Billet invité. Publié également sur greekcrisis.fr.
Le beau temps revient au pays en case. Il faut bien dire que la pluie soutenue tombant sur Athènes devient rapidement gênante. C’est connu, les rues et les avenues se transforment aussitôt en ruisseaux et il ne fait pas bon d’être piéton dans pareils cas. De toute manière, les Grecs préfèrent le soleil. Lui seul, il atténue les souffrances de la crise, il amoindrit les esprits, comme il doit sans doute nous faire éviter… certains suicides. Alors soleil !
Et par cette météo entre soleil et orages, on redécouvre parfois notre histoire lorsque le temps nous le permet. Par exemple, les navires de guerre au Parc d’Histoire maritime accueillent alors les curieux, autochtones ou hétérochtones. Un passé présenté comme toujours glorieux au beau milieu d’un présent alors si gluant. On visite par exemple le croiseur cuirassé Geórgios Avéroff ayant servi comme navire amiral de la marine royale grecque durant la première moitié du XXe siècle, et c’est le seul navire de ce type existant encore des nos jours au monde, désormais exposé comme navire musée dans ce port de Phalère.
Les années passent, et ainsi certaines traces demeurent. Photos exposées, réalisées par son équipage de ce jadis d’entre-deux-guerres (de l’autre siècle), l’uniforme de l’Amiral Kountouriotis, et bien en face, l’autre navire célèbre, le légendaire contre- torpilleur Velos II.
Ce dernier est entré dans l’histoire en 1973, lorsque son équipage, sous le commandement du capitaine Nikólaos Pappás avec six officiers et 25 sergents, se retire d’un exercice de l’OTAN, et part se réfugier en Italie pour demander l’asile politique, en réaction de taille, face à la dictature des Colonels (1967-1974).
L’ex USS CHARETTE DD-581 de la classe ‘Fletcher’ construit en 1942, avait été offert par les États-Unis à la marine grecque en 1959 et a servi jusqu’en 1991, quand il a été désarmé. Mais pour les Grecs, pour ceux déjà qui n’ont pas la mémoire courte, Velos demeurera l’exact synonyme de ce geste extraordinaire contre la junte d’alors. Sauf que du côté des… autres petites histoires bien grecques, et fort actuelles, rien ne change. D’après la presse du moment, les dettes des Grecs envers l’État (non acquittées) ont augmenté de 1,6 milliards, rien qu’en janvier 2017. Il faut en outre comprendre que sur dix millions d’habitants que compte encore ce pays, exactement sous le soleil, plus de 4,7 millions de Grecs sont redevables (contributions impayées) envers l’État (fisc), et plus de 850.000 de citoyens… se sont vus saisir leurs biens ou leurs revenus par l’administration, quotidien “Kathimeriní”.
Dans le même registre, avec seulement 50% versé du montant total des cotisations sociales des indépendants (professions libérales) en ce début 2017, c’est alors la consternation pour le “gouvernement”. Le nouveau calcul initié en 2016… oblige les indépendants à verser entre 60% et 80% de leur chiffre d’affaires (en impôts, taxes et cotisations, par l’obligation faite d’avancer l’impôt de l’année suivante), et c’est ainsi que la date limite des paiements vient d’être repoussé une deuxième fois par le “gouvernement”. “L’effondrement c’est pour bientôt”, croit savoir le voisin Chrístos, tout comme le voisin Kóstas, ou encore, le voisin Petros. Nous sentirions la fin arriver… nous l’espérerions même.
En attendant, les gens se baladent, les jeunes surtout, et ce 25% à 30% de la société s’en sort encore bien ou difficilement, tandis que le grand corps mourant de l’ex-classe moyenne s’enfonce davantage. Rien que les cas (repérés) de branchements illégaux au réseau électrique ont dépassé les 10.000 en 2016 d’après la Régie… record absolu d’après les reportages. Cela, au moment où les premières fraises ont fait leur apparition à Athènes, au même titre que le drapeau national… accompagné de celui de l’occupation européiste, et de celui enfin, de l’équipe du Pirée, le légendaire Olympiakós. Donc circulons !
En attendant, et même si certains se baladent encore, Peter Koening (économiste et analyste géopolitique) vient d’adresser son accablante et émouvante “Lettre ouverte au peuple de Grèce : Vous êtes abattus sous les yeux du monde entier” (en anglais sur le site canadien d’analyse “Global Research”).
L’auteur, dénonce entre autres et à très juste titre, les “socialistes caviar de SYRIZA pour avoir laissé leur pays saigner à mort littéralement, moralement, socialement et psychologiquement. (…) Prenez votre situation en vos mains. Ne croyez pas vos politiciens, ni vos médias ! Quittez cette organisation criminelle appelée Union européenne, de même que ce système monétaire criminel de l’Occident, et qui vous étrangle jusqu’à la mort. Récupérez votre souveraineté, votre monnaie. Cessez de payer la dette, et le système occidental ne pourra rien faire contre votre décision. Et il ne pourra rien faire, parce que vous ferez tourner votre pays via vos propres banques publiques et votre monnaie, en y allant progressivement mais sûrement, en reconstruisant toute une économie dévastée. Le paiement de la dette est d’ailleurs négociable. Les exemples abondent dans ce monde. L’Argentine en est un, et d’ailleurs récent. Même l’Allemagne avait renégocié sa dette internationale en 1952 lors des Accords de Londres sur la dette extérieure allemande”.
“Ô peuple de Grèce, réveille-toi devant l’évidence. N’acceptez pas ce que le gouvernement, Bruxelles et la Troïka vous imposent, à vous, comme à votre pays. Exigez le Grexit en suite fort logique et légale à votre vote triomphant du ‘NON’ à tout nouveau ‘plans de sauvetage’ passant par l’austérité imposée par la Troïka. Si vous le faites, vous verrez rapidement la lumière au bout du tunnel – une lumière ayant a été trop longtemps dissimulée par l’Allemagne, par ces gangsters de la Troïka et par votre propre gouvernement”.
“Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, essaye toujours de duper les Grecs, et d’impressionner le reste du monde, en menaçant de la Grèce de sortie de la zone euro. Tout gouvernement sain d’esprit, saurait pourtant transformer cette menace en initiative propre, afin de quitter ce monstre pétrifié que vous appelez l’Union européenne, ainsi que sa fausse et illusoire monnaie commune nommée euro. Sauf qu’en Grèce, c’est la morbidité qui y règne, et c’est tout le problème. Ainsi, à la morbidité de la Troïka, le gouvernement grec répond par sa propre et totale servitude morbide, en se conformant entièrement à la destruction de millions de compatriotes dépossédés et réduits en esclavage”.
Le beau temps qui revient au pays comme à sa case, les gens fréquentant les cafés en bord de mer comme si de rien n’était, notre théâtre est si ambiant… L’acteur et metteur en scène Alexandre Kollatos m’avait invité cette semaine à la première répétition privée de sa nouvelle pièce de théâtre. Elle est intitulée “Yanis et Alexis”, une fiction… d’amour, imaginée entre Yanis Varoufákis et Alexis Tsipras dont l’histoire bien brève relate de manière tragi-comique la (première) terrible période Syriziste, entre janvier et juillet 2015.
Ma photo est certes floue, sauf que la pièce ne l’est pas du tout. Nous n’étions que quatre spectateurs invités à cette première avant l’heure et nous avons tous bien pu rire. C’est alors si important par les temps qui courent et qui ne rigolent alors plus en Grèce depuis 2015, et c’est autant vrai que nous ne rions pratiquement plus. Alexandre, comme son “Yanis et Alexis” sont à la recherche d’une salle à Athènes, puis, qui sait peut-être plus tard à Paris, à Londres, à Bruxelles ou à Berlin. Nous le lui souhaitons ardemment.
En attendant, le beau temps revient au pays où il ne fait pas toujours bon d’être piéton, la mesure se perd et c’est pour que l’hybris triomphe. L’inexplicable tient de l’insupportable (comme son contraire). Car en cette… belle Cyclade d’Ios, Théodosis, le phoque connu et aimé (presque) de tous, a été retrouvé inanimé… Une mort causée par balle alors tirée d’une arme à feu que l’on dira toujours “humaine”. Sur l’île, d’après les reportages de la presse locale c’est la consternation. Pays où il ne fait pas bon d’être piéton ni phoque.
Maigre consolation… maritime, les archéologues pensent avoir découvert les vestiges de la base navale de la flotte grecque menée par Eurybiade et Thémistocle face à celle des Perses de Xerxès Ier pendant la bataille de Salamine en 480 av. J.-C. Autres temps ? Sauf qu’en Grèce, c’est la morbidité qui y règne, et c’est toujours tout le problème. L’esclavage c’est encore la nouvelle convention en interne que la direction des magasins H&M entend imposer aux salariés. Ces derniers devraient accepter (entre autres), d’être mutés temporairement à n’importe quelle boutique de l’enseigne à travers toute la Grèce, le tout, en supportant les coûts des déplacements et de l’hébergement… pour quelques centaines d’euros par mois de salaire seulement. C’est aussi cela la politique de la Troïka, et autant celle de… SYRIZA caviar au pays où il ne pleut pas, sauf seulement l’été.
Le beau temps reviendra un jour au pays en case… et c’est l’animal (à peu près) adespote (sans maître) de ‘Greek Crisis’ qui nous le dit. Pour les piétons, pour les employés des magasins H&M, et peut-être même pour les phoques.
« Que sera votre vie quand…la vue changera chaque fois….que vous clignez des yeux…. » https://youtu.be/WsQaPj98fR0