J’ai travaillé à une époque dans le secteur du prêt automobile d’occasion subprime américain. Je ne dis pas n’importe quoi pour me rendre intéressant, voyez vous-même : l’Internet a une mémoire d’éléphant. C’était l’époque où un CV devenu de haute crédibilité dans le secteur bancaire américain m’ouvrait les portes des grandes banques bien entendu, mais aussi de toutes les officines où j’avais envie d’aller fouiner. Comment finance-t-on un plan-retraite de plusieurs millions de dollars par an ? comment finance-t-on un parachute doré ? Vous aimeriez le savoir ? eh bien moi aussi je voulais le savoir et le fait est que maintenant, je le sais !
Bon, je n’ai pas nécessairement travaillé dix ans dans chacune de ces boîtes : dans certaines j’ai su ce que je voulais savoir assez rapidement, dans certaines autres, mon côté fouineur a indisposé avant que je ne sache tout ce que je voulais savoir… et c’était peut-être mieux ainsi : le secteur du prêt automobile d’occasion subprime est lié au trafic d’armes, je peux vous en apporter la preuve !
Quoi qu’il en soit, a paru il y a quelques jours dans le New York Times, un article très intéressant à ce sujet : In a Subprime Bubble for Used Cars, Borrowers Pay Sky-High Rates, par Jessica Silver-Greenberg et Michael Corkery. Si vous lisez l’anglais vous y découvrirez – si votre opinion n’est pas déjà faite sur notre système économique qui a « sorti des milliards de personnes de la misère » (sic) – que les mensualités exigées sur un prêt automobile d’occasion subprime américain n’ont aucun rapport avec le prix de la voiture mais a été calculé sur une autre base : que l’emprunteur ne crève pas la gueule ouverte dans les minutes qui suivent la signature du contrat mais… tout juste !
L’article explique que la filière est aussi pourrie que celle du prêt subprime immobilier, ce qui était déjà le cas (croyez-moi !) en 2004-2005, époque de mon passage dans le secteur, et que les régulateurs sont soucieux. Comme vous le savez sans doute – ou comme vous vous en doutez – les lois ont le plus souvent été écrites ou – dans le pire des cas détricotées – de telle manière que le régulateur n’ait pas beaucoup plus de latitude que d’être « soucieux ». L’article explique aussi que quand on remonte la filière pour découvrir qui est responsable de la fraude massive et autres coups tordus, il est impossible de remonter jusqu’au vendeur du tacot. Pourquoi ? Et là je cite :
Grâce à un amendement de la loi Dodd-Frank de réforme du secteur financier, la grande majorité des revendeurs automobiles, ne sont pas sous la juridiction du Consumer Financial Protection Bureau.
Vous savez qui écrit ces amendements qui mettent les fraudeurs à l’abri des poursuites, et qui, dans un cas comme celui-ci, permet à toute une filière d’être vérolée sans qu’on ne puisse rien y faire ? Ce sont des juristes qui sont payés pour rédiger les amendements et qui, parce qu’ils sont payés pour le faire, le font !
Vous vous demandez toujours d’où vient ce « message d’outre-tombe » que j’annonce en titre ? Eh bien le voici : mon père était juriste mais figurez-vous qu’il n’était pas un juriste de cette eau là, et ceux qui ont rédigé l’amendement à la loi Dodd-Frank qui permet au prêt automobile d’occasion subprime américain de détruire des millions de vies – y compris un jour ou l’autre celle des retraités américains dont la caisse de pension a investi dans des titres adossés à ces mêmes prêts accordés à des emprunteurs en faillite personnelle (parce que ceux-ci ne pourront pas se re-déclarer en faillite avant huit ans) -, eh bien, il leur aurait craché à la gueule !
Puisqu’on parle ici des futures circonstances d’une vengeance … L’occasion de mettre en valeur cette longue considération de l’illustre Naomi…