Billet invité. Ouvert aux commentaires.
Je souhaite réagir et apporter mon expérience suite au billet sur les accidents nucléaires et la façon dont on nous y prépare. Je suis médecin Anesthésiste Réanimateur et j’ai effectué mon service national en tant que médecin réanimateur dans un hôpital militaire. Un beau matin, j’apprends par le général commandant l’hôpital qu’il va y avoir un exercice de simulation d’accident nucléaire dans un grand centre de traitement de déchets nucléaires proche de l’hôpital. Et me voilà promu d’office responsable de la cellule de crise (j’avais en tout et pour tout eu 5 heures de cours sur ce sujet lors de mes classes).
Le service des urgences est entièrement recouvert de films plastiques blancs et nous revêtissons nos tenues de protections, comme on peut le voir dans les films catastrophes. Les premiers blessés arrivent et là, oh stupeur, tous les chariots de médicaments et d’appareils médicaux ont été mis derrière les films plastiques blancs et sont inaccessibles pour soigner les patients. Nous déchirons donc les films plastiques pour accéder au matériel, contaminant de la sorte tout ce qui devait rester non radioactif. La suite est tout aussi guignolesque puisque nous nous rendons rapidement compte que nos combinaisons intégrales nous empêchent de mettre le moindre stéthoscope dans nos oreilles afin d’écouter les poumons de nos patients irradiés.
Lorsque enfin les patients sont intubés et stabilisés, et que nous voulons leur instiller dans l’estomac les produits de décontamination, nous découvrons que c’est impossible car nous n’avons aucun soluté ni pilon pour fragmenter et diluer les comprimés afin de les injecter dans la sonde gastrique. Cet exercice m’a fait prendre conscience que si un accident nucléaire grave arrivait en France, l’armée n’est absolument pas préparée à y faire face et l’idée rassurante qu’elle pourrait maitriser et soigner les pauvres irradiés que nous serions devenus n’est qu’un mythe.
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