Paul Jorion, Penser tout haut l’économie avec Keynes, Odile Jacob 2015 : 90
La crise de 2008 annonçait, dit-on, le retour en force des idées de Keynes en économie. Celui-ci a effectivement lieu en ce moment-même, et sous de multiples formes, mais c’est sans doute dans la fin du laisser-faire que le retour de Keynes se manifeste le plus clairement, fin honteuse sans doute, qui n’ose dire son nom, mais fin néanmoins.
Où l’État doit-il exercer de préférence son empire ? La première distinction à établir, dit Keynes, est celle que Bentham, recourant au latin, avait établie entre les choses qu’il convient de faire, Agenda et celles dont il convient au contraire de s’abstenir, Non-Agenda :
« Nous devons distinguer ce que Bentham, dans sa nomenclature très utile bien qu’aujourd’hui oubliée, appelait Agenda et Non-Agenda, et le faire sans l’a priori de Bentham que toute interférence est, automatiquement, « généralement non-nécessaire » et « généralement pernicieuse ». La principale tâche des économistes au jour d’aujourd’hui est peut-être de distinguer sur des bases nouvelles les Agenda des gouvernements des Non-Agenda, et la tâche accompagnatrice de la politique est de mettre au point au sein d’une démocratie, les formes de gouvernement qui seront capables de mener à bien les Agenda » (Keynes 1926 : 288).
Keynes précise alors que
« L’Agenda le plus important pour l’État ne touche pas aux services que des individus privés assurent déjà, mais à ces fonctions qui tombent en-dehors de la sphère de l’individuel, ces décisions qui ne seraient prises par personne si l’État ne les prenait pas quant à lui. La chose la plus importante pour l’État n’est pas de faire des choses que des particuliers font déjà, et de les faire un tout petit mieux ou un tout petit peu moins bien qu’eux, mais de faire des choses qui à l’heure qu’il est ne sont faites par personne » (ibid. 291).
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Keynes, John Maynard, « The end of laissez-faire », 1926, in Essays in Persuasion, Donald Moggridge (sous la dir.) The Collected Writings of John Maynard Keynes, Volume IX, Cambridge : Macmillan / Cambridge University Press for the Royal Economic Society, [1931] 1972 : 272-294
PJ : « Un lecteur d’aujourd’hui de mon livre Principes des systèmes intelligents » Je pense que c’est le commentateur Colignon David*…