Billet invité
Européens et américains, les diplomates occidentaux se pressent à Kiev, tandis que les dirigeants russes observent le petit effet de leurs déclarations d’hier, et que Vladimir Poutine reste silencieux une fois passés quelques coups de téléphone entre grands de ce monde. L’incertitude sur les intentions russes est pour le moment leur meilleur arme, et leur permet de pousser leur avantage : le ministre russe des affaires étrangères, Sergueï Lavrov, vient de se déclarer opposé à une élection présidentielle dès le 25 mai prochain…
La tâche du jour est de constituer un gouvernement provisoire, que les Américains ont qualifié de « technique » pour ne pas effaroucher Moscou, mais l’essentiel n’est pas là. L’Institute of International Finance (IIF) – ce lobby des grandes banques mondiales que l’on voit réapparaître à chaque fois qu’une crise se présente, et qui fait désormais autorité – a hier sonné l’alarme : il reste peu de temps pour prévenir la panique financière qui résulterait d’un effondrement de l’Ukraine, prévu dans les semaines qui viennent, car « les caisses de l’État sont vides ». Les réserves du pays sont selon l’IIF de 12 milliards de dollars, et il doit cette année débourser 25 milliards de dollars pour rembourser ses créanciers. Pour payer les dépenses courantes, dont les salaires des fonctionnaires et les retraites, il ne va vite rester comme solution que la planche à billets, avec comme conséquence la montée de l’inflation et la dépréciation de la monnaie ukrainienne.
Voilà qui éclaire la venue à Kiev aujourd’hui d’un haut représentant du Trésor américain dans les bagages de William Burns, le n°2 du Département d’État, dont la mission est de tracer les contours d’une aide sous conditions du FMI. L’IIF annonce à cet égard « des réformes très douloureuses », en contrepartie d’un prêt qui pourrait atteindre 20 milliards de dollars, dont 5 milliards devraient être alloués à consolider les banques. Un tel montant ne laissera qu’une partie du fardeau aux Russes, qui sortiront financièrement soulagés de l’affaire alors que leur situation économique se dégrade. Et les Ukrainiens devront rembourser les prêts accordés après s’être fait spolier par leurs oligarques, qui ont pour le moment décampé.
La géopolitique à l’œuvre, il restera à trouver la solution politique qui laissera l’Ukraine dans la zone d’influence russe. Cette condition-là du soutien financier du FMI figurera-t-elle dans des clauses secrètes ?
C’est la formule : un entretien qui a duré, si je me souviens bien, 1 ½ h, découpé en « capsules »…