Billet invité.
Le gouvernement allemand entre par effraction dans la négociation avec la Grèce, une fois celle-ci terminée, et s’est trouvé un allié pour la manœuvre avec le gouvernement français. La prééminence des chefs d’État et de gouvernement devait certes être réaffirmée, mais là n’est pas le seul enjeu.
En réclamant des « précisions » à l’accord intervenu sous les auspices de la Commission, de la BCE et du FMI (dans son statut d’observateur), ainsi qu’en voulant imposer un délai afin de le finaliser, en l’assortissant d’un crédit relais, l’intention poursuivie n’est pas de faire capoter l’accord mais de le durcir, pour le principe. Et de soumettre le gouvernement grec à une tutelle renforcée en multipliant les contrôles préalables à la libération de tranches d’aide financière calibrées a minima. Afin d’être totalement dissuasive, la punition doit être exemplaire.
En reprenant l’initiative, les autorités allemandes montrent qui est désormais le patron en Europe, quitte à entériner une cavalerie financière. C’est le prix à payer pour tracer le cadre dans lequel vont se dérouler les débats sur le renforcement de la gouvernance de la zone euro. Il n’est pas question de changer de politique, mais au contraire de créer de nouvelles contraintes institutionnelles excluant toute mise en cause. Le piège se referme, et François Hollande, sans surprise, ne voit pas d’autre attitude possible que d’accompagner le mouvement pour essayer de l’influencer. Ce n’est donc pas seulement Athènes qui ne peut s’opposer à Berlin, c’est également Paris : le futur ministre des finances de la zone euro aura tout pouvoir et une Commission décidément incontrôlable sera sortie du jeu.
La mise sous tutelle de la Grèce montre la détermination du gouvernement allemand à imposer sans partage – sauf pour la forme – son leadership et sa politique : un cocktail de réformes ultra-libérales et de coupes budgétaires destinées au remboursement prioritaire de la dette publique qui tient lieu de pensée économique. Les opposants à une sortie de la Grèce de la zone euro faisaient valoir pour s’y opposer qu’elle conduirait à s’interroger sur le pays qui la suivrait. Il en est de même à propos de sa mise sous tutelle…
Le FMI, qui ne voit pas d’objections à retarder un accord qui évacue toute décision sur l’allégement de la dette grecque, met en attendant son grain de sel. Il attend que les créanciers européens prennent des « décisions » à ce propos avant de s’engager dans le nouveau plan, conformément à ses prises de positions antérieures. La partie ne va pas pouvoir se jouer en deux temps, et si les autorités européennes ne veulent pas en convenir, il leur faudra faire l’impasse sur l’apport du FMI et prendre le risque d’accroître d’autant le montant de l’addition qu’ils devront ultérieurement régler, sauf à réintégrer le Fonds d’ici quelques mois dans le dispositif en sacrifiant à sa demande.
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