Essai critique sur le “Commun” * (VIII) L’interface : open source / logiciel libre, par Dominique Temple

Billet invité.

* à partir de l’ouvrage de Pierre Dardot et Christian Laval « Commun. Essai sur la Révolution du XXIe siècle »

Chapitre VIII

L’interface : open source / logiciel libre

Il n’empêche que le mot free signifie libre ou gratuit. De sorte que certains utilisateurs s’accordent sur le fait de traiter le logiciel libre comme un donné a priori qu’ils peuvent utiliser à toutes fins utiles y compris commerciales, ce qui est le contraire de ce que signifie libre pour Richard Stallman puisqu’il veut dire libre de toute utilisation à des fins privatrices de liberté.

Mais la question demeure : pourquoi les promoteurs du logiciel libre n’utiliseraient-ils pas les services des logiciels non-libres lorsqu’ils sont particulièrement novateurs et performants ? Pourquoi ne pas intégrer l’échange lucratif s’il démultiplie l’efficacité de la recherche ? Pourquoi ne pas inféoder le ressort du profit à la construction d’une liberté plus efficace ?[90].

« Ainsi, pour la plupart d’entre eux, seule la commodité d’utilisation comptait. À moins qu’un logiciel ne soit techniquement inférieur, ils ne voyaient pas pourquoi le refuser pour de simples raisons de licence. Un jour, les hackers finiraient par mettre au point une alternative libre à PowerPoint. Mais en attendant, pourquoi critiquer Microsoft ou PowerPoint, et pourquoi ne pas utiliser ce logiciel ? C’était un bon exemple du clivage de plus en plus marqué dans la communauté du logiciel libre, entre ceux qui accordaient de l’importance à la liberté en soi, et ceux qui ne prenaient en compte que la fiabilité et la puissance des logiciels »[91].

Les hackers se divisent donc.

« Stallman désignait ces deux camps comme deux partis politiques au sein d’une même communauté. Il nomma le premier le “parti pour la liberté”. Et comme le second camp ne daignait pas se donner un nom, il l’appela ironiquement “le parti des opportunistes” ou “le parti pour le succès”. Nombre des partisans de ce dernier considéraient en effet que l’objectif premier était d’attirer toujours “plus d’utilisateurs” (…)»[92].

C’est alors qu’est proposé le terme d’open source.

« Le message des promoteurs de l’open source était simple : tout ce dont vous avez besoin pour vendre le concept de “logiciel libre”, c’est de le rendre intéressant pour les entreprises. De leur point de vue, Stallman et le mouvement pour le logiciel libre étaient en lutte contre le marché, tandis qu’eux cherchaient à l’exploiter »[93].

Au cours de l’année 1998, Richard Stallman observe :

« Certes, open source évitait la confusion avec “logiciel gratuit” mais il supprimait par la même occasion le sens de “logiciel respectueux de la liberté” »[94].

L’interface réciprocité/échange se complique donc. L’échange permet de démultiplier les relations de réciprocité pourvu qu’il en respecte les équivalences (l’échange de réciprocité), et on peut imaginer que chaque chercheur qui vise l’intérêt général ait recours à l’échange fût-il mû par le profit pour se procurer les compléments nécessaires à l’avancée de ses travaux. Cependant, si l’échange est motivé par le souci de son intérêt personnel, que ce soit en termes de profit ou de pouvoir, il provoque la concurrence entre les protagonistes et renverse l’égalité en inégalité, la liberté en pouvoir. Immergé dans le système capitaliste, le logiciel open source amarré à des logiciels privateurs autorise la spéculation, et se risque à n’être plus qu’un démultiplicateur du capitalisme utilisant le commun comme un moyen de promouvoir la liberté… du capital.

Résumons cette difficile analyse : les partisans de la seule open source se soucient d’abord de l’efficacité de l’open source, et justifient ainsi d’utiliser au nom de leur performance des logiciels privateurs utilisant les logiciels libres comme la manne du désert, y compris au risque de développer l’ingénierie capitaliste à partir de la privatisation de leurs applications. Ils introduisent donc dans le cycle de réciprocité la spéculation capitaliste. Aux partisans de l’open source, Richard Stallman répond :

« Je pense que la liberté est plus importante que les avancées technologiques. Je choisirai toujours un logiciel libre moins avancé du point de vue technologique à un logiciel non libre plus avancé parce que ça ne vaudrait pas que je renonce à ma liberté. Je m’en tiens à cette règle : je ne prends rien que je ne puisse partager »[95].

Il dira plus tard :

« Je pensais à des problématiques à la fois éthiques, politiques et juridiques. J’ai essayé de faire quelque chose de viable dans le système législatif actuel. Dans l’esprit, il s’agissait de concevoir les bases législatives d’une nouvelle société, mais ne gouvernant pas, je ne pouvais changer aucune loi. Il me fallait donc tenter de les bâtir au-dessus du système juridique existant, qui n’a en rien été conçu pour cela »[96].

Pierre Dardot et Christian Laval quant à eux concluent :

« Internet, par sa profusion, par la multiplicité et la diversité des contributeurs constitue à n’en pas douter un ensemble de ressources produites et mises en commun par des internautes qui donnent et reçoivent sur le mode du don réciproque »[97].

Mais, pour les uns, ajoutent-ils, « tout se passe comme si la prévalence de la connaissance dans la production donnait déjà naissance à un commun qui, par son expansion progressive, ferait exploser l’enveloppe capitaliste qui l’entrave ».

Tandis que pour les autres, « le revenu du capital est moins un profit qu’une rente obtenue par la “privatisation du commun”, c’est-à-dire par la mise en place de multiples formes de droits de propriété »[98]. (privée !)

Ainsi réapparaît la fêlure entre propriété et propriété privée, car ce n’est pas la propriété qui est niée par les créateurs du logiciel libre puisqu’elle est tout à fait nécessaire pour fonder sa protection juridique, mais la privatisation de celle-ci. Si l’on ne fait pas cette distinction, la disparition de la propriété entraîne celle de la responsabilité qui lui est liée.

Pierre Dardot et Christian Laval passent sous silence cette question de la responsabilité et de sa matrice, et doivent donc chercher une autre raison au logiciel libre et au copyleft. Ils se prononcent pour une question de productivité. Sans aucun doute est-ce une raison importante et même décisive pour disqualifier la privatisation sur le terrain même où elle prétendait se justifier.

Qu’est-ce qui fait la décision entre une interprétation de la coparticipation des auteurs comme une prestation justifiée par un intérêt privé, et l’interprétation de la coparticipation des auteurs comme prestation désintéressée et mue par la raison pratique ? L’information est par définition destinée à autrui, et ne peut être estimée que par celui qui la reçoit sans que celui-ci puisse être sanctionné de la recevoir ou de ne pas la recevoir. D’autre part, l’information n’a aucune valeur si elle n’est pas incorporée dans un ensemble ou un corps d’autres informations avec lesquelles elle doit réagir pour engendrer sens ou valeur commune. Or, nous savons que la technique informatique (plus précisément l’Internet) échappe au contrôle humain et rend par conséquent le produit de l’interaction réciproque propriété commune. Mais, alors, pourquoi propriété ? Parce qu’il est de la responsabilité individuelle de ses usagers de la respecter aussi bien dans sa production que dans son usage, et que cette responsabilité émergeant de la généralisation de la réciprocité doit affronter la prétention du pouvoir de lui imposer une responsabilité collective.

Richard Stallman marque cette différence lorsqu’il déclare à propos de la loi HADOPI :

« Aux Français, j’explique le logiciel libre en trois mots qui devraient leur être familiers : liberté, égalité, fraternité. Liberté, parce que chaque utilisateur est libre de l’usage qu’il veut faire du programme. Égalité, parce que le logiciel libre ne confère à personne de pouvoir sur personne. Fraternité, parce que les utilisateurs peuvent s’entraider, en partageant (…).

Or, dans le monde, les États qui sont dominés par l’empire des entreprises mènent une guerre conte la pratique du partage au point d’en faire paraître la simple notion comme aberrante, antinaturelle, voire barbare. Ils l’appellent « piraterie » comme si partager équivalait moralement à attaquer et piller un navire. (…) L’aspect qui révèle le plus clairement la nature tyrannique de la loi HADOPI est qu’elle cherche à imposer à chaque Français le rôle de soldat d’une guerre contre les autres : celui qui ne « sécurise » pas son réseau, c’est-à-dire, qui n’aide pas les maîtres à maintenir leur joug sur les autres, risque d’être puni pour être resté neutre. Cette pratique de « responsabilisation collective » est le recours classique des gouvernements injustes dont le but est d’exploiter leurs sujets.

Défier la responsabilisation collective pour protéger les concitoyens contre l’empire est le premier pas naturel de la résistance »[99].

Conclusion

Pierre Dardot et Christian Laval concluent leur thèse :

« Le commun tel qu’on le comprend ici s’entend avant tout du gouvernement des hommes, des institutions et des règles qu’ils se donnent pour ordonner leurs rapports. Il s’enracine donc dans la tradition politique de la démocratie, dans l’expérience grecque notamment. Il donne à entendre qu’il n’est de monde humain souhaitable que celui qui est fondé explicitement et consciemment sur l’agir commun, source des droits et des obligations, lié intimement à ce que depuis les Grecs on appelle la justice et l’amitié »[100].

Cependant, ces droits et obligations sont aussi liés à ce que l’on désigne par la responsabilité et pas seulement l’amitié. Nous avons souligné que si l’amitié naît de la réciprocité directe, la justice et la responsabilité naissent de la réciprocité indirecte, si l’on se réfère à la terminologie de Marcel Mauss, ou encore de la réciprocité ternaire dans notre terminologie qui emprunte à Claude Lévi-Strauss.

Pierre Dardot et Christian Laval proposent dans un “post-scriptum sur la révolution au XXIe siècle” :

« La primauté du commun n’impliquant donc pas la suppression de la propriété privée, a fortiori n’impose-t-elle pas la suppression du marché. Elle impose par contre leur subordination aux communs et, en ce sens, la limitation du droit de propriété et du marché, non pas simplement en soustrayant certaines choses à l’échange commercial pour les réserver à l’usage commun, mais en supprimant le droit d’abuser (jus abutendi) par lequel une chose est entièrement livrée au bon vouloir égoïste de son propriétaire »[101].

On peut être surpris qu’après leur réquisitoire impitoyable contre la propriété privée, réquisitoire qu’ils étendent à toute forme de propriété, Pierre Dardot et Christian Laval puissent conclure par : « la primauté du commun n’implique pas la suppression de la propriété privée, a fortiori celle du marché… ».

Mais, si notre critique est juste, le mode d’appropriation de la nature varie en fonction des diverses structures sociales qui répondent au principe de réciprocité, et nous avons vu que la réciprocité de face-à-face conduit au commun tandis que la réciprocité ternaire généralisée conduit au marché de réciprocité, et à l’échange de réciprocité. La propriété se décline alors en raison de la fonction sociale qui lui est impartie par la structure de réciprocité choisie par la communauté : propriété individuelle, familiale, sociale, chacune protégée par son inaliénabilité, c’est-à-dire de toute privatisation. Il s’ensuit aussi que l’individu, la commune, la nation sont en droit d’exiger la propriété des moyens de production nécessaires à leur activité productrice.

Dès lors, la phrase « La primauté du commun n’impliquant pas la suppression de la propriété privée, a fortiori n’impose-t-elle pas la suppression du marché », peut s’entendre comme : la primauté du commun n’impliquant pas la suppression de la propriété individuelle et responsable, a fortiori n’impose-t-elle pas la suppression du marché de réciprocité.

Et « supprimer le droit d’abuser (jus abutendi) par lequel une chose est entièrement livrée au bon vouloir égoïste de son propriétaire », correspondrait à l’abolition de la privatisation de la propriété, but vers lequel beaucoup d’analyses aujourd’hui convergent.

La répudiation du droit d’abus que la bourgeoisie a greffé sur la notion du droit de propriété, pourrait être le premier article d’une refonte constitutionnelle qui fasse l’unanimité des citoyens car elle n’implique ni la suppression de la propriété individuelle, ni celle de la propriété commune qui sont les deux modalités principales de “La Propriété” universelle.

Aristote, à qui se réfèrent Pierre Dardot et Christian Laval, n’oppose pas seulement l’altruisme à l’égoïsme, le collectivisme radical de Platon à la privatisation non moins radicale du capitalisme, il oppose à ces extrêmes le juste milieu que nous appelons aujourd’hui le Tiers. Il nous apprend à le reconnaître dans le sentiment du juste, de l’amitié, de la confiance ou de la responsabilité en nous révélant quelle en est la matrice. Cette matrice est la réciprocité.

Toute réciprocité est la matrice d’une conscience affective, l’amitié par exemple. Et toute conscience affective s’impose absolument. Le “absolument” vient du caractère affectif de la conscience en question. Si plusieurs structures de réciprocité incarnent le principe de réciprocité dès la communauté de parenté, l’alliance, la filiation, le partage, la redistribution et la communion, l’affectivité étant toujours une, l’articulation des structures de réciprocité faisant système, de multiples définitions de l’humain sont possibles. Si chaque système engendre une conscience affective absolue et que toute société peut se prétendre universelle et unique à partir du système qu’elle privilégie, aucune ne peut donc échapper à l’affrontement auquel conduit l’exclusivité de sa définition de l’humain, à moins que la raison lui permette d’éviter sa sujétion aux valeurs qu’elle privilégie et ne lui permette de les apprécier qu’au regard de celles des autres.

C’est la médiation d’une représentation objective qui permet de mettre cette sujétion à distance. D’où le recours à l’échange, car l’échange offre la possibilité d’une représentation objective, l’échange symbolique dans un premier temps, ensuite l’échange régi par la relation des choses entre elles, mesurées les unes les autres en fonction de leurs rapports de force qui sont, eux, parfaitement objectifs. Tant que les rapports humains demeurent des relations de réciprocité, et que l’échange est contrôlé par le partage, le processus est validé par la société démocratique. Plusieurs structures traduisent alors le principe de réciprocité. Pour la construction de la cité, les plus importantes sont sans aucun doute la réciprocité binaire collective (le commun) qui implique la propriété indivise, et la réciprocité ternaire généralisée (le marché) qui implique la propriété personnelle.

Pour que la fonction sociale de la propriété soit respectée par chacun, encore faut-il que chacun puisse exercer son activité grâce au moyen de production mis à sa disposition (pour la terre nourrir ses habitants, par exemple) de la façon la plus efficace possible. La notion de propriété demeure donc essentielle et nécessaire pour que la communauté puisse attribuer les ressources à qui de droit, ce qui implique la propriété individuelle dans certains cas, collective dans d’autres, pour que tout le monde puisse contribuer à la satisfaction des besoins de tous (la chreia) et créer le bonheur (l’eudaimonia) de la communauté des hommes libres. La propriété s’inscrit donc comme individuelle lorsqu’elle est ordonnée au commun, et indivise lorsqu’elle est ordonnée à l’individu, de sorte qu’elle puisse toujours “cumuler les avantages d’être collective et individuelle”.

Pierre Dardot et Christian Laval ont proposé cependant de réunir toute forme de propriété sous le titre de dominium parce que la propriété, comme le dominium antique, se prétend un droit absolu. L’évolution du concept de propriété pendant les débats de la Révolution française confirme que la propriété privée liée au pouvoir de l’individu s’apparente au dominium. Néanmoins, au cours de ces débats, la propriété s’est acquis la dignité d’un concept à part entière. Nous avons souligné que le peuple ne voulait pas indemniser les propriétés du domaine féodal parce que, disait-il, elles ne répondent pas au droit de propriété mais à des droits de domaine. Le dominium fut disqualifié, de façon à mettre fin à la sujétion, c’est-à-dire au caractère absolu de la conscience affective.

Mais lorsque la réciprocité est renversée en non réciprocité par la privatisation de la propriété, et que les rapports de force sont subordonnés aux intérêts des individus pour eux-mêmes, alors commence le pouvoir de la liberté de chacun au détriment de la liberté commune. La jouissance aveugle du pouvoir distribué par le capitalisme pour remplir le vide de son impuissance éthique contraint la raison à une fonction utilitaire qui l’asservit à la logique des choses. Et dès lors que le “rapport des choses entre elles” s’impose aux relations de réciprocité intersubjectives, le Tiers est exclu des relations sociales. L’anthropologie elle-même ne parvient plus à concevoir sa genèse. Ses valeurs peuvent sans doute être traitées comme un capital symbolique, mais dont l’origine est alors rapportée à la nature ou à la divinité. Le libéralisme économique ne se prive certes pas de faire appel aux “valeurs constituées” : sous leur protection, le principe de leur genèse peut être plus aisément ignoré ou combattu.

Que l’énergie psychique soit alors privatisée et “accumulée” sous la forme inerte du capital, ne signifie pourtant pas sa “mort”. L’énergie psychique fait partie de la nature. Et la nature exige son respect. Nous avons observé que la nature questionne désormais le pouvoir, puisque l’information exige la liberté commune et celle-ci la réciprocité. La nature se rebelle donc contre l’hubris. C’est ce que nous rappelle aujourd’hui le débat exemplaire du logiciel libre.

Le pouvoir est, certes, une manifestation de la puissance au sens aristotélicien du terme. Cette manifestation est non contradictoire lorsqu’elle s’actualise dans le sens de la physique ou dans celui de la vie, et contradictoire lorsqu’elle se développe comme le juste milieu, la médiété, le Tiers, fruit de la dialectique de l’antagonisme entre la dialectique de la physique et la dialectique de la vie.

Ce Tiers, Aristote dit qu’il est un sentir. Lorsqu’il devient par la réciprocité le sentir du sentir, il est la pensée pure (l’âme), et lorsqu’il est sentir de quelque chose (sentir que l’on voit, que l’on entend, que l’on marche), il est conscience objective (l’esprit)[102].

Aujourd’hui, les sciences humaines, la sociologie, la psychanalyse…, les sciences de la vie, les neurosciences, l’écologie…, les sciences de la nature, la physique, la chimie…, et même la mathématique (Grothendieck) et la logique (Lupasco), qui furent pourtant longtemps utilisées comme boucliers par les capitalistes, s’interrogent sur le Tiers. Seule l’idéologie de l’économie politique occidentale demeure figée dans une posture sectaire, et se cramponne encore irrationnellement à la justification d’un système meurtrier ou suicidaire.

C’est pourquoi l’avenir n’est pas dans le choix entre communisme et libéralisme politique, entre le commun et l’individuation, ou entre leurs valeurs respectives, l’amitié et la responsabilité. Le capitalisme se joue de l’un comme de l’autre et de l’un contre l’autre, mais il doit se colleter avec la puissance psychique. Son dernier recours est d’inviter tout le monde (en tant que subalterne, il est vrai) à la jouissance du pouvoir. Il semble qu’il joue sur le velours en s’adressant à la multitude puisque très nombreux sont en effet ceux qui s’inquiètent à juste titre de fuir la sujétion de leurs ancêtres, et qui veulent connaître la liberté ou se faire une place au soleil. Faudra-t-il pour autant attendre la détresse du monde entier pour récuser les leurres du capital et consentir à l’effort de construire la liberté commune ? Rien n’y oblige. Toutes les communautés, toutes les sociétés, comme le dit Karl Marx à Vera Zassoulitch, peuvent directement construire la société post-capitaliste sans passer par les différentes phases du développement de la société capitaliste pourvu que par la raison elles éclairent la genèse de leurs sentiments éthiques. Il faudra donc un nouvel effort pour affranchir la raison de la logique des choses à laquelle se réfère le capitalisme, et réinitialiser la genèse de la médiété (du Tiers). Mais un effort immédiatement largement récompensé. Quiconque passe en effet le seuil de l’économie capitaliste accompagné de cette conscience critique révolutionnaire acquiert un sentiment victorieux et irréversible de contentement (l’eudaimonia, le démon du bien) qui ne peut être détruit parce qu’il est celui du bonheur de tous.

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[90] « Quelle était donc la nature de ce système mixte et à quelle philosophie serait-il rattaché ? Était-ce l’incarnation de l’esprit du logiciel libre explicité par Stallman au sein du Manifeste GNU ? Ou n’était-ce qu’un amalgame d’outils ingénieux que n’importe quel utilisateur, tout aussi motivé, aurait pu lui-même assembler sur son système maison ? » Ibid., p. 206.

[91] Ibid., p. 229-230.

[92] Ibid., p. 230-235.

[93] Ibid., p. 244.

[94] Ibid., p. 240.

[95] Ibid., p. 164.

[96] Ibid. p. 182.

[97] Pierre Dardot et Christian Laval, Commun, op. cit., p. 170.

[98] Ibid., p. 200-202.

[99] Sam Williams, Richard Stallman & Christophe Masutti, Richard Stallman et la révolution du logiciel libre, op. cit., p. 274.

[100] Pierre Dardot et Christian Laval, Commun, op. cit., p. 459.

[101] Ibid., p. 582.

[102] Certes nous ne disposons pas des écrits originaux d’Aristote de sorte que nous devons risquer notre interprétation. Nous faisons appel au principe d’antagonisme pour dire la relativisation de l’énergie et de la matière au profit de leur médiété (l’énergie psychique, le Tiers). Nous appelons principe du contradictoire la révélation de ce qui est en soi contradictoire comme de nature affective dans l’expérience de la conscience. Nous appelons principe de réciprocité la relation intersubjective entre les uns et les autres, qui produit la réflexion du Soi qui engendre la Conscience.

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