Billet invité. Ouvert aux commentaires.
Enfin, dans le monde économique de plus en plus de voix (malheureusement encore minoritaires) s’élèvent pour dénoncer un accroissement abusif et donc excessif de « la concentration des richesses » qui pose des problèmes au bon fonctionnement de l’économie, comme T. Piketty enfourchant le cheval des excessives « inégalités de richesse » qui seraient la raison principale de l’insoutenabilité du fonctionnement de l’économie mondiale actuelle.
Comme s’il s’agissait là simplement d’un carburateur mal réglé.
Pourtant, « la concentration des richesses » ainsi que « les inégalités de richesses », comme le prétend le libéralisme anglo-saxon empreint du rigorisme protestant, ne seraient que la résultante du labeur de certains qui mieux que d’autres ont su faire fructifier leur business. Ainsi, le nombre de 0 sur un compte en banque (et souvent même plusieurs comptes en banque) ne serait que la toise de la réussite sociale.
La Loi et la Constitution interdisent-elles une in-équité devant la répartition des richesses ? Non, que Diable ! La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme fait-elle état de quelques réserves que ce soit quand aux inégalités de richesses ? Ma foi, non.
Devant certains écarts abyssaux, certains invoqueront d’urgence la raison éthique et même la morale mais ces deux là relèvent de la discipline personnelle de chacun et ne regardent en rien la société.
Aussi, vouloir contraindre et limiter l’accroissement de la richesse de certains ne peut en aucun cas se justifier sauf à vouloir exhumer l’égalitarisme imbécile de la vieille dictature communiste dont on sait tous ce qu’elle est devenue.
Il est cependant naturel de ressentir un certain malaise dans ce « théorème naturel » de la répartition disparate des richesses. D’où vient donc cette perception confuse qu’on a tordu le sens des mots et savamment entretenu une certaine confusion sémantique ?
Imaginons un instant que nous remplacions le mot « richesse » par le mot « pouvoir ». Nous serions dès lors confrontés à « la concentration des pouvoirs » et un accroissement « des inégalités de pouvoir ».
.Article 16 – Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution, énonce la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme. Mais aussi, Article premier Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. Les distinctions sociales ne peuvent être fondées que sur l’utilité commune.
La question qui se pose aujourd’hui, c’est : la richesse permet-elle d’octroyer à certaines personnes des pouvoirs spécifiques qui ne sont pas ceux que la Constitution accorde à chaque citoyen ? Dans notre société mondialisée, la fortune ne permet-elle pas de s’affranchir de l’égalité entre les citoyens ?
Si la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme ne dit rien spécifiquement sur la richesse et la fortune, se limitant à garantir de Droit de propriété, il est à noter que la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne du 18 décembre 2000 s’engage bien davantage. Chap. III, article 21, point 1 : « Est interdite, toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle. »
Interdire toute discrimination fondée sur la fortune, revient de fait à inscrire dans la loi (ou presque) les inégalités de fortune comme étant inaliénables et incontestables.
Ainsi, si des représentants du peuple souverain venaient à considérer qu’une fortune excessive peut s’apparenter à une prise de pouvoir illégitime aux yeux de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme, ces mêmes représentants seraient condamnables au regard de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
Où l’on voit que richesse et pouvoir sont au cœur de l’enjeu démocratique actuel. La fortune ne permet-elle pas de s’affranchir de l’égalité entre les citoyens ? Tant que nous n’aurons pas clairement apporté de réponse à cette question et mis en lumière cette confusion sémantique, celle-ci continuera de profiter à certains, et à certains seulement pour justifier l’in équité de la société actuelle.
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