Billet invité.
Les autorités italiennes ont retenu des dernières rencontres des ministres de l’Intérieur ainsi que des Affaires étrangères européens qu’elles doivent d’abord compter sur elles-mêmes pour enrayer l’exode des réfugiés. Car il en est ressorti que le partage de leur accueil avec les autres pays est rigoureusement exclu, ne laissant que deux issues de disponibles : détruire les réseaux de passeurs et séparer les réfugiés ayant droit à l’asile des migrants économiques, qui représenteraient 80% de l’ensemble en application de critères non précisés.
Dans le contexte de la Libye et de la zone du Sahel par laquelle les réfugiés y parviennent, la première issue n’est pas gagnée d’avance. Et définir les critères de distinction entre les deux catégories de migrants ne va pas être facile à revendiquer si l’on veut être rigoureux, le droit d’asile contemporain ayant été conçu dans un tout autre contexte historique.
Marco Minniti, le ministre italien de l’Intérieur, s’est à nouveau rendu en Libye afin de proposer à treize maires des villes du sud – via lesquelles les réfugiés venant du Niger, du Soudan et du Tchad pénètrent dans le pays – « un pacte afin de libérer nos terres des trafiquants ». Car, dit-il, c’est « un devoir moral de supprimer ce trafic qui produit des morts ». Le ministre ne voit dans l’exode qu’un trafic, mais cela ne va pas l’avancer beaucoup.
Il y a de l’énervement dans l’air, et pas seulement côté italien. Sebastian Kurz, le ministre autrichien des Affaires étrangères, a appelé l’Italie à ne plus transférer sur le continent les « migrants illégaux » débarquant sur ses îles, sur le modèle des réfugiés bloqués dans les îles grecques. Une solution alternative existe cependant à ses yeux, afin que « les missions de secours en mer ne soient plus considérées comme un ticket pour l’Europe centrale ». Elle consiste à renvoyer en Libye les naufragés, une fois secourus, au lieu de les débarquer en Italie. Début du mois, le ministre avait prévenu que l’Autriche était prête à mettre en place des contrôles renforcés, voire à fermer sa frontière sud avec l’Italie si la pression migratoire se poursuivait.
Parallèlement, la tension entre les gouvernements allemand et turc continue de croître, tout en étant désormais le prétexte. Ce qui fait resurgir une interrogation : Recep Tayyip Erdogan pourrait-il aller jusqu’à ouvrir sa frontière maritime et relancer l’exode vers la Grèce et les pays des Balkans ? À deux mois des élections allemandes, cette menace implicite explique que les réactions allemandes soient mesurées dans la pratique, le gouvernement allemand et les dirigeants européens étant prisonniers de l’accord qu’ils ont passé avec le président turc.
Berlin a annoncé jeudi une « réorientation » de sa politique vis-à-vis de la Turquie, mais on en reste globalement aux intentions. Jean-Claude Juncker, a rappelé que « la main de l’Europe reste tendue » à Ankara et Sigmar Gabriel, le ministre des Affaires étrangères, a déclaré, comme pour s’en excuser, que « le gouvernement allemand ne peut pas regarder sans rien faire l’arrestation de citoyens allemands ».
Plusieurs d’entre eux, ainsi que la directrice d’Amnesty International pour la Turquie, Idil Eser, sont inculpés de manière totalement invraisemblable de « crimes commis au nom d’une organisation terroriste sans en être membre », en référence à la confrérie Gülen. Mais tant que la ligne rouge du rétablissement de la peine de mort ne sera pas franchie, l’autocrate Erdogan aura le champ libre.
Bonjour Régis, il y a du vrai dans v/com. et à son sujet, j’avais écrit, il y a quelques temps,…