Billet invité.
Quand je suis arrivé en Inde, j’ai commencé par croire que je ne comprenais rien à cette société. J’ai donc parlé, beaucoup, avec des gens différents, d’âges différents, appartenant à des castes différentes, de professions différentes, des religions différentes, des régions différentes… et puis j’ai lu, beaucoup, la littérature indienne, les sociologues occidentaux… et finalement je suis arrivé à la conclusion que, certes, je ne comprenais pas l’Inde – rien de nouveau jusque-là – mais aussi que l’Inde ne se comprenait pas elle-même – mieux, que personne ne la comprenait (sans que cela ne l’empêche pour autant d’exister – je parle de l’Inde) ! Bien sûr, certains possédaient une connaissance fine de tel ou tel contexte, mais aucun savoir de surplomb – scientifique – objectif – théorique ne permettait de s’en faire un idée définitive – « claire et distincte » aurait dit Descartes.
Et puis en rentrant, je n’ai pu m’empêcher de tracer le parallèle avec l’économie mondiale, ô combien plus complexe encore que l’Inde, avec ses milliards d’agents, ses millions de marchandises, ses organisations infiniment diverses, ses multitudes de circonstances infiniment variables, sa dépendance d’avec les structures sociales, politiques, culturelles, sa perpétuelle évolution historique, etc. (Combien de livres faudrait-il pour décrire l’économie mondiale dans toute sa complexité ?)
Tout cela pour dire que la « science économique » s’attaque probablement à l’un des « objets » les plus complexes que les êtres humains puissent étudier : un réseau possédant des milliards de nœuds, des milliards de milliards de connexions – proche du cerveau de ce point de vue-là – et pourtant considérablement plus complexe puisque chaque nœud – chaque personne – est un cerveau entier, au comportement infiniment complexe et varié.
Face à cette (inimaginable) complexité, deux méthodes ont été suivies par les économistes – une fois dépassée – à tort ou à raison ? – la posture de l’honnête homme issue de la Renaissance (soit des Précurseurs jusqu’aux Classiques).
Pour faire simple, d’un côté Marx (et plus généralement l’approche historique allemande, à laquelle s’ajouterait Max Weber et les institutionnalistes variés) : c’est la voie de la connaissance encyclopédique (doublée ou non d’une synthèse de type hégélien), qui conduit à l’historicisation du capitalisme, et rapproche l’économie de l’histoire.
De l’autre Walras (et plus généralement toute l’économie académique actuelle, ce que l’on appelle aussi la théorie néoclassique), c’est la voie de l’abstraction du problème doublée d’une formalisation mathématique, qui conduit à la naturalisation du capitalisme, et rapproche l’économie de la physique (comme elle, écrivait Walras, « l’économie est une science mathématique »).
Keynes est singulier de ce point de vue, puisqu’issu de cette seconde tradition, il a refusé malgré tout l’usage d’un formalisme pour décrire sa conception du capitalisme – et cela, tout comme Hayek d’ailleurs, parce qu’il avait conscience de l’incertitude (impossible à probabiliser, par opposition au risque, probabilisable) inhérente au capitalisme – raison évidemment pour laquelle, seul, il a pu faire une théorie des crises financières et des bulles spéculatives.
Mais je m’enflamme… et l’on partirait trop loin.
Tout cela pour dire que la critique – triviale – selon laquelle l’économie n’est pas une science / est une mauvaise science, etc. me paraît – à la fois – juste et stupide.
La vraie question à se poser serait plutôt : mais qu’attendons-nous donc de l’économie ?
Si vous souhaitez prendre connaissance d’une tradition regroupant les plus brillants esprits des temps passés parmi tous ceux qui ont étudié les questions économiques, eh bien plongez-vous dans la science économique en lisant les écrits qui la composent (cela devrait être obligatoire au cursus de n’importe quelle formation de citoyen digne de ce nom, tout comme devrait l’être l’étude de tous les domaines du savoir – même si cela paraît difficilement réalisable dans un monde comprenant six milliards d’être humains).
Mais attention, si par hasard vous le faites, vous y perdrez vos illusions !
Car l’objet même de l’économie défie nos capacités d’appréhension : personne ne peut comprendre scientifiquement le système capitaliste; il ne s’agit là que d’un fantasme (au mieux) ou de l’alibi d’une domination (au pire).
Et de ce point de vue-là, l’économie se rapproche effectivement de l’histoire. Posez donc des questions analogues à celles qui motivent certaines interventions sur ce blog à des historiens : demandez-leur de prédire le futur, demandez-leur les causes précises d’une transformation majeure du passé, demandez-leur des plans détaillés pour réformer la société actuelle, croyez-vous qu’ils pourront vous répondre « scientifiquement » ? En déduirez-vous que l’histoire n’est pas une science pour autant ?
Cela étant dit – et si l’on devait faire le procès de l’économie contemporaine, les deux fautes majeures que l’on pourrait lui reprocher sont, d’une part, la naïveté scientiste de la tradition dominante qui croit comprendre le capitalisme en le purifiant mathématiquement (et particulièrement des certitudes antipolitiques qui en découlent, je parle de la prétention de savoir avec laquelle se leurrent la plupart des économistes – ce que la psychanalyse nommerait « infatuation du moi »), et d’autre part la corruption théorique de ceux qui ont vendu leur réflexion aux intérêts financiers dominants (mais le plus souvent, comme toujours, par ignorance, bêtise, bref finitude humaine). Deux grandes fautes, c’est certain – mais qui se doublent d’un fantasme de soumission bien facile chez les citoyens (l’économie, c’est trop compliqué pour moi, je préfère regarder la télévision ; ou dans sa variante opposée, les économistes sont nuls, moi je sais tout, bienvenue au comptoir du bistrot !).
Et malheureusement, c’est cette servitude volontaire (La Boétie est à la mode ?) qui me laissera toujours sceptique (ou totalement idéaliste c’est selon) ; puisque je ne vois pas dans quelles conditions nous pourrions dépasser cet antagonisme « prétention de savoir / soumission devant les experts ». Le problème fondamental que nous touchons là, l’ajustement par rapport au savoir de l’ensemble des citoyens, n’a rien à voir avec l’économie, le même problème se pose en ce moment par exemple avec le nucléaire, et c’est bien la même raison qui poussait Platon, il y a déjà plus de deux mille ans, dans La République en l’occurrence, au plus profond pessimisme sur le fonctionnement de la démocratie. – Comment une société complexe peut-elle démocratiquement se gouverner elle-même ? Ou si vous préférez, comment créer autant de citoyens que de sapiens, soit plus de six milliards d’un coup et par magie. Compte tenu de la complexification des savoirs contemporains et de l’accélération de l’histoire à laquelle nous assistons – j’avoue ne pas DU TOUT savoir comment répondre à cette question…
129 réponses à “L’HUMAIN ? COMPLEXE… TROP COMPLEXE !, par FP”
L’important, c’est la cause, l’important,
c’est la cause, l’important,
c’est la cause du moment.
Ici, c’est l’économie. Et la cause de l’économie ? Son but ?
Ne pas être prétentieux
Ne pas se soumettre aux « experts » mais écouter leurs points de vue attentivement.
Toujours avoir une place pour la remise en question.
Que pensez-vous de la Sociocratie ?
Bien à vous tous
Dixit wikipedia :
Moi je n’en pense que du bien et je verrais d’un très bon oeil un PS, parti Sociocrate qui le pratiquerait en interne pour commencer.
Je trouve cela très juste, Paul… Mais cela résume l’impasse actuelle de nos sociétés post-contemporaines… Et l’absence d’alternative à la démocratie, le pire de tous régimes à l’exception de tous les autres !
Moi si ! Sans magie.
PS : https://secure.avaaz.org/fr/bradley_manning_fr/?cl=1013807490&v=8824
Ce qu’il y a de bien avec l’indouisme (qui ne resume pas toute l’Inde) c’est l’idée que ‘tout est une illusion’, ce qui se resume par le OM originel et ultime
Peut être c’est notre « intelligence » qui rend la vie complexe?!
Certainement la cie économique! 😉
Il faut y aller par étape, sachant qu’il n’y a pas d’étape ultime, et en espérant ne pas reculer. Vers où? Je dirais vers là où vous semblez vouloir aller, sans savoir comment!
Comment? En commençant pas ne pas faire l’inverse de ce qu’il faudrait faire (concentrer le capital, désavouer un référendum, organiser la non-représentativité par un bi-partisme,…vous pouvez faire votre liste), bref, en faisant des choses qui vont dans le bon sens.
ça peut servir, ou pas, l’histoire le dira.
Autrement dit: on sait bien qu’il est illusoire de vouloir répondre à cette question, à moins de détenir LA vérité. Pourtant on a bien tous une idée de comment on pourrait vraisemblablement améliorer les choses. Et c’est en améliorant qu’on améliore! Comme en sciences, quand le progrès technologique nourri le progrès scientifique et ainsi de suite. Par progrès technologique, j’entend surtout ceux qui alimentent la qualité de nos mesures et peuvent étendre le champ de nos connaissances.
Il faut expérimenter sans trainer, avec douceur et raison, ce qu’on pense être bon. Que nos élites écoutent un Paul Jorion, par exemple. On n’en saura pas plus si on n’avance pas en acte.
100% d’accord avec cette démarche, simple et simplement réaliste (voire scientifique).
Chaque pas, de chacun, allant dans l’intérêt commun, aussi simple qu’il puisse être, est source d’une dynamique de progrès.
Reste à savoir rester humble, un minimum altruiste, et agir en fonction de ses « compétences » (ou capacités) quelles qu’elles soient.
Comme disait l’autre : Il faut de tout pour faire un monde !
@ Paul
Je suis loin d’être toujours en accord avec ce qui est exprimé sur ce blog.
Cependant, je tiens à vous dire que je suis à 100% en harmonie avec ce billet et je pense que c’est parce que, à mon avis, vous y posez les vraies questions.
Je crois que chercher les réponses n’est pas une bonne approche. Affiner les questions et les confronter me parait plus efficient parce que cette méthode permet de fonder des affirmations négatives ( du genre: cela n’est pas) toujours plus vraies logiquement que des affirmations positives (cf. vos références à un célèbre peintre belge). le négatif laisse une porte ouverte au savoir comme au doute et donc à des possibilités que referme brutalement le « positif ».
Peut-être vaut-il mieux deviner les potentiels de réponse qui se révèlent peu à peu en creux que de sculpter une réponse figée et inadéquate en bosse…
L’Inde est en effet complexe.
Mais une chose est sûre, les Indiens ont été génétiquement modifiés depuis longtemps.
Autrement, comment expliquer que :
Brahma a quatre têtes, Vishnu quatre bras, Shiva, un troisième oeil et Rama est bleu.
Nos futurs « dieux » seront peut-être à leur image…
Ceci écrit, je vais encore faire un scandale de plus.
Une « certaine » probabilité d’accident de centrale nucléaire a été émise par Monsieur Jorion.
Je vais donc lui poser la question gênante sur la circulation d’électrons et de neutrons suivante :
Pourquoi la probabilité d’accidents de la route est-elle si faible en rapport au nombre d’objets transportant des humains dans un plan pourtant en seulement 2D..??
Non pas que j’ai eu un grand-père garagiste, mais il devrait nous expliquer ce phénomène antropeulogique.
Peut être parce que le comportement des particules nucléaires sont régies par des lois physiques, tandis que l’homme est dirigé par son esprit, autrement plus complexe et doué d’intellect !
Mais pour faire simple, on dira qu’un atome n’a pas de reflex de survie 😉
Concept que l’homme ferait bien de remettre en question très rapidement…
Non non, aucune manipulations génétiques, juste quelques réacteurs nucléaires défaillants….
@Yvan :
Parmi la multitude de divinités indiennes, combien de leurs dieux prônent la richesse ?
Il n’y en a qu’un seul, le connaissez-vous ?
Bertrand, vu les 3 hypermilliadaires indiens et le 1,3 milliards de pauvres, cette divinité doit être un loupé aussi infâme que l’américane drim.
La DS de citroën fut une richesse bien plus grande…
Immatérellement votre…
« Brahma a quatre têtes, Vishnu quatre bras, Shiva un troisième œil et Rama est bleu … »
… et tout comme …*l’idée d’un homme fait Dieu (avatâr) plonge ses racines dans l’Inde
et n’est arrivée en Judée que par l’Egypte…
*A. Schopenhauer in « Les deux problèmes fondamentaux de l’éthique. »
Nos « dieux » sont déjà à leur image: ne reste plus qu’aux masses, aux flux, de physiologiquement
leur ressembler: et c’est très bien parti…!
Sur les dollars US nous pouvons lire » IN GOD WE TRUST « , je devine trop pourquoi les mêmes étasuniens n’avaient pas cru bon d’ajouter d’office sur la couverture de leur Holly Bible
» IN MONEY WE TRUST « . Un peu trop vrai… dommage…
La complexité, la complexification: tout un programme en Inde et ailleurs !..
» Tout ce qui est compliqué est faux ou pourri. »
L.-F. Céline
En Inde toujours… le crocodile d’estuaire a résisté à 250 millions d’année de transformations géologiques: il a presque disparu en dix ans de contact avec « la complexité humaine ».
VOTRE TRES DELIRANT DE L’ HEMISPHERE GAUCHE…
Cordialement…
« Comment une société complexe peut-elle démocratiquement se gouverner elle-même ? »
Réponse proposée : en commençant par rester rigide sur les principes de base : élection des représentants, une voix par citoyen, contre pouvoirs type USA, conseils constitutionnels, lutte anticorruption, etc. .
Commentaire : la dernière ruse du capitalisme est de faire croire que la complexité prohibe la solution des problèmes. On a déja compris la physique infinitésimale, la physiologie des organes et des cellules et un peu la neurobiologie, on ne désespère pas d’apprendre à gérer une démocratie. La conceptualisation mathématique des phénomènes n’écarte pas la possibilité d’agir sur eux ; seulement, le résultat n’est jamais garanti…
La « complexité », je crois que c’est davantage une ruse de classe qu’une ruse du capitalisme.
Bien vu Julien.
Comme j’ai toujours dit à mes patrons : donnez-moi les moyens de vos ambitions.
Et lorsqu’ils me les ont accordé, ils ont vu que c’était … possible.
C’est là que nous voyons qu’avec beaucoup de moyens, on peut tuer l’humanité.
voila la ruse cher JA…
vous site
La “complexité”, je crois que c’est davantage une ruse de classe qu’une ruse du capitalisme.
Quand vos récepteurs perçoivent de cette façon, c’est qu’ils sont pas connectés..
M’explique..
faire croire que le Capitalisme vas MAL ,c’est juste un détail.(de classe??)
Voir notre Président s’agiter est une ruse?
bisous
pour yvan
Aucuns arguments
Je SUIS MON PATRON…
OK …
demande pour aller aux toilettes ?
En effet, l’approche par la pratique est probablement la plus efficace … que savons nous ? de quoi avons nous besoin ?
> Commencer par abandonner une économie de croissance dans un monde qui regorge déjà de capacités techniques serait un très grand pas … avons nous besoin chaque jour d’un nouveau gadget technologique, ou d’un monde plus réfléchi ?? la question est simple …
Et si la démocratie n’était pas un moyen de décider mieux (cela se saurait de longue date) mais avant tout un formalisme permettant à la minorité d’accepter la décision contraire de la majorité? Bref, un liant sociétal faisant poids aux dissentions normales et inévitables dans un groupe humain.
Et si une moins mauvaise gouvernance ne consisterait pas tout simplement en un comité de sages prenant les avis des experts techniques pour proposer un texte référendaire suffisamment simple pour être présenté au suffrage universel ou à une représentation, élue sur le même mode, selon la nature ou l’importance du sujet en question?
Le comité des sages, belle idée…et qui désignera donc ce comité des sages, sinon nous-même?
Nous devons être les sages, qui d’autres?
Soyons sages!
@ quelqu’un a
L’idée des sages n’est pas de moi mais d’un philosophe grec au larges épaules…
Le mode de désignation ou d’élection… à votre convenance.
Tout ce qui se passe actuellement montre que c’est un voeu pieu et que, comme le rappelle FD, nous ne le sommes collectivement pas…
Je crois que vous avez oublié une approche très importante, celle du structuralisme. Claude Lévy Strauss effleure le sujet de l’inde dans « Triste Tropiques » et Catherine Clément présente parfois quelques mythes indiens de façon structuraliste. Le structuralisme est très important car c’est une théorie de l’information, et n’existe que ce qui a une visibilité dans nos sociétés, – dans vos deux exemples. Je ne suis pas sûr que la société indienne soit d’essence structuraliste mais il y a des chances, car le langage l’est, et par nécessité les choses n’existent que par distinctions, positions et différences. Ce qui ne s’inscrit pas dans une structure est perdu, invisible.
voila cher Flitzs
vous site
et par nécessité les choses n’existent que par distinctions, positions et différences. Ce qui ne s’inscrit pas dans une structure est perdu, invisible.
OUI ,c’est avec raison qu’exister existe ..
Invisible est ce qui nous entoure..
Vous adore cher FILTS
exc jle pseudo ?
vous pas non plus ,qu’elle importance??
bonne connections..
pardonnez mes erreurs..
Lisztfr dit
ZUT
toute votre interprétation de vos perceptions est correcte à mon avis..
CONTINUER est invivable sans vous..
bon ok FLITZ mettre juste convivial sur votre émetteur..
le barbichu me surveille..
@Julien Alexandre
Je ne sais pas si la classe des possédants a précédé le capitalisme ou inversement.
Certes, mais l’argument de la complexité n’est pas la résultante du système mais de ceux qui souhaitent le préserver, ie la classe dirigeante. Au contraire, le capitalisme porte en lui-même les instruments de sa destruction, et sa logique tend à faire émerger les moyens de mise en œuvre des solutions pour le détruire.
Pour prédire l’histoire à venir, c’est très simple, il suffit de se référer à la théorie d’Harry Seldon appelée la « Psycho-histoire » (voir les Fondations d’Asimov)
Tsss….
Il faut lire aussi « la faune de l’espace », roma
Erreur de frappe ….
Concernant la « psycho histoire », il faut lire aussi “La faune de l’espace”, roman / receuil de nouvelles de AE van Vogt.
François78
Si on liste les classiques de la SF, il va falloir écrire un article sur le sujet !
(J’en ai une tartine je ne vous dis pas….)
Je souhaite juste développer l’idée « l’incertitude (impossible à probabiliser, par opposition au risque, probabilisable) ». Je vous renvoie à cet excellent blog : http://robertbranche.blogspot.com/
On ne peut pas probabiliser l’incertitude mais on peut définir des tendances, des « mers » comme l’indique M. Branche.
C’est un peu comme si le temps était fractal, plus le moment considéré est proche de nous plus on peut le définir avec détail. Plus il est loin, moins les détails comptent, seul reste la forme, l’idée globale.
Je pense que la grande force de l’esprit humain est d’avoir cette capacité à « sentir » les tendances, les inflexions, les mouvements d’ensemble.
Comme l’explique très bien M. Branche, il nous est impossible de connaître l’itinéraire exact de la molécule d’eau dans un fleuve. Par contre, nous pouvons assurément dire que l’eau de ce fleuve va se jeter dans une mer.
L’erreur épistémologique actuelle est de croire qu’en décrivant un système physique dans ses moindres détails on sera capable d’en déduire toutes ses propriétés à grande échelle. La réponse est non ! Car à grande échelle de nouvelles propriétés indépendantes des constitutants apparaissent.
Exemple: L’ADN est constitué de bases nucléiques elles-mêmes constituées d’atomes. Il est impossible à partir d’une description atomiste d’en déduire le code génétique qui n’apparaît que grâce à l’agencement des molécules entre elles…
Merci pour cette citation de mon blog effectivement centrée sur l’incertitude.
Juste un commentaire supplémentaire : l’incertitude n’est pas d’abord un problème – pour faire simple, la source de nos peurs et de nos angoisses -, elle est d’abord la première et ultimement la seule garante de nos libertés. En effet, dans un monde prévisible, quelle serait la place laissée à l’homme et à l’intelligence.
Comme j’aime à le dire et à l’écrire : il n’y a a pas d’espoir sans incertitude
Voici deux extraits (1er et dernier §) de la recension de « Histoire populaire des sciences » de Clifford D. Conner, sous la plume de Jean-Luc Porquet du Canard :
Galilée s’est trompé dans les grandes largeurs. Pas à propos de la Terre qui tourne, bien sûr. Mais à propos des marées. Il n’en démordait pas : elles résultaient du seul mouvement annuel et diurne propre au globe terrestre, et ceux qui prétendaient le contraire n’étaient que des benêts. Les marées dues à la Lune, pfff ! « Cela répugne à mon intellect. » Pourtant, au long des siècles, des générations de marins à qui il importait de connaître très exactement le moment, l’endroit, la vitesse et la hauteur des marées montantes et descendantes avaient remarqué le très étrange, et irréfutable, lien entre les marées et la position de la Lune dans le ciel. Ils avaient observé, mesuré, corrélé, et dressé des tables permettant de prévoir très précisément les marées pour chaque jour du calendrier lunaire. Depuis le XIIè siècle au moins, date de la première table connue, les marins en savaient plus que Galilée.
On trouve mille histoires et aperçus nouveaux dans ce bouquin foisonnant, que sous-tend cette conviction : en dépossédant le peuple de ses savoirs et savoir-faire, en confiant la recherche, désormais élevée au rang de religion sacrée, aux seuls experts, et en la subordonnant à celle du profit, nos sociétés industrielles ont pris un chemin dont chacun sent aujourd’hui qu’il ne nous mène guère vers un avenir radieux. En lieu et place de ce monde soumis à la tyrannie technologique on peut rêver, notent les éditeurs dans la préface, d’ »un monde où le travail productif, infusant l’intelligence quotidienne, n’aurait pas perdu son sens premier : la production de valeur pour l’humain et non pour l’économie.«
Ca me fait penser à cette expression : »la Découverte de l’Amérique »…. très idiote dés que l’on sort du contexte « Europe 15ème siècle ».
Très juste, Batracien.
Et à notre petite échelle, le blog mute. La production de valeur a changé de camps.
Bonne suite.
un dernier texte pour la route.. :
http://www.lemonde.fr/idees/article/2011/04/11/la-prise-en-charge-des-soins-medicaux-un-acquis-menace_1505760_3232.html
Il sera désormais important de repomper toute la richesse accumulée par les vieux…
toujours pire, et en courant :
un coup de gueule du Professeur Grimaldi (AP-HP)
extrait:
…« Rigolade ! Foutaise ! Dérision !
Nous aurions tort de le penser. Le changement de vocabulaire a pour fonction de changer la programmation de la pensée. Technique de formatage des esprits ! Ils ont mené et gagné la bataille idéologique et nous avons haussé les épaules. Maintenant il est bien tard. Nous avons cependant mené le combat contre le concept pervers « d’hôpital entreprise » et les politiques,du président de la république à la ministre, ont du verbalement reculer tandis que les concepteurs continuaient à s’y accrocher. Exit donc l’hôpital entreprise que la loi met en œuvre. Hypocrisie ou post modernité ?
Pour les promoteurs de la réforme néolibérale nous sommes « des producteurs de soins » ou des « ingénieurs »,et ceux qui refusent leur nouveau statut sont des « petits mandarins », les patients sont des «consommateurs » certes « de plus en plus éclairés » ou des « clients ». On ne répond pas à des besoins, on vise à « gagner des parts de marché ». On n’est pas dévoué, on ne travaille pas beaucoup, on « travaille à flux tendu » on ne supprime pas des gaspillages on « augmente la productivité », on n’a plus de projets mais des « business plan » etc etc
Je vous propose de débusquer l’imposture en révélant ce que cache le discours de ces « défenseurs du service public ». Voilà ce qu’écrivait l’un d’entre eux dans un condensé de la pensée néolibérale (Patrick Mordelet dans Gouvernance de l’hôpital et crise des systèmes de santé, aux Editions ENSP) : « La bonne gouvernance des hôpitaux passe, plus ou moins directement, par leur privatisation ou, à tout le moins, par l’application des règles et de la culture du secteur privé et le développement des partenariats public-privé » et parmi les objectifs fixés « le libre choix des citoyens concernant leur assurance médicale ». […]
http://cjmclf.blog.fr/2011/01/15/le-coup-de-gueule-d-andre-grimaldi-contre-la-novlangue-manageriale-10369045/
Crapaud Rouge,
Écoutez bien les paroles, de cette chanson, ce n’est pas qu’un succès
http://www.youtube.com/watch?v=IA8krPH_USg
On prétend que « l’esprit humain ne peut concevoir une unité indivisible sous peine de l’annihilation de l’idée avec son sujet ». C’est une erreur, comme l’ont prouvé les Pythagoriciens et, avant eux, un certain nombre de voyants, bien qu’il faille un entraînement spécial pour arriver à cette conception et bien que l’esprit profane ne puisse guère la saisir, car les méta-mathématiques, pure et simple, procède elle-même de l’universel au particulier, du point mathématique indivisible aux corps solides…L’enseignement prit naissance aux Indes et fut donné en Europe par Pythagore qui, jetant un voile sur le cercle et le point (qu’aucun homme vivant ne peut définir autrement que comme des abstractions incompréhensibles) plaça l’origine de la matière cosmique différenciée à la base du triangle…C’est ainsi que le triangle devint la première des figures géométriques…L’auteur de New Aspects of Life, en traitant des mystères cabalistiques, proteste contre l’objectivation, si l’on peut s’exprimer ainsi, de la conception de Pythagore et contre l’emploi du triangle équilatéral qu’il appelle un « faux-non », son argument, d’après lequel un corps solide équilatéral : « un corps dont la base, aussi bien que chacun des côtés, forme des triangles égaux doit avoir quatre surfaces ou côtés égaux entre eux, tandis qu’un plan triangulaire devra tout aussi nécessairement en posséder cinq (2 surfaces + 3 côtés…?), prouve, tout au contraire, la grandeur de la conception dans toutes ses applications ésotériques à l’idée de « pré-genèse » et de genèse du Cosmos…Nous admettons qu’un triangle idéal, défini par des lignes imaginaires, ne puisse avoir aucun côté, car ce n’est qu’un fantôme de l’esprit, auquel les côtés que l’on donnerait devraient êtres les côtés de l’objet que sa construction représente…Mais dans ce cas, la plupart des hypothèses scientifiques ne valent guère mieux que des « fantômes de l’esprit »; elles sont impossibles à vérifier, sauf par voie de déduction, et n’ont été adoptées que pour répondre à des nécessités scientifiques…Complexité quand tu nous tient!
juste un petit bonsoir..
Sans être de ce monde ,mourir existe???
met ta ceinture
Régoris mets ta ceinture dorée celle du sage de l’homme spirituelle et tout ce passera bien.
C’est pourquoi mon père dit que son père à lui (mon grand père) en savait beaucoup, il était agriculteur !. Car je lui disais, il va falloir bientôt retourner à l’agriculture, il me répond, Oh mais ça ne pousse pas comme ça ! Un bon paysan doit avoir énormément de connaissances également. Non seulement celà mais chaque homme en sait beaucoup… au bout d’un certain temps. J’admire rien que le fait de vivre et de parler, de se souvenir de quantités d’histoires, de savoir bricoler, chiner, etc…On comprend cela quand la personne n’est plus là. Et encore il était polonais, je comprenais pas le quart de ce qu’il disait.
le savoir-faire et savoir-être des anciens, qui peu à peu fût méprisé …
ils savaient se débrouiller dans tous les domaines vitaux …trés polyvalents.
Pas nous; cela s’est perdu, sauf exception, en deux générations…
une autre façon de comprendre : ils étaient souvent des taiseux, les paysans. quelques mots essentiels …
une écriture que j’aime: celle d’Erri de Luca .
… » Je m’apprête à passer la nuit dans la cabane à outils, car il n’y a plus de train après dîner.
Je bêche sous les lauriers. De leurs feuilles épaisses, toujours vertes, ils protègent les moineaux qui, le soir, se disputent la place la plus chaude, près du tronc. Ils se disputent pour vivre. Puis ils ont un murmure de mise en ordre, je pense qu’ils prient.
Ce n’est qu’au printemps que je taille les lauriers, quand ils ne servent plus d’abri aux moineaux.
J’aime brûler les restes de leur feuillage. Ils font une fumée qui étourdit et fait revenir en mémoire les disparus. C’est dans cette fumée que je m’assieds à midi avec des olives noires. … »
dans « Trois chevaux »
ouais,mais juste en vitesse cher list etc..
sais bien ,mais de quel coté en Pologne (que j’adore)? un chemin de sable entre des pins vers le lac..?
Excusez moi pour avant ,la hauteur reste indifférente ..
Bonne route .ne me lire n’a peut d’importance,écrire est NUL,croire est débile,vivre n’existe pas sans CRÉER..
@Zevengeur
Tsss…
On peut plus sérieusement lire Thierry Gaudin, Ray Hammond et même Attali !
L’Inde, très complexe, certes, et je n’y comprend pas plus que Paul.
Par contre, dans le domaine qui m’intéresse et intéresse pas mal de monde ici, l’avenir de l’Humanité, je constate que l’Inde produit des idées originales et séduisantes.
Ainsi, Amartya Sen est le promoteur de l’idée de capabilités (traduction de l’anglais capabilities), capacités individuelles qui peuvent être converties, prolongées en actes et en « être-bien » collectif grâce à leur mise en œuvre. Et là, c’est une indienne Martha Nussbaum qui fait des propositions concrètes.
Pierre Ansay résume tout cela dans un article « Sen Nussbaum et Jackson: pour des solidarités et libertés durables » consultable sur : http://www.etopia.be/IMG/pdf/r8_ansay.pdf;
Je ne résiste pas au plaisir d’extraire deux passages de cet article :
« Deux capabilités, la raison pratique et l’affiliation, se distinguent par leur importance particulière, parce qu’elles organisent et imprègnent toutes les autres et leur mise en œuvre rend la vie véritablement humaine. Forger des projets pour soi-même sans être capable de le faire dans des formes complexes de discussion et d’échange avec les autres êtres humains, et en se souciant d’eux, c’est, une fois encore, se comporter d’une manière qui n’est pas totalement humaine Donc, la pleine humanité, c’est la pensée de son devenir
et son devenir connectif avec les autres. » et puis
« Il nous faut un État animateur, réorienteur et qui protège les Bantoustans écologiques acquis aux thèses de Jackson en espérant que ces Bantoustans envahiront progressivement la sphère marchande. Première mondiale ? Une cohorte de moutons envahissant pacifiquement les tanières des loups ? »
Je ne comprend pas…. Vous voudriez un monde dans lequel chaque être humain aurait les capacités et les connaissances d’un docteur es Science économique, physique relativiste, physique nucléaire, anthropologie, biologie moléculaire, génie génétique (etc etc etc les champs de domaines étant infinis) ???
On se rapproche de la science fiction, là. J’imagine que parvenu à ce stade, chaque individu serait proche du point Oméga décrit par Chardin.
Personnellement, je n’ai pas les capacités pour comprendre et analyser en profondeur les méandres de notre système économique (ni pour obtenir un doctorat en astrophysique, snif). C’est comme ça, mieux vaut le reconnaître, on est pas tous égaux (d’un certain point de vue, hein, ne me faites pas dire.. etc). Il faut donc faire confiance à ceux qui « savent » et ce sont les critères qui nous poussent à faire confiance à telle ou telle personne qui devraient, AMHA, faire l’objet de toutes les attentions, car cela pose la question du sens critique chez le citoyen. On devrait tous être « formés » au sens critique, à repousser les techniques de manipulations etc. CAD à faire des choix en toute liberté et non-contraint.
Aujourd’hui, avec les nouvelles techniques qui s’appuient sur les neurocsciences, financées par les industriels pour la pub, on a toujours plus à craindre de nouvelles formes de dirigisme, de manipulation et de techno-fascisme.
ps, mon dernier commentaire était un peu familier, je m’en excuse; Mais je pense toujours que ce serait une très bonne chose si vous faisiez quelques articles sur l’intelligence artificielle, où l’on en est etc….
@ Julien Alexandre
Au-delà de la pointe d’ironie que je partagerais plutôt, j’employais le concept de complexité dans un sens précis :
http://en.wikipedia.org/wiki/Herbert_Simon
qui est en gros celui des sciences cognitives actuelles.
Et de ce point de vue, pas de doute, l’économie est un système bien plus complexe que n’importe quelle centrale nucléaire… or je ne vous ai pas vu interroger Gouwy sur les ruses de classe en physique nucléaire !
Le billet adoptant une posture épistémologique, c’est-à-dire qui ne prend pas parti directement pour telle ou telle théorie, il faisait également remarquer la complexité mathématique de la théorie néoclassique. De ce point de vue, jetez un oeil sur :
Debreu et Arrow, Existence of an Equilibrium for a Competitive Economy, Econometrica, 1954, vol. 22, p. 265 à 290.
Vous comprendrez mieux ce que je veux dire par « complexité », en l’occurrence formelle.
Or même si vous considérez que l’usage politique de cette théorie est stupide (ce que je défendrais tout à fait), il n’en reste pas moins que pour la critiquer, il faut encore la comprendre – ce qui vous demandera quelques années de mathématiques au minimum !
Pouvons-nous les demander à chaque citoyen ?
Encore une fois je ne juge pas, je constate 🙂
Paul vous me rassurez de ne pas savoir du tout ! ce serait vous adorer en dindon et nous la farce.
« l’aliénation : les véritables chaînes sont celles de nos affects et de nos désirs. La servitude volontaire n’existe pas. Il n’y a que la servitude passionnelle. Mais elle est universelle. » Frédéric Lordon, Capitalisme, désir et servitude. Marx et Spinoza, éditions La Fabrique, 2010.
« Je ne suis rien.
Je ne serai jamais rien.
Je ne peux vouloir être rien.
A part ça, j’ai en moi tous les rêves du monde. »
Pessoa, Derniers poèmes d’Alvaro de Campos
@Julien Alexandre
Dans un système ouvert il est hasardeux de prédire l’évolution des composants. Malgré les arguments de Marx et de Rosa Luxembourg, je ne suis pas sûr que le système capitaliste porte en lui-même, de façon définitive, les instruments de sa destruction et qu’il n’évoluera pas, tel que l’accumulation du capital et/ou du pouvoir ne soit prorogée – mais je n’ai pas encore lu Le capitalisme à l’agonie !
Dans le doute, je reconnais que c’est bien la classe dominante qui utilise l’argument de la complexité pour ne rien changer et non « le capitalisme ».
Le point que je tente de soulever – en rapport au projet du blog – c’est la mesure dans laquelle un débat « démocratique » est (encore) possible, compte tenu de la complexité des problèmes contemporains.
Il ne s’agit pas d’une question spécifique à l’économie – même si c’est le terrain sur lequel je l’ai formulée – puisque c’est l’orientation générale du blog.
C’est une question qui touche n’importe quel problème d’importance dans l’actualité contemporaine, et je dirais en gros – pour ma génération en tout cas – depuis le onze septembre. Regardez les questions épidémiologiques – sida, grippe A, etc. Fukushima demande de faire appel à la physique nucléaire. La crise financière ? à l’histoire de la pensée économique. La guerre en Lybie ? et la crise du pétrole ?
Toujours la même chose, beaucoup de connaissances sont nécessaires.
Résultat : sur internet, qu’on aurait pu croire capable d’engendrer un débat démocratique, vous trouvez une constellation d’îles, chaque blog étant structuré autour d’une question somme toute très spécifique, ici la crise financière, là le onze septembre, là-bas le réchauffement climatique, par ici le crise du pétrole, etc – Par ailleurs, et sur chaque problème à peu près, à moins de beaucoup de connaissances et d’une grande culture, vous vous trouvez fondamentalement incapable de juger entre les deux camps qui s’affrontent invariablement, tandis que l’opinion se polarise en parallèle et de manière arbitraire (ou plutôt guidée par un flux de propagandes extrêmement complexe) sur l’une ou l’autre des thèses en présence (et pas toujours celle, que personnellement j’adopterais pour autant que je me penche sur la question; et il en ira de même pour chacun de nous !).
Or combien de temps faut-il à une personne extrêmement cultivée et disposant de nombreuses connaissances pour s’informer raisonnablement sur l’ensemble de ces questions contemporaines ?
Toute une vie n’y suffirait pas !
Or, n’est-ce pas que l’on attendrait de chaque citoyen pour parler de véritable démocratie ? Ou croit-on qu’en votant comme par chance, la barque puisse se gouverner comme par miracle ? N’est-ce pas une autre forme de main invisible, tout aussi naïve que celle des libéraux ?
C’est la raison pour laquelle je renvoyais à Platon : soupesez la complexité de la République – texte sur l’interprétation duquel personne ne s’accorde encore aujourd’hui 🙂 Et pourtant, regardez la simplicité de la société athénienne de l’Antiquité (quelques centaines de milliers de personnes, des maîtres et des esclaves, une économie agricole très simple) ! Ensuite, comparez cette société avec l’économie mondiale d’aujourd’hui : pensez-vous que les raisons qui faisaient rejeter la démocratie à Platon (en gros, la majorité ne sait pas et qui plus est cède aux sirènes de persuasion) ne valent plus aujourd’hui ?
Ou voyez-vous au contraire qu’elles se démultiplient quasiment à l’infini ?
Pour moi ce que vous évoquez au sujet de la démocratie pourrait tout à fait être appliqué à la vie de chacun d’entre nous. Et pourtant cela ne nous empêche pas de mener nos vies bon an mal an. N’y-a-t-il pas derrière cette volonté de parvenir au bon jugement, à la vérité (n’est ce pas M. Jorion ?) un besoin présent en chacun d’entre nous d’échapper à l’incertitude et à l’absence de contrôle ? Ne trouve-t-on pas tout simplement la peur ?
Les chinois ont une petite histoire qui existe sous différentes formes que je connais sous le titre de la jument de M. Sai :
M; Sai est un pauvre paysan qui possède en tout et pour tout un petit lopin de terre et une jument.
Un jour sa jument s’enfuit et l’ensemble du village se désole pour M. Sai.
M. Sai laboure son champs.
Quelques semaines plus tard la jument de M. Sai revient et il s’avère qu’elle attend un heureux événement. Tout le village se réjouit § Quelle chance !
M. Sai lui continue à labourer son champs.
Le poulain naît et après quelque jour donne un coup de pieds au fils de M. Sai l’estropiant à vie.
Tout le monde dans le village se lamente pour M. Sai et son fils.
Mais M. Sai imperturbable continue à labourer son champs
Mais quelque temps après les envoyés de l’empereur viennent réquisitionner les hommes valides pour les envoyer à la guerre. Le fils de M. Sai n’est pas retenu. Aucun des hommes ne revient dans le village après la guerre. Tous se lamentent.
Pendant ce temps M. Sai continue à labourer son champs.
Je ne suis pas sûr de comprendre toutes les implications de cette histoire mais néanmoins il y a au moins une acceptation de l’incertitude inhérente à la vie et l’impossibilité que nous avons d’évaluer les conséquences de nos actes… Et peut être faut-il simplement l’accepter sans renoncer à agir.
Ah, je connais, j’ai le livre, Leu t’si. Titre :
D’un mal peut résulter un bien.
Avec de la chance.
Ca me fait penser au « il faut labourer son jardin » de Voltaire. Il y a des choses sur lesquelles on a aucune prise… faut-il s’en lamenter ou s’en réjouir ?
C’est pourquoi sans doute l’on évite de débattre en France. Des gens qui suivent trop votre type de questionnement.
Je plussoie. D’autres pourraient faire de même mais ils se perdent en route : ils divisent proportionnellement à leur savoir mais n’ont pas le mode d’emploi pour réassembler les morceaux : ils en arrivent donc à la conclusion pour eux incontournable que la complexité du problème est bien la preuve qu’il est impossible de l’appréhender ! Un peu comme si un coiffeur coupait les cheveux en quatre (ou plus !) avant de coiffer.
« complexité des problèmes contemporains« … »Toute une vie n’y suffirait pas ! » : « Ah ! ‘Voyez bien ! C’est trop compliqué, trop long (pensez donc, toute une vie, j’ai pas que ça à faire ! : ????) : je retourne bosser, au moins ce morceau de la division de la complexité ne m’effraie-t-il pas ! »
No comment : étonnant non !
RePS : https://secure.avaaz.org/fr/bradley_manning_fr/?cl=1013807490&v=8824
J’ai oublié les liens :
je retourne bosser : http://www.pauljorion.com/blog/?p=23147#comment-169928
No comment : http://www.pauljorion.com/blog/?p=23273#comment-170068
Précisément,en quoi ce qui vaut pour des citoyens – non formés dans tous les domaines complexes de la société contemporaine, n’embrassant pas l’ensemble des connaissances nécessaires à une compréhension globale des événements – ne vaudrait-il pas pour une classe d’oligarques, chacun , dans le meilleur des cas,càd hors connivence, n’étant, à peu près, connaisseur que dans son propre domaine de compétence ( souvent prisonnier d’un dogme…: largement autant que la Population ; peut-être même plus ), chaque groupe d’ experts travaillant dans l’entre-soi ( je parle dans le meilleur des cas, càd hors lobbies ), et donc en circuit fermé, pouvant ainsi perdre de vue le bien fondé et le bien commun que sa recherche, son travail, devrait procurer à l’Humanité.
Trop de pouvoir concentré en quelques mains nous a menés là où nous en sommes : une catastrophe financière – de gens bardés d’expertise déconnectés du réel : ce n’est pas ce vers quoi il faut continuer de nous diriger .
Ce qui est certain c’est qu’on risque de ne pas comprendre votre billet ! Qui est FP par ex. ?
Je ne suis pas du tout d’accord avec votre exemple de milliards d’agents économiques qui expliqueraient que l’économie soit complexe, – le nombre n’ajoute rien à la difficulté. S’ils agissent comme un banc de poissons, ils sont prévisibles, et ils le sont d’une certaine manière, la pub s’y efforce, l’idéologie également.
Nous n’avons pas besoin de nous laissez intimider par de la complexité, car nous n’avons pas besoin des détails pour comprendre. Ce qui nous intéresse est le nom inscrit en gros sur la carte, et qu’on ne voit pas parce qu’il est trop gros. Il ne faut pas analyser mais abstraire. Nos yeux captent quantités d’informations, que nous gérons très bien. Donc le complexe n’est pas ingérable, et il n’est pas nécessaire d’en connaitre les détails. Parfois il suffit de noter certains effets pour avoir une idée de ce qui se trame ailleurs dans l’édifice.
D’ailleurs je raye le mot « complexe » de mon vocabulaire, car il rime avec paralysie. Il y a des choses plus ou moins difficiles à comprendre et d’autres qui n’ont pas de sens. Sans être omniscient nous pouvons néanmoins faire beaucoup mieux que ceux qui sont actuellement en place, qui eux n’ont sûrement rien compris à l’économie. Oh si, les détails, ils les comprennent…
Et, dans ce vain savoir, qu’on va chercher si loin,
On ne sait comme va mon pot, dont j’ai besoin.
Il faut sans doute aussi renoncer au mythe d’un savoir omniscient, exhaustif, pour reprendre votre exemple de l’Histoire ; mythe scientifique nécessaire aussi.
Je ne suis pas satisfait de tout celà…
Fantasme de dévoration par la complexité, perte de la maitrise de l’objet… Il faut peut être se laisser dévorer par le monde, tel Jésus qui donnait son corps, le pain de la vie. Nous sommes perdus, so what ?
A l’impossible nul n’est tenu.
je ne résiste pas:
Clément Rosset, Le Principe de cruauté, Éditions de Minuit, 1988.
Clément Rosset, Le Réel et son double
Ah il y a une ironie terrible dans ces histoires, il y en a quelques une chez Rosset, d’ailleurs je connaissais celle-ci…. La première citation, c’est bien vrai.
Je ne connais pas beaucoup C Rosset…
Belles paraboles, c’est le bouquet & la caravane passe.
Merci Clément Rosset & Roma
j’aime cette histoire …
la faucheuse, la camarde …
tonton Georges
http://www.youtube.com/watch?v=SmyyHZHa1Cg
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Clément Rosset, La Force majeure, éditions de Minuit, 1983.
… et donc, si de fait, tel que vous semblez le reconnaître, les gens votaient plus avec leurs pieds qu’avec tout autre chose d’intelligent qui par principe ne serait pas à leur portée… le monde tel un ballon rond serait alors soumis à des forces très aléatoires nous conduisant vers des destinées plus que fantaisistes. Ces trajectoires tourbillonnantes pour toute perspective nous paraissent en effet tout drôle et probablement pas tenables.
Personnellement j’aurais tendance à fuir ce genre de confrontation et m’occuper de mes moutons. Sortir de ce constat, faire volte face en cherchant ailleurs le problème et ses solutions.
Déduction plus sage, non ?
sur ce sujet possibles de « conversations » …..
http://laphrance.phreadz.com/v/G978T1N8EO4/#/view/G978T1N8EO4
-(02:43) Economie de la contribution et projets locaux de développement (Ars Industrialis)
drone
20 Dec 2010 [32 hits]
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-(04:30) Debat Stiegler/Jorion !
drone
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autre choix possible, autre orientation possible, autre ….
ex : Algérie, marches interdites, augmentation de 50% des salaires de la police, de 75% celui des douaniers (rétroactif sur 2010), la place des martyrs est grillagée …..
Crapaud rouge :
▪ « Galilée s’est trompé dans les grandes largeurs. »
▪ Dans le même ordre d’idée, Aristote autre grand esprit s’il en est, pensait que l’oie de tête dans un vol d’oies sauvages, était l’oie la plus intelligente…(Source une ancienne émission appelée Euréka sur Arte)
▪
ouiais
faut pas aller si loin et de toute façon tu te fais avoir à croire que la FINANCE est une Science..
rego
Regoris,
La finance est une science humaine.
pour L’enfoiré
sais bien . à l’amour,l’amitié et merci ..
FP :
« … De ce point de vue, jetez un oeil sur :
Debreu et Arrow, Existence of an Equilibrium for a Competitive Economy, Econometrica, 1954, vol. 22, p. 265 à 290.
Vous comprendrez mieux ce que je veux dire par « complexité », en l’occurrence formelle.
Or même si vous considérez que l’usage politique de cette théorie est stupide (ce que je défendrais tout à fait), il n’en reste pas moins que pour la critiquer, il faut encore la comprendre – ce qui vous demandera quelques années de mathématiques au minimum ! »
– Je me souviens du physicien François Lurçat qui regrettait (France Culture) que la science avait cessé d’éclairer le monde pour simplement l’éblouir.
Fatso :
« …. je n’ai pas les capacités pour comprendre et analyser en profondeur les méandres de notre système économique »
…. Un débat déjà bien ancien traitant de l’économie ( « Éconoclaste » sur la 5 ? ) avec entre autre Alain Minc et Jean Marie Messier qui en faisaient des tonnes sur internet, la « nouvelle économie », les perpectives de croissance…etc…
Un participant au débat (créateur d’une Startup) avait su remettre les choses à leur place en disant en gros.. » nouvelle économie ! nouvelle économie ! … vous savez il n’y rien de nouveau sous le soleil: c’est toujours a course pour être les premiers à poser des barbelés sur la prairie… »
C’est peut-être trop simple ?
Oui ça l’est. « comprendre et analyser en profondeur », de manière fine etc.. La simplification à outrance est aussi stérile que son pendant complexe.
… »Comment une société complexe peut-elle démocratiquement se gouverner elle-même ? Ou si vous préférez, comment créer autant de citoyens que de sapiens, soit plus de six milliards d’un coup et par magie. Compte tenu de la complexification des savoirs contemporains et de l’accélération de l’histoire à laquelle nous assistons – j’avoue ne pas DU TOUT savoir comment répondre à cette question… »…C’est exactement ce que je répète régulièrement à ma prof de chinois…quand mes « tongxué » critiquent les pratiques du gouvernement chinois…( et ceci dit sans, cependant,… le soutenir…:-( )
…Cependant, niveau solidarité, cela ne s’arrange VRAIMENT pas chez nous en BE, Marine…du pipi de chat !
http://www.lesoir.be/actualite/belgique/2011-04-11/la-n-va-veut-un-bonus-par-chomeur-suspendu-833770.php
Il y a des électeurs qui ont voté pour ces gens. J’aimerais en voir un, pour voir à quoi il ressemble.
…réponse à Paul « Il y a des électeurs qui ont voté pour ces gens. J’aimerais en voir un, pour voir à quoi il ressemble. » …moi aussi !!!
« Pinochet n’a qu’a bien se tenir » , ….il récompensait les policiers pour chaque arrestation (de gauche) c’est le début de la chasse à ce qui n’est pas Vlaams, zuiver etc…
…et pendant ce temps…!
http://www.lalibre.be/actu/elections-2010/article/654310/les-presidents-de-partis-francophones-a-la-rencontre-du-patronat-flamand.html
Ils sont où, eux ??? On nage en plein délire ! Je vais finir par être d’accord avec le PTB qui avait dit aux élections : » On ne négocie pas avec la NVA « …
…Ben moi non plus, Paul, je n’ai mais VRAIMENT aucune réponse face ….à un tel comportement ! Pire, peut-être pour la première fois, je prends peur… et ce n’est pas dans ma nature !( Je ne pouvais pas concevoir que ceci arrive chez moi !…et j’ai l’impression d’être dans mon pire cauchemar !!!)
En fait 28 pct des flamands qui votent NVA pensent cela + un autre 20 pct qui votent pour des partis encore pire (VB/LDD).Ce qui fait malgré tout un flamand sur deux…je suppose qu’ensuite cela sera le tour des handicapés, des rmistes (RIS en Belgique), des immigrés, des gays, des ….ils ne seront contents que quand ils auront éliminé l’autre 50 pct, puis probablemnt ils commenceront à se battre entre eux.Les Flamands contre les Limbourgeois, ensuite les Anversois contre les Gantois, encore ensuite les gens de tel quartier contre ceux d’un autre quartier pour finir entre les gens d’une rue contre ceux d’une autre rue.
La plupart sont amnésiques car quand la solidarité jouait dans l’autre sens(pendant plus de 120 ans) on ne les entendait pas.
Je leurs propose de porter un T shirt ‘Vive Moi’!
il n’y en a pas un pour arranger l’autre ( Pays ) …c’est général à toute l’europe …
l’homme de la photo le porte sur le visage ! ce qui n’est pas le cas de tout le monde ! c’est trés reposant du coup ! on le verrait bien avec du persil dans les oreilles .
>Nous attendons d’elle (c’est à dire de nous) qu’elle (c’est à dire nous) produise la justice et la liberté très durablement, pour le bonheur de tous et du tout.
>Tant mieux.
>C’est en le faisant qu’on l’apprend, c’est à dire qu’on y répond, par la libre détermination, accompagnée de l’idée du bien..
Ou comment voulons nous atteindre autrement le bien, si ce n’est par l’action – celle de chacun de nous – ?
Croyons nous pouvoir avancer qu’en répondant à la question du « comment » des choses sans nous préoccuper en même temps du « pour quoi » et donc du sens que nous devons donner à tout ce que nous faisons …consciemment et consciencieusement – autant que nous pouvons – ?
Oui, je sais, c’est difficile de passer des belles idées à leurs belles réalisations…et pourtant, c’est bien le chemin du pèlerin. Et sur cette terre, nous ne sommes tous que des pèlerins…
nous ne sommes que de passage …
Ce qui ne nous empêche pas de tenir la porte ouverte à ceux qui nous suivent…