Pour répondre à l’un d’entre vous qui vient de me faire remarquer (à très juste titre) qu’Emmanuel Todd avait annoncé une crise majeure du capitalisme dès 2002, je suis allé reprendre le manuscrit de « La crise du capitalisme américain » (2007 ; rééd. 2009) où je me souvenais avoir cité Todd au premier paragraphe de mon introduction. Voulant vérifier la correspondance dans la numérotation des pages, je me suis rendu compte que le résumé du livre, qui constituait les pages 2 à 4 du manuscrit, avait été éliminé par La Découverte lors de la parution du livre en 2007 (à part quelques corrections, la réédition du Croquant a reproduit le premier tirage). Alors voici un inédit : les trois premières pages de « La crise du capitalisme américain » :
Résumé
Pour parer à une crise financière majeure des ménages américains, le New Deal introduisit en 1936 un système de subventionnement du prêt au logement. Au fil des années, ce système, dont l’objectif initial était de simple dépannage, a bénéficié essentiellement à la moyenne et à la haute bourgeoisie, leur permettant de réaliser des plus–values dans la revente de leur logement qu’Alan Greenspan évaluait en 1999 à 25.000 dollars en moyenne.
Deux tiers des ménages ont ainsi accédé à la propriété de leur logement. C’est–à–dire, en théorie, puisque la moitié des « propriétaires » ne sont propriétaires que de nom, ne possédant en titre que 10% seulement de la valeur réelle de leur maison. Ce succès apparent dans l’accès à la propriété a cependant encouragé les gouvernements successifs à envisager une « société propriétaire » où la totalité des ménages possèderaient leur logement.
Dans un contexte économique où les disparités financières entre les ménages atteignent un niveau exceptionnel au sein des nations industrialisées, là où les 50% les moins nantis de la population se partagent 2,8% seulement du patrimoine, et le pourcent le plus riche, au contraire, 32,7%, le rêve américain du « tout–propriétaire » est bien entendu au mieux un rêve, au pire, un simple effet de propagande.
Dans les faits, un double système de prêt au logement s’est mis en place : un secteur « prime », d’une part, qui offre effectivement des prêts avantageux à ceux qui ont les moyens d’y souscrire, un secteur « sous–prime », d’autre part, qui mime le fonctionnement du premier mais vise en réalité à délester de leurs économies les malheureux qui cherchent à souscrire au « rêve » sans disposer en réalité des moyens financiers d’y accéder, au premier rang desquels, la population noire et celle originaire d’Amérique latine. Les combines sont ici nombreuses, allant des contrats aux conditions écrites différentes de celles de l’accord verbal, jusqu’aux offres qui visent simplement à acculer le candidat à la faillite pour bénéficier ensuite de la saisie du logement, en passant par les refinancements présentés comme « avantageux » mais aux conditions en réalité calamiteuses.
La bourgeoisie nantie s’est accommodée d’un système qui génère des plus–values immobilières qui lui ont permis de compenser des pertes aussi considérables que celles engendrées par l’effondrement du marché boursier en 2001. L’appréciation du prix des maisons autorise un effet de levier au sein d’un système financier bien rodé où toute composante du patrimoine peut être mise en gage afin de contracter de nouvelles dettes. Du coup, le taux d’épargne des ménages américains est tombé petit à petit des 6% comparables à ceux observés en Europe Occidentale, à zéro en 2006. La politique prodigue des compagnies émettrices de cartes de crédit permet aux ménages de vivre encore davantage au–dessus de leurs moyens, l’accord s’étant rapidement fait autour du principe qu’une dette est supportable si les revenus permettent de faire face aux échéances mensuelles, évaluées en termes uniquement des intérêts à payer, la question du remboursement du principal étant tout simplement mise entre parenthèses.
La frénésie de dépense ostentatoire d’une société où la rivalité avec les « Jones » – les voisins qu’il s’agit d’écoeurer – constitue une norme culturelle, alimente le déficit de la balance commerciale, vis-à-vis de la Chine en particulier. Celle–ci y trouve son compte et a décidé du coup de soutenir non seulement la dette du Gouvernement américain, en achetant mois après mois avec ses dollars en excès, des quantités considérables de Bons du Trésor, mais aussi plus directement encore la dynamique de l’immobilier résidentiel en étant l’un des principaux acheteurs de Mortgage–Backed Securities, ces obligations que les banques constituent en agrégeant plusieurs milliers de prêts au logement en un titre unique.
Dans un monde où les États-Unis risquent de perdre leur leadership sur le plan technologique, la Chine a encore besoin de la locomotive que constitue la consommation des ménages américains. Un jour cependant, le marché indien ainsi que son propre marché intérieur, suffiront amplement à ses ambitions. Elle pourra alors se désintéresser des États-Unis. Son retrait du marché de la dette américaine, où son intervention massive aujourd’hui contribue à maintenir des taux d’intérêt artificiellement bas, précipitera encore davantage la crise déjà amorcée aux États-Unis.
En effet, l’augmentation constante du prix du logement au fil des années a rendu de plus en plus difficile le recrutement de nouveaux acheteurs. Les deux sources classiques pour ceux–ci sont, d’une part, les jeunes, d’autre part, les immigrants. Or, l’immigration a subi un ralentissement marqué après la destruction des tours jumelles en septembre 2001. Quant aux jeunes, le prix croissant des logements met ceux–ci hors d’atteinte pour eux. Les organismes financiers se sont ingéniés, à leur intention, à mettre au point des formules de prêt qui reculent toujours davantage les échéances de remboursement : ainsi, les taux promotionnels, qui font en réalité croître la dette (« amortissement négatif »), ou les prêts sans amortissement aucun où le principal restera dû jusqu’à l’échéance, c’est–à–dire, très exactement la formule qui avait conduit le quart des emprunteurs à se déclarer en faillite personnelle durant la Dépression.
Lorsque les taux grimperont à la suite de la défection de la Chine sur le marché de la dette américaine, les derniers entrants sur le marché de l’immobilier résidentiel en seront rapidement expulsés. On comptait en mars 2006 que la fin, au mois d’avril, de certains taux promotionnels, signifierait à elle seule la faillite personnelle d’un ménage sur huit parmi ceux qui en bénéficiaient.
Introduction
Dans Après l’empire. Essai sur la décomposition du système américain, publié en 2002, Emmanuel Todd envisageait une crise majeure du capitalisme américain. Ignorant cependant sous quelle forme précise celle-ci se manifesterait, il écrivait : « Le plus vraisemblable est une panique boursière d’une ampleur jamais vue suivie d’un effondrement du dollar, enchaînement qui aurait pour effet de mettre un terme au statut économique « impérial » des États-Unis ». […]
69 réponses à “INÉDIT : LES 3 PREMIÈRES PAGES DE « LA CRISE DU CAPITALISME AMÉRICAIN » (2007)”
Juste une remarque, pas sur le contenu du billet, mais sur la pratique de l’éditeur :
Comment un éditeur s’autorise-t-il à supprimer des pages de ce qu’il édite ?
Droits d’auteurs ? Frilosité ? …
C’est souvent le directeur de collection… ou le correcteur… qui sont tous convaincus qu’ils sont beaucoup plus intelligents que vous … 😉
Ceci dit, chez Gallimard, on ne modifiera pas une virgule sans vous demander l’autorisation.
Sans prévenir d’auteur, c’est un peu fort de café.
Chez certains éditeurs, le plus important c’est l’auteur.
Chez d’autres, l’auteur est un accessoire, alors pensez chez un éditeur « de gauche » dans les mains de l’ultra capitalisme !
Euh… en vingt ans de travail dans l’édition, je n’ai jamais vu un correcteur supprimer des pages, comme vous semblez le dire.
Et merci de ne pas mépriser le travail des lecteurs-correcteurs, ces tâcherons de l’impossible qui exercent dans des conditions d’extrême précarité.
J’en suis… alors je m’autorise !
Si vous saviez…
Un certain Harry Dent dans « Le grand boom de 1993 » publié fin 1992 avait aussi prédit la mère de toutes les crises aux USA de 2006/2008 jusque vers 2020, avec un Japon définitivement ruiné et une Europe qui s’en sortirait plutôt un peu mieux.
D’autre part un certain John Xenakis affirme que la crise économique a été organisée, inconsciemment mais aussi consciemment; par la « jeune » génération actuelle, la génération X, celle de Barack Obama, pour se venger de la génération des baby boomers qu’elle estime incompétente et dictatoriale. Dans ce cadre la jeune génération actuelle serait celle d’une reconstruction et d’un « plus jamais ça ». Un autre point de vue intéressant sur la situation du monde, voir http://www.generationaldynamics.com et en particulier l’article récent « The Legacy of World War I and the Holocaust ».
Enfin Paul apparaît quelques fois dans un film de Hubert Védrine sur Arte+7 intitulé « Un monde dans tous ses états » et encore visible quelques jours. Rien de bien neuf pour moi qui regarde tout ça depuis fin 2006 mais une vulgarisation plutôt bonne qui va jusqu’à l’automne 2011. Je ne sais pas si le lien a déjà été donné alors le voici:
http://videos.arte.tv/fr/videos/un_monde_dans_tous_ses_etats-6405774.html
+1
une émission à regarder absolument ! Rien de neuf pour ceux qui suivent ce blog, c’est une belle remise en perspective des différentes crises actuelement en cours, économique, financière, climatique, énergétique, alimentaire.
+1
A regarder! La surprise, c’est qu’il y a quelques éléments positifs d’offerts en fin d’émission (une sorte de « happy end », comme tout bon film américain?…)
Même si c’est du vu et revu, c’est du bon boulot le film de Védrine.
Un truc dont je ne me lasse pas, c’est l’audition de Greenspan.
C’est qu’il en ressort grandi le beau diable. Sa sincère désillusion face à l’évident échec de ses 40 ans de politiques économiques en dit long l’ancrage profond de son idéologie néolibérale.
Les auditions des Golden boys de Goldman (Fabrice Tourre and co) laissent aussi sans voix. Ils n’ont pas, eux, tout du moins à l’époque des auditions, avoué avoir pris la mesure du délire complet dans lequel ils nageaient.
Dans un autre style, Inside Job de Charles Ferguson est un film / documentaire stupéfiant.
En 1980 je fais un voyage d’étude sur l’immo californien en compagnie de grands dirigeants français d’entreprises immo.
Déjà je suis éffaré des prix annoncés en milliards de $ pour des villas neuves à L.A et regarde la spéculation débridée faire fureur sans comprendre , lancée par des armées de vendeurs en call centers qui harponnent des chefs d’entreprises du nord pour délocaliser en californie , les salariés devant suivre et acheter aussi leurs maisons ou condo.
Il y avait là une industrie immo florissante qui cherchait à tout prix l’énorme gain.
il aura donc fallut 30 ans pour que tout s’écroule , c’était vraiment de l’abattage qui était pratiqué.
Il faut dire que les sociétés immo étaient tout à fait libres de toute contrainte , achetant des hectares pour construire des villes entières.
En début Janvier 2007, je disais justement à un de ceux là qui avait acheté des terrains pour construire là que tout s’effondrait, il en doutait, c’était un européen qui avait touché quelques millions de dollars de son activité là, il était dingue de ses projets et de l’accueil qu’il avait rencontré là bas en Californie, je suppose que depuis il a du réviser sa pensée.
Merci pour cet extrait.
J’ignorais ce fait. Une référence à soumettre à vos lecteurs pour se faire une meilleure idée du phénomène ?
Discours d’accueil d’un nouveau professeur dans une université américaine de la Ivy League (le top-5), par le recteur: « Il ne s’agit pas seulement de recruter les meilleurs mais aussi de prendre les meilleurs à nos concurrents, afin qu’ils ne soient pas à même d’être meilleurs que nous. »
C’est la mentalité donnée par l’accès facile au crédit . Ainsi, dans un village français où tous les hommes travaillaient pour des salaires quasi identiques dans la même usine de meubles et où les femmes étaient toutes employées pour un même SMIC à l’atelier de confection de lingerie, chaque famille essayait d’éblouir ses voisins par une voiture plus chère, une plus grande véranda etc …
J’ai employé le passé parce que les deux entreprises ont été délocalisées , ce qui n’empêche pas ces familles, toutes dans la même galère du chômage, de continuer à essayer d’écoeurer les voisins par des c….ries . Toujours la frime, les « must » !
Je ne sais pas si c’est la frime ou la peur de l’échec, qui fait jouer la comédie de la réussite ??? Si un spécialiste en psychologie humaine veut bien examiner cela.
Je crois que la Vigne serait bien placé pour répondre.
Ma bagnole, mon boulot, mes vacances, ma maison, ma femme, mon mari, mes gosses etc…
Misère et décrépitude du prolétaire.
Vous n’êtes pas écœuré…..
Vous en reprendrez bien une petite louche ?
A votre avis pourquoi aux « Nouveaux Monde », tout est deux fois plus gros que chez nous ?
par soucis de revanche ? comme quoi les complexes ça se trainent sur des générations !!!
@ demobilier: un article interessant dans Sciences Humaines: Soif de reconnaissance et inégalités volontaires. J. J Rousseau pourrait répondre à votre question. D’autres articles en accès libre sur le site du magazine.
Je remercie Mr Jorion pour avoir cité E. Todd. Ce blog est un de ceux dans lesquels j’ai le plus confiance.
Je crois pouvoir dire que Emmanuel Todd n’est pas ignoré, ici ;
il est cité quand c’est nécessaire. Par exemple, dans une entrevue
dont je ne retrouve pas les références, il avait prédit la stratégie d’échec
des Socialistes à la présidentielle. Si on admet que le candidat actuel
n’a pas grand chose à voir avec le socialisme, même tempéré
par la « soumission au réel », ses arguments d’alors me semblent encore fondés.
Je l’avais signalé.
Pour ma part, j ‘apprécie son originalité et sa vigueur dans « La chute finale »
ou « le fou et le prolétaire » par exemple.
J’ai emprunté à la bibliothèque municipale » le nouveau nationalisme
américain » de Anatol Lieven, uniquement parce que son nom – « Préface
d’ Emmanuel Todd »- apparaissait sur la couverture.
C’est un essai dans la ligne anglo-us, bourré de références et assez pesant à ingérer.
Ah non ! il faut apprécier Anatol Lieven en tant que tel (il n’avait que quinze ans quand il m’a expliqué la bataille de Waterloo, dont il savait tout, absolument tout, vous dis-je !)
Je viens juste de le commencer.
A première vue c’est un auteur qui aime la précision des références,
rien qui aille contre mon préjugé favorable.
En plus, datant de 2004, et centré sur la » philosophie » des Républicains,
je le prends pour un livre d’ Histoire, de celle qui s’est construite aux USA et
qui « explique » la tragédie de l’Irak et les tromperies qui en sont la base.
L’aveuglement de l’opinion US – « les auteurs de l’attentat sont en lien
avec Saddam et ses ADM. Détruisons-le »- reste un mystère.
Promis, je me sens en phase pour apprécier ce livre et son auteur,
Quand à Waterloo, et 15 ans ! , que peut-on espérer d’un jeune Anglais
passionné de son Histoire. J’espère qu’il ne vous a pas dit que ce jour-là,
les Britanniques ont sauvé tout à la fois le Continent de ses démons,
la Démocratie et la liberté d’ entreprendre.
Non, non : un intérêt pour la logistique uniquement !
On va pas en faire un roman, parce que tout ça, c’est Nelson qui la fait !
A partir de la destruction d’une bonne partie de la flotte et surtout
de la perte de l’esprit combatif de notre marine, Napoléon
ne pouvait que mal finir. Il lui aurait toujours manqué une liberté d’action.
Logistique ? En effet, c’est plutôt rare bien que très important
Le matériel de guerre, c’est lourd et encombrant. Il faut
des prodiges de prévisions pour balancer les Forces, afin
qu’elles soient au bon endroit en bon nombre, alimenter le gouffre,
le sien et celui des Alliés. Et le prix est consternant pour des finances
délabrées.
Le site http://www.stratisc.org/ publie la correspondance militaire
de notre homme ( http://www.stratisc.org/Napoleon_garde.html ).
A la lecture on peut dire que Napoléon était totalement obsédé par la logistique, plutôt opérations combinées tactico-logistiques et stratégie et les conséquences logistiques.
Il y a longtemps, je m’étais intéressé à l’opération de la Navy de rassemblement et de rapatriement des troupes espagnoles que Napoléon avait dispersé dans les Iles danoises.
Discrétion, politique et logistique navale.
Compte-rendu de lectures,
» Le NOUVEAU nationalisme américain » par Anatol Lieven. JC Lattès-2004.
Traduit de l’anglais ( Grande-Bretagne) par F. Boisivon et V. Raynaud.
Préface d’Emmanuel Todd.
( NOUVEAU est bien en majuscule sur la couverture ).
Secondairement :
» La menace américaine » par Theodore Roszak. Le cherche Midi- 2004.
Sous titre: » Le triomphalisme américain à l’ âge du terrorisme. »
Traduit de l’anglais ( Etats-Unis) par Edith Ochs.
Le prestige américain, qui a imprégné le monde après 1945, est mort.
» Le nouveau nationalisme américain » en est le constat.
Vie des idées et esprit public, psychologie et moeurs , politique et diplomatie, opérations extérieures pendant la Guerre Froide et séquelles de l’attentat « fondateur » de septembre 2001, ce livre expose pourquoi les USA ne se portent pas bien en explorant tous ces domaines.
Un livre aussi riche et documenté n’est pas facile.
Je me bornerai à ce que j’en ai retenu et à quelques réflexions.
L’auteur fait confiance à son propre jugement et ne cherche pas la caution des grands « ancêtres », penseurs ou philosophes.
La révérence à Marx est rapidement expédiée.
Weber et Tocqueville étaient inévitables, mais les emprunts sont d’ordre pratique ou factuel.
Point d’envolées intellectualisantes, encore moins d’idéologie, mais des faits, des événements que l’auteur agence et porte à notre connaissance avec sûreté et talent.
Le ton est descriptif mais ce n’est pas pour autant un instantané d’une période précise. L’auteur sait relier le présent à une histoire ayant de profondes racines, jusqu’aux sources des immigrations initiales,
Angleterre, Ecosse, et Irlande protestante avec la variété bien définie d’ Irlandais d’origine écossaise.
Il met en évidence la grande diversité de détails et le zonage géographique des croyances et opinions, ainsi
que la permanence d’une conviction qualifiée de « calviniste » par commodité.
La variété et le nombre des références sont étourdissants.
Un déluge, plus d’ une centaine pour chacun des 8 chapitres.
L’intérêt de l’accumulation des références et des sources est que l’auteur donne liberté à son lecteur d’en tirer ses propres observations, comme s’il s’effaçait devant la richesse de son sujet.
Ce livre est donc un « tremplin » qui invite le lecteur à le dépasser.
Il n’y a pas d’index, lacune compréhensible: il aurait sans doute doublé la taille du volume. Le regroupement des notes en fin de chapitre est très pratique.
Ces nombreuses particularités sont autant de qualités. Elles sont à porter au crédit de l’auteur et j’en ajouterai une autre:
il a su reléguer l’économie à un rang subalterne. De toutes les activités qui rendent l’observation des Hommes si passionnante, l’économie est en effet subordonnée ou contingente.
J ‘espère que mes lacunes et mon point de vue « latéral » ne dissuaderont pas un lecteur potentiel.
C’est un ouvrage important. Il faut le lire et réfléchir.
Ce livre est l’oeuvre d’un journaliste-historien qui s’est fait le tabellion impartial
d’une société en transition et qui souffre.
Le mot n’est pas écrit, je crois, mais « oligarchie » transparaît souvent, une oligarchie soucieuse de pérenniser ses chances. Visiblement, le jeu démocratique est quasi verouillé et le cynisme pour tout justifier est roi, autant que l’argent.
On comprend mieux l’aveuglement du corps électoral, savamment endoctriné.
Endoctrinement facile, car les Américains sont un peuple qui a un besoin vital de croire.
L ‘auteur, britannique, est si immergé dans la société US qu’il ne semble pas conscient d’un phénomène: la religion, ou les croyances religieuses, ne sont plus une affaire personnelle. Le citoyen doit subir des déclarations publiques, non sollicitées, de foi personnelle, et lui-même est invité à faire de même. Cette pression, quasi coercitive, ressemble fortement à la mise en condition collective pratiquée en URSS, il y a longtemps.
Mais ce n’est pas tout: la foi déborde sur l’action publique.
D’où des décisions politiques burlesques: par exemple l’interdiction d’enseigner uniquement l’évolution dans le règne animal théorisée par Darwin. ( Oh, joie et soulagement : il semble que Phyton soit oublié ! )
La Bible est admise à égalité avec Darwin.
C’est un « cas » pittoresque sans doute mais non inoffensif.
L’industrie florissante des prédicateurs est un autre exemple de cette invasion à caratère religieux, moral et politique.
L’ « offre » est très variée , il y en a pour tous les goûts.
Cependant les Américains ne font pas preuve de variété en matières socio-économiques.
Ici, l’unicité est totale.
Un seul modèle existe, celui de la libre entreprise triomphante et ses ( faibles) variantes. C’est le noyau indiscuté des convictions américaines. Il a résisté à toutes les vicissitudes.
Toute une armée de publicistes, faux journalistes, chercheurs stipendiés, professeurs prestigieux, etc…
s’emploient à faire en sorte qu’aucune pensée déviante ne puisse s’implanter.
Un certain nombres de ces gardiens du temple sont les créateurs de petites entreprises s’adonnant
aux conseils boursiers et aux prévisions économiques. C’est une garantie de conformisme et de compétence.
On ne s’étonnera pas que que l’ intervention de l’ Etat soit simplement condamnée; une véritable hérésie.
Ou que la timide social-démocratie européenne soit incomprise et rejetée.
Le « modèle » européen – vue de loin et à gros traits, l’ Europe peut passer pour unifiée- est révoqué en doute.
Lorsque que l’attaque contre un pays européen devient nécessaire, au gré des péripéties politiques, ils diront tous en choeur qu’ il est cynique, immoral et corrompu. Mais la critique envers l’ Europe la pire, et la mieux comprise,
reste son « capitalisme de copains »…
Au fond, les fredaines politico-religieuses sont admissibles. Elles contribuent à une règle de vie morale, individuelle et sociale, viable. Et cet idéal de vie ne doit pas être minoré. Mais aussi dérangeantes qu’elles paraissent, elles ne menacent pas le crédo US en matière d’organisation politico-économique, ce qui reste l’essentiel.
( plus bas, une note -et un clin d’oeil- de confirmation.)
Les oies du temple libéral pourraient dormir tranquilles mais elles ne s’autorisent aucune relâche.
Lieven traite trop rapidement, à mon goût, de la question de l’ empire américain.
Les dénégations américaines, maladroites, feront plutôt sourire.
Le lecteur aura l’impression qu’un voile n’aura pas permis à l’auteur
de traiter ce sujet avec son brio habituel. C’est d’autant plus surprenant
que l’auteur aurait pu s’inspirer de la notion d’ « Empire informel ».
Les Impérialistes britanniques l’avaient utilisée au 19.iéme siècle pour conjurer l’attrait de l’immensité de la Chine, politiquement vide et riche de promesses économiques.
Il donne néanmoins quelques citations permettant de se faire une idée, avec l’aide d’informations extérieures.
L’ Empire existe, c’est plus une fatalité historique et géo-politique qu’une volonté propre. Ils le disent.
Ses serviteurs sont extrêmement énergiques.
Ils l’ont doté des moyens organiques de toute nature
pour informer et surveiller, prévenir et exiger , et finalement punir.
Ces moyens sont mis en oeuvre sans état d’ âme. Les « déviants » sont dénoncés sans ambages.
Ces moyens sont de plus représentatifs de la croyance US dans les sciences et la technologie comme solution exclusive à tous problèmes.
La liste interminable des engagements guerriers US depuis 1945 montre sans appel leur goût irrépressible à se créer des ennemis.
Lieven permet tracer une ligne de continuité entre les Pères Pèlerins,- bigots, intolérants et n’ayant rien appris de leur persécution-, et l’action extérieure américaine caractérisée par l’ exceptionnalité missionnaire. On dira donc que le prêche, s’il est mal reçu, est parfois remplacé par des arguments moins pacifiques.
L’autre point que j’ai retenu concerne l’offensive contre l’ Etat.
Il mérite une prise de position .
Ceux qui en Europe estiment que l’ Etat a fait son temps feraient bien d’y réfléchir:
le vide créé par sa dilution, -la situation US en cours -, sera à toute force rempli
par une puissance économique multiforme, autrement avide et sans pitié;
la Force aux forts, la Souffrance en partage pour les autres.
Mon point de vue est que nous devrions tracer une frontière entre l’examen
des idéologies et leurs promotions, sans céder aux modes.
La disqualification de l’ Etat est une vieille lune de la droite libérale et réactionnaire américaine. C’est véritablement une antiquité, qui n’est pas sans fondement au Nouveau Monde. L’ Europe a une histoire différente.
Ici, nous avons besoin d’une puissance publique symbolisant et exprimant
notre volonté de vivre ensemble ou notre sociabilité politique.
Seul l’ Etat est capable de s’opposer aux coalitions d’argent.
Lui seul est capable de mettre un frein à l’accumulation des richesses,
défaut majeur du capitalisme libéral. Et ce n’est pas seulement un impératif moral, mais aussi un clause de survie:
la stratification inégalitaire menace la cohésion et le dynamisme d’une société .
Lui seul est capable de fédérer et protéger les initiatives locales.
Un Etat impartial et démocratique est potentiellement seul capable
d’assurer l’épanouissement de l’individu et du citoyen, et le faire échapper
à la condition de pantin gouverné par l’économie, seule autre branche de l’alternative.
A cet égard, l’idéalisme est hors de propos.
La situation américaine permet d’affirmer qu’un Etat se donnant pour tâche
de réglementer la finance, et tordre le cou à la spéculation, mérite par le fait-même le qualificatif d’impartial.
Finalement, on remarquera l’ hypertrophie de la fonction judiciaire aux USA.
Elle est probablement la conséquence du retrait de l’ Etat au nom du respect
de la liberté individuelle.
Apparté 1 :
En relation avec la démonisation de l’Etat, la finance s’est offerte comme objet principal de la puissance US au 21.ième siècle.
D’un côté, une participation substantielle au PNB du pays et à son rayonnement , de l’autre, autonomie et protection assurées par le pouvoir politique . Il y a là une connivence rendue possible par une interpénétration entre le gouvernement, le monde des affaires et les universités les mieux cotées. Il faut y ajouter des influents « instituts de recherche », ayant le statut fiscal de fondation, en fait des activistes politiques à prétentions intellectuelles, quelques fois usurpées.
Cette émancipation de la finance s’est presque conclue sous Clinton. les Présidents suivants l’ont confirmée. C’est une tendance historique, déja notée par Galbraith dans « la crise de ’29 ».
Ce phénomène sera certainement jugé important plus tard. L’ auteur est visiblement passé à côté mais il a plusieurs excuses : d’abord son parti pris a-économique, ensuite la très relative solidité de l’ économie au moment de la rédaction. L’ économie n’était pas alors un sujet prévalant et la finance en était encore à sa phase ascendante.
Apparté 2 :
Un Gorbatchev US est-il possible ?
La réponse, à la lecture de Lieven, est négative: l’opinion, sa part la plus agissante s’entend, s’égarait déja en 2003-2004 dans une impasse politico-religieuse bizarre, véritable défi à la compréhension commune mais largement approuvée.
La pratique politique américaine est à front renversé: le Président a à refréner « ses » propres extrémistes.
La mise en pratique d’une politique « populiste » , sûrement fondamentaliste, serait un cauchemar ou une « tentative de suicide ».
( « tentative de suicide » est le titre du chapitre sur la guerre du Vietnam, par Paul Johnson dans son livre » Une histoire du monde moderne ». Paul Johnson est cité par Lieven dans un autre contexte.)
Seule une brisure de la cristallisation actuelle pourrait faire émerger de nouvelles façons d’appréhender la politique et le rôle de l’ Etat. Elle est très peu probable.
Mais, après tout, l’armature en place n’est-elle qu’un tigre de papier. La générosité, la subtilité, et le goût pour des conceptions politiques à la hauteur d’un Monde complexe, n’ont tout de même pas entièrement déserté les USA.
Apparté 3 :
La France est particulièrement vulnérable à l’affaiblissement de l’ Etat, parce que
ses élites et son personnel dirigeant sont d’un rendement anémique en matière économique.En d’autre termes, l’initiative privée, observée sur une longue période, y est toujours défaillante.
Il nous faut une superstructure engerbant les énergies.
Nous le devons, non pour notre intérêt direct, mais pour l’équilibre de l’Europe.
J’ ai plaisir à signaler que l’auteur cite Bernard Fall.
( note 113 du chapitre » Splendeur et misère du crédo américain; le livre cité est » The two Vietnams », Praeger, 1964.)
C’est une marque de richesse et de complétude dans la documentation. Et une main tendue au lecteur…
Wikipédia en français signe un très bon article biographique sur Bernard Fall.
L’ Indochine fait partie de notre histoire occultée.
» Le nouveau nationalisme américain » est un livre indispensable.
» La menace américaine » en est un complément quasi parfait .
J’ai lu les deux livres en parallèle. Sans doute, je les ai quelque peu mélangé et attribué à l’un ce qui est à l’autre.
Roszak fournit beaucoup moins de notes et références que Lieven mais les interrogations sont semblables.
Le ton est parfois véhément, comme une rage froide. Un pamphlet.
Roszak est américain. Il dénonce la trahison dont il s’estime victime.
Il met en évidence que l’oligarchie, au pouvoir depuis la présidence de Reagan, n’est pas majoritaire, malgré ses dires. Elle n’ a pas reçu un mandat explicite pour appliquer des politiques brutales et sans retour; à savoir , à l’extérieur l’alliance inconditionnelle avec Israel, à l’intérieur la destruction, parfois en sous-main, du filet de protection sociale initié par Roosevelt.
Une forte minorité estime cette politique préjudiciables aux intérêts à long terme de la nation.
Le mépris pour Roosevelt jugé sous influences européennes et pour Keynes, les oppositions de principe guidées par une idéologie partisane revancharde, parfois haineuse, négligeant souvent l’intérêt commun, tout cela constitue un facette désolante de l’exercice de la Démocratie aux USA.
L’ influence de l’argent en est une autre, également mauvaise.
Un long chapitre est consacré aux doctrines religieuses en vogue .
L’ auteur marque nettement que la substance de la croyance est secondaire.
De 60 à 80 millions d’américains, dont sans doute un ancien Président, croient des billevesées bâties de toutes pièces à partir de la Bible, qu’un Européen « normal » rejèterait comme étant des galéjades.
Un exemple révélateur de ce besoin indiscriminé est la popularité des théories complotistes. Les fictions montrant des patriotes chrétiens sionistes, prémillénaristes ou autres (!), luttant contre un complot fomenté par des méchants, sont des succès de librairie à plusieurs dizaines millions d’ exemplaires.
La laîcité des institutions promue par la Constitution – une disposition souvent ignorée- est totalement battue en brèche par beaucoup de politiciens et hommes d’ Etat. Non seulement ils font un étalage public de leurs convictions religieuses mais ils les revendiquent comme source d’inspiration de leurs projets.
L’ accusation de viol de la Constitution est matériellement fondée. Ce dévoiement à la base prouve le dérèglement du jeu politique et de la Démocratie aux USA.
L’auteur conclut ce chapitre en affirmant que, transposées en politique, ces doctrines représentent une menace contre la Paix.
J’ai l’impression que Roszak minimise la part tactique, ou le cynisme, du personnel politique dans sa quête de la popularité. Car le lecteur est stupéfait du niveau primaire des arguments politiques, souvent mêlés de considérations religieuses ridicules ou étranges.
La question est légitime : « Sont-ils sincères? ».
Ces deux ouvrages ont un point commun : ils décrivent une société éclatée, apeurée et grosse de violences civiles.
Sa cohésion repose sur une intense propagande dont la teneur est: » les « standards » américains sont les meilleurs; tout dysfonctionnement possède sa solution dans un cadre indiscutable. »
Le melting pot est réservé à quelques privilégiés.
Pour les autres, il ne reste que le repli communautariste et une sorte d’apartheid.
Les USA prouvent qu’un pays peut s’infliger des souffrances aveuglément.
On se sent mal à l’aise à observer que tant d’énergie et de bonne volonté soient
gaspillées ou mal orientées.
Il y a là un ratage, ou un échec collectif, qui n’a pas de raison d’être.
Enfin, avec les mêmes préoccupations, on pourra relire » Une Amérique Qui Fait Peur » , Edward Behr, 1996.
Rapidement : une vieille photographie journalistique, brocardée à sa parution, mais amplement confirmée
dans son objet, sinon dans ses détails.
Comme le dit Emmanuel Todd, en substance, dans la préface à Lieven , ces lectures loin de prédisposer à l’inquiétude nous transfusent l’ espérance, si nous savons raison garder.
Il est évident que le Monde unifié par la théologie libérale ( impulsée par les USA) est à la croisée des chemins. Soit nous nous laissons aller à une fin, certaine bien que ses contours et les délais restent peu perceptibles, soit nous étudions des voies de dégagement. La situation américaine nous invite à cet effort.
Disons-le clairement, les voies et moyens qu’il nous faut découvrir ne devront presque rien à l’exemple américain.
Lieven et Roszak décrivaient déja en 2004 un repoussoir, et l’actualité les confirme bien trop souvent.
Le renouveau viendra de l’ Europe, si nous savons nous débarrasser de notions bâties uniquement pour assurer l’ hégémonie, économique au premier chef, d’un seul pays dans un monde en compétition. L’ économie est une fausse science qu’il est très facile à la Puissance du moment d’instrumentaliser, en vue de prolonger sa prééminence.
Le concert des nations doit cesser d’être une jungle, seul contre tous; place à l’entr’aide et à l’ émulation dans la coopération.
Etudions les « solutions » américaines, reconnaissons-en même la conformité à leurs situations… et faisons autrement. Dans le doute, faisons le contraire! L’erreur sera faible et toujours amendable.
A l’intérieur, le socialisme, débarrassé de ses scories idéologiques, est la voie privilégiée. La protection et la promotion des humbles est le fondement d’une politique en rupture avec les errements d’aujourd’hui.
Il nous faut construire une société apaisée, en tout cas désintoxiquée de la violence inhérente aux inégalités .
Il s’agit bien de faire renaître, et encadrer dans l’exercice de la démocratie, ce qui se nomme encore « lutte des classes ».
Les USA cesseront d’être un phare et serviront plutôt de contre-épreuve.
C’est le destin ordinaire d’un impérialisme débordé par ses difficultés intérieures.
Il aura peu duré, espérons-le pour le repos du Monde.
La grande République en a vu d’autre. Elle a assez de ressources intérieures pour rebondir. Car ces deux livres confortent une intuition: la société US, l’organisation collective US, la civilisation US, un je-ne-sais-quoi US possède le talent d’ extraire le maximum de ses participants, au bénéfice de la collectivité; une société à haute productivité en quelque sorte.
Les USA resteront un pays indispensable, exubérant et créatif, dans une humanité multipolaire et apaisée.
Daniel.
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Note extraite de Paul Jorion, « L’ endettement excessif aux Etats-Unis et ses raisons historiques. »
Les citoyens américains dans leur quasi-totalité considèrent le système économique qui est le leur comme idéal, n’envisageant sa réforme possible que sur des aspects mineurs. Suggérer à un Américain que certaines des institutions de son pays pourraient être améliorées si l’on s’inspirait de l’expérience d’autres nations, produit toujours chez lui la même consternation : s’il lui paraît admissible que certains détails soient révisables, l’idée que d’autre nations auraient pu faire mieux à ce sujet est pour lui inacceptable.
Et c’est pourquoi on pourrait être tenté de qualifier le capitalisme tel qu’on le trouve aux Etats-Unis non pas de « sauvage », mot qui suggère un archaïsme, mais de « fondamentaliste ».
Comme Marcel, je remercie Paul Jorion. Emmanuel Todd est un esprit remarquable qui finira par se transformer en « pierre angulaire » d’une nouvelle pensée sociale, économique et internationale
@Paul Jorion
« il n’avait que quinze ans quand il m’a expliqué la bataille de Waterloo, dont il savait tout, absolument tout, »
Alors : qu’en est-il de l’historicité du mot de Cambronne?
Puisqu’on est dans les petits rappels. Voici, pour les nouveaux venus sur le blog qui découvrent Paul, un moment de télé qui passera à l’histoire. C’était début 2010. Aujourd’hui nous savons :
1) que Paul avait évidemment raison sur la Grèce et le reste (le prétexte à détruire le filet social).
2) que son contradicteur méritait d’avoir des problèmes avec la justice.
http://www.pauljorion.com/blog/?p=7689
Au passage, cet extrait télé ouvre une nouvelle fois le débat malhonnêteté-incompétence de nos élites. Eric Woerth ment-il face à Paul ou est-il un incompétent? On peut maintenant douter de l’honnêteté de Woerth à l’appui de certaines affaires récentes. En ce qui concerne l’incompétence, rien ne le laisse a priori supposer vu que ce type était au départ spécialisé dans l’optimisation fiscale et l’audit des collectivités locales, plus largement son boulot a toujours été « la gestion des gros sous ».
un tres grand moment de television a continuer a faire partager a tous.
à Moi,
Un menteur ne pourrait-il pas être incompétent et un incompétent ne pourrait-il pas mentir ?
Eric Woerth, vu le nombre d’affaires qu’il a gérées et donc qu’on lui a confiées, est à l’évidence quelqu’un d’absolument compétent (c.a.d. quelqu’un qui sait faire). Son bilan est plus qu’élogieux pour ceux qui aujourd’hui nous regardent de haut.
Ce ne sont pas leurs finances qui s’en plaignent, mais les finances publiques !
C’est possible dans le vague et en parlant d’une même personne dans deux contextes différents. Mais je parle d’un cas précis et concernant une assertion précise. Lorsque Woerth dit qu’il ne faut pas s’inquièter concernant la Grèce, il n’y a que deux possibilités:
1) il sait qu’il faut s’inquièter mais il ment
2) il ne sait pas qu’il faut s’en inquièter.
Le cas 2) est difficile à croire vu le CV du gars. Et puis, un incompétent qui tire toujours un bénéfice de son incompétence est-il toujours un incompétent? La majorité risque bien de crever de faim la gueule ouverte en pensant que les riches bien gras qui les dirigent sont des cons. Je vous laisse juger qui a l’air le plus con dans ce cas de figure…
@Yves de Bressy: vous m’avez devancé, c’est exactement ma pensée.
Le compétent qui ment sait qu’il ment et que son mensonge sera dévoilé, alors pourquoi ment-il ?
Pour gagner du temps ?
@Marlowe: vous me faites penser à une planche d’une bédé (c’est je crois dans les séries des blagues coquines de Dany).
De mémoire: une femme revient chez elle et découvre son mari au lit avec une autre. Elle commence à crier sur le mari qui se rhabille tranquillement pendant que sa maîtresse s’enfuit. Sa femme lui crie toujours dessus alors qu’il refait le lit et range la chambre, de manière toujours très impassible. Puis quand il a finit, il met une claque à sa femme pour la calmer et lui dit comme à une folle : « Mais enfin, tu es cinglée? De quoi parles-tu?! ».
Quand Monsieur Marlowe se posera des questions intelligentes le monde en sera-t’il révolutionné ? C’est ben possible.
Monsieur Marlowe a.t’il idée de ce que représente un gain de temps pour tout un chacun, ne serait-ce qu’un court ou moyen-terme, particulièrement pour un chacun/chacune dans la finance ou dans la politique ?
Par ailleurs monsieur Marlowe ignorerait-il qu’un chacun/chacune compétent par exemple en matière criminelle serait particulièrement avisé de mentir éhontément face aux vents contraires et ligués de l’évidence, de l’adversité et des arts persuasifs d’une équipe de la Criminelle durant une garde à vue, au risque sinon de perdre effectivement beaucoup de temps en prison, quitte à repousser ainsi de quelques menus temps l’heure du Jugement prochain à celle du Dernier ?
Encore un étalage édifiant de l’humour Môayen…
Mes meilleurs sentiments à Mme Moi… la vie doit pas être drôle tous les jours.
Quand la raison cède la place à la raison d’état, est-ce bien raisonnable ?
Le spectacle EST par définition LE mensonge.
Toutes les mamans racontent des histoires pour endormir les frayeurs de la nuit.
Les papas ne peuvent être des ogres.
Pour la vigne, tu peux faire court toi aussi. merci.
@vigneron: « Encore un étalage édifiant de l’humour Môayen… »
Ouais, j’avoue. 🙂
Si un menteur peut mentir quelque temps c’est uniquement parce que le monde, c’est-à-dire les rapports sociaux sont fondés sur le mensonge.
Bonjour,
Assumer qu’une personne au pouvoir est incompétente est une forme d’incompétence.
Quoi qu’il en soit ils sont responsables, pénalement j’espère.
N’avez-vous pas remarqué qu’ils échappaient tous aux sanctions pénales ?
On peut discuter des peines mais impunité, non…
Carignon, Noir, Léotard, Boucheron, Pasqua, Emanuellli, Juppé, Tibéri, Dugoin, Santini, Donnedieu de Vavres, Balkany, Dumas, Mellick, Schuller, C. Mitterrand, Flosse, Bédier, Chirac, etc, DSK ?…
Non, y’a des procureurs et des juges d’instruction qu’ont bossé un peu à c’qui paraît… y’a plus cool pénalement comme bisness, beaucoup plus cool…
@ Vigneron
Vous êtes victimes des titres des journaleux ( » effet d’annonce. »)
Ils ont bien morflé, je le suppose.
Mais pour un cas que je connais parmi ceux que vous citez , il a bien été
condamné avec les égards de la Cour et l’estime de ses pairs , mais
pour le dixième de ce dont il était coupable.
Pour vous mettre sur la piste, si le coeur vous en dit:
il continuait à percevoir sa paye en prison, pour un poste électif
rémunéré qu’il ne pouvait exercer.
J’en profite pour dire que l’élection ou la ré-élection n’a pas pouvoir de laver un comportement délictueux.
Un pourri réélu reste pourri.
@ vigneron,
certes quelquefois ils se font prendre.
mais quand ils sortent de leurs quelques mois de prison avec sursis et qu’ils ont payé leur cotisation (enfin, amende) de 0,01% de ce qu’ils ont détourné, ils se retrouvent où, en général ?
Pas à faire la manche, en tous cas. Ils continuent à nous regarder de haut.
Le capitalisme c’est la privatisation des profits, et la socialisation des pertes.
Capitalism is the privatization of profits and socialization of losses.
El capitalismo es la privatización de las ganancias y la socialización de las pérdidas.
Le rêve des émergents: « Consommer comme des occidentaux! », notre cauchemar: « Travailler comme eux! »
The dream of emerging people: « Consume as western people » Our nightmare: « Work like them! »
El sueño de los emergentes: « Consumir como occidentales » Nuestra pesadilla: « Trabajar como ellos! »
Voilà qui me rappelle ce bel aveu de François FIllon, dans son discours au colloque « Patrimoine et fiscalité : enjeux et convergences européennes » le 3 mars 2011. Le mot-clef est là aussi le verbe « rêver » :
Sic transit gloria mundi…
Le discours complet est à http://www.gouvernement.fr/premier-ministre/discours-du-premier-ministre-au-colloque-patrimoine-et-fiscalite-enjeux-et-converge
Si Shakespeare avait raison quand il disait que « nos vies sont tissées de l’étoffe dont sont faits nos rêves », on comprend mieux l’état d’une société à laquelle sont proposés comme rêves ceux de l’ascension sociale, d’autant plus quand l’ascenseur est en panne.
Y’en a qui…seront jamais dans la merde (à propos d’ascenseur).
Yves Jamait.
http://www.youtube.com/watch?v=498lnrLD59w
Oui mais pourquoi la titrisation a eu autant de succès?
Introduite en France en décembre 1988, elle est passée inaperçue. En effet il s’agissait de titriser des dettes irrécouvrables en partie: La production de « junk bond »
Il est tout à fait clair que ces titres étaient mal vus des marchés régulés.
Or justement on a introduit une dérégulation des marchés en y autorisant la création de plateformes »concurrentielles », permettant de baisser les couts de transactions et « d’augmenter la liquidité ».:
Les MTF, (Système multilatéral de négociation de titres). Pas de couts veut dire pas de controle.
On les nomme « Dark Pool ».
Ainsi les titrisations de dettes pourries pouvaient etre échangées dans ces « Dark Pool » en dehors des marchés régulés.
C’est en 2004 que la Commission Européenne introduisit les « dark pools » en Europe:
http://eur-lex.europa.eu/LexUriServ/LexUriServ.do?uri=CONSLEG:2004L0039:20040430:FR:PDF
Pour etre généralisés en novembre 2007! Soit un an avant la chute de Lehman.
Désormais les dark pool, à l’origine de la Crise, ont encore du succés:
Bourse – Le succès fulgurant des plateformes alternatives (MTF):
http://www.lenouveleconomiste.fr/lesdossiers/le-succes-des-plateformes-alternatives-mtf-9602/
« Le succès des MTF[1] (gérés à la fois par les MR[2] et les PSI[3]), initié par la mise en place de la MIF, se concrétise aujourd’hui avec une part de marché de 40% sur les valeurs du LSE et de 30% sur le CAC40. Cette montée en puissance des MTF s’est accompagnée d’un essor grandissant des dark pool (plates-formes opaques de négociation adossées un MR ou à un MTF) qui proposent à leurs membres une totale confidentialité dans l’exécution de leurs ordres de grande quantité (blocs de titres). »
http://finance.sia-conseil.com/20100713/la-revision-de-la-directive-mif-sera-t-elle-a-la-hauteur/
Bien entendu on ne reglemente pas en Europe les MTF, et Barnier et les autres n’ont pas l’intention de revenir en arrière.
A quoi sert de réguler des marchés déja régulés en laissant les MTF?
Le CAC et Down-Jones ne sont qu’une façade publicitaire du capitalisme pour les gogos.
Ainsi la formation des prix est devenu opaque…Le capitalisme est à l’agonie.
Une très bonne analyse ici:
http://www.renovezmaintenant67.eu/index.php?post/2012/02/16/Victoire-des-Lobbies-financiers%3A-la-Directive-MiFID-March%C3%A9s-d%E2%80%99instruments-financiers-et-services-d%E2%80%99investissement
Monsieur Jorion,
J’ai pris le temps (il y a deux ans déjà) d’éplucher les minutes de la FED sur les années 2003 à 2008, et j’ai pu constater que l’augmentation du taux d’intéret de juin 2004 à juin 2006 se fait conjointement à une préoccupation accrue (dans ces minutes) sur les prix de l’énergie.
Du type (août 2004) : « Core consumer price inflation moderated substantially in May and June, though sizable increases in food and energy prices continued to push up overall consumer price inflation. » (lien)
Cette préoccupation, je l’ai mesurée en comptant le nombre d’occurrence du mot « energy » dans chaque minute de la FED, et c’est édifiant.
En résumé, début 2004, il n’est prononcé que 3 fois par séances, 10 fois début 2005 et 15 début 2006. (pour rappel, le prix du baril de brut triple, passant en moyenne de 20 à 60$ sur la période)
En 2007, « energy » est retombé à 10 occurences, et c’est le problème de l’immobilier qui est au cœur de leur discussions.
Ici le liens vers le graph récapitulatif que j’ai construit. lien vers image
Un coup d’oeil rapide vaut mieux que mille explications.
Une ligne pour le taux de la fed, une barre pour le nombre d’occurrence du mot « energy » (moyenné sur 5 séances), le tout ajusté sur une même échelle.
Corrélation n’est pas démonstration évidemment, mais cette juxtaposition est troublante.
Pensez vous que cette préoccupation sur le prix de l’énergie ait pu ajouter un élément supplémentaire (au problème chinois) ?
Comme je n’ai pas lu votre livre, je « découvre » aujourd’hui cette explication (défection de la chine) à l’augmentation des taux (le reste du mécanisme subprime m’étant depuis l’automne 2008 en revanche familier). Avez vous un argumentaire plus étoffé dans vos pages ? (n’allez pas dire oui juste pour que je l’achète, hein 😉 )
« Correcteurs plus intelligents que vous ? »
« Pour parer à une crise financière majeure » : dommage qu’ils aient laissé passer une faute dès le 3e mot de l’ouvrage !
« On pare quelque chose » (et non « on pare à quelque chose »).
Cordialement.
Mais, vous ne comprenez pas : ça n’a PAS été publié !
Bonsoir,
Au chapitre correction, n’y aurait-il pas une erreur de conjugaison dans cette phrase:
« Voulant vérifier la correspondance dans la numérotation des pages, je me suis rendu compte que le résumé du livre, qui constituait les pages 2 à 4 du manuscrit, avaient été éliminées par La Découverte lors de la parution du livre en 2007[…] »?
Ok, merci.
@GéBé
Vous auriez peut-être du parer au plus pressé en ne vous attachant pas à ce détail…
C’est exactement le type de prêt dit « aidé » PAP dont j’ai été victime en 1986, avant l’arrivée du prêt à taux zéro . Ce prêt PAP dont les mensualités commençaient comme un simple loyer et augmentaient de 4% chaque année tandis que les salaires augmentaient alors entre 5 et 8% par an depuis très longtemps était un piège pour les familles aux revenus trop modestes pour se voir accorder un prêt normal dit « prêt conventionné » ( équivalent du « prime »américain ). Comme par hasard le gouvernement décida de bloquer les salaires deux ans plus tard. Les mensualités de remboursement continuaient d’augmenter de 4% tous les ans et les banquiers reprirent leurs maisons aux « PAPistes » surendettés pour les revendre pour une bouchée de pain à des copains . Le malheureux « PAPiste » se retrouvait donc de nouveau locataire tout en devant continuer à rembourser d’énormes mensualités pour une maison qu’il n’avait plus et qui avait été bradée pour presque rien .
J’avais à l’époque une collègue de travail qui en avait un, elle avait payé 380KF et si elle voulait le transformer elle redémarrait avec 420KF plus que son emprunt de départ !!! C’était un prêt du crédit agricole !!! le bon sens près de chez vous, c’était ça la pub je crois ?
Comme je vois un flux vers mon site provenant de celui de M. Jorion,
je me permets de vous donner un commentaire
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Une chose que j’ai identifiée dès le 28 août 2009,
et que strictement personne n’a identifiée
est que le Housing Bust est composé de 3 bulles qui éclatent successivement depuis 2006/07:
1) la crise appelée communément « Crise des Subprimes » (Bush / Paulson), qui est terminée
2) la crise des Alt-A et des Primes (Obama / Bernanke / Geithner), dont la seconde bosse est pour janvier 2013,
et qui atteint les emprunteurs qui n’étaient pas des junkies ou des NINJA – No Income, No Jobs avec zéro bonités bancaires
et la crise dont strictement personne ne parle et qui va laminer définitivement les USA >>>
3) la crise Obama Mortgage / FHA – Federal Housing Administration / Ginnie Mae (Obama / Geithner)
qui va éclater à partir de l’hiver 2014 à la fin de la deuxième bulle
qui est une crise surajoutée personnellement par Obi, le roi du bricolage avec ses Obama Mortgage, les crédits hypothécaires qui portent officiellement son nom.
Pour de plus amples détails je vous prie de venir lire mon vieux post en entier >>> http://www.renovezmaintenant67.eu/index.php?post/2009/08/28/Avec-l-accord-d-Obama%2C-la-troisi%C3%A8me-crise-des-subprimes-est-pr%C3%A9par%C3%A9e-par-Federal-Housing-Administration-et-Ginnie-Mae
J’appelle aussi cette troisième crise
– la crise des Sub-Subprimes
– ou la crise des Helikopter Loans.
Car Obama a jeté des milliers de milliards de $ aux particuliers pour « relancer » l’immobilier ou refinancer une XXXL-ième fois les crédits hypothécaires.
C’est un dévoiement du deficit spending keynésien.
La crise des Alt-A, dont les emprunteurs, à peine moins pauvres que ceux des « subprime », risque de faire encore plus mal puisqu’ils n’étaient pas répertoriés ni encadrés comme les « subprime » dont le nombre était limité et connu . Le nombre des emprunteurs ALT-A est vraisemblablement bien plus élevé et impossible à connaître avant leur cessation de paiement . Cela risque de faire encore plus mal que la crise des « subprime ».
Je suppose que la crise Alt-A a déjà commencé, s’enchaînant directement à la suite de celle des « subprime » et c’est le plus gros de la vague qui sera en 2013.
Pouvez-vous nous en dire davantage sur la 3e crise, celle des crédits hypothécaires . Pourquoi attendra-t-elle l’hiver 2014 pour éclater ?
Au début de son quinquennat, Sarko trouvait que nous étions en retard et voulait autoriser ces merveilleux crédits hypothécaires . L’a-t-il fait ?
Excusez-moi, mais je traite ces questions sur mon site.
Je lis une trentaine de quotidiens en ligne en trois langues depuis 2006,
c’est un énorme boulot
@+
Thomas, le Cimbre,
Malheureusement je n’ai pas les compétences techniques pour juger de votre affirmation selon laquelle il y aura une troisième bulle dévastatrice pour les USA.
Quelqu’un se dévoue sur le blog pour vous répondre sur le fond ?
Je pense que votre commentaire appelle un commentaire éclairé, c’est ainsi qu’on fait avancer le débat.
C’est amplement expliqué dans mon billet dont je vous ai donné le lien ci-dessus
Les Grecs ont toujours de l’avance.
Jadis ils ont inventé la démocratie, aujourd’hui ils inventent la bancocrature.
A chacun de choisir le régime qu’il préfère.
Nous serons heureux de vous accompagner dans votre voyage politique.
Un intéressant article dans http://www.spiegel.de d’aujourd’hui, titre: « Abstieg der Geldgötter » (crépuscule des dieux de l’argent)
« Pour la deuxième fois en trois ans maintenant, l’argent public a été assouplie afin d’éviter un enfer bancaire. Une fois de plus, les risques du secteur monétaire sont communautarisés. »
C’est ce qui vient de se passer avec le MES secret inviolable incontrôlable dont le personnel dispose de l’immunité diplomatique !!!
la dictature des marchés à votre porte