Billet invité. Ouvert aux commentaires.
Quand j’entends que la crise agricole est due à la grande distribution ou à l’embargo russe, je me dis que le vrai scandale n’est pas nommé, à savoir la pauvreté d’une bonne partie de la population française et mondiale.
La crise agricole, c’est d’abord la course aux prix les plus bas, grâce aux bons services des multinationales de la chimie industrielle et des banques pour rafler les marchés les plus importants (Russie, Chine, Moyen-Orient), afin de nous assurer un excédent commercial (Loi de modernisation de l’économie 2008 et 2010) avec pour but de participer au redressement économique de la France censé compenser la fuite ou la faillite de ses principales industries.
Un bon plan aussi pour l’agro-alimentaire qui s’en donne à cœur joie pour nous faire manger n’importe quoi au goût des arômes artificiels, et engranger des bénéfices records.
Une stratégie payante dans les premières années et sponsorisée par Bruxelles pour les meilleurs élèves, mais qui a mis sur la paille beaucoup de paysans traditionnels et leur savoir-faire, qui n’ont pas voulu suivre le mouvement de l’endettement et de la productivité.
Une stratégie qui a conduit à une dérégulation du marché, parce que du pas cher, tout le monde sait faire quand il s’agit d’optimiser une production, il n’y a qu’à supprimer ce que font les hommes et utiliser l’animal dans un rapport de prix au kilo, sans tenir compte de sa nature d’être sensible et du respect de l’environnement.
C’est dans ce piège de surproduction face à une concurrence imparable que notre politique agricole a mis à l’agonie nos producteurs.
La vérité est que le juste prix du labeur du paysan et de la viande d’un animal élevé dans un milieu qui correspond à sa nature (exemple : une vache élevée dans un pré l’été et nourrie l’hiver au fourrage sans pesticides), est un luxe qui n’est pas à la portée du salaire de base pour assurer un mois complet de nourriture, mais réservé à une élite hors-sol, et réaliser de beaux reportages culinaires.
La concurrence des prix les plus bas pour se nourrir, c’est une des stratégies politiques de dissimulation de la pauvreté. Un moyen de laisser un peu de pouvoir d’achat aux smicards pour s’acheter leur smartphone et leur ôter l’idée de réclamer de la brioche.
Quant à l’embargo russe, je me pose des questions. En contrepartie de quoi et de qui les Russes laissent-ils produire leur viande par les Français ? N’ont-ils pas assez de place, de compétences, de travailleurs, pour laisser filer un peu de leur indépendance alimentaire ?
Sommes-nous naïfs au point de croire que les Russes ou les Chinois ne soient pas capables de faire de la viande dans les mêmes conditions industrielles que nous le faisons pour avoir des prix compétitifs ?
À ce jeu du chantage économique c’est à celui qui tuera la poule, la vache et le cochon, les hommes, qui raflera la mise.
Presque 130 millions de repas distribués aux plus précaires en 2015.
Bon appétit et bonne journée !
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