Billet invité.
La mise sous tutelle de la Catalogne n’était pas négociable. Carles Puigdemont a hier tenté en pure perte d’obtenir la suspension immédiate des mesures l’accompagnant, une fois que l’autorisation en aura été donnée par le Sénat. Mariano Rajoy va conclure cette séquence en claquant la porte.
Faisaient question la destitution du cabinet catalan, le droit de veto sur les résolutions du Parlement, le contrôle des finances, de la police régionale et des médias publics. Carles Puigdemont avait aussi demandé la libération des deux leaders indépendantistes emprisonnés et le départ de la Guardia Civil. Dans l’attente d’un projet de décret actant leur non application, qui n’est jamais venu, il reportait à deux reprises pour rien la tenue de son discours…
À Madrid, le PSOE tentait de son côté d’émousser la politique de Mariano Rajoy en présentant au Sénat un amendement, rejeté, qui prévoyait la suspension de l’application de l’article 155 au cas où les autorités catalanes convoquaient des élections anticipées. C’était la position de départ du Parti Popular (PP), sur laquelle Mariano Rajoy était ensuite revenu. Un autre amendement, celui-là mis à l’étude par le PP, excluait du champ des mesures de la mise sous tutelle le contrôle des médias publics (chaînes de télévision et de radio).
Au final, après avoir épuisé les possibilités d’un compromis de dernière minute, Carles Puigdemont a donné la parole au Parlement. La démission d’un membre du gouvernement catalan était enregistrée, pouvant annoncer des défections lors du vote de proclamation de l’indépendance au Parlement, dans le dernier espoir que les autorités de Madrid reculent si le vote n’a pas lieu.
Après s’être rallié à Mariano Rajoy, qui avait les moyens de faire adopter seul sa position au Sénat où le PP est majoritaire, le PSOE a tardivement tenté de se démarquer de son intransigeance en défendant une version soft de sa politique. Dans le climat très conflictuel qui s’annonce en Catalogne, l’unité un moment affichée à Madrid entre les deux partis de gouvernement ne tiendra pas très longtemps. La crise politique va rebondir, rendant plus problématique la position du gouvernement minoritaire de Mariano Rajoy.
L’Europe connaissant déjà un déficit démocratique, la mise sous tutelle d’une région, faisant suite à celle d’un pays, la Grèce, ne va pas passer inaperçue. En affectant de considérer la revendication catalane comme une affaire intérieure à l’Espagne, pour ne pas s’impliquer, la Commission et le Parlement ont perdu une excellente occasion de faire prévaloir la vision d’une Europe ouverte et conforté ceux qui n’en attendent plus rien. La mise sous tutelle de la Catalogne n’infirme pas le délitement de l’Europe, elle le confirme.
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