Billet invité.
La prochaine crise financière surviendra on ne sait où et on ne sait quand. C’est tout du moins l’idée communément admise, puisque sa réédition est considérée comme une fatalité contre laquelle rien ne peut être entrepris.
Non seulement cette vision n’est pas spécialement rassurante, mais elle relativise la portée d’une régulation financière qui – quoi que l’on puisse par ailleurs en penser – repose sur l’expérience acquise au cours d’une crise qui ne se renouvellera pas suivant le même modèle… C’est l’occasion pour Satyajit Das, ancien banquier et analyste financier reconnu, de décrire dans le Financial Times le scénario de la prochaine crise telle qu’il la prévoit. Avec comme prémices que ce sont les mesures même de régulation qui ont été adoptées qui vont paradoxalement en faire mûrir les conditions, dans des conditions plus difficiles que la précédente, car aux risques endogènes du système financier s’ajoutent désormais les risques exogènes de la crise économique qui en est la conséquence.
La dette souveraine en sera le moteur : destinée à renforcer les fonds propres des établissements financiers et à être davantage utilisée comme collatéral pour garantir les transactions, elle va parallèlement perdre son statut d’actif sans risque – ce qui est déjà entamé – et voir sa valeur chuter lorsque son taux montera en raison de la prime de rique réclamée par les prêteurs éventuels. Quel serait alors l’irrésistible enchaînement des faits ? La détérioration de la qualité des titres souverains détenus par les banques leur infligera des pertes. Également utilisés pour garantir des transactions, des appels de marge additionnels en résulteront, et cela affectera aussi le calcul de l’ajustement de la valeur de crédit (CVA) mesurant le risque de contrepartie, qui augmentera.
En retour, les banques devront couvrir ce risque accru, à moins qu’elles ne se délestent des titres souverains en leur possession. Ce qui ne manquera pas d’accroître les pertes, la valeur de ces titres continuant de chuter. L’enchaînement décrit pas à pas par Satyajit Das ne s’arrête pas là : fragilisées, les banques ne pourront plus bénéficier du soutien d’États qui le seront également, le risque de contrepartie en sortira encore renforcé, enclenchant une spirale descendante…
Il ne faut pas chercher davantage, dans ces conditions, pour comprendre le tabou qui entoure la dette souveraine et la nécessité de la rembourser. Avec comme conséquence, si les États n’y parviennent pas, de précipiter une nouvelle crise financière, après avoir créé une crise économique et sociale aiguë, dans l’incapacité de relancer la machine de l’endettement qui agissait comme pansement.
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