LE TEMPS QU’IL FAIT LE 10 JUIN 2016 – Retranscription

Retranscription de Le temps qu’il fait le 10 juin 2016. Merci à Marianne Oppitz !

Bonjour, nous sommes le vendredi 10 juin 2016. Chambre d’hôtel, de nouveau, à Paris : hier soir j’ai été à Radio Nova. J’ai pu m’entretenir pendant une vingtaine de minutes avec les journalistes de Radio Nova. Il y aura un podcast, un de ces jours et je vous montrerai ça et vous écouterez ça. Tout à l’heure je serai en route et je prendrai le train pour Digne. Je fais un exposé à Digne à 18h30. Alors, si vous avez l’occasion d’être dans… c’est quoi, les Alpes Maritimes ? je ne connais pas très bien ma géographie [en réalité, les Alpes de haute Provence]. En tous cas, venez si vous êtes dans la région.

De quoi parler ? Eh bien, je vais parler de la fin de l’équipée de Bernie Sanders, aux États-Unis. Bon, il dit qu’il va continuer sa campagne mais cela n’avait une justification que s’il avait encore une chance de gagner. À mon sens – je l’avais dit – c’est la primaire en Californie qui allait faire la différence. Alors il a perdu : il a perdu avec une marge importante, plus importante que ce que les sondages avaient indiqué. Probablement parce qu’il devenait de plus en plus clair que Hillary Clinton allait l’emporter. Et certains super-délégués, qui ne font pas partie du processus des primaires à proprement parler, avaient déjà fait la différence la veille. Alors, voilà, disons qu’il n’y aura pas de candidat socialiste à proprement parler aux États-Unis, ce qui aurait quand même été une première. Au début du vingtième siècle, il y a eu des candidats de gauche, à une époque de lutte des classes féroce aux États-Unis, dont on ne parle pas souvent. Il y a un livre d’histoire de Monsieur Zinn, qui parle de ça récemment. Ce sont des choses qui avaient fort été mises entre parenthèses, si ce n’est dans une fameuse encyclopédie de la gauche américaine. Et quelques films qui nous parlent de ça.

Alors voilà, ce sera donc entre Madame Clinton et Monsieur Trump. Ce sont fort les mêmes milieux qui sont représentés, mais Monsieur Trump est quand même du style fou furieux. On va espérer que ce ne soit pas lui qui passe. Encore que, bien entendu, il aurait des conseillers : des gens autour de lui, et il ne pourrait pas mettre en application des choses aussi loufoques que ce qu’il avait promis de faire dans sa campagne. Mais quand même, c’est un type dangereux : un populiste dans le mauvais sens du mot, parce que, comme vous le savez, je considère qu’il y a un bon sens du mot, de représenter véritablement quelque chose qui serait de l’ordre du peuple. Mais, dire n’importe quoi, pour prendre les gens dans le sens du poil, ou de leur paranoïa, ce n’est pas la meilleure chose à faire.

Autre évènement, et là je crois qu’il est très important, je l’ai salué immédiatement par un billet : c’est le renversement de la tendance dans la manière dont Jérôme Kerviel a été traité. Bon, vous connaissez mon opinion, depuis le début : j’en ai parlé – je l’ai souligné encore récemment – dans les heures qui ont suivi l’annonce, si pas dans les minutes de l’annonce de l’affaire Kerviel en janvier 2008. Et j’ai continué d’en parler, y compris, voilà, dans des chroniques dans Le Monde, dont une qui mettait en cause la raison d’État intervenant dans cette affaire.

Alors, qu’est ce qui s’est passé ? Eh bien, vous l’avez vu : un tribunal du travail, le tribunal des prud’hommes a accordé 450.000€ à Kerviel. 300.000 d’un bonus qui lui avait été promis, et 150.000 pour la manière vexatoire dont il a été traité : la manière insultante dont il a été traité. J’espère que ce genre de considérations interviendra également dans d’autres affaires dans les mois qui viennent.

Alors, qu’est ce qui est important ? Eh bien, j’ai tout de suite fait le parallèle avec l’affaire O. J. Simpson aux États-Unis. Ce n’est évidemment pas Kerviel qui se retrouve dans la position de Simpson : c’est la Société Générale qui se trouve dans la position de Simpson. Qu’est-ce qui s’était passé ? Eh bien, j’en ai parlé et vous vous en souvenez sans doute : O. J. Simpson, accusé du meurtre de son ex-épouse et d’un ami de son ex-épouse. La justice pénale, un jury, le disculpe de cette accusation, et l’opinion publique est très partagée autour de ça. Et ensuite, les familles des victimes déposent plainte au civil (pas au pénal), et là, ils obtiennent gain de cause pour le meurtre, c’est-à-dire que la responsabilité du meurtre est attribuée par les tribunaux civils, à O. J. Simpson. Et donc, vous voyez le parallèle.

Comme je le dis, la position d’O. J. Simpson est celle, maintenant, de la Société Générale : il y a une affaire qui est réglée vite fait au niveau du pénal, avec une condamnation très lourde pour Kerviel, et un tribunal… – ce n’est pas exactement civil, puisque, si j’ai bon souvenir, les tribunaux du travail, en France, c’est à la jonction du civil et du pénal – mais, toujours est-il qu’un autre tribunal considère que voilà, attribue la responsabilité de ce qui s’est passé, de façon très claire, à la banque et pas au trader. Il est dit, et il est sous-entendu, que le trader a fait ce qu’on lui a demandé de faire, ce qui est à mon sens l’opinion générale et celle que j’ai défendue depuis les premières heures après l’annonce de l’affaire.

Alors, ça c’est très, très bien, parce que cela participe à mon sens de ces vacillements que l’on constate du côté de nos élites quant à la manière de gérer la suite des choses. C’est-à-dire qu’il y a des hésitations. J’attire toujours l’attention là-dessus : sur le fait qu’en haut, au sommet, là où nous imaginons souvent qu’il n’y a que des élites à l’opinion monolithique, et bien, c’est en train de se lézarder, les preuves sont nombreuses. J’en ai cité encore récemment : celle du Financial Times, représentant véritablement le monde des affaires anglo-saxon, du côté britannique essentiellement, et qui perd son sang froid et qui attaque d’une façon assez ordurière, un article fait par un sous-directeur du Fonds monétaire international, où celui-ci remet en cause l’austérité et un certain nombre de décisions qui ont été prises récemment, en particulier par la Troïka, constituée, non seulement par le Fonds monétaire international, mais par la Banque centrale européenne et la Commission européenne. Et là donc, voilà, ça c’est intéressant parce que cela montre que même si on a le sentiment que rien ne se passe, eh bien, au niveau des instances supérieures, c’est la guerre civile entre eux. Et cela prend un tour tragi-comique, mais c’est révélateur. C’est révélateur du fait qu’il n’y a plus de position monolithique là au sommet, qu’on commence à prendre en considération la réalité des choses : la manière dont les choses se passent véritablement. C’est une révolution par rapport à ces gens là.

Voilà, j’avais envie de parler de ces deux choses là – dans un hôtel, j’essaye de faire des vidéos un peu plus courtes, vu la difficulté technique de les faire de cette manière là. Voilà, à la semaine prochaine. Au revoir.

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  1. Mes yeux étaient las, bien plus que là, juste après l’apostrophe : la catastrophe.

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