Ce texte est un « article presslib’ » (*)
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Une lectrice du blog me demande de la tuyauter pour son examen dans une école supérieure de commerce. Je lui ai répondu ceci.
Il me semble important de mettre l’accent sur la possibilité de généralisation des mesures proposées. C’est Martin Wolf qui dans une tribune libre du Financial Times (*) avait attiré l’accent sur le fait que les Allemands (compatriotes pourtant de Kant) semblaient avoir perdu de vue l’impératif catégorique kantien en demandant aux autres nations de la zone euro de devenir exportatrices nettes à l’instar de l’Allemagne. Il y a là une erreur logique : toutes les nations ne peuvent être exportatrices nettes, si certaines sont exportatrices nettes, il faut que d’autres soient importatrices nettes et personne ne peut alors en blâmer ces dernières.
La plupart des mesures proposées par les économistes ne sont pas généralisables et doivent être rejetées au même titre :
– la compétitivité : elle suppose un moins-disant salarial dont l’« attracteur » est le salaire de subsistance dans le pays où le prix des denrées de première nécessité est le plus bas au monde. C’est ce que j’appelle : « aligner tous les salaires (français, belges, suisses, québécois, etc.) sur ceux du Bangladesh ».
– les zones franches : elles supposent un moins-disant fiscal dont l’ « attracteur » est l’imposition zéro.
À ceux qui proposent compétitivité et zones franches comme un idéal, il faut répondre comme le fit Wolf : « Kant avait raison ». Il existe bien sûr une ou plusieurs manières moins polies de dire la même chose.
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(*) « Malheureusement, le débat qui a lieu en Allemagne suppose, à tort, que la solution, c’est pour chaque membre de la zone euro de devenir comme l’Allemagne elle-même. Mais si l’Allemagne peut être l’Allemagne, c’est-à-dire une économie disciplinée sur le plan fiscal, une demande intérieure faible et un surplus colossal à l’exportation, c’est seulement parce que les autres ne le peuvent pas. Son modèle économique viole le principe d’universalité du plus grand philosophe allemand Emmanuel Kant ». Martin Wolf, « Germany’s eurozone crisis nightmare », Financial Times, le 9 mars 2010. Voir mon billet Pourquoi la Grèce peut sauver le monde.
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction numérique en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
60 réponses à “« KANT AVAIT RAISON ! »”
Euh, certes, elle peut répondre cela… mais suis pas certain qu’elle sera bien notée… On n’est jamais à l’abri d’une surprise, ceci dit 😉
Lol la pauvre va passer en conseil de discipline oui !!
Une étudiante en ESC, me demande de la tuyauter;c’est Kant tu veux!
Fantasme, Kant tu nous tiens !
Le problème des analyses actuelles semble bien être, en effet, l’excès de politesse.
Tout est question de granulométrie comme le disait mon prof de physique.
Un peu de concurrence, entre producteurs locaux par exemple, peut stimuler et faire émerger le meilleur service. Trop de concurrence, par exemple le marché mondial du café arrimé aux banques et vampirisé par les spéculateurs de tout poil, elle, fait mourir les producteurs et pénalise les consommateurs.
Cher Paul Jorion,
Comme vous l’écriviez le 12 avril : «L’argument vaut ce qu’il vaut.»
Cordialement
Un bon petit rappel sur le principe d’universalité kantien,mais morale et économie ne font pas bon ménage,je pense que le problème de l’Allemagne n’est pas d’imposer un modèle mais qu’il s’impose de lui même,elle d’un côté (offre,rente),les autres(demande,dette),ça porte un nom:politique de l’asservissement,hégémonie
Pour le coup je vous embrasserais !
Avant la seconde l’Allemagne prétendait aussi être un bon modèle de société.
Le succès est le seul juge ici-bas de ce qui est bon et mauvais. Mein Kampf (1925)
« Combien d’hommes s’identifient aux modèles que les conventions sociales leur proposent ! » Manuel de Diéguez
Dans un monde fini, la production est en vase clos.
Mais dans une économie mondialisée, les échanges entre pays se font sous le principe des vases communicants.
L’objectif à atteindre n’est pas que chacun des vases (pays) soit rempli de la même quantité de liquide mais faire en sorte qu’il y ait le moins de différence possible de liquide dans chacun des vases et surtout qu’il ne faille pas pour remplir un seul vase vider tous les autres et que ce ne soit pas toujours le même qui soit le plus plein!
C’est bon Pr Paul, je l’ai mon Bac?
« Les derniers seront les premiers » (ça marche seulement pour ceux qui ont de la patience)
Cet impératif kantien fait écho pour moi ce soir à la confiance qu’accordait Rousseau à la démocratie dont la généralisation des lois assurait la justice, en dehors de toute autre instance externe (Constitution, représentation..). Le caractère de généralité des lois en garantit la justice.
Harff la guerre de la combédidividdé …Grossse Mahler !!!!
Il en faut de la culture pour vous suivre . Heureusement , Martin Wolf ….c’est un politique les
rapprochements les plus scabreux , il les fait .
L’introduction de la Raison pratique de Kant est surprenante quand on s’attend à un philosophe éthéré dans les sphéres celestes , il y explique pourquoi il a écrit ce livre sur la logique où il met a jour Aristote , à sa maniére .
Il commence par faire l’état des lieux politiques dans les nations de son époque , mi-18e , deux
camps s’y affrontent menaçant les libertés . Surtout , étrange , il insiste sur l’incitation venant de l’étranger à l’endettement . (vous feriez le rapport avec les libertés ?) . L’Impératif Catégorique .
Martin Wolf là se sert de Kant ou rappelle que l’austérité Grecque , suite de son endettement ,ménera au fascisme ? Va savoir …
Kant , trés audacieux , le premier à avoir remis en cause la logique d’Aristote de maniére cohérente . Voilà quelqu’un réglé comme une horloge …qui a remit les pendules à l’heure .
bonsoir,
cette phrase mériterait peut-être une analyse un peu plus détaillée pour expliquer cette spécificité allemande. qu’est-ce qui explique une telle discipline, qu’est-ce qui explique cette propension à la parcimonie de la population?
Faut pas trop déconner, le pouvoir d’achat allemand n’est pas minable, ils sont juste passés de 20 % de plus que les salaires français, il y a 20 ans, à l’équivalent français actuel. Tout ça pour mettre en place l’intégration de la RDA. Ils se sont passés de dépenses militaires pharaonesques aussi.
Il n’y a pas eu de bulle immobilière en Allemagne, preuve d’une gestion avisée.
Alors je veux bien le bancor, mais c’est juste une mesure protectionniste comme une autre. Eh oui…
Par ailleurs, qu’il y ai des déséquilibres fait partie de la vie et de ses trébuchements nécessaires pour avancer et qu’ils font vivre.
Comment expliquez vous que les salaires allemands de l’automobile sont équivalents, voire supérieurs à ceux des français pour la même monnaie, avec plus de salariés en Allemagne pour ce secteur.
Comment se fait il que je gagne 80 % de revenus en plus en Allemagne par rapport à la France et qu’en plus mes idées rapportent environ 100 fois plus que ce je coûte à mon employeur, ce qui n’a jamais été le cas en France où j’ai été traité comme un Jean foutre ?
La confirmation de ce que je dis c’est que je suis toujours outre Rhin, augmentations annuelles et primes régulières malgré mes critiques parfois sur la stratégie en cours, car je ne me prive pas de dire et c’est bien reçu.
De toutes façons le bancor, dans l’hypothèse qu’il serait appliqué, n’aurait pour conséquence que d’élever le pouvoir d’achat allemand, donc retour au Mark. En quoi les grecs en profiteraient ?
Quoi que vous fassiez, il n’y a pas à tortiller en tordant les indicateurs, les plus efficaces seront toujours plus efficaces, tant qu’ils le seront
L’absence de bulle immobilière en Allemagne ne serait-il pas plutôt du à la décroissance nette de la population de puis plusieurs années? Et puis quand on voit le nombre de retraités allemands dans le Sud de la France, on se dit qu’ils participent à l’augmentation des prix de l’immobilier.
Il me semble que vous ne saisissez pas pourquoi le modèle allemand n’est pas généralisable:
, même si ceux-ci ont sans doute une culture d’entreprise beaucoup plus intéressante que celle généralisée en France.
La réponse est pour Kaiel . Reprenez la suite des événements . Il existait de multiples raisons
pour un boom immo autour de Berlin . La reconstruction de Berlin mais aussi un possible retour des ex gros propriétaires terriens de la Prusse . Trés rapidement le Boom est parti et trés rapidement il a été stoppé . Ce n’est surement pas l’effet du hasard . Peut étre des chercheurs dans l’avenir nous expliquerons-t-ils pourquoi , reste que les Allemands ont montré par là une spécificité , qu’il serai bon de comprendre , parce non seulement les piigs mais nous nous sommes en partie tombés dans le panneau .
Encore que Sarkhozy a fait de gros efforts pour nous inciter à aller plus loin , loi ceci , loi cela ,
déductions d’impots , je le revois encore proner les crédits sur hypothéques comme aux US ,
alors que çà hérisse le poil non seulement des banques mais des notaires qui savent trés bien à quoi s’en tenir . Il nous faisait l’article alors qu’aux US on parlait déjà de crise des subprimes . Et la maison à 100 000 euros de Borloo . Remember .
Ou ces hommes sont des Charlots qui ne comprennent rien à ce qu’ils font où ce sont des perverts .
Je connais un chirurgien super bien payé qui exporte (vend) pourtant beaucoup ses services, et un cireur de chaussures très mal payé qui n’exporte (vend) pas grand-chose malgré ça. Le cireur de chaussures consomme local (il cire lui-même ses chaussures) mais le chirurgien, non. Le chirurgien a un excédent extérieur (il épargne), pas le cireur. Il n’y avait pas un certain Ricardo… ?
En fait l’Allemagne peut exiger de chaque membre de la zone euro d’être exportateur, mais il faut que le reste du monde soit globalement importateur, non ?
@etcetcetc
Bah… non.
ils exportent, ensuite les autres exportent, un peu comme les vases communicants. eh voilà.
« ils exportent, ensuite les autres exportent » ?????
A qui ??
Pour que les vases communicants soient équilibrés, il faudrait que lorsque l’Allemagne exporte 100 vers les autres pays, elle importe 100 de ces mêmes pays.
à Louise:
« Si ton oeil était plus aigu tu verrais tout en mouvement. » (Nietzsche)
Globalement, « tout reste dans la famille »…(famille bizarre, quand-même)
A propos de besoin de compétitivité allégué, je croirais à l’honnêteté des responsables d’entreprises quand il aligneront leur propre salaire sur celui de l’Albanie.
Je dois rectifier mon post l’introduction dont je parle , et celle de la critique de la raison pure ,
bien sur et non celle de la raison pratique . Milles excuses .
Et pour répondre à méthode ce qui fait la ‘discipline’ Allemande , qu’il faudrait plutot appeler
organisation [ la discipline c’est Français contrairement à ce qu’ils croient d’eux-mémes en affichant de l’esbrouffe ,les Français appellent à la discipline comme celle de leurs jardins et clotures , ils ne sont satisfaits qu’avec un général ) .Ce qui fait cette organisation c’est la concertation préalable , ensuite on exécute le vouloir collectif , sans faille .
Il suffit de comparer les comportements de jeunes Allemands et de jeunes Français face à un pb identique pour étre impressionné par la différence .
Et puisqu’il est question d’un de leur philosophe , Kant , le premier d’une grande série qui les a propulsé au premier rang mondial
il est caractéristique qu’il ait fondé le premier une dialectique , c’est à dire une suite ordonnée de point de vue opposés , formant systéme . Groupir ! Si l’on veut .
@moneyistime
Pas sûr que la dialectique soit l’idée maitresse de Kant… je ne pense pas qu’il en use beaucoup. Mais c’est le plus sympathiques des philosophes dans sa volonté de limiter les erreurs et les égarement de la pensée vers la métaphysique notamment. Joyce raille beaucoup son nom, « Kant », he can’t…
Il a récapitulé les points de vue opposés en effet, d’ailleurs je dois relire ça.
Il est assez ridicule comme le fait P Jorion de ramener l’efficacité allemande à une discipline de brutes soumises. Il n’a jamais vécu dans ce pays, n’y a jamais travaillé, il n’en parle pas la langue, n’en a aucun vécu, mais il en applique pourtant d’autant plus mal des clichés totalement erronés. Pour un anthropologue, c’est déficient.
Il serait temps de parler du syndicalisme allemand sur ce blog, sans compter Bismarck, ou du capitalisme rhénan qui n’a pas disparut, bien au contraire.
fnur, en parlant de déficience, vous pourriez commencer par dire que l’indépendance de la france coûte trop chère, alors partir bosser en germanie-unie est devenu alléchant… pas besoin d’en appeler à la mythologie.
@ fnur
Vous ne me ferez jamais rêver, quand bien même vous auriez bien plus vécu dans le meilleur des mondes, il serait tout autant cucul la praline de vouloir toujours faire entendre les mêmes termes d’économisme aux peuples.
Comment des pays dans l’histoire peuvent-ils se permettre la chose, on ne peut pas dire non plus que l’Allemagne écrase et suggestionne tout le temps le monde en Europe.
Tout de même vous n’avez pas l’impression parfois que l’histoire se répète, bien sur pas dans les mêmes images et procédés de dirigisme, naturellement ça ferait trop mal aux yeux.
Surtout que les premiers responsables la crise dans le privé ne se sont toujours pas présentés devant la justice, tant d’usuriers de première qui influencent et endettent bien toujours à la fois l’histoire des peuples.
Et si contrairement à tant d’idées reçues, la Grèce avait bien plus de choses à nous apprendre sur le moment, là c’est sur l’allemagne ferait déjà moins la plus vertueuse aux images.
Tout le monde n’a plus trop les moyens de voyager, de prendre l’avion, le train, de mieux connaître l’envers du décor, de connaître d’autres mentalités plus rentables, ayant paraient-ils plus d’ouverture d’esprit que vous.
Dit autrement L’allemagne servant bien aujourd’hui de 1er modèle de la classe, le bel enseignement premier des écoles de commerce, en fait faudrait tout le temps savoir mieux dégager des marges qu’autrui.
Jérémie
« vous auriez bien plus vécu dans le meilleur des mondes »
Elle est bien bonne celle là. Ben non, c’est pas le meilleur des mondes, la preuve étant que les
banquiers allemands ont été aussi nuls que leurs confrères de France ou d’Espagne ou des US.
L’épargne gérée par eux deviendra un don.
Evidemment cela dépend de que qu’on entend par dialectique , si on attend une synthése comme
avec Hegel ou Platon , he can’t . Pour moi ces antinomies en sont une quand méme , et la meilleure , parce que je pense que la synthése au mieux nous méne à une autre alternative , la différence est qu’elle y est implicite . Kant suppose une tolérance …
Sur un mode plus Café du Commerce que Salon de Koënigsberg, ça me rappelle une petite observation lue je ne sais plus où :
Dans la constitution d’une équipe sportive, il n’est pas bon de sélectionner systématiquement les meilleurs joueurs, ou ceux considérés comme tels. Cela ne fonctionne pas. Il faut intégrer des joueurs a priori moins talentueux, ou moins remarquables pris individuellement, pour que le système pris dans sa globalité fonctionne.
Du délicat passage de la Somme des parties au Tout… Typiquement le genre de questions qui n’intéresse guère les cavaliers seuls…
L’économie est elle au moment historique d’une révolution copernicienne ?
A l’heure où le financier, ultime maitre et possesseur de la nature, ne peut plus explicitement ou implicitement s’auto-justifier, fut il exportateur, libéral, social démocrate…
Les derniers masques tombent un par un: le roi est presque nu.
Quels penseurs aujourd’hui questionnent réellement les conditions de possibilité d’un monde pour demain ? Sur quelle propositions se justifiera l’inévitable future révolution, à la forme et dates non définies (révolution simplement intellectuelle ? de velours ? sanglante ?)
J’ai une idée.
Et si on établissait une frontière entre les nations?
Les états pourraient taxer les produits importés en fonction de leur aptitude à fabriquer des produits équivalents au prix étranger.
Il faudrait évidemment embaucher des fonctionnaires pour contrôler les entrées et soulever les barrières entre pays.
Supprimer les bateaux et les avions à moteur.
Réverlution.
« la compétitivité : elle suppose un moins-disant salarial … »
Peut-être suffirait-il de baser la fixation des taux de change non plus sur des pratiques financières spéculatives mais sur les performances factuelles des économies réelles ?
« l’impératif catégorique kantien »
L’impératif catégorique est le problème psychologique de Kant lui-même et ce n’est pas partageable.
C’est peut-être parce qu’il était prussien, allez savoir.
Encore que je sois bien sûr que tous les prussiens ne sont pas psychorigides 🙂
ce billet m’inspire : « le ciel étoilé au-dessus de moi, la loi morale en moi ».
Une petite digression autour du film « Prometheus » :
Dans ce film, ainsi que dans « Mission to Mars » (2000), il est répondu à la question de qu’est-ce que l’homme, par la présentation de son ADN. Kant pose la question finalement du « qui suis-je », et cette question est aussi posée par le Sphinx à Oedipe, qu’est-ce l’homme ? Et à Socrates également, connais-toi toi-même, mais les réponses divergent. Et par exemple dans le film de Cameron, Abyss, l’homme est celui qui est lié aux autres par une relation affective forte, de type amoureuse. C’est pourquoi ayant fourni cette réponse, il sera épargné par les créatures marines, mais c’était en 1989. Maintenant, l’homme en dernière analyse, est ramené à son ADN. Il y a là comme une perte… et quelque chose de désolant, d’abord la perte d’une tradition, le remplacement d’une tradition introspective et philosophique par une réponse matérialiste définitive, voire nihiliste. Le fait de considérer l’être humain comme un code, indéchiffrable, non individualisable, l’espèce. Ensuite, une perte de sens : « Nous vous avons créé parce que nous le pouvions », c’est la réponse du film Prometheus. Qui est d’ailleurs un kaléidoscope de scènettes plutôt qu’un film.
Ramener l’existence humaine à son ADN me semble assez symptomatique d’une perte de la dimension métaphysique ou humaniste, l’existentialisme sans historicité, – la nausée de Sartre devant l’ADN. L’ADN comme identification ultime, code-barre arbitraire et absurde signe la fin de la pensée par la même occasion, toute les réponses ayant été trouvées. La culture est abolie également….
« Le rationalisme est parfaitement justifié dans cette perspective. La rationalisme a raison. Mais c’est dans la mesure où il a raison, que lui échappe l’erreur et l’inessence; l’art est cette erreur et cette inessence, que la raison perd comme erreur et comme inessence dans la mesure même où elle les raisonne. »
(Françoise Collin, sur Blanchot, 1971)
Dans 2001 l’Odyssée de l’espace, il me semble que l’insistance porte sur le temps.
Une dernière remarque sur Hitchcock : Dans The Lady Vanishes, ainsi que dans les 39 marches il me semble, Hitchcock insiste sur la transmission d’un message, l’homme est celui qui conserve le message pour le transmettre, à l’arrivée, comme lors d’un passage de témoin. Chez Ridley Scott, ceci est remplacé par une tératologie abortive, on n’accouche que d’Aliens en guise de transmission. Le message, c’est l’horreur.
@ Liszt
Quelle panorama pour montrer « ce qui est commun », ce ciment multidimensionnel de la maison commune. On peut le voir comme cette chose qui unit les individus dans la détresse ici (ou les divise quand elle est absente, immanente à son contraire) :
http://www.pauljorion.com/blog/?p=38737#comment-337428
Mais comment croire qu’ on pourrait avec une simple check-list , définir ce ciment vivant, comme le fait la défunte et regrettée Eleanor oldstrom :
http://www.pauljorion.com/blog/?p=38150#comment-331904
La Check list est evidemment utile pour l’ action de construire ce ciment, mais pas pour définir ce qui se construit, et qui ne peut qu’ être montré à défaut d’ être défini.
Pour exploiter positivement l’exemple de l’Allemagne, il convient de prendre plus de recul et ne pas s’arrêter sur « le surplus colossal à l’exportation ». La morale de l’histoire et de l’exemple à retenir sont selon moi les suivants.
Quand on sait faire du surplus, c’est qu’on a su discipliner sa consommation intérieure afin de ne pas consommer plus en valeur que ce qu’on produit en valeur. C’est nettement mieux et plus facile à corriger que d’être dans la situation inverse.
Si tous les pays qui veulent lier leur destin ne comprennent pas que depuis le niveau de chaque individu, en passant par chaque cellule familiale, chaque commune, chaque département, chaque région, et jusqu’au niveau de chaque pays, il faut que chacun se sente en devoir d’équilibrer ses recettes et ses dépenses, alors il est vain d’espérer réaliser une union. En effet, cela suppose que chacun vise à se comporter correctement vis-à-vis de ses partenaires en prenant conscience de ses devoirs personnels pour que la communauté vive et se perpétue.
On ne peut pas créer un collectif fort et performant si chacun de ses membres ne prend pas conscience de son devoir de contribuer au maximum de ses possibilités, lesquelles, comme le veut la nature, sont très inégalement réparties. Par contre, l’engagement personnel, le cœur mis à l’ouvrage commun, le soin et la volonté apportés pour atteindre l’objectif assigné individuellement rendant possible l’atteinte de l’objectif collectif, dépendent grandement de la conscience que chacun a de son rôle dans la communauté et de ses devoirs vis-à-vis d’elle. C’est là que se mesure le mérite individuel qui s’apprécie aussi au niveau collectif comme étant l’intégrale des mérites individuels.
Durant quinze ans, j’ai eu la chance et l’avantage d’employer au sein du département dont j’avais la charge, des techniciens, contremaîtres et ingénieurs allemands issus des équipes qui, à Pennemünde, en temps de guerre, avaient largement contribué à placer l’humanité sur le chemin de la conquête spatiale. J’ai beaucoup apprécié ces hommes, non parce qu’ils étaient plus brillants que d’autres, mais parce qu’ils étaient plus fiables que les autres. Une fois l’objectif bien défini et les modalités d’atteinte bien acquises, on pouvait être certain que chacun mettrait un point d’honneur à remplir sa propre mission, quels que soient les imprévus rencontrés, ce qui permettait d’atteindre des objectifs difficiles.
Avec le tempérament latin et particulièrement français, ça n’est pas systématiquement le cas. Ce tempérament trop souvent frondeur, trop soucieux de la satisfaction de soi, et pas assez du respect de l’attente des autres, peut certes mener à des actions d’éclat, peut-être plus brillantes certaines fois, mais au prix d’une plus grande incertitude. Or, ce qui rend la vie difficile à vivre, c’est l’incertitude, la hantise de devoir faire face à des imprévus pénalisants, susceptibles de remettre en cause la marche normale de l’existence. Le manque de confiance, pourrit la vie.
Voilà ce que peut apporter l’Allemagne à l’Europe, la sérénité par l’effort sur soi, afin que cela profite à tous, à condition que cela soit compris par tous. Ceux qui ne veulent pas le comprendre seront laissés dans leurs errements.
N’est-ce pas cela l’impératif kantien ?
Entre nous soit dit l’Allemagne a certainement beaucoup à nous apprendre sur ses errements historiques et collectifs, sans parler de son aveuglement.
@ octobre 26 juin 2012 à 12:05
Je m’attendais bien à quelque coup de griffes en évoquant, le très bon comportement humain, que j’ai eu l’avantage d’apprécier chez ces techniciens et ingénieurs anciens concepteurs, metteurs au point et producteurs des VI, V2 et autres fusées à Pennemüde, il y a 70 ans . Certes, contrairement à vos habitudes, celui-ci ne me visait pas directement, mais il ne me surprend pas de vous.
Quand comprendrez-vous donc qu’il ne sert à rien de ressasser le passé chez les autres, pour les noircir ?
Vous qui n’avez certainement rien à vous reprocher, avez-vous la certitude de ne trouver dans votre généalogie individuelle et collective, que des ancêtres qui n’ont jamais, de près ou de loin, été impliqués dans des erreurs et comportements condamnables ?
Le mieux n’est-il pas de tirer les leçons des erreurs passées pour progresser en s’appuyant sur le côté positif des comportements exemplaires qui nous ont été légués par ceux qui nous ont précédés ?
Ne progresse-t-on pas en tirant les leçons des erreurs passées ? Alors tirez le meilleur du passé pour donner le meilleur au futur ? Pensez-vous que cela donnerait moins de chance à notre futur commun, si vous cessiez de vous en prendre aux générations d’avant la dernière guerre ? N’ont-elles pas aussi eu le mérite de vous donner naissance et de construire une Europe prospère et paisible dont vous avez largement profité ?
La critique est tellement facile, qu’il vaudrait peut être mieux, au lieu de vous montrer ingrat à l’égard des générations de vos parents ou grands parents, vous-vous souciiez des critiques qui pourront vous êtes adressées si, par faiblesse et manque à vos devoirs, vous laissez à vos descendants une situation chaotique et invivable.
Disons que le Conseil National de la Résistance avec ses illustres personnages peut-être un bon point de départ en tant que source d’inspiration : Droiture, moralité, dignité, exemplarité, imagination, action…
Mais j’ai ma propre capacité à m’indigner aujourd’hui contre les innombrables formes d’injustices, que cela vous plaise ou non.
La parole n’est pas encore morte et il y a bien des façons d’envisager la résistance ici ou ailleurs.
Je n’ai pas besoin de noircir quoi que ce soit, l’histoire présente s’en charge, les faits sont pleins de cette évidence ; je vis cette tranche d’histoire bouleversée mais en dépassant les petits bobos « du bon père de famille ».
En fait c’est le mode de vie qui doit devenir concurrentiel. Un salarié qui coûte déjà trop cher dès sa naissance (frais de maternité, congé parental), va à l’école pendant un trop grand nombre d’années (même si le salaire des maîtres est très bas), utilise une voiture ou les transports en commun pour aller travailler au lieu d’y aller à pied et continue à avoir des revenus une fois qu’il est trop vieux pour travailler ne peut pas être concurrentiel.
Je n’ai pas l’impression que ce qui précède fasse le tour de la question mais crains qu’en se contentant de baisser les salaires et les impôts on soit encore très loin du compte. On peut envisger que la main d’oeuvre vive pour l’essentiel en dehors de l’économie marchande (comme c’est le cas dans les sociétés traditionnelles) et que son coût ne corresponde qu’à une part de niveau de vie qui n’est pas indispensable mais corresponde à du superflu.
Quand l’acier, le caoutchouc et l’énergie ne sont plus disponibles en quantités suffisantes pour que le système « je paye mes ouvriers suffisamment pour qu’ils m’achètent des voitures » n’est plus applicable il reste d’autres solutions à essayer…
Cette idée de baisse du niveau de vie est fort pertinente et marche non pas en sus mais en parallèle avec la baisse des salaires. Si les salaires sont plus bas, le niveau de vie baisse. Si le niveau de vie baisse, les salaires peuvent baisser aussi, en termes réels.
Les Strasbourgeois savent qu’à Kehl, de l’autre côté du pont, en Allemagne, les produits de première nécessité (au sens nouilles, saucisses en conserve etc…) sont sensiblement moins chers qu’en France. Il faut bien qu’il en soit ainsi, sans quoi les travailleurs d’Europe de l’Est, à salaire d’Europe de l’Est, formellement employés dans leur pays d’origine mais transbahutés en Allemagne pour une mission, ne pourraient pas survivre. De même pour les employés de service, coiffeurs, vendeurs, etc., qui sont nombreux à vivoter sur des salaires de misère (il n’y a pas de smic en Allemagne). De même aussi pour tous les allocataires Hartz IV qui pour toute sorte de raison ne trouvent pas à s’employer.
Nonobstant les vertus germaniques d’efficacité et de dédication au travail, il est clair qu’une des clés de la fameuse compétitivité allemande est aussi à chercher dans le coût de la vie, qui a été sensiblement réduit ces dernières décades: En 1980, la RFA était un pays cher, à hauts salaires. En 2012, la RFA est un pays peu cher (prix à la consommation inférieurs à ce qu’ils sont en Grèce!), avec un large éventail de salaires, mais une proportion croissante de salaires de misère.
Amha, le fait que les prix soient plus bas en Allemagne n’a rien à voir avec une éventuelle et fort peu probable « philanthropie » qui aurait pour but de mettre les produits à la portée des plus bas salaires, mais le simple résultat de la « compétitivité » !
Nous sommes 7 milliards, le fait qu’un certain nombre crève de faim est le cadet des soucis du « marché » .
Il en est des réserves de travailleurs comme des réserves de pétrole.
@ louise 27 juin 2012 à 08:46
Il faut peut-être aussi s’interroger sur l’effet d’un Smic uniforme en France ce qui n’est pas le cas en Allemagne où il n’y en a pas. Quand on a un Smic plus élevé que ce qu’exige le niveau de qualification pour produire et distribuer localement, il ne serait pas surprenant d’aboutir à des prix de production et de distribution plus élevés, toutes choses égales par ailleurs.
D’autre part, l’Allemagne est un pays globalement plus efficace que la France, il est normal qu’il arrive à produire et distribuer moins cher. C’est ce qui le rend plus compétitif et l’amène à mieux équilibrer sa balance commerciale, voire-même à la rendre excédentaire.
Beaucoup de Français, notamment sur le blog, ne veulent pas entendre parler de performances, d’efficacité et de compétition. C’est le plus sûr moyen pour être relégués au bas de l’échelle des niveaux de vie, avant d’être appelés à disparaître physiquement, pour incapacité à s’adapter à l’évolution du monde. La sélection est appelée à s’opérer sur l’efficacité économique en donnant une plus grande chance de survivre à ceux qui consomment le moins pour vivre et qui, de plus, travaillent beaucoup comme dans les pays du BRICS, ce qui les amènent à produire et vendre à moindre coût et, en final, à moindre consommation d’énergie . Voir les études de D.Meadows et P.Chefurka.
Le marché, c’est ce qui fait marcher le monde, et chacun de nous y participe alternativement comme producteur et consommateur. Si nous avons tendance à être piètres producteurs et grands consommateurs cela ne pourra pas durer longtemps.
« une des clés de la fameuse compétitivité allemande est aussi à chercher dans le coût de la vie »
Il est habituel de lier le coût de la main d’oeuvre (la variable qu’il s’agit de maîtriser) avec les deux autres éléments que sont les salaires et les prix mais ça a pour effet de dissimuler la manière réelle dont les choses se passent.
Il y a des différences très importantes dans la manière de vivre de ceux que les statistiques se satisfont de ranger dans la catégorie des salariés:
– pour les salaires il faudrait prendre en compte ceux pour qui le salaire n’est que partiel et/ou intermittent
– pour les prix il faudrait tenir compte de ce à quoi les salaires des uns et des autres sont consacrés.
Quand les enfants continuent à habiter chez leurs parents et que l’age du mariage s’en trouve retardé, la chose n’est pas reflétée par « le coût de la vie »!
@ G L 27 juin 2012 à 12:54
Le coût de la vie est très largement dépendant du mode de vie. A niveau de vie équivalent, c’est-à-dire revenu équivalent, deux familles identiques peuvent arriver au bout d’un certain temps à deux situations très différentes.
L’une en adoptant un mode de vie plutôt spartiate, peut s’enrichir, puis investir, ce qui fait croître son niveau vie et l’amène à payer plus d’impôts et taxes qui serviront à payer plus de fonctionnaires et de personnes assistées.
L’autre peut se donner plus de bon temps, plus de confort et d’agrément de vie jusu’à l’excès,et en arriver à être plus ou moins à la charge de la collectivité, participer ainsi à déstabiliser les comptes sociaux, que la première famille contribuera à rétablir.
Où est la morale dans cette histoire ?
La première contribue à faire croître le niveau de vie moyen de son pays alors que la seconde contribue au déclin de son pays. L’une développe un état d’esprit de type capitaliste, tandis que l’autre penchera très certainement pour l’anticapitalisme.
Oui, rétorqueront les Allemands, Kant avait raison, mais vous faites une erreur logique :
toutes les nations ne peuvent être importatrices nettes, si certaines sont importatrices nettes, il faut que d’autres soient exportatrices nettes et personne ne peut alors en blâmer ces dernières.
Pourquoi cette question d’importateurs nets / exportateurs nets doit-elle être traitée au niveau des nations et seulement à ce niveau?
Il me semble qu’il y a par exemple en France de nombreuses régions (ou départements, ou encore communes) dont la compétitivité est en dessous de la moyenne et dont le niveau de vie est artificiellement maintenu au-dessus de ce qu’il devrait être. Pourquoi ces déséquilibres devraient-ils continuer à être acceptés alors qu’ils sont une source de retard et un handicap pour ceux dont le comportement est le plus vertueux?
Madame Merkel est trop timide, si elle proposait comme il serait logique d’étendre les règles qu’elle veut appliquer aux 17 nations de l’euro aux entités qui composent ces nations, elle rencontrerait, en s’appuyant sur les plus dynamiques des européens, un soutien beaucoup plus large et beaucoup plus fort!
Malgré de grandes différences qui faisaient dire aux gens les plus raisonnables que ce serait un échec, les 13 colonies américaines se sont réunies pour former les Etats-Unis parce qu’elles avaient un intérêt évident à le faire (menaces constituées par les indiens, les français, les espagnols et les anglais toujours présents au Canada et surtout parce que l’union était le seul moyen pour mettre à profit les territoires de l’ouest sans autre querelle qu’une seule guerre civile une fois la conquête achevée.)
A l’inverse, pour que chacun n’ait ni plus ni moins que la part d’austérité qui lui revient, le nombre d’états existant actuellement en Europe risque d’être insuffisant…
@ GL
C’est bien pour cela que nous portons la proposition d’un bancor qui résout à l’échelle mondiale la question de la péréquation de la façon la plus juste qui soit.
« Très » juste, Julien.
Ca fait depuis l’an zéro après Lehman que les Chinois réclament la même chose, soit, un panier de devises.
Soit, tout comme dans le panier de la ménagère, un équilibre est recherché. Le bancor n’est rien d’autre.
Camarade, à ton avis, pourquoi les cowboys refusent…??????????????
En aparté, les négociations climatiques sont EXACTEMENT le même principe : les émergents veulent moins d’injustice et les US veulent le même unilatéralisme.
Martin Wolf est un économiste Kantique !
Les importations comme les exportations sont calculées en valeur en tenant compte des taux de change. Ceux-ci varient dans le temps et ne reflètent que des fonctionnements financiers et non ceux de l’économie réelle. Un déséquilibre de la balance commerciale d’un pays, dans un sens ou dans un autre, indique une incohérence entre son économie réelle et la géographie des taux de change, incohérence dangereuse à terme. Nous en mesurons les conséquences avec l’Euro. Faire des globalisations au niveau mondial avec des taux de change à la signification réelle très discutable c’est s’embarquer pour un monde virtuel. C’est une composante des incompréhensions que j’expose dans le blog de Zénon.
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