Quand il s’agit de comprendre pourquoi nous sommes si mal dirigés, les explications ne manquent pas. « Aucun d’eux n’est capable de faire preuve de courage », fera remarquer quelqu’un, ce qui, à défaut d’une explication complète, est manifestement le cas. La lettre d’allégeance de Christine Lagarde à Nicolas Sarkozy, rendue publique hier, apporte cependant un nouvel éclairage.
Lorsqu’on découvre à la lecture un document de cette nature, on ne peut s’empêcher de passer rapidement : il n’y a qu’un nom pour le sentiment qu’on éprouve, il s’appelle la honte et il n’est pas du genre dont on aime se délecter. Une hypothèse fait cependant peu à peu son chemin : nos dirigeants ne seraient-ils pas tous désormais comme cela ? Le vide au sommet ne s’explique-t-il pas par le fait que l’on n’y trouve plus que des courtisans, chacun prisonnier de sa vaine quête d’un maître à qui prêter allégeance ?
Quand, dans un royaume, chacun se met à passer en revue en son for intérieur les vertus éventuelles de la république, la royauté est en danger. De même sans doute quand chacun dans une république en vient à se demander si la royauté ne présentait pas quelque avantage, et en particulier qu’il y avait là en tout cas quelqu’un en charge des affaires.
Bien sûr, le caractère aléatoire de l’arrangement des gènes à chaque génération faisait que la qualité du souverain ne pouvait être garantie, et il fallait se satisfaire alors que ses sautes d’humeur soient, sinon « régaliennes », tout au moins « princières », c’est-à-dire que, même dans ses inconduites, le souverain continue de se situer au niveau de la cause commune, plutôt qu’à celui de la sienne propre uniquement, comme il en va quand il s’agit d’un courtisan.
La servitude volontaire est épargnée au dirigeant du fait même de la position qu’il occupe, mais s’il se retrouve en position de diriger alors que sa nature profonde est celle du courtisan, il ne s’identifiera jamais à la cause commune et continuera à rêver d’un maître aux pieds de qui se prosterner (« Si tu m’utilises, j’ai besoin de toi comme guide, etc. »), Dieu nous préserve qu’il décide de se tourner alors en désespoir de cause vers les quelques personnages qu’il nous reste qui « ne s’autorisent que d’eux-mêmes », tels Vladimir Poutine ou Bachar el-Assad !
La république est de loin préférable à la royauté, protégée qu’elle est contre le hasard facétieux des recombinaisons d’ADN, mais comment empêcher que ne se retrouvent au sommet, comme aujourd’hui, uniquement des courtisans orphelins d’un maître ?
En fait, les hommes et les femmes identifiés au bien commun ne manquent pas. Voyez par exemple Warren Buffett, le milliardaire d’Omaha (Nebraska), attirant l’attention du peuple américain – tout occupé à des choses plus urgentes – sur le fait qu’il paie moins d’impôts que sa secrétaire, ou déclarant, espérant provoquer ainsi un sursaut, que la lutte des classes existe aux États-Unis, que ce sont les riches comme lui qui la mènent, et qu’ils l’ont sans doute d’ores et déjà gagnée. Voyez aussi « Nous sommes les 1% », dont Le Monde a publié hier l’appel, et qui affirment : « Nous préférerions que le tissu législatif nous incite à des activités à plus forte valeur ajoutée pour le bien commun, et que l’enrichissement individuel ne puisse se réaliser sans enrichissement collectif ».
Je n’entends pas suggérer par l’exemple de Buffett et de « Nous sommes les 1% », que les meilleurs candidats à l’attitude « princière » d’identification à la cause commune et au bien général ne se découvrent que parmi les riches : il en existe bien certainement aussi parmi les pauvres. C’est seulement qu’on voit beaucoup moins ceux-ci à la télé. Sauf bien entendu quand l’un d’entre eux, attribuant à tort au simple caprice d’un courtisan, un projet authentiquement d’intérêt général, voit sa yourte accidentellement écrasée par un bulldozer.
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