Billet invité.
Une constance s’affirme dans toute l’Europe : on ne change pas une politique qui perd ! À la suite d’un second tour électoral aussi désastreux que le premier, ceux qui viennent d’être désavoués en France en tirent comme conclusion qu’il faut « maintenir le cap ». En Espagne, au Portugal et en Grèce, les manifestations massives qui se succèdent mois après mois n’aboutissent pas à un autre résultat. Et, quand des élections s’annoncent dans d’autres pays, les partis de gouvernement qui ont bon espoir de revenir au pouvoir – parce ce que ceux qui sont en place sont rejetés – n’annoncent aucun changement de cap. Ils n’ont tous comme politique que de surfer sur le découragement et la résignation en le favorisant.
Au Portugal, où le débat sur la restructuration de la dette va être débattu au Parlement à la suite de la signature d’une pétition qui l’impose – le parti socialiste qui s’était gardé d’en soutenir la perspective affiche comme principal slogan « Mudança » (changement), promesse qui laisse grand ouvert son champ de manœuvre lorsqu’il accédera au pouvoir l’année prochaine, seul ou coalisé avec le parti actuellement au pouvoir. Le scénario n’est pas différent en Espagne, où le social-libéralisme a comme partout pris le pas sur la social-démocratie. En Grèce, la Troïka a pour mission de permettre à Nouvelle Démocratie de rester le premier parti en devançant Syriza, et le FMI va rattraper ses paiements en retard, afin que la droite garde l’initiative face à ce trublion.
Les électeurs français ont tort, si l’on écoute nos édiles, lorsqu’ils se manifestent par l’abstention ou par un vote à l’extrême-droite qu’ils croient être celui du rejet. La politique qui a été désavouée a seulement été « mal expliquée » en concluent avec la plus grande mauvaise foi ceux qui ne veulent pas en changer et enterrent leur passé socialiste, concédant tout juste un zeste à venir de « justice sociale ». Ils n’ont que ce qu’ils méritent, mais ils nous entraînent avec eux au fond du trou.
Il est coutume d’utiliser l’expression « traversée du désert » pour signifier les moments de disgrâce des professionnels de la politique. Les rôles sont désormais inversés, ce sont les électeurs qui sont condamnés à y errer, faute que leur vote – ou leur abstention – soit pris en considération. Vidée de son contenu par ceux qui s’en revendiquent, la démocratie représentative est devenue formelle, son exercice détourné pour en faire une rente de situation, l’habillage d’un pouvoir n’ayant comme objectif que le maintien d’une autre rente, la vraie, la seule qui compte.
Seul petit problème rencontré dans la réalisation de ce plan : à l’image de son système financier, la viabilité de la société déséquilibrée qu’il engendre n’est pas démontrée.
Imbus de leurs certitudes ils ont fait le pari de démontrer la validité de leurs présupposés. Voyons ce qu’en dit…