Billet invité. Ouvert aux commentaires.
La transition de la société capitaliste à la société post-capitaliste est hors de la compétence de notre génération parce que celle-ci est tributaire de la privatisation de la propriété, et de ses conséquences l’aliénation de la qualité du travail et l’exploitation de la force de travail. Cette génération ressemble à une bande de poissons asphyxiés dans un filet tiré par un chalut. La rupture du filet ne lui rendrait pas la vie pour autant, même pas la survie. Que pourrait-elle faire de sa liberté puisqu’elle ne disposerait d’aucune propriété, d’aucun moyen, d’aucune compétence pour entreprendre une alternative ? Ce n’est pas du mécontentement de cette génération vieillie sous le harnais de l’aliénation que se construira la société de demain parce que les idéologies à laquelle elle se réfère sont disqualifiées par la conscience émergeant sous l’effet de l’évolution des forces productives. Mais il suffit d’une génération pour accomplir la transition.
Aujourd’hui le monde naît dans le numérique : une seconde nature. Et la révolution technologique est d’une rapidité à couper le souffle. De même que les paysans au début du XXe siècle sont devenus grâce au progrès scientifique architectes, médecins, avocats… de même que les médecins qui ne formaient qu’une catégorie il y a pas même cinquante ans sont répartis en de nombreuses spécialités qui se différencient chaque jour davantage, les générations nouvelles disposent d’un éventail d’opportunités où déployer leurs potentialités sans commune mesure avec celles des générations précédentes.
Il reste que ces potentialités en quête d’actualisation doivent se développer dans le respect les unes des autres. Le respect implique que les biens qui assurent la vie quotidienne soient à la disposition de tous. Ce préalable peut être immédiatement satisfait par le dividende universel, le revenu minimum inconditionnel ou l’allocation universelle…
La question de la propriété du capital qui conditionne le déploiement des capacités de chacun n’est cependant pas tranchée. Or, selon que l’on entend par capital le capital mis à la disposition de tous par la révolution numérique (l’information, la mémoire, l’innovation, la critique…), ou le capital accumulé dans la propriété privée, la perspective est différente : s’il est vrai que le travail est offert à tous, les emplois rémunérés par le système capitaliste ne le sont pas. C’est donc cette limite du capitalisme qui doit être dépassée.
Comment un tel changement peut-il se réaliser ? Sans doute faudra-t-il prendre en compte les observations suivantes :
1) La nature offre à l’origine à tous les hommes leurs conditions d’existence. Ces biens naturels doivent donc être communs ou partagés ce qui implique leur propriété collective.
2) La privatisation de la propriété a dévoyé l’économie, et dès lors que les expropriés n’ont plus accès à leurs moyens d’existence, ils sont forcés d’aliéner leur travail aux conditions d’autrui. Il est plus que temps de libérer le travail de son aliénation et de son exploitation. La liberté du travail se recouvre avec le dividende universel, ou le revenu minimum qui est dû à tout citoyen toute sa vie.
3) La production sociale est inaliénable, et doit être répartie par la gratuité du service public.
4) La révolution numérique offre l’information à tout le monde, et autorise la démocratie directe à tous les étages de la cité. 5) Le but de la fonction politique est le bonheur des hommes comme l’affirme le premier article de la Constitution de 1793. Le produit Intérieur brut est donc inadéquat pour mesurer le bonheur des hommes. Les critères du développement humain doivent être redéfinis.
Peut-être faut-il graver dans le marbre de la sixième république que la propriété de la nature est universelle, la propriété sociale inaliénable, le travail libre sacré et la démocratie indivisible.
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