Donc d’un côté nous dévastons et de l’autre nous consentons quelques efforts bien intentionnés de restitution de nos dévastations. Une telle campagne peut-elle être gagnée ? J’en doute mais on fait ce qu’on peut. Enfin, probablement.
Et c’est l’un des éléments qui caractérisent sans doute l’espèce à laquelle j’appartiens : nous faisons ce que nous pouvons. Malheureusement ce n’est pas assez, et de beaucoup.
Je lisais tout à l’heure les mémoires de Jacques de Larosière : 50 ans de crises financières et, dans un passage, c’est très exactement cela qu’il laissait entendre : nous faisons ce que nous pouvons !
Le contexte, c’était l’effondrement de l’ordre monétaire international en 1971, du fait de la dénonciation par les États-Unis des accords de Bretton Woods datant de 1944, et les efforts consentis pour en limiter les conséquences :
« Jeune directeur du Trésor depuis juin 1974, je fus chargé des négociations du côté français […] quelques signes étaient donnés, où la France voulait voir la volonté d’une certaine discipline […] mais force était de reconnaître que ces vœux restaient théoriques […] En regardant ces événements avec le recul du temps, je ne me sens pas particulièrement fier des résultats de la négociation franco-américaine, qui ouvrit la voie aux accords de la Jamaïque. La réalité était que le flottement était libre. L’illusion était que cette liberté pourrait être contrôlée et constituer un « système » » (2016 : 74-75).
La franchise de Larosière est admirable et me paraît très représentative de ce que nous avons été : nous avons fait « de notre mieux » avec le donné qui était le nôtre, à savoir d’être un animal social, colonisateur et opportuniste, et d’être aussi à l’instar de tous les autres animaux qui nous entourent, des prédateurs –même si ce n’est que d’innocente verdure. Ce qui vaut aussi bien d’ailleurs pour l’aigrette garzette qui, quand elle patauge à ses occupations, et constitue avec l’eau où elle enfonce ses pattes délicates et avec la végétation luxuriante qui l’entoure, ce qui apparaît à mes yeux émerveillés comme un paysage paisible d’une inouïe splendeur, dévore pendant ce temps-là sans vergogne escargots, insectes aquatiques, petits poissons et grenouilles, qui ne lui ont pourtant rien fait, de la même manière que nous nous régalons de méchoui, côtelettes et autres magrets, parce que c’est ainsi que notre nature est faite : nous trouvons nos aises aux frais du reste du monde, qui n’en peut mais ! Sa vengeance n’en sera pas moins terrible.
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