Le système monétaire idéal de John Maynard Keynes (I) Les monnaies individuelles et les rapports entre elles

Les monnaies ne sont sans doute pas nées indépendamment les unes des autres : certaines nations ont dû copier ce qui se faisait chez l’une de leurs voisines dont la monnaie s’était mise à circuler chez elles, facilitant le négoce local. L’invention a dû leur paraître excellente et mériter d’être reprise. Quoi qu’il en soit, au bout d’un moment chacune de ces nations disposa de sa propre devise, constituant chacune un système monétaire autonome.

Comme aucune de ces nations émettrices de monnaie ne vivait en autarcie, un modus vivendi a dû être trouvé partout où elles interagissaient dans le commerce qui s’établissait entre elles, autrement dit quand des citoyens de deux de ces nations s’achetaient et se vendaient des biens, l’acheteur réglant dans sa propre monnaie ou devant préalablement échanger sa propre monnaie pour l’autre, auprès d’un changeur. La question de la parité de ces deux devises se posait alors.

Si la parité entre deux monnaies est flottante, c’est le rapport de force implicite ici et maintenant entre les économies des deux pays qui en sont garants qui détermine le taux de change entre ces deux monnaies.

Si la circulation des capitaux est libre entre deux pays, le taux de change de leur monnaie respective sera essentiellement déterminé par les taux d’intérêt qui ont cours sur leur marché domestique : des taux plus élevés pour l’éventail des maturités dans l’un des deux pays attireront les capitaux originaires de l’autre où ils sont moins élevés. De vastes sommes seront alors traduites d’une devise dans l’autre et prêtées en échange d’une promesse de remboursement assortie de versements d’intérêts ; dans le jargon financier, cette stratégie a pour nom « carry trade ».

Lorsque la parité entre deux devises est fixe, les fluctuations du rapport de force entre les deux nations émettrices débouchera le cas échéant sur une appréciation ou une dépréciation des prix exprimés dans l’autre devise à ce point marquée qu’une redéfinition du taux de change deviendra impérative, forçant à la dévaluation de l’une des deux monnaies dans les termes de l’autre, et à une réévaluation relative de l’autre.

Les systèmes monétaires étant nés sinon indépendamment les uns des autres, du moins chacun d’entre eux acquérant une vie autonome, sans souci particulier pour les nations émettrices de monnaie d’une organisation monétaire qui couvre tous ces systèmes conjointement sur le plan international, c’est pragmatiquement qu’il a fallu découvrir les conditions de fonctionnement optimales d’un système qui puisse englober l’ensemble des systèmes monétaires sur la base d’opérations de change entre toutes les paires imaginables de ces nations prises deux par deux.

La mise en place d’un système monétaire global se fit en 1944 quand, à l’initiative des États-Unis et de la Grande-Bretagne, les Alliés s’accordèrent pour instaurer un ordre monétaire international. C’était l’aboutissement des accords de Bretton Woods, une retraite sauvage au fond des bois du New Hampshire. Après une histoire chaotique de vingt-sept ans, les accords de 1944 furent dénoncés en 1971 par Richard Nixon, alors président des États-Unis. Aucun ordre monétaire international n’a remplacé depuis celui qui était né à Bretton Woods.

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  1. Mes yeux étaient las, bien plus que là, juste après l’apostrophe : la catastrophe.

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