Billet invité.
Nous vivons quelque chose « d’historique » (mais tout ne l’est-il pas, finalement, pour l’orgueilleux Occident ?) Tout s’effondre – et tous ici, qui sommes à lire ce blog, à débattre de cette Grande Perdition, nous ne pouvons – nous le croyons – que regarder, que constater cet effondrement, comme Néron regardant l’Empire brûler (Rome avait-elle tant d’importance que cela ?). Nous voyons donc tout s’effriter, se désagréger, s’effondrer… C’est le Spectacle. In Girum Imus Nocte et Consumimur Igni. Notre communauté de lecteurs du blog de M. Jorion observe, regarde, spécule, brasse l’air finalement au sujet de quelque chose qui s’effondre sous ses yeux (l’Impermanence finalement) sur lequel il n’a pas de pouvoir… Voilà notre plus grande activité, ici du moins et de la manière synthétique que je suis en capacité de concevoir. Pourtant, M. Jorion (et M. Leclerc) s’avère être un hétérodoxe en mesure de nous inspirer à aller plus loin. Mais nous continuons de gloser alors que M. Jorion attend que l’on franchisse le pas fatidique.
Quand j’étais petit, je rêvais de faire de nombreuses choses (cela n’a fait depuis qu’augmenter, en réalité). Adolescent, je fis quelque chose qui me plaisait : des études qui coûtaient de l’argent à une famille pauvre (quel luxe !) soit des études d’arts appliqués, puis continuant sur ma lancée rêveuse, des études d’arts plastiques, rêvant d’obtenir le diplôme, le concours, le sésame afin d’enseigner les arts… Quelle chance ai-je eu !! Mais la cruauté de la réalité, à laquelle je suis sans cesse confronté m’a rapidement rappelé qu’il me fallait payé mes factures, car je n’ai pas gagné le sésame tant espéré.
Le sort en a ainsi fait autrement : me voilà m’occupant depuis plusieurs années de délinquants et criminels derrière les barreaux, afin qu’ils ne perdent pas totalement pied avec la société (non pas avec la réalité cruelle qu’ils connaissent souvent mieux que les lecteurs du blog qui connaissent confort et stabilité en général), tout en leur donnant l’espoir qu’ils peuvent, en sortant, reprendre petit à petit le pouvoir sur leur vie déliquescente. Ces personnes détenues (parmi lesquelles : des médecins, des avocats, des chefs d’entreprises, etc. – pas de banquiers et politiques bizarrement) sont le plus souvent, déjà brisées avant d’arriver. Chômage, précarité, isolement, vivant à la rue (ou repassant par les horribles centres de rétention), polytoxicomanes, délinquants, voilà en gros le profil-type. « La crise », ils ne font que la subir de loin quelque part : car leurs problèmes personnels, dérisoires pour nous qui sommes dans le confort, sont immenses pour eux.
À l’autre bout de la chaîne humaine, très très loin d’eux : les technocrates, nationaux, euro-technocrates et internationaux ; les banquiers ; les industriels ; tous ces gens qui décident de leurs vies. Dont les problèmes ne sont pas ceux du peuple (et encore moins ceux des personnes détenues) mais ceux de leur caste, à savoir : comment les peuples vont-ils rembourser l’ardoise qu’ils ont fait écrire ? Comment les nations (cela existe-t-il encore ?) vont-elles nationaliser les pertes privées… pour leur profit ? Comment faire comprendre aux peuples que cela est dans leur intérêt de sauver, de renflouer, de redonner vie aux banques-zombies ? Comment rester crédibles et responsables ou donner cette apparence d’être crédibles tout en niant la réalité et se montrant irresponsables ?
Sans parler même de cet autre cauchemar : Fukushima !!! On peut dire aisément que la crise de l’euro (financière, monétaire, bancaire, etc.) est « un Fukushima en soi ». Les retombées politiques, sociales, économiques, professionnelles de « la crise » sont d’une certaine façon, identiques aux maux que les radiations invisibles de Fukushima produisent sur nous et produiront sur nos enfants (en réalité, sur tout le monde)… Fukushima impacte nos vies physiques. Les crises politico-financières impactent nos vies socio-professionnelles.
Je suis désormais adulte, et avec un emploi stable, et gagnant raisonnablement ma vie (juste assez pour nous faire vivre) mais, surtout, depuis que je suis père, ma vision de l’existence a radicalement changé . Ma conscience de la responsabilité envers autrui, de père comme de citoyen a considérablement crû. Pour ma femme, handicapée, et mon unique enfant, j’ai la responsabilité de tout faire pour leur assurer le meilleur présent et futur. J’ai conscience que je ne suis pas le seul dans le bateau : nous y sommes tous. Car regarder faire, c’est être complice, je vous en assure. Einstein en savait long sur le sujet. C’est vrai. Voilà mon cas de conscience, qui me hante chaque jour depuis que j’ai appris que j’allais devenir père. Voilà MA responsabilité. Les « Responsables » par contre, les « Autorités » n’ont semble-t-il pas cette conscience-là. En tous cas, voilà mon fardeau. Et le sujet de ce billet. Pourquoi ?
Quand j’étais ado, j’ai participé à la misère de mes parents ouvriers longtemps au chômage, qui n’étaient pas des gens intellectuellement élevés, qui n’avaient rien réussi dans leur vie (sauf la plus grande chose : l’éducation ; je remplissais toutes les conditions pour développer ensuite… une délinquance !). Car j’ai vécu 20 ans il faut le dire, dans un taudis, sans eau chaude, ni salle de bain, avec WC hors du logement, murs en torchis, etc. Et de faibles revenus avec un compte toujours dans le rouge. Dans la France récente, certains s’accommodent de telles conditions de survie. Pour moi qui côtoyait des camarades de classe qui ne connaissaient que l’inverse (la norme), nous étions une exception dont tout le monde avait honte. J’en avais honte, et ma sœur a développé la même névrose. Nous étions une exception, à ce temps T et en ce lieu L. Mon adolescence fut ainsi une période extrêmement douloureuse dans mon existence. Mais celle-ci, que nous vivons depuis plusieurs années, et surtout depuis 2 ans que je suis père, en est une nouvelle.
Car j’en ai voulu, terriblement, à mes parents, d’avoir connu tant d’humiliations, de honte, etc. Tant de mes camarades vivaient dans le confort et la dignité, et « consommaient » aisément. Moi, je connaissais bien Secours Populaire et Catholique, Restos du cœur, CCAS… Heureusement, jusqu’ici ma fille n’a jamais connu cela – ni ma sœur et ses enfants.
Ce billet n’est pas rédigé pour que je vous raconte ma vie.
Non, mais il l’est pour qu’un sursaut de conscience, puis de courage, vous saisisse, vous électrifie. Pourquoi, encore une fois ?
M. Jorion a posé une question le 28 juin : « Faut-il arrêter le blog ? »
A notre grand soulagement il répond : « non ! »
Non, car nous qui observons le désastre, la Grande Perdition, le « retour vers le futur » à grande vitesse, attendons cette étincelle qui nous embrasera et nous donnera le courage de surmonter nos peurs et notre attachement à nos vies afin d’oser tout miser sur le bon cheval : le monde dont nous rêvons.
Dans mon seul commentaire de ce billet de M. Jorion, je disais que nous vivions « une époque » sans courage, sans courageux, et donc qu’il en faut désormais. Car vous, moi, ma femme et ma fille, et plein d’autres, avons besoin de voir autre chose que des lâches, des cancres, des êtres faux, égoïstes, à la tête des Etats, des BCE-FMI-BRI-BM, etc. etc.
Alors bon, s’engager, pour autrui, pour des rêves, pour un autre monde, oui : pas celui de notre esprit soliloque, non, celui que nous rêvons pour tous, pour autrui. Il faut être altruiste pour cela. Sans quoi… c’est toujours pour soi, in fine, que l’on fait les choses : pour satisfaire son ego, qui adore la masturbation mentale.
Mais comment ? On commence par soi. Pour donner l’envie aux autres qu’ils agissent comme il aimerait qu’on le fasse, on se rectifie, s’analyse, se jauge avec impartialité, on devient un exemple, un modèle à suivre. On devient, courageusement, comme on aimerait qu’autrui, cette vaste humanité, devienne. On se change : pour le bien des autres. Pour le bien de mon enfant, je me discipline afin qu’elle ait une bonne image de moi, que je puisse devenir sa référence, son modèle pour se construire, qu’elle ne m’en veuille pas comme j’en ai voulu à mes parents, d’avoir vécu dans la misère profonde. Cela implique une vigilance constante, permanente à mon égard. Je me connais ainsi mieux (sachant ce qu’il faut corriger ou développer) et je sais où je veux aller : voilà qui devrait inspirer « nos dirigeants » ! Ça c’est pour ce qui me concerne, c’est ce que je peux travailler de moi. Pour autrui, pour ce qui concerne autrui : comment agir ?
Au niveau local, cela passe par l’humanitaire. Il y a tellement à faire… Moi qui travaille avec les personnes détenues, je puis vous assurer plusieurs choses : tout repose sur l’éducation : les fréquentations, les conditions de vie globales, l’égalité et la fraternité… Montrez aux autres que vous êtes à leur écoute, que vous essayez de les soutenir au moins temporairement. Femmes battues, prostituées, étrangers, SDF, précaires, étudiants, toxicomanes, etc. : ce sont eux les plus démunis. Comment une société ne pourrait-elle pas s’effriter si l’on abandonne ses plus faibles ? Un sucre fond par la face la première posée sur l’eau…
Au niveau national : cela passe par la volonté d’électriser, de rendre conscient autrui afin que le courant passe. On est arrivé à ce point où l’on ne peut plus faire autrement. Pour que le courant passe, il faut du fil de cuivre et des émetteurs, bref : un contre-pouvoir. Devenir soi-même le diffuseur et le moyen de diffusion de ses revendications (par exemple, fonder un journal que l’on distribue soi-même par court-circuitage de la diffusion consensuelle ou hégémonique), ou carrément – car je crois qu’on en est là – fonder une Résistance, à défaut : une Dissidence… Il faut taper extrêmement fort sur la table, il n’y a plus d’autres choix. Un second 11 mars, mais politique.
L’époque manque de héros, de courageux pour qui la vie d’autrui et de la société compte plus que le peu d’années pendant lesquelles ils ont eu l’opportunité d’agir vraiment sans rien en faire d’autre que d’hésiter sur la direction à donner à sa vie. L’époque compte par contre des myriades de lâches. Nous ne pouvons plus nous permettre de compter parmi eux : sinon à quoi bon gloser sur le blog de M. Jorion ? Voyez Braveheart !!
Tout cela relève donc de la conscience, du cas de conscience : quel sens donnons-nous à notre vie ? Si, apprenant que demain nous devons mourir, l’on nous demande : quel est le bilan de ton existence ? Qu’auriez-vous à répondre ? Vous étiez-vous engagé ? Qu’avez-vous fait, pour améliorer votre présent (qui devient votre futur) et surtout celui d’autrui, celui de vos enfants avec qui vous vivez ? Personnellement, localement, nationalement : qu’avez-vous fait de ces opportunités de donner du sens à votre vie, et un modèle et du courage aux autres ?
Bonne nuit. Demain, peut-être verrez-vous l’aube se lever. Ou pas. Profitez de chaque aube que vous regarderez désormais pour vous demander : que vais-je en faire jusqu’à la suivante ?
107 réponses à “UN MONDE MEILLEUR N’APPARAÎTRA PAS DE LUI-MÊME, par AncestraL”
Bon faut être honnête (c’est-à-dire au delà de ma perception, de mes choix, de nos parents, etc…), je suis plutôt d’accord avec Dennis Meadows, y à une voiture qui est lancé dans le vide et ça sert à rien d’appuyer sur la pédale de frein, mais je crois qu’il y a plusieurs voitures (une part du climat est foiré, mais on peu agir, une part des médias est naze, mais y à internet, une part de la finance est out, mais au quotidien vous trouvez des personnes qui au delà de leurs status s’offusquent, etc…), alors s’engager, oui, mais sans qu’une structure soit l’unité, laissons à chacun déterminer, quel voiture il ce doit défendre! (quelque soit l’échelle et l’influence).
fin des grands soirs, vive les petits matins 🙂 .
Acceptez, je vous en prie, que je vous félicite pour votre style, cher Ancestral.. Ce fut un plaisir de vous lire.
Cependant, il y a un manque évident dans votre récit: Un mot important, vital, celui qui « donne du sens à la vie », celui qui permet d’avancer, celui là est oublié: il s’agit du mot « Progrès ».
La communauté des Hommes a suivi, depuis l’origine, un lent cheminement vers le progrès: progrès de la connaissance, progrès de la connaissance de la connaissance, progrès de la maîtrise de ses conditions de vie. Ceci est effectif, malgré les turpitudes, les ornières, les chutes douloureuses, les guerres, les mauvaises gens.
Cette épopée semble se poursuivre, du fait même du poids de la multitude.
L’accélération du progrès semble liée au nombre d’individus présents sur notre planète plus qu’à toute autre chose.
Il n’y a pas de vraie raison pour que les « anormaux », les voyous, les pervers, triomphent sur la durée, pas plus qu’ils n’ont réussi, dans les siècles passés, à imposer définitivement leur emprise sur la terre.
Il n’y a aucun progrès de l’Humanité.
Elle reste toujours de la même bêtise et de la même ignorance, aucune expérience ne servant à ceux qui ne l’ont pas vécue.
Les évolutions technologiques ont jusqu’à maintenant conforté l’objectif de nos gènes: la perpétuation de l’espèce.
Il reste à savoir si nos gènes seront capables de nous faire savoir jusqu’où ne pas aller trop loin…
Quand aux « anormaux » voyous et pervers, ils font partie du projet de perpétuation de l’espèce et en cela il est illusoire d’espérer autre chose.
Et comme disait San Antonio, on est toujours le con de quelqu’un…
Mais comme ça part d’un bon sentiment, essayez déjà d’éviter de l’être vous même.
« Science sans conscience n’est que ruine de l’âme »…
Le progrès comme alibi, sans une conscience claire des autres Êtres comme faisant partie d’un tout, ça n’a plus aucun sens : c’est même légèrement destructeur. Pour la planète, pour les autres espèces, pour l’Humanité in fine. Je ne me lancerai pas dans la longue litanie des pires horreurs (Fukushima?)que ledit « progrès » sans aucune conscience derrière autre que celle de l’ego, a pu engendrer.
Car permettez-moi de vous le dire sans aménité : vous n’êtes pas différente de cette « lie de l’humanité » que vous mettez en opposition face aux « progressistes ». Non; nous sommes tous pareils. seuls ceux qui arrivent à prendre le progrès, la science, les avancées technologiques pour ce qu’elles sont (càd un formidable moyen, mais surtout pas une fin) auront franchi le cap.
Comprenez : il ne s’agit pas de la valeur intrinsèque de l’être Humain au départ, comme vous semblez vouloir le dire.
Chacun est un pervers, un voyou, un meurtrier , un « monstre » en puissance si il n’a pas cessé de s’identifier à son ego, à son mental. C’est ceci qui fait que des gens « normaux » comme vous et moi peuvent s’entretuer au nom de la religion, ou pour une simple queue-de poisson sur l’autoroute…souvenez vous de l’affaire de la petite Marina, récemment. Des gens comme vous et moi… »normaux ». Cette affaire a bouleversé l’opinion parce que confusément chacun a senti que le monstre est en chacun de nous.
Le « progrès »? Je le répète : une vaste blague, à l’heure actuelle, dans sa forme actuelle ;c’est une bagnole lancée à 200 km/h face au mur, pied collé au plancher et on accélère, les yeux fermés. Il est temps de les ouvrir. Le seul vrai progrès est devant nous, il est vital, c’est une condition sine qua non de notre survie en temps qu’espèce : un saut dans la Conscience. Sinon nous ne passerons pas le prochain siècle, grâce aux « progrès » de la Science dans l’armement, notamment, soyez sûre que ça ne fera pas un pli.
Le progrès une vaste blague ? Tout dépend de ce que vous appelez progrès. Vous mettez sur la balance tout le poids de la destruction de la planète, très bien. Je pose dans l’autre plateau, les avancées de la médecine, des communications et des conditions de vie générales de l’humanité. Bien sûr que l’on vivait mieux avant, mais nous étions singulièrement moins nombreux. Alors où est-elle cette conscience vers laquelle nous devrions sauter ? Je pose la question avant de me ramasser un gros gadin car il me semble qu’elle n’est pas accrochée dans les nuages, cette conscience. Elle est plutôt dans les bides herniés des gosses squelettiques attendant la mort dans les contrées où la conscience a taillé la route depuis longtemps.
Pour reprendre le langage de Stiegler, le progrès est incontestablement un pharmakon, une force composée de deux vecteurs contradictoires et que l’on ne peut contrôler que dans le mouvement – l’évolution du système – qui, de la même manière qu’il permet au cycliste de conserver l’équilibre sur deux petits bouts de caoutchouc, permet au système de conserver un équilibre dynamique entre la chute vers le désordre entropique – mort par dispersion, désagrégation – et celle vers l’ordre statique – mort par concentration, condensation de la matière.
C’était juste pour réhabiliter un peu la notion de progrès. Personnellement, j’en ai besoin pour éviter l’écueil, si tentant parfois, du cynisme et du sophisme.
Non pas une vaste blague, mais peut-être quelque chose qui pourrait se révéler.
Tout dépend aussi de l’idée que l’on préfère se faire de l’histoire.
Certes sur le moment, mais si demain les avancées de la médecine se plantaient au niveau des vaccins, des médicaments, auriez-vous le même raisonnement ? Vous savez je suis pas totalement contre le progrès.
Si demain l’excès de communication mondial n’amenait pas plus un meilleur changement des mentalités, auriez-vous le même propos à faire entendre envers votre prochain ?
Si aujourd’hui les conditions de vie générales de l’humanité devaient nous renvoyer un plus grand coup de baton à la figure, seriez-vous toujours partant pour le progrès plein gaz, non certainement pas à mon avis tant pour vous même que pour vos petits enfants.
Tant que le produit marche bien aucune plainte envers le fabricant. Hélas comme la qualité n’est pas toujours plus présente dans les choses.
Je sais pas si l’on vivait mieux avant, non à mon avis cela devait être bien plus dur matériellement. Et vous avez bien raison de le souligner, c’est vrai ils étaient moins nombreux, voire bien plus bourrins et sauvages que nous autres en société, mais peut-être aussi qu’ils avaient bien plus de tripes que la plupart de nos contemporains préférant davantage ( relire le billet du fil )
Elle ne pourrait se présenter envers une personne qui préférerait plutôt l’écarter d’un simple revers de main.
Vous savez tout ceci et cela dans le monde, ne permet pas toujours mieux aux êtres d’en prendre le recul, en espérant ne pas être trop dans les nuages en vous disant cela ainsi.
Je comprends votre raisonnement, mais si demain toutes ces choses devaient partir en couilles, ce n’est pas non plus une chose à écarter, tant au niveau du marché, du commerce, de la médecine, du nucléaire, de l’armement, comment pourriez-vous mieux vous opposer au sophisme ou à mon cynisme. Non je suis pas comme ça c’est juste que je crois ne pas être le seul à m’en alarmer, et cela au fur et à mesure des choses comme Fukushima.
Et si demain on découvrait comment obtenir et consommer de l’énergie proprement et sûrement, on pourrait mettre la terre en bouteille. Et si demain les elohim nous visitaient, finis les problèmes. De demain en demain, je relance parce que j’ai la main. Aujourd’hui, le problème est pire qu’hier, on attend demain ?
Si vous n’y comprenez rien, ce n’est que justice. Je n’ai rien compris à votre interprétation du progrès.
le progrès « dans sa forme actuelle » relisez-moi svp, et oui, c’est une vaste blague. Car je le répète sans conscience -de soi, des autres, que l’autre est semblable à nous, que nous ne faisons qu’un, tous partie du tout- sans cette conscience-là, qui naturellement fait que vous appliquez au quotidien des valeurs considérées souvent comme de la faiblesse par la majorité, par l’opinion : altruisme, compassion, don désintéressé, respect de la vie sous toutes ses formes, donc sans cette Conscience-là, nous courrons à notre perte. Car ce même progrès a démultiplié nos capacités de nuisance, aussi bien que les belles choses dont nous sommes capables-et que vous citez à raison- justement, quand nous agissons en Conscience, c’est à dire en respectant notre Être profond et véritable.
Oui, il y a à faire; non, ça n’est pas gagné. Mais il ne s’agit surtout pas de cynisme, ni de sophisme ou que sais-je; il s’agit juste de reconnaître que nous ne sommes pas parfaits, loin de là, et d’ouvrir les yeux pour s’apercevoir que nous prenons la mauvaise direction, mais que nous avons toujours le pouvoir de changer les choses. Et ça commence par le changement individuel.
Je suis bien d’accord avec les réponses précédentes qui parlent de la relativité de la notion de progrès, surtout quand elle s’adosse uniquement à une sorte de surenchère technique censée résoudre magiquement les affres de notre humanité.
Pour considérer factuellement ce qu’il en est du progrès, considéré comme tel par les les économistes et compagnie, je me rappelle avoir lu il y a quelque temps un article d’un chercheur américain qui avait constaté que le nombre de brevets déposés (mondialement, ou pays de l’ocde, je ne sais plus trop) avait connu un pic dans les années 1980 au plus tard (exactement comme n’importe quelle courbe d’extraction de ressources).
Si on accepte les brevets comme proxy raisonnable du progrès par l’innovation (en faisant abstraction du côté éthique/moral), alors non, le progrès n’est plus en progression depuis longtemps. Même d’un point de vue purement « chiffriste ».
Le hasard fait bien les choses, je viens de tomber sur un commentaire sur un autre site qui parle exactement de ce que je disais au dessus :
http://www.theoildrum.com/node/9292#comment-903244
Le commentaire en question sera le premier en haut de la page.
Le monde est chaque jour pire que la veille et ça s’accélère.
L’accélération comme nouvelle forme de totalitarisme.
« L’hypothèse que je voudrais défendre ici est que, en réalité, l’accélération sociale est devenue une force totalitaire interne à la société moderne et de la société moderne elle-même, et qu’elle doit être critiquée comme toutes les formes de domination totalitaire. Bien sûr, je n’utilise pas ici le mot « totalitaire » comme je le ferais pour me référer à un dictateur politique ou à un groupe, une classe ou un parti politique ; dans la société moderne tardive, le pouvoir totalitaire consiste plutôt en un principe abstrait qui assujettit néanmoins tous ceux qui vivent sous sa domination. Je suggère que nous puissions considérer comme totalitaire un pouvoir lorsque a) il exerce une pression sur les volontés et les actions des sujets ; b) on ne peut pas lui échapper, c’est à dire qu’il affecte tous les sujets ; c) il est omniprésent, c’est à dire que son influence ne se limite pas à l’un ou l’autre des domaines de la vie sociale, mais qu’elle s’étend à tous ses aspects ; et d) il est difficile ou presque impossible de le critiquer et de le combattre. »
Hartmut Rosa. Aliénation et accélération. Vers une théorie critique de la modernité tardive. La Découverte.
Sur quels mécanismes concrets pourrait bien reposer cette « accélération sociale » en tant que « force totalitaire interne ». Il me semble que ce totalitarisme repose, en définitive, sur la propriété des fonctions exponentielles d’être à elle-même leur propre dérivée. L’exponentielle du prêt à intérêt composé est devenue la façon dominante de représentation de l’avenir : « toujours plus », « les sous font des sous », l’augmentation du prix de ma maison paiera mon crédit, etc.
Cette représentation, cette abstraction, cette croyance en ce que « ça durera toujours « ( du moins sur le papier des économistes) a pour défaut de rencontrer les limites matérielles du domaine dans lequel le modèle de l’exponentielle génère des dispositifs concrets; l’épuisement des ressources est nécessairement au bout. De plus la consommation du substrat énergétique croit pour assurer la reproduction de la structure, c’est le problème de la nappe de lentilles d’eau qui se multipliant par deux toute les 24 h, consomme la moitié de l’oxygène disponible la veille et, étouffe l’étang le lendemain, pour de façon allégorique ; en crever le surlendemain.
C’est pourquoi , ma cousine, « il nous faut la croissance », à défaut d’imaginer d’autres mécanismes de reproduction d’une structure sociale stable. De leur côté, les décroissants régressent vers la forme cyclique qui fit les beaux jours de sociétés archaïques et traditionnelles, tandis que les individus néonomades, recherchent l’équilibre par le surf sur la variété nécessaire. de son côté, le capitalisme tente de nous vendre la stabilité de son exponentielle vitale en promotionnant le surfing sur l’emploi comme « flexisécurité ».
Sur quel modèle de stabilité, les « révolutionnaires » imaginent-ils l’avenir ?
A+
L’avenir ?
Pas d’avenir !
Sauf à ressaisir le temps.
Je voulais juste sous-entendre que la vacuité de « l’avenir radieux » et des « lendemains qui chantent » montre que la nécessité d’une représentation de l’avenir était posée, et qu’elle se pose encore.
@Jean Luce Morlie :
///// Sur quel modèle de stabilité, les « révolutionnaires » imaginent-ils l’avenir ? //////
Je ne suis pas révolutionnaire ….du moins a plus de 500 m de chez moi ,mais je peux répondre :
-La conjecture de l » avenir est contrainte par l’ énergie disponible et l’ évantail probable de son exploitation ( renforcée par l ‘acces au mat.prem.)
Cette conjecture donne une palette de possibilités variées mais non infinies de modèles societaux ( pyramide societale )
-Pour la décroissance , il faut visualiser ce que la quantité moyenne d’ énergie /individus peut nous offrir (en laissant de coté les variantes de pentes societales, ce qui optimise le système a son idéal) ……….cette quantité peut dépasser ce qui est nécessaire a produire l’ indispensable ….et donc offrir un quota de modernité , …par ex Mach.a Lav, eau au robinet , 10A au compteur , …internet …….suivant un ordre décroissant de priorité .
Ce n’est pas « là « , un choix de société , mais l’ optimisation de ce qui sera l’avenir .
A regarder le début actuel du process , on glisse plutot vers l’ obscène : 100% « on change rien » Pour un quota qui se réduit ts les ans …….et on élimine la « demande » necessaire par l’ élimination des autres ……avec un interface kaki obligatoire et de + en +de cameras .
La « décroissance » c’est juste un synonyme d’ équité face a une réalité inéluctable .
Le « connais-toi toi-même » est l’essence, il est la clé.
L’auteur de ce billet (que je salue) l’a bien compris : ou nous commençons par nous changer nous-mêmes, et vite…ou notre espèce disparaitra, et je pense beaucoup plus rapidement que ce que l’on croît.
Tout ceci pour dire que le tout est de prendre conscience , c’est ça le plus important! Cette prise de conscience salutaire (au lieu de rester englués dans les méandres du mental, de l’ego et de sa négation de l’Etre) fera que nous pourrons « sauter le pas » pour construire quelque chose de meilleur, de plus équilibré, sur les ruines de l’ancien. Pour l’auteur, elle a semble-t-il passé par la naissance de son enfant -c’est souvent le cas, mais souvent aussi, on assiste à un repli sur soi, quand on devient parent, et ça la société de consommation actuelle l’encourage…
Pour d’autres, les « accidents de la vie » font que d’un coup, l’on va s’éveiller peu à peu à cette Conscience qui fait partie de notre Etre, et se désidentifier progressivement du mental consumériste actuel-c’est mon cas.
Quelle que soit la manière dont cela arrive, l’époque y est propice : les grands bouleversements amènent toujours de changements sur tous les plans. Et il est plus que temps.
Pour paraphraser un certain petit bouquin : « indignez-vous!……mais pas que. Agissez! Soyez! Vivez!
La prise de conscience est le premier électrochoc.
Mais une fois que l’on a conscience, que l’on sait, si l’on veut être honnête avec soi, il faut prendre sur soi, il faut prendre du courage, oser prendre des risques : c’est le second électrochoc.
Avoir conscience ne suffit pas.
Comme aimer u enfant ne lui suffit pas : il lui faut une éducation.
Merci pour cet acte de foi – la création de ce blog hautement nourricier et cette contribution vibrante…
Ceux qui ont vécu une jeunesse aussi démunie que la vôtre ne seront pas désarmés face au tsunami – ils ont déjà appris à se passer de l’inessentiel et ne laisseront ni anesthésier ni piéger par un confort factice acheté à crédit : « on est possédé par ce qu’on possède »…
maintenant que nous en sommes là, les lecteurs pourraient s’organiser d’abord sur leur territoire (groupe territorial, coopérative, association ou toute initiative informelle répondant à des besoins fondamentaux non pourvus comme le logement) : y a-t-il par exemple des lecteurs à strasbourg déterminés à « rendre le monde meilleur », à « embellir la vie » à partir d’actes simples?
un premier acte simple est le soutien aux éditions du croquant.
Les solidarités sont tout de même un véritable problème dans la société moderne, il y a plusieurs segments dans la société qui ne s’intéressent plus les uns aux autres, s’ignorent ou ne pensent plus qu’à leurs propres profits.
Les jeunes qui sont toujours considérés comme le socle de la société sont littéralement balayés par le capitalisme moderne. Ils ne peuvent plus compter que sur eux ou sur l’aide de leurs parents pour vivre déçament. Ils sont exclus du système dès leur entrée, par des prix pour se loger ou se nourrir, irréalisable par rapport aux contrats précaires ou à titre gratuit qui leurs sont proposés en masse pour tenter de s’intégrer, sachant qu’ils n’ont pas la sûreté de l’emploi par des types de contrats à durée déterminé et sous pression de résultats, avec des revenus très faibles.
La société a muté pour les jeunes, ils doivent dès le départ sous peine d’être exclu directement avoir une ligne internet, un ordinateur, avoir un moyen de déplacement (avec l’emploi à distance), les assurances pour les primo-accédants très élevés par rapport aux anciens, un logement avec des loyers très élevés par mois, des études de plus en plus coûteuses, et les paiements des taxes diverses. Pour entrer dans une société ce sont des revenus trop hauts qui sont exigés, pour ceux qui ont la part des revenus les moins rémunérateurs et les plus inadaptés pour s’intégrer en société.
Les plus âgés pensent surtout à leurs retraites, et ont eux aussi peur de l’avenir. Tenter de ne pas perdre le peu qu’ils ont accumulés sur des décennies de travail, que le capitalisme n’exclue pas comme moyen de faire des profits. Ce sont ses générations plus anciennes, qui aussi travaillent dans la tranche d’âge en dessous de la retraite jusqu’au jeune, qui font office de solidarité, sinon c’est l’exclusion pur et simple ou des difficultés pour tenter de stabiliser dans des conditions de vie précaires.
Les dirigeants de la finance, de l’économie et des grandes entreprises sont bien loin de ses réalités, avec des sommes d’argent si faramineuses, que la question de la redistribution devraient se poser. Ce qui même s’il y a débat, n’amènera pas vers une redistribution réelle. La vision d’une société bon marché n’a plus de réalité mais celle du bénéfice à tout prix. Ce sont des classes sociales qui s’appauvrissent, et qui tentent de survivre dans un espace capitaliste en constante hausse des prix.
C’est une société complètement éclatée, devenu parfois individualiste par le type de vie proposé, avec des solidarités que les jeunes apprennent de moins en moins à transmettre, à cause d’un niveau de vie de plus en plus élevé.