Billet invité.
Le club restreint des traders sur le marché monétaire est bien sombre, après avoir déjà vu le nombre de ses membres diminuer en raison de l’essor des transactions électroniques. Ne pouvant en faire autant avec les ordinateurs et les algorithmes, plus de dix d’entre eux ont été suspendus par leurs banques respectives, dans le contexte de l’enquête qui se poursuit à propos de nouvelles manipulations présumées. Cela commence toujours comme cela. La liste des banques susceptibles d’avoir mis la main dans le pot à confiture s’allonge, JP Morgan Chase et Citi venant de rejoindre la Deutsche, UBS, Crédit Suisse, Barclays et RBS. C’est à qui ne figurera pas à ce palmarès d’un nouveau genre, après y avoir été déjà inscrit à propos des manipulations du Libor.
Les enquêteurs s’intéressent plus particulièrement aux échanges enregistrés sur un chat électronique dont les noms utilisés pour le dénommer sont tous évocateurs : « The Cartel », « The Dream Team », « The Bandits’ Club » ; cela la fout mal, même en faisant la part de la plaisanterie pratiquée dans ce petit milieu où tout le monde se connait. Ils cherchent les propos qui mettraient en évidence une collusion entre les traders afin de faire grimper les marchés à leur profit, à l’occasion des vacations de fixing qui permettent de calculer les cours d’équilibre des monnaies afin d’évaluer les portefeuilles. Aux États-Unis, le FBI a de son côté ouvert une enquête criminelle.
Un deuxième scandale majeur affectant peu ou prou les mêmes banques, il y aura de quoi s’interroger si les soupçons actuels s’avèrent justifiés. Les manipulations seraient-elles l’exception ou bien la règle au sein des mégabanques ? Dans le cas du Libor comme maintenant dans celui du Forex, un petit nombre de traders ont la capacité de manipuler au profit de leurs mandants un indice qui fait mondialement référence pour d’innombrables contrats et un marché où s’échangent des montants colossaux. Les procédures d’auto-régulation sont elles admissibles qui permettent de telles escroqueries ? Quand on observe l’opiniâtreté avec laquelle le milieu financier a tenté de les préserver dans le cas du Libor – rien n’est définitivement réglé, mais il est acquis que Londres conservera la mainmise – on ne s’interroge plus. Les transactions du marché interbancaire, dont les taux exigés permettent d’établir le Libor – sont de gré à gré, sans enregistrement, et tout repose sur du déclaratif…
Quant au scandale du Libor, le rideau s’ouvre sur le deuxième acte. Après Freddie Mac, Fannie Mae (l’autre organisme de refinancement des crédits immobiliers américains renfloué par l’État) vient d’engager des poursuites judiciaires contre neuf banques et l’association des banques britanniques (BBA) qui était chargée de déterminer quotidiennement la valeur du Libor. L’objectif est d’être remboursé des pertes occasionnées par les manipulations du Libor, qui sont dans le cas de Fannie Mae estimées à 800 millions de dollars, et de recevoir des dommages et intérêts.
Beau projet pour une « start-up » ! Elon Musk n’aurait pas 8 millions d »€ pour éliminer un concurrent encore plus radical…