Billet invité.
Le krach de Lehman Brothers en septembre 2008 a engendré de gigantesques flux de capitaux dans le système bancaire mondial pour compenser les pertes effectives et latentes engendrées sur le prix des actifs financiers représentant la capitalisation de l’économie réelle. Les banques centrales n’ont pas répété l’erreur de 1929 qui avait consisté à réclamer la livraison des garanties réelles aux banques en difficulté, plutôt que de leur accorder des liquidités gratuites pour faire face à tous leurs paiements. Les économistes furent nombreux à annoncer une explosion inflationniste qui pour les uns résoudrait la crise et pour les autres précipiterait la dépression qu’on voulait éviter.
Il n’y a pas eu finalement de hausse massive des prix à la consommation ni de dépression brutale. La dépression est venue progressivement par la crise des dettes et des budgets publics concomitant à une croissance du chômage et au déclassement des populations à revenu moyen. La « science économique » n’a rien explicité des mécanismes dépresionnaires qui se sont irrémédiablement enclenchés. Elle s’est évertué à ne pas considérer son erreur de prédiction : pourquoi les flots de liquidité déversées dans l’économie financière n’ont pas provoqué une crise inflationniste géante comme celle du « choc pétrolier » de 1973 ?
C’est que justement l’économie financière a été dissociée de l’économie réelle par la libéralisation des années 70-80. L’économie réelle est celle du travail et de la production. L’économie financière est celle de la mesure du capital, du crédit, du profit et de l’intérêt. Depuis la contre-révolution libérale, la sphère financière a l’exclusivité de pilotage de la monnaie et du crédit pour déterminer l’équilibre général des prix par la croissance de la masse monétaire. La politique monétaire des banques a été menée à l’avantage des intérêts financiers dissociés des intérêts réels.
La dissociation est produite par la libre circulation du capital dans un marché financier unifié au-dessus d’un marché du travail et de la production nécessairement compartimenté par les nations. Le capital et le crédit financent la plus-value calculée sur le marché international unifié tandis qu’ils financent le travail sur des marchés nationaux. Les marchés nationaux sont mis en rapport et coordonnés par des parités de change livrées à la spéculation financière depuis le retrait des États souverains dans l’abandon du système de régulation de Bretton Woods.
Donc depuis 2007, les bilans bancaires explosent pour produire de la liquidité ; mais cette liquidité fait monter le prix des seuls actifs financiers qui déterminent le calcul de la plus-value et de l’intérêt distribués. L’économie financière dirige les parités de change pour de fait mettre au chômage les économies réelles des pays développés trop généreuses en salaires et protections sociales ; et pour faire travailler les économies réelles des pays dits émergents qui consomment peu et épargnent beaucoup pour refinancer les crédits qui gonflent les plus-values en capital. Les prix à la consommation sont stables parce que seuls les prix financiers augmentent au bénéfice des rentiers.
« En période de récession économique ou de crise politique, l’extrême gauche devient souvent l’extrême droite…! » Il faut changer de lunettes…