Billet invité.
Je viens de terminer Et les faibles subiront ce qu’ils doivent ? de Yanis Varoufakis, que j’ai acheté malgré la maladresse de son titre en français, parce que j’avais été intrigué par la critique favorable publiée dans Le Monde.
Je doute que la « modeste proposition » qui en est la conclusion ait beaucoup de chances d’être appliquée. Par contre j’ai trouvé l’historique des échanges internationaux depuis 1945 à la fois compréhensible et cohérent (il est d’autant plus compréhensible qu’il est cohérent).
Ce qui me semble particulièrement intéressant dans ce livre c’est que la nécessité d’une compensation telle que le bancor devient tout à fait évidente même pour ceux qui ne sont pas à l’aise en matière financière. Des exemples comme le plan Marshall, le SME ou l’euro sont tout à fait convaincants.
Voici ce que j’ai compris : quand, après avoir prêté aux pays qui n’ont pas grand-chose à exporter l’argent nécessaire pour qu’ils achètent ce qui leur manque (*) et après avoir encaissé les intérêts, les créanciers s’inquiètent et exigent le remboursement des dettes correspondantes, de deux choses l’une :
– soit ces pays dévaluent leurs monnaie malgré les effet catastrophiques entraînés par les très fortes dévaluations (dont l’accaparement par les créanciers à un coût dérisoire de ce qui les intéresse).
– soit (dans le cas de la zone euro mais aussi ailleurs quand le FMI s’en mêle) ces pays n’ont ni la possibilité de dévaluer ni celle de faire défaut et il ne leur reste plus que celle d’accepter un esclavage de type colonial (même si la classe dirigeante locale reste en place.)
La difficulté avec le bancor (ou ses équivalents) c’est qu’on est tellement habitué à ce que les échanges commerciaux soient une concurrence et la monnaie une arme dans cette concurrence que la coopération qu’il implique semble relever de l’utopie. La période que décrit ce livre est une démonstration de l’idiotie qu’a été le projet européen : réaliser une « union toujours plus étroite » entre des pays ayant des situations économiques très inégales en les mettant en concurrence les uns avec les autres et en les soumettant à une contrainte monétaire rigoureuse. Ni les largesses budgétaires de l’État ni l’austérité ne peuvent améliorer la situation des perdants.
Ceux qui comme Jacques Sapir préconisent de s’en tenir aux traditionnelles dévaluations semblent plus réalistes mais la dévaluation n’est qu’une arme défensive qui aboutit le plus souvent à accepter la tutelle du FMI pour pouvoir emprunter à nouveau…
Je ne suis qu’un citoyen ordinaire cherchant à comprendre d’ou vient et où va l’argent, pas un historien, et je n’ai pas tout compris de la « modeste proposition » de Yanis Varoufakis. Plutôt qu’une critique, j’ai surtout voulu exprimer que la lecture de son livre rend tout à fait évident que l’histoire du monde depuis 1945 démontre la nécessité d’une monnaie de type bancor.
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(*) Du blé par exemple, mais il est souvent difficile d’acheter du blé à crédit quand on n’achète pas en même temps des armes. Si au lieu d’acheter du blé, des Mercedes et des armes ils achètent des tracteurs, des semences et des engrais il n’y a qu’une faible chance qu’ils arrivent à rembourser leur dette et ses intérêts en écoulant leur production au prix du marché.
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