Billet invité.
Un compromis paraissait encore possible au cours de ces dernières heures, mais il s’est vite évanoui. Un plan B reposant sur la convocation d’élections anticipées en Catalogne était évoqué, qui aurait ouvert le jeu en laissant espérer à chaque partie de pouvoir l’emporter. Pedro Sanchez, le leader du PSOE, défendait cette position et une source gouvernementale déclarait à l’AFP « S’il (Carles Puigdemont) convoque des élections, et selon les modalités envisagées, cela pourrait être considéré comme un retour à la légalité ». Sous-entendu, pas question d’élections constituantes.
Cette solution s’étant éloignée, les indépendantistes n’y ayant jamais été favorables, Carles Puigdemont a fait savoir, par écrit et avant l’heure limite de 10 heures fixée par les autorités de Madrid, que « si le gouvernement de l’État persiste à empêcher le dialogue et poursuit la répression, le Parlement de Catalogne pourra procéder, s’il l’estime opportun, au vote d’une déclaration formelle d’indépendance qu’il n’a pas votée le 10 octobre », répondant ainsi à la demande de clarification qui lui était faite.
Ne voulant pas y voir ce qu’il cherchait à obtenir, Mariano Rajoy reprenait l’initiative en convoquant samedi prochain un conseil des ministres, première étape en vue de la suspension d’autonomie de la Catalogne selon l’article 155 de la Constitution espagnole. Apportant la confirmation qu’il joue la politique du pire après le placement en détention provisoire de Jordi Sanchez et Jordi Cuixart, les deux leaders indépendantistes qui ont été inculpés mardi soir de « sédition ». Elle suscitait en réponse la manifestation de deux cent mille personnes mardi soir dans les rues de Barcelone.
Deux jours séparent désormais du lancement de la procédure prévue à l’article 155 de la Constitution qui implique un vote du Sénat qui est acquis, le parti populaire disposant de la majorité. Une nouvelle manifestation est convoquée pour ce soir par la CUP, la formation d’extrême-gauche indépendantiste avec comme mot d’ordre « Arrêtons la répression, sortons dans les rues sans peur. Faisons la République maintenant ».
À moins d’un coup de théâtre, un point de non-retour est désormais franchi. Mariano Rajoy a décidé de jouer l’affrontement, faisant le calcul de se refaire une santé électorale par la suite. Comment se serait-il engagé dans la voie du dialogue avec comme perspective, impensable pour lui comme pour la droite espagnole, l’instauration à terme d’une République organisée sur le mode d’une fédération ?
Il pourra être reproché aux indépendantistes, dans leur diversité politique, d’avoir sous-estimé l’obstacle et de pas avoir placé l’indépendance de la Catalogne dans un contexte d’évolution de l’Espagne toute entière. Ada Colau, la maire de Barcelone, a eu beau s’opposer à une déclaration d’indépendance unilatérale et appeler au dialogue, rien n’y a fait. Catalunya en Comú, son mouvement, est avec Podemos et Izquierda Unida favorable à un état plurinational, renouant avec les principes de la IIème République espagnole, mais il n’a pas été audible.
Il reste deux jours avant l’irréparable, après quoi l’affrontement va se poursuivre. Avec tous ses aléas et son imprévisibilité.
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