Billet invité
La situation n’est pas à un paradoxe près. Les Chypriotes ont manifesté leur joie devant le refus du parlement d’avaliser le plan de sauvetage qui leur était imposé, rappelant comment Georges Papandréou avait au dernier moment proposé un référendum en Grèce, qui avait précipité sa chute (il ne fait pas bon défier les dirigeants européens). Ils viennent à la fois de manifester leur patriotisme, ferment d’une ancienne bataille menée sous le drapeau de l’Énosis (l’union avec la Grèce), et de défendre les fortunes russes et leur argent sale, source de leur prospérité. L’État russe a quant à lui naturellement soutenu la finance de l’ombre qu’il a suscité et avec laquelle il compose, mettant en évidence que ces deux mondes ne font qu’un, et pas seulement en Russie ! Les paradis fiscaux, quant à eux, n’ont pas nécessairement pour sièges de lointaines contrées aux noms exotiques.
Le second paradoxe est que les Chypriotes sont riches en puissance de l’exploitation du gigantesque gisement de gaz naturel découvert dans leurs eaux territoriales. Les Russes l’ont bien compris, ce qui n’a pas été le cas des négociateurs de la Troïka qui se sont pris tout seuls les pieds dans le tapis. Les dirigeants européens attendent désormais une « contre-proposition » du gouvernement chypriote – du jamais vu – et campent sur leur nouvelle position : pas de prêt supérieur à 10 milliards d’euros, mais pas de taxe pour les dépôts en dessous de 100.000 euros (ce qui implique de plus lourdement taxer les autres). Ils se donnent désormais le beau rôle mais offrent au gouvernement russe une opportunité de monnayer au meilleur prix un accès au gaz chypriote.
De combien de temps les protagonistes disposent-ils ? Il est question de fusionner les deux grandes banques pour réduire l’enveloppe des besoins financiers ou de puiser dans les fonds de pension des institutions publiques et semi-publiques. L’Église orthodoxe chypriote pourrait même également intervenir… Une réunion d’experts financiers des partis politiques a eu lieu à la banque centrale, sans que l’on en connaisse le résultat. Car il n’est en tout cas pas question à Nicosie de taxer davantage les riches déposants russes, ukrainiens et hongrois (la liste s’est entre-temps allongée).
Qui a le plus à perdre ou à gagner dans la confrontation qui est engagée, de la zone euro et de la Russie ? L’effondrement de Chypre et de son système bancaire, au cas où aucun compromis ne serait trouvé, est-il véritablement une option ? La résistance des Chypriotes est inédite, non seulement en raison de la forme qu’elle emprunte mais également de sa portée : ils ont à leur manière refusé le destin réservé à leurs cousins grecs. Après l’Italie, les refus se succèdent en Europe. Angela Merkel vient de déclarer « il est de notre devoir de trouver une solution ensemble »…
Interrogé à l’occasion de la tenue d’une conférence à Hong Kong, Jean-Claude Trichet a eu les mots qui conviennent en faisant référence aux sacrifices demandés au secteur privé dans le cadre d’un plan national : « nous devons être extrêmement méfiants et prudents ».
Réponse de o1 , et en attendant le réponse de o3 Je comprends que vous soyez curieux de savoir comment…