Billet invité.
Le dernier sondage IFOP qui place Marine le Pen en tête du premier tour de la présidentielle en 2017 est juste une confirmation d’un scénario largement prévisible.
En avril 2013, j’écrivais dans un billet :
Avec un taux d’abstention élevé, porté par un rejet de la politique grandissant (et l’on ne peut que se désespérer de la conduite des partis de pouvoir actuels), un parti qui réalise entre 20 et 25% des voix peut très bien se retrouver au second tour si sa capacité de mobilisation est plus forte que celle des partis « concurrents.
D’ores et déjà, les conditions qui avaient permis l’arrivée au second tour de Jean-Marie Le Pen me semblent largement remplies ».
Au lendemain des élections municipales, dans un autre billet :
Marine le Pen a gagné la première bataille. Si elle double la mise aux élections européennes (la mère des batailles) en mai prochain, la messe sera dite. Sauf accident de l’histoire, il faut se préparer à voir ce qui semblait inconcevable pour beaucoup, l’arrivée d’un président d’extrême droite en France en 2017.
Enfin, au soir des européennes, je ne pouvais que confirmer le scénario :
C’est fait. Le FN a viré en tête aux élections européennes… Si le premier tour des élections présidentielles de 2017 devait confirmer le résultat d’aujourd’hui, MLP serait présente au deuxième tour… Les partis nous expliqueront que rien n’est joué d’avance, qu’avec un tel taux d’abstentions, tout est encore possible, que les circonstances ne sont pas les mêmes, que la personnalisation des élections présidentielles peut conduire à des résultats totalement différents… Ils se trompent.
On est arrivé à un stade où tout profite à MLP. Les luttes internes féroces qui se livrent au sein des partis pour être le candidat et dont le spectacle pourrait être risible s’il n’était pas pathétique. Le détricotage social qui continue en parallèle sans que la politique économique et sociale ne s’infléchisse, situation qui ne peut que renforcer la rancœur de la population, l’un des fonds de commerce du FN. Enfin, le spectacle offert par un islamisme qui se radicalise et apparaît au grand jour lors de manifestation de soutien à la cause palestinienne ne peut que nourrir les peurs collectives qui sont l’autre carburant du vote FN. Bref, MLP est dans une position extrêmement confortable, où finalement la répétition du discours mezza-voce suffit à progresser dans les sondages.
Ce contexte est déjà en place depuis fort longtemps et il n’y a aucune raison qu’il change. Je recommande aux partis politiques qui comptent sur une évolution radicale, un voyage à Lourdes : seul un miracle est en mesure de répondre à leurs attentes. Quant à l’UMP qui compte hypocritement sur la discipline républicaine (qu’il n’a pas appliqué aux municipales), la désillusion risque d’être lourde. Le taux d’abstention risque d’être la sanction finale qui conduira MLP au pouvoir.
Reste que ce sondage contient quand même quelques enseignements. En premier lieu, la messe est dite pour le PS. La conversion entreprise il y a des années du PS en un parti crypto-libéral qui favorise l’économie à tout prix au nom de la défense de l’emploi est un triple échec : échec économique parce que le libéralisme est la source même du problème qu’il entendait combattre, échec électoral, parce que le PS a peu à peu perdu ses électeurs de gauche sans pour autant convaincre les électeurs de droite, échec enfin parce qu’il a perdu toute crédibilité sur le discours social qui est maintenant occupé par d’autres. Une conclusion s’impose : S’il reste des personnalités au PS qui ont encore la fibre sociale et qui souhaitent reconquérir l’opinion, la création d’un nouveau parti s’impose.
L’échec de Mélenchon qui plafonne désespérément à 10% des intentions de vote alors qu’un boulevard est ouvert devant lui est un autre sujet de désespérance… Un égo démesuré, des fautes politiques à répétition et un discours politique inaudible disqualifient JLM qui devrait laisser la main au sein de son propre parti s’il veut vraiment le voir progresser.
Enfin, bien que ce soit plus anecdotique, il semblerait que le choix du candidat soit déjà fait à l’UMP. Une seule hypothèse a été testée par l’IFOP : celle de la candidature de Nicolas Sarkozy, il serait peut être bon d’aviser les Alain Juppé, François Fillon et consorts que la messe est dite et que les primaires ne servent à rien.
Le rejet dans certains sondages de la personnalité de MLP entretient l’illusion chez certains que sa victoire est impossible. Pour que l’analyse soit complète, il faudrait pourtant mettre en parallèle ce rejet avec celui des politiques menées par le PS et l’UMP. En l’état, ces multiples rejets sont le moteur d’une abstention qui pourrait bien conduire à une possible victoire de MLP. En attendant, le spectacle continue suivant le scénario annoncé.
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