Billet invité. Ouvert aux commentaires. P.J. : j’ouvrirai bien entendu volontiers les colonnes du blog à d’autres acteurs de cette affaire s’ils le souhaitent.
2- la fraude comptable n’est pas celle avancée par la banque mais un leurre
La valorisation de ce portefeuille très particulier piloté par le quatuor si particulier avait un protocole de valorisation unique. Logique.
JP Morgan finit par l’admettre en Septembre 2013. La banque avait caché certaines réalités à l’époque en 2012 et accoucha très officiellement d’une fraude comptable dans la foulée du scandale. Selon la banque tout viendrait de différences de prix inconnues de la banque que des traders au CIO auraient cherché à cacher. Les autorités américaines seront plus subtiles et donc plus ambigües encore. Selon la SEC ou le Département de la Justice américaine, les traders auraient mis en place un dispositif voué à cacher une partie des pertes au moyen de différences de prix artificielles. Elles ne disent pas si l’opération jamais réussit peu ou prou, contrairement à la banque. On affirme de tous côtés que ces différences, plus ou moins connues donc, ont à coup sûr induit des chiffres de performance faux dans les comptes. La seule preuve de cela réside dans la révision à la baisse des profits du premier trimestre 2012 d’un montant de $450 million environ. En Juillet 2012, cette fraude là dont la banque se disait la victime était-elle véridique ? Rien n’est moins sûr dès qu’on comprend qui était le véritable « trader-quatuor ». Le donneur d’ordres ne pouvait tout de même pas oublier si facilement ses propres ordres, quand bien même il était dans l’embarras. Mais le quatuor a tenté la chose sur tous les modes possibles.
Il faut comprendre que ce portefeuille gigantesque, unique en son genre, piloté par un « trader-quatuor » inhabituel, sans limites, et sans objectif, avait un protocole de valorisation tout aussi particulier. Il suffit pour cela d’observer le rôle de ce portefeuille dans la banque depuis 2006. Il s’agissait de protéger la banque contre certaines de ses expositions sur les marchés financiers.
Une des mesures de référence pour concevoir cet énorme portefeuille était la VAR [Value at Risk]. La VAR est un montant qui indique ce que la banque doit s’attendre à gagner ou perdre au jour le jour sur les marchés. C’est un chiffre qui indique en gros les fluctuations du résultat de la banque au quotidien au gré des hausses et des baisses successives des marchés financiers. C’est l’indicateur phare depuis 1994 pour tous les investisseurs, toutes les banques, tous les régulateurs en matière d’industrie bancaire et de risque de marché. La VAR de cet énorme portefeuille de tranches synthétique au CIO suggérait des encours massifs en trading. Elle indiquait fortement qu’un résultat économique tout aussi énorme était attendu par la firme. La VAR de l’unité spécialisée dans la trading chez JP Morgan, la Banque d’Investissement ou IB, tournait autour de $80 millions au quotidien. Bon an mal an, l’IB ramenait $5 à 10 milliards par an en trading pur et quelques $15 à $25 milliards de revenus bruts par an. En attendait-on de même de cette énorme protection gérée au CIO, toutes proportions gardées, dont la VAR était au moins de $50 millions au quotidien depuis 2007 ? Cela donne une attente de revenus de l’ordre de $2 à $4 milliards en trading pur par an et disons $6-$10 milliards de revenus bruts avant les frais divers. Pas du tout en fait. La preuve est dans les annexes du rapport du Sénat américain dans un email du 5 avril 2012, veille de parution des articles séminaux. Là Ina Drew le déclare à tous les hauts dirigeants et Dimon que le portefeuille a été « très rentable » avec un revenu brut cumulé sur les 5 dernières années de $2.5 milliards. Y-a-t-il une erreur ? Non.
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