Billet invité.
Le long chapitre, près d’une centaine de pages, que Paul Jorion consacre à un état des lieux planétaire, provoquera peut-être chez certain(e)s un fou-rire incontrôlable.
Mais de ceux qui vous saisissent lors d’un enterrement, lorsque submergé par la peine et l’absurdité des choses, votre corps décide sans vous demander votre avis de relâcher l’insupportable tension.
Car il faut bien admettre l’absurde de la chose : aurions-nous eu la volonté de nous suicider, que nous n’aurions guère fait mieux !
Dix !… Nos voix ont cessé d’être entendues. Peu importe les candidats, peu importe les discours, il n’y a qu’une seule politique possible, celle dictée par la « science » économique.
Neuf !… La « science » économique est tout entière au service d’un pouvoir économique extraordinairement concentré.
Huit !… La machine infernale fonctionne sur deux temps : concentration des richesses et escamotage dans les « havres » fiscaux.
Sept !… Son logiciel de commande est financier, il ne fonctionne qu’en mode « court-termisme ». Demain n’existe pas, seul compte le profit immédiat, celui qui est la raison des normes comptables.
Six !… L’État-providence est subordonné à la croissance…, si toutefois il en reste suffisamment une fois les intérêts payés.
Cinq !… L’ultralibéralisme est la négation de toute dignité. Toute chose à un prix, y compris la fin de l’espèce.
Quatre !… Les générations futures hériteront d’un monde dévasté. C’est leur problème !
Trois !… Crise financière, crise environnementale, crise de la complexité. Mêlées, elles forment le soliton, cette énorme vague scélérate qui se dresse droit devant la proue de notre frêle esquif.
Deux !… L’intelligence artificielle arrive. De père inconnu, sa maman s’appelle… l’armée.
Un !… La démocratie est enchaînée.
Zéro ? Pas encore, pas tout à fait. Il nous reste l’équivalent de deux, peut-être trois générations pour réagir et tenter d’éviter la tragédie.
J’ai lu que son job sera de fermer le ministère de l’éducation ; et de renvoyer ces compétences aux niveaux…