif ne s’est opéré aux cours des semaines de négociation à huit clos, ponctuées par des attaques publiques. Aucun compromis ne s’est dessiné sur les grands sujets qui divisent : les politiques budgétaire, énergétique et de l’immigration, pas plus que sur les questions européennes, de politique étrangère et de défense. Ces derniers thèmes sont d’ailleurs ignorés dans les médias allemands, sauf pour rapporter la déclaration de la CSU qui accuse les Verts – les plus pro-européens de tous, avec une aile de la CDU – de bloquer les négociations à leurs propos. Concernant la politique énergétique et le changement climatique, les points de vue sont tellement éloignés que la CSU et le FDP ne pourraient pas souscrire à l’accord sur lequel reposait la coalition sortante. Pire qu’un désaccord entre partenaires, Angela Merkel est aux prises avec ses propres contradictions afin de respecter les objectifs impossibles à atteindre d’émissions de gaz à effet de serre de la COP 21 de 2020, entre sa défense du diesel et de l’industrie automobile, l’arrêt du nucléaire et la dépendance au charbon,
Angela Merkel reconnait ce matin « des divergences profondes » mais il est trop tôt pour enterrer la formule d’une coalition Jamaïque au profit de l’avènement d’un gouvernement minoritaire, qui serait en Allemagne une grande première. À moins que la convocation de nouvelles élections soit préférée. Mais qu’il puisse être évoqué une rupture entre la CDU et la CSU, les deux alliés historiques chrétiens-démocrates, en dit long sur les évolutions en cours dans l’électorat allemand, plus encore que l’avènement de l’AfD ou le retour du FDP.
Dans l’immédiat, il appartient aux dirigeants des partis de décider de la poursuite des négociations, avec comme objectif concret de progressivement supprimer les nombreux passages entre crochets de l’ébauche de leur document de travail qui identifient leurs désaccords. Le scénario des négociations au finish dont Bruxelles a l’habitude, où un accord intervient au tout dernier moment, peut certes intervenir dans les trois semaines à venir, une extension de cette échéance n’ayant pas grand sens si le temps imparti aux négociations n’a pas permis de les conclure. Une telle issue serait d’autant plus concevable qu’aucun des partis présents autour de la table n’a intérêt à retourner devant les électeurs, bien que ce ne soit pas la meilleure des motivations pour fonder un accord de gouvernement durable.
L’Allemagne subit à son tour les effets de la crise politique européenne.
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