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J’écrivais le 4 juin, dans mon billet intitulé, Jacob Taubes (1924 – 1987), l’homme qui avait tout compris … et qui en est mort de rire ! ceci :
Post-scriptum : Or il n’y a rien au ciel, pas même le Surmoi universel ! Et, non, le banquet des fils où l’on mangeait du steak ou une côtelette de père n’a pas eu lieu : c’est de la mythologie ! Et de plus, le messie ne viendra pas, et l’injustice ne sera pas réparée, alors que la catastrophe – qui ne sera pas une révélation – aura lieu quand même ! Alors que faire ?
(La réponse au prochain numéro 😉 )
La réponse se trouve sans doute dans une interprétation sécularisée d’une phrase de Thomas Carlyle (1795 – 1881) que cite Max Weber dans son Confucianisme et taoïsme (1916) : « Des millénaires ont dû passer avant que tu ne viennes à la vie, et d’autres millénaires attendent en silence ce que tu vas faire de ta vie » (in Weber [1916] 2000 : 326-327), interprétation sécularisée car elle peut s’entendre aussi bien dans un monde dont Dieu est absent que dans un monde où il est présent, monde au cours irréversible dans sa course folle, où chacun laisse sa marque, comme trace imperceptible, où comme trace du flot détourné des fleuves Alphée et Pénée ayant décrassé les écuries d’Augias. Taubes écrit : « Il n’y a pas d’éternel retour, le temps ne permet aucune insouciance, mais il est tourment (Bedrängnis), le temps presse » (Le temps presse, 509), « On ne peut pas se prétendre à la fois défenseur de l’Occident chrétien et présenter la philosophie de l’histoire comme une illusion, parce que c’est la spécificité propre à la conscience occidentale » (ibid. 508).
Une interprétation qui ne vaut pas cependant, il faut le noter, dans l’univers culturel chinois où le monde ne connaît qu’une infinie pulsation de l’harmonie plus ou moins bien réalisée entre la Terre et le Ciel, de l’équilibre entre le yin et le yang, dont l’empereur seul joue le rôle de chef d’orchestre : « La doctrine commune à toutes écoles philosophiques rassemblait les esprits « bons » sous le principe yang (céleste et masculin), et les esprits « mauvais » sous le principe yin (terrestre et féminin) ; le monde était né de l’union de ces deux principes, qui étaient éternels, comme le ciel et la terre » (Weber 47-48).
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Jacob Taubes, « Le temps presse ». Du culte à la culture, Paris : Le Seuil, 2009
Max Weber, Confucianisme et taoïsme (1916), Paris : Gallimard 2000
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