Billet invité. Ouvert aux commentaires. P.J. : j’ouvrirai bien entendu volontiers les colonnes du blog à d’autres acteurs de cette affaire s’ils le souhaitent.
La VAR était la clef de voûte du protocole de valorisation du portefeuille du CIO
Prenons un exemple inventé mais très proche de la réalité (cf. le rapport du Senat américain). La VAR [Value at Risk] de l’IB était de disons $80 millions. La VAR du portefeuille du CIO était de disons $50 millions, celle du CIO au total de $60 millions. Et la VAR totale de JP Morgan ? Était-ce $80 + $60 = $140 millions ? Non. La VAR de JP Morgan était seulement de $105 millions. Les chiffres ici sont des estimations pour simplifier la discussion. La réduction de $140 à 105 millions de la VAR totale de la firme venait de l’effet protecteur du CIO pour l’essentiel. C’est une chose que Dimon voulait et que le département des risques de JP Morgan analysait et façonnait au jour le jour.
En réalité cet énorme portefeuille de protection permettait à toute la firme de prendre plus de risques en VAR qu’elle ne l’aurait fait sans. Les chiffres qui circulaient indiquaient une réduction de l’ordre de 25% des risques de VAR par le seul fait de l’existence de cette protection. Donc en pratique, cette énorme protection du CIO permettait à la banque de prendre 25% de risque en plus. Si on considère maintenant que JP Morgan sortait en moyenne $15-20 milliards de profit nets par an et que 50% des profits venaient du trading, on peut grossièrement estimer que cette énorme protection avait permis de booster les profits de 25% depuis 2007 pour moitié, soit 12,5%. Et 12,5% de 5 années à disons $17 milliards cela donne environ $9 milliards de profits attribuables à l’énorme portefeuille de protection du CIO.
Ce n’est qu’un ordre de grandeur des enjeux ici. Mais c’est aussi un minimum pour les gains apportés par cette protection depuis 2007 à la banque quand on considère que beaucoup de banques ont péri ou presque en 2008… Bref, le résultat pris isolément de ce portefeuille n’avait pas beaucoup de sens contrairement à n’importe quel portefeuille typique de trading. Bien évidemment Dimon et la haute direction en étaient parfaitement conscients, ne serait-ce que parce qu’ils étaient les concepteurs de cette énorme stratégie de protection pour la firme. Bien sûr la valorisation de ce portefeuille sans limites et emmené par un quatuor de traders, eux-mêmes hauts dirigeants, était adaptée à la situation. Ainsi cette protection n’utilisait que des instruments financiers activement cotés à la banque d’Investissement JP Morgan. Tout naturellement aussi le prix « mid » clef dans la procédure de mark to market était fourni par un trader de l’IB pour toute la banque et était vérifié au quotidien par plusieurs contrôleurs. L’enjeu était de taille car la non moins énorme banque JP Morgan se devait de fournir à sa multitude de clients un prix fiable pour leur propre valorisation. À ce titre le CIO et son énorme portefeuille de protection étaient traités comme un très gros client de JP Morgan dans la pratique routinière.
Laisser un commentaire