Billet invité.
C’est la rentrée, donnant l’occasion à l’OCDE de délivrer de sinistres prévisions, modifiant les précédentes datant de mai dernier. Montrant que même à court terme, elles ne tiennent pas longtemps la route ! L’accent est mis sur le risque d’une récession si rien n’est fait. Il en sort que l’Italie sera particulièrement touchée par le mal, son ratio dette/PIB appelé à dépasser 145% et sa dette à devenir insoutenable. Et que l’Allemagne voit sa croissance continuer à décliner. À contretemps des dernières décisions des autorités européennes, l’OCDE préconise d’ailleurs que la BCE s’engage de manière décidée dans l’assouplissement quantitatif et remarque que « la reprise mondiale a besoin d’une poursuite du soutien à la demande ». Comme le FMI, l’OCDE s’inquiète de l’euphorie qui règne sur les marchés financiers, « déconnectée » de l’économie réelle et exposée au risque d’une « correction brutale ».
Pour le monde financier aussi, c’est la rentrée ! En Europe, elle suscite de profonds soupirs de soulagement. Non seulement la montée d’un nouveau risque – le risque réglementaire – a pu être stoppée, mais les banques caressent l’espoir que les nouvelles autorités européennes vont assouplir plusieurs dangereux projets, au vu de la nomination aux postes clés de la Commission du Français Pierre Moscovici (dont les prouesses à propos de la séparation des activités des banques à la françaises demeurent dans toutes les mémoires) à l’économie, et du Britannique Jonathan Hill à la régulation financière.
La Taxe sur les transactions financières (TTF), contre laquelle tous les lobbies bancaires sont vent debout et réclament purement et simplement la suppression, réduit ses ambitions comme peau de chagrin et ne va conserver qu’une dimension symbolique, afin de satisfaire les dirigeants politiques. Les projets de séparation des activités bancaires sont pour leur part toujours aussi flous et semblent être condamnés à le rester… La banque universelle, chère notamment aux autorités françaises, peut respirer ! Les activités spéculatives pourront toujours s’appuyer sur le matelas des dépôts de la clientèle et les banques tirer une part importante de leurs profits de la facturation de leurs services.
Certes, l’Union bancaire permet aux dirigeants politiques de mettre en avant que non seulement les déposants seront protégés, mais que les contribuables le seront aussi, les actionnaires et les créanciers de la banque devant en premier lieu être mis à contribution en cas de malheur. Mais le sauvetage de la banque portugaise BES, en avant-première de sa mise en œuvre, augure mal du respect des promesses affichées : il a été procédé à une nationalisation de fait, et la suite des opérations (la vente de la good bank Novo Banco, qui s’annonce précipitée pour satisfaire aux desiderata des banques qui veulent éliminer un concurrent sur un marché encombré) n’augure rien de bon étant donné le flou qui l’entoure. Les comptes de l’addition finale risquent d’être masqués et brouillés, dans la grande tradition bancaire.
Pour les banques européennes, l’enjeu est a minima de cotiser au fonds de résolution de l’Union bancaire. Les gouvernements se chamaillent pour définir les clés de répartition par pays des cotisations, chacun défendant une méthode de calcul à son avantage et la Commission doit rendre public début octobre une proposition. On a vu le résultat au Portugal : l’État a dû avancer l’argent, les fonds étant insuffisants. Il faudra ensuite les récupérer…
Comme un bonheur n’arrive jamais seul, les financiers voient poindre le retour en grâce de la titrisation. Affichant qu’elle va permettre d’accroître leur soutien à la relance de l’économie, mais avec le projet de se financer à moindre coût auprès de la BCE tout en nettoyant les bilans bancaires. Pratiquant le jeu de la patate chaude, la BCE et les gouvernements allemand et français cherchent à se refiler un risque qu’aucun ne veut assumer. Le projet de programme massif de la BCE est dans les faits abandonné, redimensionné de facto à la baisse par les mêmes gouvernements et condamné à se réduire à peu. Il s’agit donc là d’un espoir un peu déçu !
Prix de consolation, un autre programme de la BCE va être lancé, sous la dénomination T-LTRO. En plusieurs vagues successives dont la première ce jeudi, son propos est de prêter à moyen terme des fonds aux banques en quantité illimité, afin d’accroître leur visibilité en matière de trésorerie et de diminuer la part de leurs financements à court terme. Toutes les banques européennes n’ont pas les mêmes besoins, mais celles qui continuent de traverser une phase particulièrement délicate, dans les pays périphériques, attendent la mise en œuvre de ce programme pour financer le remboursement des prêts du précédent, dénommé LTRO, qui viennent à échéance et ainsi vont pouvoir rouler leur dette. Le mécanisme destiné à les contraindre au crédit en contrepartie de leurs emprunts à la BCE va avoir peu d’effet estime l’agence Fitch, conduisant une partie d’entre elles à remplacer leurs prêts douteux par de nouveaux, à volume constant au mieux. Les autres bénéficieront de deux ans de crédit à très bas coût pendant deux ans, avant de devoir le rembourser avant qu’il vienne à maturité. En fait de relance du crédit, le T-LTRO va maintenir toutes ces banques à flot.
Le risque réglementaire est bien le seul risque que les banques parviennent à maitriser, dans une situation ou enfle celui de pénalités financières qui n’arrêtent pas de tomber, infligées par les régulateurs américains.
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