Billet invité. Ouvert aux commentaires.
Nous abordons ce premier avril 2017, la fin de la trêve hivernale concernant les expulsions locatives : allez-vous enfin vous pencher sur ce scandale qu’est l’expulsion de son logement, le bannissement de la cité ?
Le président Jacques Chirac, en son temps, a eu le courage d’imposer une loi visant à améliorer les choses pour ce qui concerne cet aspect du problème plus général du logement en France : le droit au logement opposable (DALO en 2007).
Toutefois, il s’avère que cela n’a rien résolu sur le fond. En effet, si actuellement le droit à l’expulsion d’un locataire est invoqué devant la justice, le juge judiciaire saisi prendra toujours une décision dans le sens demandé par le bailleur (à peu d’exceptions près ~13 % selon le CE), c’est le droit du logement opposé au droit au logement opposable !
Dès cet instant, s’installe le processus répressif dans lequel l’État a un rôle à jouer au travers de la sollicitation du préfet par l’huissier de justice chargé de l’exécution de la décision judiciaire.
En raison du principe, inscrit dans la constitution, de la séparation des pouvoirs, l’État est tenu d’accorder son concours car une décision de justice doit être exécutée, l’article L. 153-1 du code des procédures civiles d’exécution le précise : « L’Etat est tenu de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires »
Toutefois, si pour des raisons tenant à l’ordre public (risque d’émeutes, etc…), l’État, via le préfet, n’accorde pas son concours, celui-ci se verra attaqué devant la justice administrative pour ‘excès de pouvoir’, cette requête devant le juge administratif ouvrira droit à indemnisations au bénéfice du bailleur.
Notons au passage que ce qui est invoqué en matière d’ordre public est l’ordre de la rue, il ne s’agit donc pas de l’ordre social. Mais malgré cela, une tendance semble germer qui considère l’ordre public devant être pris sous l’angle humanitaire, la CEDH a déjà pris, assez récemment, des décisions légitimant des cas d’abstention administratives.
Un autre aspect de la situation actuelle est l’insuffisance de l’action administrative en amont de ce qui a provoqué la décision judiciaire d’expulsion.
La loi Dalo était une avancée mais il faut maintenant que l’État s’implique plus avant dans le processus antérieur au judiciaire et donne plus de moyens aux CCAPEX notamment.
Le préfet est actuellement placé dans une situation schizophrène, obligé qu’il est, d’accorder le concours de la force publique et dans le même temps veiller à assurer le relogement des prioritaires Dalo, relogement qui s’avère mission impossible dans les zones en tension.
Ne serait-il temps d’imposer un moratoire dans les expulsions, cela dans l’attente d’un réexamen sur le fond de ce grave problème de société ?
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