Billet invité.
L’un des pouvoirs régaliens d’un État (censé être une émanation représentative du peuple) est le pouvoir législatif ; sa capacité à faire des lois qui vont organiser le vivre ensemble et visent à protéger l’ensemble du peuple des abus de quelques puissants. Or, avec l’avènement du commerce international et de la libéralisation des échanges (mondialisation), le droit du commerce, au travers de la norme industrielle, vient se confronter directement en termes de droit aux lois qui régissent la société. À tel point, qu’une des principales activités de l’administration européenne est de produire des normes qu’elle impose aux États sous la forme de « directives ».
Aujourd’hui, le meilleur exemple de ce combat législatif se cristallise dans les négociations internationales pour le TAFTA dans lesquelles les conflits ne seraient plus réglés au sein d’un tribunal issu d’une quelconque institution démocratique mais dans un « tribunal d’arbitrage » permettant aux grandes entreprises de contraindre les États à modifier leurs lois sous couvert de respecter des normes industrielles. Ces normes sont largement définies avec force lobbying par les entreprises elles-mêmes qui le plus souvent diligentent gracieusement leurs experts auprès des institutions, voire même organisent-elles leur propre contrôle (testes d’innocuité de substances OGM ou autres), les institutions n’ayant plus les moyens de contrôler elles-mêmes la pléthore de nouvelles molécules créées chaque année par l’industrie.
Et si la norme industrielle était garante de notre sécurité au sein de la société, alors pourquoi pas ! Pourtant de très nombreux évènements récents montrent combien les grandes sociétés industrielles (Servier, implants mammaires, Volkswagen ) et financières (Libor, Forex, fraude fiscale ) s’arrangent, et le plus souvent en connivence, pour enfreindre les normes. A contrario, la norme est aussi un moyen de faire disparaître des initiatives citoyennes comme Kokopelli.
Pourquoi toutes ces sociétés se sentent-elles libres de violer les normes qu’elles définissent et sont prêtes à attaquer devant un tribunal des États pour amoindrir encore plus la capacité des peuples à légiférer pour se protéger ? Réponse : Too big to fail !
Le scandale VW vient encore d’en apporter la preuve. Au lieu d’être condamnée pour fraude, c’est l’institution qui va modifier la norme à la baisse au détriment de la santé publique. La raison en est simple, si VW s’est fait prendre la main dans le pot d’hydrocarbure, tous les autres constructeurs sont en réalité concernés et faire appliquer la loi (qui protège notre santé) mettrait à mal l’ensemble du secteur automobile mondial.
Décidément non, la « concurrence libre et non faussée » n’est pas de ce monde. Elle n’est qu’un slogan marketing destiné à asseoir le pouvoir des puissances financières dans les règles européennes contre le pouvoir législatif des peuples garantissant leur liberté à disposer d’eux-mêmes.
Beau projet pour une « start-up » ! Elon Musk n’aurait pas 8 millions d »€ pour éliminer un concurrent encore plus radical…