Billet invité.
Débordants d’imagination, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy auraient un nouveau plan pour aborder ce mois de septembre qui s’annonce terrible. Ils envisageraient ni plus ni moins que de renforcer l’équipe d’Herman van Rompuy et de lui demander de se consacrer à plein temps à la gouvernance économique de la zone euro, une façon de le rendre pleinement responsable, dans tous les sens du terme. Coupable d’être favorable aux euro-obligations, Jean-Claude Junker serait de facto remercié et le Fonds de soutien (FSFE) pourvu d’un département de recherche et d’analyse… Ils voient loin !
La Commission et le secrétariat de l’Ecofin seraient ainsi marginalisés, la création de nouvelles structures faisant office de politique. C’est toujours ce que l’on fait lorsque l’on ne sait pas quoi faire.
Or il y a encore une fois le feu au lac. Trois bras de fer sont engagés afin de tenter de boucler le deuxième plan de sauvetage de la Grèce. Avec la Finlande qui persiste à demander des garanties pour son prêt et à qui il est proposé d’abandonner en contrepartie la perception d’intérêts. Avec la Grèce, qui a refusé de donner de nouveaux tours de vis pour compenser l’insuffisance de recettes fiscales, amenant La Troïka à spectaculairement interrompre sa mission, menaçant du bloquer le versement d’une nouvelle tranche d’aide. Avec les banques, enfin, qui continuent de renacler à participer au volet privé du plan. Cela fait beaucoup et crée sur le marché de très fâcheuses incertitudes au moment où il ne faudrait pas.
Plus souterraine, une autre dimension de la crise financière monte parallèlement en puissance. Les banques européennes rencontrent des difficultés grandissantes à se refinancer pour reconduire leur dette. On savait déjà que les fonds monétaires américains faisaient la tête en fermant partiellement leurs robinets, menaçant particulièrement les banques françaises, comme Moody’s l’a analysé dernièrement et François Pérol, président de la Fédération bancaire française (FBF) vient de le reconnaître en avouant que « le refinancement en dollar est plus tendu ». On a depuis appris que le marché obligataire menaçait de bouder les émissions des banques, sauf quand il s’agit d’obligations sécurisées, plus sûres mais plus onéreuses. Les robinets ne sont certes pas totalement fermés, mais le coût du crédit est en augmentation, au détriment des marges des banques. La poursuite d’une telle situation reviendrait à un lent étranglement.
Si l’attention est focalisée, au sujet des banques, sur la zone euro, les établissements britanniques et américains ont également leurs petits soucis. A la City, certaines d’entre elles ont perdu dans les derniers mois plus de 30% de leur valeur boursière, en raison de la crise de la zone euro et de la perspective d’une réforme bancaire aux effets redoutés. On attend pour le 12 septembre le rapport de la commission John Vickers qui devrait préconiser une séparation des activités de détail et d’investissement des banques, selon des modalités encore indécises et plus ou moins abruptes. Aux dernières nouvelles, celles-ci auraient obtenu que la réforme soit repoussée à 2015, date des prochaines élections. Encore et toujours, elles bloquent toute réforme…
Aux Etats-Unis, il s’agit d’une toute autre affaire, les banques sont rattrapées par les subprimes. Alors que Bank of America, la plus grande banque américaine en termes de dépôt et de capitalisation boursière, tente par tous les moyens de se recapitaliser en raison de ses pertes, 17 établissements bancaires, dont sept étrangers, sont visés par une plainte de la Federal Housing Finance Agency (FHFA), qui supervise les prêts immobiliers.
Ils sont accusés d’avoir trompé sur la marchandise Fannie Mae et Freddie Mac – des victimes consentantes, disent certains – en leur vendant des actifs adossés à des créances hypothécaires douteuses (des RMBS). Ces deux organismes qui ont déjà reçu 170 milliards de soutien sur fonds publics en ont acheté pour 200 milliards de dollars entre 2005 et 2008. Les montants qui vont être réclamés ne sont pas connus, mais l’on sait par exemple que JP Morgan aurait vendu à elle seule pour 33 milliards de dollars de ces titres, tous les autres grands établissements étant visés. Parmi les banques étrangeres également dans ce cas figurent la Société Générale, Royal Bank of Scotland, le Crédit Suisse et la Deutsche Bank… Que du beau linge.
La crise marche sur deux pattes, la dette des banques que l’on retrouve toujours tapie quelque part, et celle des Etats, qui est exposée au grand public comme au pilori. En fin de semaine dernière, confirmé ce lundi matin, les bourses européennes reprenaient sans exception leur dégringolade un moment interrompue, tirées vers le bas par les valeurs financières en chute libre dès l’ouverture tandis qu’il était révélé que les dépôts au jour le jour des banques auprès de la BCE avaient atteint vendredi un montant de 115 milliards d’euros, un nouveau record, signifiant qu’elles préférent les mettre à l’abri plutôt que se les prêter entre elles.
De Pékin, Robert Zoellick, le président de la Banque Mondiale, a estimé que l’économie mondiale allait entrer « dans une nouvelle phase dangereuse cet automne ». Se démarquant des appels réitérés de Jean-Claude Trichet à la réduction des déficits – le dernier en date en Italie, où il a estimé qu’elle était « décisive » – Christine Lagarde vient d’accorder à Der Spiegel une interview dans laquelle elle préconise un programme coordonnée de stimulation de la croissance et réaffirme la nécessité de recapitaliser les banques européennes. Les divergences de vue entre la BCE et le FMI ne datent pas d’hier, mais elles sont rarement aussi explicitement et publiquement exprimées.
Pour le moins crispé, et prenant le risque d’être soupçonné d’avoir une idée fixe, Jean-Claude Trichet estime ce lundi que la renforcement de la surveillance économique de la zone euro est « absolument impérieux », ne pouvant concevoir d’autre issue que via des mesures coercitives et de rétention. C’est dans le droit fil de cette analyse qu’Angela Merkel et Nicolas Sarkozy préparent leur annonce retentissante qui va, nul doute à ce propos, convaincre les marchés et retourner la situation.
79 réponses à “L’actualité de la crise : ENCORE LE FEU AU LAC ! par François Leclerc”
@ Paul Jorion.
Si c’est le radeau de la méduse, je suis preneur…je vais voir s’il reste des banques pour me faire crédit…
Mais je crois que c’est plutôt le radeau des médusés.
Bonjour à tous
Cette annonce du renforcement d’une commission non élue et sans légitimité parlementaire est bien une solution technocratique issue d’un régime quasi monarchique! Cela risque néanmoins de se heurter à la Cour Constitutionnelle Allemande garante de la démocratie parlementaire. Lire à ce sujet le dernier billet d’Ambrose Evans Pritchard.
On ne peut passer sous silence l’avis inhabituel du président de la république d’Allemagne , renforcé par celui de la bundesbank.
par ailleurs, sur Business Insider ou Zero Hedge, citant un senior du FMI, le défaut de la grèce est déjà dans les tuyaux!
On se rappelle avec joie les propos lénifiants , genre édredon, de Pélagie Angélique Lagarde sur la santé , excellente et sure des banques européeennes lorsqu’elle était ministre des finances de la raie publique et leur contraire exact émis la semaine dernière du fond du trou de Jackson! mais quoi, n’est elle pas avocate d’affaires?
Voyez, ô vous frères humains, comme la croisière s »amuse! Tita nique et Trader Idera s’empiffre!
Cordialement.
Pelagie Angelique Lagarde. Ses vrais prénoms: Christine Madeleine Odette. Le dernier prémonitoire pour une ministre des finances et directrice du FMI!
Cher Lapin
C’est vrai qu’avoir une Chief Managing Officer à la direction semble plus naturel!
Mais est ce vraiment capital?
O Dette! O désespoir! j’empruntai 500 et me vis devoir 1000 en arrivant aux urnes!
Cordialement.
Lundi 5 septembre 2011 :
Grèce : taux des obligations à un an : 82,154 %. Record historique battu.
http://www.bloomberg.com/apps/quote?ticker=GGGB1YR:IND
Grèce : taux des obligations à 2 ans : 50,376 %. Record historique battu.
Grèce : taux des obligations à 10 ans : 19,312 %. Record historique battu.
Je pense que vous étes plus fin que vous en avait l’air .
Le feu au lac est une expression Suisse . Il s’agit pour les Suisses du lac de Genéve , lac Léman pour les Français . La comparaison Suisse , Europe est édifiante , à plus d’un titre , sans jeu de mots … Les Suisses , malgré l’abandon de la base or , toujours populaire et prégnante quand méme , lutte contre la revalorisation de sa monnaie , c’est encore la seule du monde occidental qui tiens la route , pour préserver son excédent commercial . C’est encore une position trop forte ,réellement forte , dans un monde de faibles …En outre et ce n’est pas un détail négligeable , à part le canton de Genéve , dépassé par ses banques , la terre reste collective en Suisse , elle n’a pas donné lieu à cette spéculation immo , à part le canton de Genéve qui a comme par hasard , les mémes problémes que nous .
Pour les Suisses , à part le canton de Genéve , trés bien placé aussi sur la spécul des mp , il n’y pas le feu au lac ….quoique .
P’têt que la Suisse devrait expulser Genève de la confédération… 😀
Cher Paul Alain, je connais « un peu » la Suisse, une pensée me vient : Un parasite vit encore un peu sur le cadavre …
Vendez-vite le stock de fromage tant qu’il y a une demande solvable …
Le feu au lac , c’est pour ceux qui ont acquis des produits indexés sur la parité euro-fr suisse !
@Paul-Alain
Pardonnez-moi mais permettez-moi de vous dire que c’est une grande partie de l’arc lémanique suisse, et particulièrement l’axe Genève-Villeneuve, qui est touché par la spéculation immobilière.
Et les prix de l’immobilier sont surévalués partout en Suisse, contrairement à ce que les médias et les professionnels de l’immobilier affirment! Jetez juste un oeil sur le coût d’un bien immobilier équivalent en France voisine, par exemple sur Thonon ou Evian, qui sont déjà des régions bien trop coûteuses, et vous verrez la différence. Certes le revenu médiant est haut en Suisse mais n’oubliez pas qu’il y a des classes modestes qui tirent la langue dans un pays très cher quand-même. Les terrains sont surévalués aussi ici et pour acheter il faut la plupart du temps mettre son 2e pilier sur la table ce qui est une perte de sécurité (je sais la sécurité est très relative de nos jours!) pour la retraite… Pour notre part nous avons renoncé à acheter : nous préférons être locataires mais garder une certaine liberté et ne pas devoir jongler pour payer les factures. A côté de ça je suis très conscient qu’ici en Suisse le niveau de vie est très élevé et que nous sommes des privilégiés. Les Suisses vivent très largement au dessus de leurs moyens dans une société très consumériste. Ils n’en sont pas encore conscients et tout leur semble dû. Mais cela s’explique un peu pour un pays qui n’a que très peu souffert, qui a un parcours paisible et qui n’a pas encore compris, dans la souffrance comme en France par exemple, que l’Histoire avec une grande hache est souvent tragique! Je précise que je suis français vivant en Suisse depuis 10 ans, ce qui peut aider à comprendre mon point de vue. Cordialement à vous.
Certaines banques, si pas toutes, vont devoir être recapitalisées, c’est évident. Ce qui est drôle, c’est qu’Il est fort possible que les états soient obligés de participer à cette recapitalisation et ainsi, finalement, payer les dettes de la Grèce, ce qu’ils renâclent aujourd’hui à faire….
Il n’est pas toujours nécessaire de recapitaliser une banque
elle peut faire faillite…
Et c’est en réalité la meilleure solution corrective.
Cela est un peu dur à admettre, mais seule l’éventualité de la faillite permet de ne pas différer les décisions indispensables..
En direct sur france 2, l’émission mots croisé d’yves Calvi (avec X bertrand et A Montebourg), il soufflerait un vent de légère panique à Bruxelles…………..pour que Fr2 lache cette info………ça sent le roussi !
Lundi 5 septembre 2011 :
En zone euro, deux groupes de pays sont en train de s’éloigner l’un de l’autre de plus en plus vite.
1- Premier groupe : les Etats européens en qui les investisseurs ont confiance.
Leurs taux d’intérêt sont en train de s’effondrer.
Allemagne : taux des obligations à 10 ans : 1,8 %.
Pays-Bas : taux des obligations à 10 ans : 2,3 %.
Finlande : taux des obligations à 10 ans : 2,3 %.
Autriche : taux des obligations à 10 ans : 2,6 %.
France : taux des obligations à 10 ans : 2,6 %.
2- Second groupe : les Etats européens en qui les investisseurs n’ont plus confiance.
Leurs taux d’intérêt sont en train de monter.
Espagne : taux des obligations à 10 ans : 5,2 %.
Italie : taux des obligations à 10 ans : 5,5 %.
Irlande : taux des obligations à 10 ans : 8,7 %.
Portugal : taux des obligations à 10 ans : 10,7 %.
Grèce : taux des obligations à 10 ans : 19,3 %.
Ces deux groupes de pays divergent de plus en plus.
Cette divergence est intenable.
La zone euro est un navire dont la proue et la poupe s’éloignent l’une de l’autre : ça va finir par craquer.
Aujourd’hui, lundi 5 septembre 2011, nous sommes en train de vivre la dislocation de la zone euro.
Houlala! ça flirte avec les 3000 sur le CAC ( GAG? ); tenez bon les gars, parce que sinon, ça va prendre le chemin des 2500; en tête de gondole des + fortes baisses, le fleuron bancaire national BNP, CA, SOC GEN, on se demande bien pourquoi!
le petit porteur souffre, abrégeons son calvaire, vendez, vendez tant qu’il en est encore temps!
Ce nouveau plan est-il voulu par Merkel et N. Sarkozy, ou par les économistes ?
http://www.ilsole24ore.com/art/economia/2011-08-26/premio-nobel-mundell-leva-204503.shtml?uuid=AanMKIzD&fromSearch
http://www.ledevoir.com/economie/actualites-economiques/330201/dix-sept-prix-nobel-croient-a-la-survie-de-la-zone-euro