The Big Short d’Adam McKay, produit par Brad Pitt, est un film très bien fichu : Hollywood au mieux de sa forme, avec un montage super serré, avec quelques personnages ayant une certaine profondeur psychologique, et des trouvailles, comme faire expliquer ce que sont les subprimes par une pin-up dans un bain mousse et les CDO synthétiques par une flambeuse dans un casino, flanquée d’un mathématicien du 20 heures, calculant ses chances de gain.
Pour expliquer les subprimes, il m’avait fallu à moi en 2008 tout un livre : La crise, et puis pour faire comprendre plus spécifiquement en 2011 les évènements que rapporte The Big Short, une grande partie de mon livre Le capitalisme à l’agonie. Au cinéma, on ne dispose que de deux heures en tout et pour tout et il faut donc recourir à des astuces comme celles que l’on voit là, qui permettent au spectateur, sinon de comprendre de quoi il retourne exactement, du moins de s’en faire une idée suffisante.
Le film diffère du livre du même titre de Michael Lewis, paru en 2010 et dont le film s’inspire, en ce que les jeunes gens qui finissent par rafler la mise en ayant parié sur l’effondrement du marché des titres subprimes, sont présentés comme des héros positifs auxquels le spectateur est censé s’identifier – au point que la personne qui m’accompagnait m’a demandé : « Sachant toi aussi ce qu’ils savaient, pourquoi n’en as-tu pas fait autant ? », à quoi je n’ai pu répondre qu’un piteux : « Parce que moi je suis Paul Jorion ! », sous-entendu : « J’étais monté au front pour dénoncer toute la bande : les prétendus gagnants aussi bien que les perdants ! »
L’angle d’attaque du livre de Michael Lewis était davantage celui qu’incarne le personnage joué dans le film par Brad Pitt, qui fait remarquer froidement qu’un million de chômeurs de plus, c’est aussi quarante mille morts en plus, ou celui que souligne la conclusion du film – je cite de mémoire : « La finance est aujourd’hui réformée, les financiers véreux, sous les verrous, et les grandes banques responsables de la tragédie, démantelées … Non, je déconne évidemment ! »
C’est la méthode descendante : avec un LLM en arrière-plan de chaque personnage.