Billet invité
C’est officiel : les politiques d’austérité prônées par la Troïka en direction des pays de l’Union européenne et tout particulièrement de la zone euro sont tout simplement du bluff, du vent, de l’esbrouffe. Car la BCE avait menacé Chypre de lui couper l’ELA (Emergency Liquidity Assistance), les liquidités financières dont le pays avait besoin et que sa Banque centrale versait avec l’autorisation du Système des Banques Centrales Européen (SBCE), si l’accord défini n’était pas adopté.
Comme Chypre ne signe pas cet accord (du moins en l’état), la BCE annonce, comme si de rien n’était, qu’elle continuera à fournir les liquidités autant que nécessaire. Signe des temps, les marchés boursiers, qui clôturaient hier en baisse à cause de Chypre, ont ouvert ce matin à la hausse, sachant que la BCE continuera justement à fournir ses précieuses liquidités. Parce que si cela n’était pas le cas, Chypre ferait immédiatement défaut sur sa dette souveraine, tout en pouvant par ailleurs rester et dans l’UE et dans la zone euro, sans que ni la BCE, ni la Commission européenne ni même le Conseil n’aient la possibilité d’exiger une sortie du pays de la zone euro ou de l’UE.
La BCE le savait, le FMI aussi, l’Allemagne également. Cette triple alliance, qui oriente les politiques européennes depuis plusieurs années en lui imprimant une politique ordo-libérale, a joué une partie risquée de poker. Mais elle vient de la perdre et ce quelle que soit la suite du jeu engagé. Car ce jeu est fondé sur le bluff.
Les joueurs ne peuvent pas savoir ce que chacun a comme cartes en main. Ce qui permet à chacun de pouvoir prétendre à mener, et parfois gagner, une partie, sans parfois même que jamais les autres partenaires ne sachent ce qu’étaient réellement le jeu en la possession du meneur. Du moins tant qu’un joueur ne paye pas le prix du risque pour demander à voir les cartes. Ce qu’a fait Chypre. Au poker, connaître la stratégie d’un joueur est l’enjeu central car cela donne tout simplement l’avantage à ceux qui réussiront à la déchiffrer.
La Troïka a tout simplement oublié avec qui elle jouait cette partie de poker. Elle a tout simplement oublié qu’à la table de jeu était aussi assis un autre joueur, en retrait, autrement plus redoutable et ayant les moyens de ses ambitions : la Russie. Au poker, ce type d’oubli est une faute majeure.
Aujourd’hui, nous savons, grâce au refus de quelques 56 députés chypriotes, que le jeu en main de cette Troïka ne vaut pas tripette. Aujourd’hui, l’Irlande, la Grèce, le Portugal et l’Espagne savent qu’eux aussi auraient pu refuser de jouer à ce jeu. Aujourd’hui, les Européens savent que la Troïka n’avait pas les cartes qu’elle disait posséder.
Il est temps de dénoncer ce bluff. Il est temps de quitter cette partie de poker menteur. Et de renverser la table.
Ps : l’Histoire, qui n’est pas avare d’ironie, retiendra que c’est une alliance objective entre des députés communistes et socialistes chypriotes d’une part, et une Russie capitaliste post-communiste d’autre part, qui aura imposé au pouvoir chypriote nouvellement élu, sur la base justement des oukases de la Troïka, de jouer cartes sur table. Un nouveau pouvoir élu correspondant au souhait de cette Troïka, comme en Irlande, en Grèce, en Espagne et au Portugal. Les électeurs doivent aussi maintenant savoir qu’élire ce type de « nouveaux dirigeants » fait partie du bluff. À eux de décider
@Khanard et Pascal Pour moi, Marianne reste un média de gauche ou de centre gauche, heureusement, il n’est pas encore…