Comment reconstruire la réflexion économique après la crise de 2007 et la débâcle d’une « science » aux ordres de la finance ? En quoi la lecture de Keynes peut-elle nous y aider ?
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Le « multiplicateur » aura un bel avenir : il deviendra un outil économique standard. Le multiplicateur budgétaire mesure l’impact sur le Produit intérieur brut d’une réduction du budget de l’État ; un multiplicateur inférieur à 1 signifie que si l’État diminue ses dépenses d’un euro, le PIB baissera de moins d’un euro, supérieur à 1, il signifie que si l’État diminue ses dépenses d’un euro, le PIB baissera de plus d’un euro.
Le multiplicateur sera au cœur d’une crise en octobre 2012 quand Olivier Blanchard, l’économiste en chef du Fonds Monétaire International, affirmera qu’une erreur avait été commise dans l’évaluation du multiplicateur budgétaire en 2009, au lendemain de la crise financière dite des « subprimes ». Le chiffre de 0,5 utilisé à cette époque pour l’Europe justifiait une politique d’austérité, alors que le chiffre réel, situé lui dans la fourchette 0,9 à 1,7 et « significativement supérieur à 1 au début de la crise » selon Blanchard et Daniel Leigh, le co-auteur de l’étude qu’ils publieront conjointement en janvier 2013 (Blanchard, Olivier & Leigh, Daniel, « Growth Forecast Errors and Fiscal Multipliers », IMF Working Paper 13/1, janvier 2013 : 19), aurait encouragé la politique de relance que proposaient alors un grand nombre d’économistes. La Commission européenne et l’OCDE avaient elles aussi utilisé ce chiffre erroné proche de 0,5.
Comment se faisait-il que le chiffre soit faux ? Parce que si le multiplicateur était considéré de valeur 2 durant les décennies « keynésiennes » des années 1950 et 1960, les économistes néo-libéraux dont l’influence devint dominante dans les années qui suivirent prétendirent que la parfaite maîtrise du niveau des taux d’intérêt désormais acquise par les banques centrales justifiait de réduire dans les calculs le multiplicateur budgétaire à 0,5, la possibilité existant en principe d’abaisser les taux d’intérêt de manière à compenser l’impact d’une réduction des dépenses de l’État sur le PIB. Lorsque la crise qui débuta en 2007 fit baisser les taux de façon à ce point drastique que le pouvoir d’action des banques centrales sur le niveau des taux d’intérêt s’évapora, ils oublièrent de tenir compte de ce nouvel élément.
Au temps donc pour ceux qui imagineraient que la « science » économique est une science exacte. Ironie supplémentaire, quand en avril 2012, cinq mois donc avant l’avertissement qu’il lancerait en octobre de cette année là, Olivier Blanchard s’était vu demander lors d’une conférence de presse si la politique d’austérité menée par le Fonds monétaire international vis-à-vis de la Grèce, du Portugal et de l’Irlande, n’était pas excessive, il avait répondu que « L’autocritique est toujours difficile mais n’est pas pertinente dans le cas présent » (Talley, Ian, « IMF Details Errors in Calling for Austerity », Wall Street Journal, le 3 janvier 2013).
J’ai lu que son job sera de fermer le ministère de l’éducation ; et de renvoyer ces compétences aux niveaux…