Billet invité. A paru dans L’Humanité Dimanche, semaine du 21 au 27 juillet.
Des deux côtés de l’Atlantique, nous assistons au démarrage de l’Acte II de l’implosion du système financier, dont la faillite de Lehman Brothers, en septembre 2008, a frappé les trois coups du premier.
Depuis les années 80, le capitalisme financier a prospéré en produisant de l’endettement à grande échelle. Il fallait suppléer à la distribution inégale de la richesse pour maintenir la consommation et la croissance. Le moment est arrivé où, ayant prêté sans compter, l’échafaudage financier construit pour faire tenir debout cette montagne de dettes a vacillé. En dépit des étais destinés à le renforcer, fournis par les Etats et les banques centrales, il n’a toujours pas retrouvé son équilibre perdu.
Les contextes américain et européen sont différents, mais la crise de la dette est unique.
Des Etats menacent désormais de faire défaut, de ne pas honorer leurs échéances. Ce risque augmentant, les créanciers haussent leur taux et fragilisent encore plus les finances publiques, créant un cercle vicieux. Les investisseurs scient ainsi la branche sur laquelle ils sont assis, car les obligations d’Etat sont un point d’appui du système financier.
De la crise de l’endettement, on est passé à celle du désendettement, c’est à dire au remboursement de la dette privée et publique. Une longue opération qui soulève beaucoup de lièvres. Or, les Etats européens les plus fragilisés n’y parviennent pas, les gouvernements ne pouvant s’appuyer ni sur une croissance économique absente, qui améliorerait leurs recettes fiscales, ni sur une inflation dont le système financier ne veut pas, car elle ferait fondre la valeur de ses avoirs. Reste à leur disposition la rigueur, coupes budgétaires et mises en cause de « l’Etat providence », et poursuite de la financiarisation de l’économie, sous couvert de programmes de privatisations destinés à rembourser la dette publique. Mais gare aux retours de flamme des « indignés » !
Le système financier ne parvient pas non plus à facilement se désendetter, masquant au mieux qu’il peut ses grandes faiblesses et retournant à l’envoyeur la dette des Etats à risque, bien que poursuivant ses jeux financiers toujours pas réglementés.
Les Etats sont quant à eux intimés de procéder à leur désendettement dans l’urgence, afin que les banques puissent étaler le leur dans le temps. On refuse aux uns ce qui est accordé aux autres. Même inégalité de traitement que lorsqu’on compare le coût de leurs financements réciproques, via le marché pour les premiers ou les banques centrales pour les secondes.
Les dirigeants européens ne veulent reconnaître que la dette publique et tentent sans y parvenir de contenir la crise. Alors que, publique ou privée, c’est la dette en général qui est trop grosse pour être digérée et qu’elle ne reconnaît pas les frontières.
Les dirigeants américains sont pris dans une autre nasse. Au bout de leur chemin, ils ne peuvent plus financer leurs splendeurs et doivent étaler leurs misères. Mais certains sont tentés par une fuite en avant, afin de poursuivre un rêve américain devenu un cauchemar pour beaucoup, aiguillonnés par des démons porteurs de dangereuses aventures. Ils risquent à ce jeu d’entraîner une seconde fois le système financier dans une chute libre, arrêtée de justesse la première fois.
Eponger toute cette dette à la faveur d’une restructuration mondiale est la seule solution envisageable. Sans cela, le risque est grand de plonger dans une inflation dont le système ne veut pas mais dans laquelle il sera entraîné. S’engager dans une réduction globale ordonnée permettrait de réduire drastiquement la taille d’un monde financier hypertrophié et dangereux, dont le poids même l’a fait chuter, excellent début pour sa remise à plat.
Il n’y a que deux solutions : tailler résolument dans la finance ou laisser l’inflation y procéder dans le plus grand désordre.
94 réponses à “L’HUMANITÉ DIMANCHE, « EMPÊCHER L’IMPLOSION », par François Leclerc”
Voici une colle pour les dirigeants de nos Banques Centrales…
» est-ce que les dinosaures ont été eux aussi …. trop grands pour disparaître » …?!!!
Pour revenir au débat entre Chris006 et Pol à propos de l’inflation, ne pourrait-on pas parler d’une inflation à deux vitesses mais en sens opposé – d’un côté la vitesse positive dû aux prix des produits de première nécessité ( bouffe, pétrole, loyer, électricité – où l’on nous tient par la gorge ) et de l’autre côté la vitesse négative des produits de simple consommation … ce qui fait que le commun des mortels vivant avec des revenus salariés qui stagnent ne peut que faire des arbitrages entre des achats de toute nécessité dont les prix peuvent monter et des achats facultatifs ( ou de luxe ) dont les prix doivent baisser. La part du gateau salarial n’augmentant pas, si le salarié doit donner plus à Paul, il faudra donner moins à Pierre.
Donc, nous vivons une époque avec à la fois de l’inflation et de la désinflation, mais les deux tendances contraires bien qu’assez fortes sont cachées par le résultat net. Résultat – on peut voir et dire ce qui nous arrange ! Un investisseur peut crier « gare à l’inflation » et un syndicaliste peut crier » gare au pouvoir d’achat » … mais devinez de quel côté M. Trichet du haut de sa chaire banquale daigne se pencher …?
Jeudi 21 juillet 2011 : réunion des chefs d’Etat et de gouvernement européens.
Vendredi 22 juillet 2011 : les taux des obligations de l’Italie et de l’Espagne repartent à la hausse.
Lundi 25 juillet 2011 : les taux des obligations de l’Italie et de l’Espagne sont en hausse.
Mardi 26 juillet 2011 : les taux des obligations de l’Italie et de l’Espagne sont en hausse.
Mercredi 27 juillet 2011 : les taux des obligations de l’Italie et de l’Espagne sont en hausse.
Jeudi 28 juillet 2011 : les taux des obligations de l’Italie et de l’Espagne sont en hausse.
L’Italie a emprunté : pic de 11 ans du rendement d’une émission de 8 milliards d’euros.
Les coûts d’emprunt de l’Italie ont bondi jeudi lors d’une émission de près de huit milliards d’euros d’obligations, l’inquiétude entourant la solvabilité de la péninsule ayant poussé le rendement du papier italien à son plus haut depuis 11 ans.
Le rendement moyen de la dette italienne à dix ans a atteint 5,77 %, à son plus haut depuis février 2000, et non loin de son niveau record depuis la création de l’euro, de 5,81 %.
Le rendement des obligations à trois ans a bondi à 4,80 %, au plus haut depuis juillet 2008.
Aussitôt après l’adjudication, la prime exigée par les investisseurs pour détenir le papier italien à dix ans plutôt que son équivalent allemand, le Bund, s’est accrue à 3,31 points de pourcentage.
Parallèlement, la Bourse de Milan a creusé ses pertes, les investisseurs s’inquiétant de la capacité de l’Italie d’emprunter à des taux de plus en plus élevés.
« Ce ne sont pas des niveaux de rendement soutenables sur le long terme », estime Marc Ostwald, analyste obligataire pour Monument Securities, à Londres.
(Dépêche Reuters)
Einstein disait: « Le monde ne sera pas détruit pas ce qui font le mal mais par ceux qui regardent sans rien faire » et il devenu de plus en plus évident pour de plus en plus de monde que nous sommes dans ce moment.
logiquement le plafond de la dette us devait correspondre au plafond de l’extraction pétrolière mondiale. car pour financer la spoliation mondiale et sécurisé l’extraction il fallait de plus en plus de moyens dès lors un conflit interne était inévitable. j’aurais pensé que la perspective du Default US n’arriverait qu’à la fin du plateau ondulant à savoir en 2015 qu’Obama aurait fait avaler le deuxième krach (2011) en prétextant qu’il fallait sauver la fed. c’était oublié les enjeux politiciens. qu’il y ait ou non replafonnement le krach2.0 a certainement déjà commencé (pour cause de seconde vague scélérate). donc autant faire croire que les responsables de la décote sont les républicains ?
bref plus nous nous perdons dans l’actualité et ses coulisses plus le pire sera terrible – de 300Millions à 2milliards de morts en 30 ans nous attendent – et plus en même tps tous les hommes du monde chercherons des solutions. c’est seulement quand la révolution sera révoltionnaire (mondiale) qu’elle aura des effets. mais nous n’éviterons plus la catastrophe local qui fera tous basculer (effet domino des pays producteurs?) ! la « dette illégale »n’était que l’arbre qui cachait la foret ! effectivement la crise des subprimes a poussé les villes américaines à amélioré leur densité et leur efficacité energétique ! de même l’épuration de la dette va mettre des gros sur la paille et faire diminuer la consommation pétrolière ! mais que ferons-nous ensuite ? nous n’éviterons pas l’implosion nous sommes trop lent face au calendrier géologique et de l’EMT mondiale ! à moins que les conséquences du défault occidental soit plus terrible nous aurons à partir de 2015 au moins l’équivalent de la crise de 2008 chaque année du fait du taux de déplétion minimal !!!!
au-delà du champs de ruines nous repartirons. avons-nous le choix ? nous n’avons pas les moyens techniques de faire tous disparaitre. l’ego, la cupidité… reviendront avec l’amour et la vie. alors autant faire de notre mieux ici et maintenant ! Alors A vos potagers que vive la Revolution 2.0 et paix à nos âmes d’ecofashistes démon-crates repentis!!!!
@chris06
« le problème avec l’inflation, c’est qu’il faut être capable d’en produire. »
effectivement Ben Bernanke n’arrivera pas à faire passer les liquidités dans l’économie réelle pour plusieurs raisons, notamment:
A)- les rapports de force entre capital et salariés aux Us comme presque partout sont écrasants pour les derniers. ce qui veux dire que les liquidités ne feront jamais frémir la demande.
Équilibrer les rapports de forces n’est du goût des financiers car il réduira une fois la phase « inflation » passée leurs marges. et puis depuis quand a t on vu quelqu’un en position de force céder du terrain facilement?
B)-la croissance étant faible et le chômage élevé aux Us, actuellement je ne vois pas comment faire monter les prix de manière généralisée.
à mon sens seul une ré-industrialisation des Us avec une augmentation de la part des salaires dans la distribution des richesses permettront d’atteindre ce double objectif. Baisser la dette et sa charge pour le peuple étasunien et offrir des perspectives de vie meilleurs au masses laborieuses.
Cela aussi est exclu par les financiers car il savent très bien compter , l’écart des salaires avec le voisin mexicain sont tels que je ne parle même pas de la chine.
En conclusion, l’inflation n’aura pas lieu.
Les liquidités à taux faible on conduit à une augmentation générale des actifs immobiliers durant la dernière décennie sans les deux conditions citées ci- dessus et cela a crée la bulle immobilière aux Us qui a failli emporter Fannie et freddy mac.
En Europe le corollaire bulle immo aussi a eu lieu et c’est ce qui déprime encore plus les économies car les salaires sont engloutis dans le gouffre immobilier au seul bénéfice des banques (quasi exclusif).
Pour le moment la « déflation » ou la stagflation nous guette plus.
Voilà cela est un complément à ton avant dernière intervention.
Au plaisir de te relire.
Un grand Merci à Monsieur Paul Jorion que je remercie pour tous son travail sur ce Blog et ailleurs : que « Dieu » vous prête une longue vie.
Mon commentaire semble être passé à la trappe.
J’y avançais que je subis dans ma chair et mes espérances d’un monde réellement nouveau où nous ferions société, les conséquences des « politiques » ultra-conservatrices et des batailles de pouvoir aux USA et en UE, comme des millions des gens. J’avançais également que les Républicains prônent un nouvel eugénisme : la saignée permanente du pauvre au profit de leur Surhomme à eux, le Riche, ce qui est intolérable et pourtant se voit toujours présenté avec une froide distance qui évite surtout de dénoncer, de s’indigner, ce qui est pourtant le moteur premier du journalisme, me semble-t-il.
N’est-ce-pas pourtant Helen Caldicott, pressentie pour le Nobel de la Paix, qui a déclaré que la Bible des « républicains » US, le Projet pour un nouveau siècle américain, était un nouveau Mein Kampf ?…
J’y ajoutais quelques considérations sur l’article dans l’Huma, que je trouvais fade et prompt à éviter tous les angles.
N’y trouvant aucun motif à censure ordinaire – diffamation, injure, racisme, ou autres – je me vois donc obligé de redonner visibilité à mon post.
Il y a eu une erreur de votre côté vraisemblablement.
C’est possible…