Billet invité.
Une nouvelle histoire secoue la Deutsche Bank, cette mégabanque qui a illustré le pire du comportement de la profession avant de crouler sous les condamnations et les amendes, et dont le sauvetage n’est pas fini. L’organisme de la régulation bancaire de la BCE, le Mécanisme de supervision unique (SSM), se prépare à ouvrir une enquête à propos de deux des actionnaires de la banque qui l’ont recapitalisée aux plus mauvais jours, le conglomérat chinois HNA – son premier actionnaire – et deux fonds dont les propriétaires appartiennent à la famille royale qatari, qui sont suspectés d’agir de concert, ce qui est interdit.
Aucun de ces actionnaires n’atteint le seuil de 10% du capital, qu’ils se sont gardés de dépasser car il autorise le SSM à enquêter à leur sujet, mais ils en sont tout proches. Hélas la précaution est inutile, car il est prévu que le SSM puisse en engager une lorsqu’un actionnaire a « une influence significative » sur les décisions d’un établissement, même s’il ne l’atteint pas.
L’enquête ne poursuivrait pas le même objectif dans les deux cas. Elle chercherait à déterminer qui contrôle effectivement HNA, dont les actionnaires sont suspectés être des prête-noms derrière lesquels se dissimuleraient des officiels chinois de haut rang. Les actionnaires des deux fonds qatari sont par contre connus, appartenant à la famille royale, mais il s’agirait d’établir l’existence éventuelle de connexions avec le financement d’Al-Qaïda. Les règles de l’Union européenne réclament des superviseurs qu’ils vérifient que les investisseurs n’ont aucun lien avec le financement du terrorisme, bénéficient d’une solide réputation, et s’engagent à moyen et à long terme.
Voilà où l’on en est, les sauveteurs de la Deutsche Bank pourraient se révéler infréquentables ! Ce qui autoriserait le SSM à leur retirer leurs droits de vote et les contraindraient à sortir du capital. Au profit de qui restera alors à déterminer, car leur venue avait été saluée comme permettant d’éviter l’intervention de fonds publics.
Sans attendre de tels développements, de discrets arrangements pouvant intervenir entretemps, la suspicion qui désormais entoure les actionnaires met en lumière la nature potentielle de ces capitaux. Dans un cas, ils peuvent être suspectés d’être le fruit de la corruption qui règne en Chine au plus haut niveau, dans l’autre de provenir des cassettes de familles royales qui financent d’une autre main des forces mises au ban des nations.
Ah, certainement non ! le système financier n’avait pas besoin de ce nouvel épisode pour se refaire une image reluisante.
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