L’Impromptu Op. 29 de Chopin
Pablo et Blandine se disputent depuis tout à l’heure sur les mérites d’Aimi Kobayashi.
Pablo dit : « Quand on préfère la musique au cirque, quel intérêt d’écouter une gamine quand on peut écouter Rubinstein ? »
Blandine répond : « Avez-vous entendu sa gestion des fortissimos dans la cadence ? Ses pianissimos suaves, arachnéens ? »
Je tranche : Blandine a gagné. Écoutez bien.
118 réponses à “LE MATCH Blandine Keller CONTRE Pablo75”
Au regret de vous contredire, Paul.
Rubinstein.
Parce qu’il fait peur.
C’est Kobayashi qui le dit : Rubinstein, c’est … Keyser Söze !!
J’avais pensé à la faire, mais je n’ai pas osé.
Le seul Kobayashi dont j’ai jamais entendu parlé, c’est le très inquiétant bras droit de Keyser Söze.
pour ceux qui aiment le jeu d’Aimi : la sonate n°5 (pas 9 !) de Beethoven vient d’être supprimée de You Tube, le compte a été fermé, c’était celui de son sponsor français, Patrick Tabet, un ancien professeur du conservatoire d’Aubervilliers-La Courneuve. Une autre version, moins bien filmée, moins bien enregistrée, un an plus tard peut-être, se trouve sur Daily Motion
http://www.dailymotion.com/video/xa2pmk_aimi-kobayashi-l-v-beethoven-piano_music
Les petits accrocs ne sont plus au mêmes endroits, le son est très désagréable, on ne voit presque pas son application tendre envers l’oeuvre, envers le son qu’elle crée à l’instant , qui était si émouvante dans la version précédente, mais on perçoit toujours son sens aigu du dialogue entre les phrases, du contraste entre leurs accents, et ça instaure une dramaturgie très forte qu’elle tire on ne sait d’où !
Et si on écoutait plutôt le sublime 5e mouvement de son 15e Quatuor – dans la version du Quartetto Italiano?
http://www.youtube.com/watch?v=pl5MB6p2qNg
Fermez les yeux, et écoutez…. seulement de la musique. L’age n’y est pour rien…..
Il n’y a pas de gamine, mais uniquement une immense musicienne.
Merci à Blandine de cette découverte.
@ P.Jorion
Vous trichez: j’avais dit ça sur l’interprétation de l’Impromptu op. 29 de Chopin, que je continue de trouver pas du tout exceptionnelle.
http://www.youtube.com/watch?v=RPDXK8MSOik&feature=related
Sur le larghetto du Concerto pour piano nº 2 j’ai écrit: « Elle est douée, c’est clair. »
Maintenant, écoutez Richter et après vous me dites des nouvelles – d’elle… 😉
http://www.youtube.com/watch?v=oZKDUtwyoR4
J’ai triché ? Soit, mais c’est pour la bonne cause… À la musique !
J’ai oublié les guillemets à « trichez »… 😉
« Le miroir est l’âme de la femme comme le miroir est l’âme du guerrier. » Proverbe japonais.
Si Blandine a raison, Pablo n’a pas tord.
L’art en général ou en particulier n’a rien à voir avec la compéte.
De toute fàçon seul l’amour est pardonable.
Merci pour cette version que je ne connaissais pas. C’est une autre pensée chez Richter. En revanche je l’ai réécouté dans le n° 1 de Beethoven et j’ai retrouvé ce qui me fait préférer Aimi, outre sa fougue et son travail sur les sonorités : Richter d’une certaine façon déromantise Beethoven, si je peux me permettre cette manière de dire. En particulier tout le relief dialogique donné par Aimi entre 3:22 et 3:36 n’existe pas chez Richter, au profit peut-être d’une construction que je n’ai pas encore perçue.
Pour l’opus 29 j’aime bien Simon Barere, le http://www.youtube.com/watch?v=uK0ZGzzQrk0 c’est un autre style.
En général j’aime bien Chopin sans maniérismes, le Chopin de Richter est à peu près tout le temps parfait.
Excellent, en effet.
(Barere est mort en 1951 sur scène, à Carnegie Hall, en jouant le Concerto pour piano de Grieg)
Je dois dire que la miss ne me parle pas du tout. J’ai pourtant connu une Kobayashi, diablement jolie de surcroit – mais ce n’était pas la même…
La vraie question est « quitte à écouter du jeune virtuose, pourquoi ne pas écouter plutôt Tigran Hamasyan » ?
Pourquoi cantonner Tigran dans la catégorie « virtuose » ? Ce jeune homme est tout bonnement un génie du jazz, et donc de la musique en général.
Aucun rapport avec les interprètes phénomènes de précocité tels cette jeune Kobayashi, mélange de don surnaturel et sans doute de travail inhumain pour une enfant.
Tigran Hamasyan, né en 1987, a commencé a jouer dans les festivals de jazz à 11 ans, il a été repéré à 13 par Chick Corea, il a enregistré son premier disque à 18-19 ans.
Ici avec les frères Moutin:
http://www.youtube.com/watch?v=3Im8jSBddfE
Son site:
http://www.tigranhamasyan.com/
J’ai fermé les yeux pour ne pas me laisser distraire par la gestuelle, et je me suis concentrée sur l’interprétation.
Je préfère les interprétations d’Arthur Rubinstein.
Si jeune et déja ponnaise
C’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase ! J’arrête le blog et le responsable a pour nom : Bernard Laget. Retenez ce nom !
En effet, voilà un vrai musicien des mots. Impeccable. Encore s’il vous plaît.
Alors on déblogue quand ?
Ça mérite un carton rouge pour le reste du match, ça !!!
Si vous fermez le blog, je me mets à la musique country !
Il y a pire, Paul : le wazabi ne fait pas le moine …
Allez, je mise sur l’outsider Pablo. Elle est incontestablement talentueuse… mais elle joue comme si on lui avait greffé un métronome. Même ses ruptures rythmiques sont chronométrées.
C’est trop propre. C’est une grande pianiste. Ce n’est pas une grande interprète.
Voilà !!! La messe est dite, Paul… Rendez-vous… (c’est clair maintenant que les renforts de Blandine arriveront trop tard…)
Je partage un peu votre avis J.A…
Disons qu’il faut attendre et écouter un peu plus tard son répertoire …
Le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle a de bonnes bases …. Mais qu’en fera t’ elle ?
Si les petits cochons ne la mange pas …
PS : on peut toujours comparer aux cracks : Richter, Rubinstein, Guillels , Arrau, Michelangeli, etc, etc….
Il n’empêche qu’il y a une pléiade d’interprètes contemporains tout autant fameux ….
Cdt . Bs.
Tiens , en parlant de répertoire :
http://www.youtube.com/watch?v=tVuP1BjbhAg&feature=related
Entre Kobayashi et Richter il n’y a pas l’épaisseur d’une feuille.
Le mur des cons existe : OUI, HÉLAS !
À eux deux ils composent une ode à la vie – à quatre mains.
Et les morts n’ont qu’à bien se tenir dans leurs décomposition.
Vous voulez dire le mur du son!
Le mur du çon, à la limite.
Les camionneurs.
http://www.youtube.com/watch?v=8yvfNmIdqT0
LE VIGNERON
Refrain
Le vigneron monte à sa vigne
Où es tu vigneron
Le vigneron monte à sa vigne
Du bord de l’eau jusqu’au ciel là-haut.
Au refrain
On y voit d’abord son vieux chapeau
C’est pas un chapeau du dimanche
Il a plutôt l’air d’un corbeau
Perché sur une branche
Où es tu vigneron ? Où es tu vigneron ?
Au refrain
On voit ensuite son fossoir
C’est pas un fossoir de gamine
Il a plutôt l’air d’un buttoir
Au flanc de la colline
Où es tu vigneron ? Où es tu vigneron ?
Au refrain
On voit paraître ses deux bras
C’est pas les deux bras dune fille
Pas non plus ceux d’un avocat
Qui boit de la camomille
Où es tu vigneron ? Où es tu vigneron ?
Au refrain
Enfin voici ses gros souliers
C’est pas des souliers pour la danse
Ils sont plutôt faits pour monter
J’usqu’où le ciel commence
Où es tu vigneron ? Où es tu vigneron ?
@ Pablo75,
Bonjour,
« Tistou les pouces verts…. »
Pour les enfants de moins de trois siècles
Sans modération
Belle journée
Smoking d’Alain Resnais
http://www.youtube.com/watch?v=H63XX9337yE
bon j’vote jamais, mais quand j’entends Richter, là tout sur Richter, le piano et l’homme pareil,
Gould en parle là http://www.youtube.com/watch?v=Q1iUdM5k5Hc
Sviatoslav Richter – Documentary – The Enigma – vol. 1- 6/8
et puis là grand énorme kado de roma:
Sviatoslav Richter – Documentary – The Enigma – vol. 1- 1/8
http://www.youtube.com/watch?v=tYzXdh8nLn4
article de Libé, à propos de
«Richter l’Insoumis», documentaire de Bruno Monsaingeon
« (…) Pour approcher le continent Richter, la souveraineté sans triomphe de cet homme de la terre, dur avec lui-même et juste avec les autres, il fallait une forme qui rende justice au destin et aux rencontres, sans jamais tomber dans les séductions de l’emphase hagiographique. L’intensité sauvage de ce musicien irréductible dont la trajectoire singulière semble s’être moquée des modes et des tourments de l’histoire, c’est ce que restitue, en deux heures trente-cinq, Richter l’Insoumis, de Bruno Monsaingeon, réalisateur du fameux Cycle Glenn Gould. Pour les mélomanes, un voyage étoilé d’images d’archives inédites et de révélations sur l’homme et sa musique étourdissante. Pour ceux qui vont découvrir Richter, une leçon de vie.
Dès l’ouverture, alternant images noir et blanc de Richter marchant dans la neige et images couleurs filmées peu avant sa mort, il s’installe comme une densité cinématographique. Cet homme au visage minéral, austèrement accoudé à une table en bois, c’est bien celui qui tétanisa le public du Carnegie Hall, en 1961, de la jubilatoire férocité de son gabarit d’airain, fonçant sur son clavier comme un aigle, à mille lieues du style policé en vogue. Il suffit de quelques mesures du Cinquième Concert de Prokofiev pour que tout semble dit. Mais Richter, arraché à la solitude de ses derniers mois, concède à revenir sur chaque instant, chaque rencontre, qui font la trame de sa vie.
Livre d’images. «J’ai une si bonne mémoire que c’en est insupportable, dit-il. Tous ces souvenirs ont perdu tout intérêt à mes yeux, c’est tout juste si je ne les déteste pas, j’ai 80 ans.» Ni calcul narcissique ni dissimulation dans l’évocation qui va suivre, occasion pour Monsaingeon et ses monteurs de déployer un fabuleux livre d’images. L’enfance dans une Russie qui évoque encore Tourgueniev, le père roturier mais excellent pianiste, et un Sviatoslav qui, à 8 ans, refuse de faire ses gammes et hait l’école. On suit, captivé, Richter du conservatoire d’Odessa, où il est accompagnateur contre un sac de pommes de terre, à l’opéra de la ville, où il découvre Krenek et Puccini. Puis c’est l’époque des purges, le virtuose sans aucune formation académique, qui a conquis en une seule audition Neuhaus, découvre la bassesse de ses contemporains. Quand son père au patronyme allemand est fusillé comme ennemi du peuple, il n’a plus que son piano et sa conscience aiguë pour tout sol.
Bon vivant. Richter parle de musique, de Schumann qu’il a interprété, de Prokofiev «capable de vous buter contre un mur», mais qui lui a dédié sa Neuvième Sonate. Prokofiev détestait Rachmaninov? Normal, explique Richter, il avait été influencé par ses Etudes-Tableaux. Chostakovitch le neurasthénique le mettait mal à l’aise «moi, je suis normal, mais j’aurais aimé être fou». Des mots tendres pour Britten, avec qui il joue Mozart pour deux pianos, mais Karajan en prend pour son grade: «Une vraie mule, regardez, sur la photo il fait le beau et nous, on sourit comme des crétins, écoeurant!»
Bien que chronologique, le documentaire est parfois contraint d’illustrer les propos du musicien par des images récentes. Cela ajoute à la force de l’évocation de celui qui refusait les effets de style et déclarait avoir horreur de l’interprétation. A peine moins assourdissants, les forte des années 80, mais un bel canto de plus en plus émouvant. Richter jouait alors dans l’obscurité. «Voir les mains du pianiste?» il fait une grimace nauséeuse «A quoi ça sert?» Le visage de l’interprète? «Il n’exprime rien d’autre que le travail en train de s’accomplir sur une oeuvre, qui a envie de voir ça?» A ceux qui n’ont connu que l’ombre keatonienne derrière une partition, ce roc de mélancolie imprévisible, aux apparitions sans cesse différées, Richter l’Insoumis dévoile un bon vivant impensé. Richter drapé d’une toge de fortune croquant une pomme en faisant la folle, Richter semant les hommes de Khrouchtchev qui le filent («Pardon, vous descendez du bus? Eh bien, moi pas!»), Richter en perruque jouant le rôle de Liszt dans un chromo kitsch sur la vie de Glinka, Richter débouchant le champagne pour ses amis sont de vraies images du bonheur.
La dureté de Richter est paradoxalement jubilatoire, parce qu’elle démonte rumeurs et préjugés. «Douze heures de piano quotidiennes? Jamais. Quelle ânerie!» Plus froid encore. «J’apprends page par page, tant que je ne connais pas une page, je ne passe pas à la suivante.» Nina Dorliac, sa femme, précise: «Il n’aimait pas le bla-bla.»
«Colossal». Les pairs se souviennent. Rubinstein évoque un Ravel «incroyable», un son «d’une grande beauté jamais entendu, comme s’il s’agissait d’un autre instrument», et un musicien «colossal», «brillant d’une intelligence extraordinaire, qui chantait avec son piano». Pour Gould, le Schubert de Richter fut une révélation, ce qui lui semblait «décoratif» apparaissait sous ses mains comme «organique». A l’inverse des Liszt ou Paganini mettant en avant leur relation ultravirtuose avec l’instrument, Richter cherchait à la court-circuiter pour donner à l’auditeur l’impression d’entendre l’oeuvre en direct. «J’ai compris que j’étais en présence de l’un des communicateurs les plus puissants de son époque», lâche le pianiste canadien.
Au terme de Richter l’Insoumis, la fascination est à son comble. «Qu’exigez-vous d’un piano?» lui demande-t-on. «J’exige davantage de moi-même», répond-il du tac au tac. Puis, derrière cette arrogance éteinte typiquement gay à la Burroughs, la fêlure apparaît. Ce n’est pas seulement celle d’un musicien dont le système auditif se désaccorde mais celle d’un homme épris de beauté, forcément consterné: «Ce qui fait distraction, ce qui est inutile, tout, en fait, me gêne. Je ne m’aime pas, voilà tout.»
oui Roma c’est un mega énorme kdo, merci !
L’article est à la hauteur ! est-il de Philippe Venturini ?
bon l’article (de Dahan Eric) je sais pas – qui ne trahit pas trop le documentaire c’est déjà bcp.
heureux de partager cette merveille, si rare à la tv
Héhéhé… « Synchronicités »…
« L’étranger dans la vigne ».
« Tu as tort de te fâcher contre la terre. Il ne faut pas, Pablo. »
http://www.youtube.com/watch?v=6MP3MqLndLE
« L’Espagnol »,1967, de Jean Prat, avec Jean Claude Rolland dans le rôle de Pablo, l’Espagnol. Tous deux suicidés ! Se sont pas ratés, eux, comme Rubinstein avec sa ceinture en croco…
Bonjour,
En écoutant ce conceto N°2, par Aimi Kobayashi, je repensais à ces pianistes virtuoses participant au concours Chopin à Varsovie. Plusieurs faisaient part de l’importance de leur travail de sensibilité psychologique, par delà le temps, pour comprendre et interpréter au mieux Chopin.
Je dois avouer que j’ai eu un doute. Vite dissipé par cet opportun enregistrement de Richter ; merci Pablo 75. Il y a là, de mon point de vue, une épaisseur, une profondeur, un registre émotionnel nettement plus grand ; je l’ai entendu traversé comme par un souffle épique.
Mais Aimi a quel âge sur cet enregistrement ? 16 – 17 ans? Déjà la technique s’efface nettement derrière le talent.
Je ne serait pas définitif comme Julien Alexandre :
Oui Pablo75 a raison, mais pour combien de temps?
Des pianistes prodiges dont on a plus entendu parler une fois adultes, il y en a plein. Et pas que des pianistes… Vous vous rappelez du cas de Roberto Benzi?
« André Cluytens lui donne ses premières leçons de direction d’orchestre à Paris alors qu’il n’a pas encore 10 ans. En 1948 [à 11 ans] il débute comme chef d’orchestre en France et poursuivra définitivement dans cette voie. » Et qui est aujourd’hui Benzi? Un chef de 3e ou 4e zone…
Ce qui est important ce n’est pas la projection de ce qu’elle deviendra, mais l’instant. On n’ entendra peut-être plus parler d’elle ou pas, aujourd’hui elle a du talent.
De même la comparaison n’a aucun sens, qui est le meilleur, le winner…. il n’est pas incompatible d’apprécier plusieurs interprétations, même très différentes, c’est ce qui en fait toute la richesse: fraicheur ou maturité, virtuosité ou plenitude etc
@ julien La maitrise de la technique instrumentale demande une telle abnégation depuis l’enfance, et l’interprétation un tel don de soi, qu’un musicien de ce niveau ne peut jouer comme une mécanique.
Je vous trouve bien cruel.
Petit être bien dressé, assujeti à une musique d’archive, selon une tradition ancienne et rigide, qui mérite bien son nom : conservation… Un vrai interprète recrée l’oeuvre, ce qui est impossible pour un enfant qui n’a pas dépassé le stade du mécanicien.
Poses, dynamiques, aspect… ce sage mimétisme devrait nous interroger sur la « TRADITION » colonne vertébrale des imbéciles selon le mot de Ravel. Tradition qui de nos jours correspond au convenu des élites, puisque le week-end on retrouve ce genre de triste spectacle nécrosé sur Bloomberg TV ou CNBC.
Oui… Cette belle musique est morte. Quelques génies, Lipatti, Haskil…. Parviennent a nous la faire aimer. Je suis d’accord ; iI est navrant de constater que cela correspond actuellement a l’image de marque que la publicité aimerait donner des banquiers. En clair un élitisme consensuel qui ne veut rien (donc tout) dire.
Les impromptus « servent » souvent d’ exercices de style.
On regarde plus qu’on n’écoute ! C’est un tel spectacle qu’écouter devient difficile 🙂
Je n’ai pas Rubinstein en tête, mais pour d’autres pièces de Chopin, la Polonaise N 6, les Mazurka, il faut une grande maturité et une idée qui entraine dans son sillage, l’esprit polonais. Enfin la nostalgie du pays. Une idée polonisante et polonisée d’ailleurs ou l’inverse.
Amis pianistes ou en herbe, vous regardez les bras et les mains d’Ami mais le plus important est la gestion des épaules….le piano implique ce contrôle du corps, semblable au yoga dans cette optique.
Ma polonaise préférée était à Bratislava la semaine dernière, à l’Opéra :
http://www.youtube.com/watch?v=i8a4d_jZKzQ
A propos des épaules, il y a dans la biographie de Gould par Kevin Bazzana un passage que je n’ai pas réussi à comprendre complètement malgré plusieurs relectures. Je l’aurais bien mis en ligne mais c’était un bouquin de bibliothèque. Bazzana raconte que Gould avait à Toronto un prof chilien peu académique qui voulant faire travailler la statique des épaules à ses élèves, était allé étudier dans un cirque de passage un mouvement particulier, pesant sur le cou et permettant de libérer les articulations des épaules…impossible de me représenter ce que pouvait bien être ce mouvement étudié sur des acrobates. C’était peut-être une question de traduction ! Quelqu’un pourrait-il m’éclairer ?
Il faut avoir un caractère bien trempé pour ne pas laisser les années de formatage technique et théorique dominer sa propre personnalité.
Nous saurons dans quelques années si Aimi Kobaya a pu reprendre le dessus et exprimer sa sensibilité à travers son interprétation.
Je lui souhaite d’être un peu « rebelle »
Edith,
c’est plutot carré le piano
@stéphanie
le piano n’est qu’un instrument, et déjà selon les firmes qui les conçoivent il y a des différences notoires, nous ne pouvons pas dire que les Evrard et les Pleyel sont en tous points pareil.
En réalité je parlais de l’oeuvre musicale, tout en respectant scrupuleusement sa forme, nul doute que la sensibilité de celui qui la joue nous amènera une interprétation différente d’un autre.
En cela, je ne pense pas que l’instrument et l’oeuvre peuvent être dites « carrés » 🙂
un peu rebelle
vous voulez dire : raisonnablement révoltée ?
mouarf mouarf
Les liens donnés par Roma à propos de Richter permettent de préciser l’ idée à priori étrange de pianiste rebelle
Bien sûr, c’est beau.
Maintenant, revenons au « prix ». Un tel résultat est le fruit de dispositions particulières, certes, mais aussi – et surtout – de beaucoup de travail, d’une lutte acharnée dans la compétition, une sélection des plus sévères. Oui, c’est beau, mais c’est du dressage, le fruit d’un système qui place la performance comme but ultime.
Cette jeune femme est à la musique ce que les traders sont à la finance. Il n’y a pas de différence de fonctionnement, juste une différence d’objet. Alors pourquoi célébrer l’une et conspuer les autres ?
Parce que c’est de la culture ? Souvenons-nous du constat effectué au lendemain de la deuxième guerre mondiale, et bien vite effacé ensuite: l’érudition, le savoir, la culture, la beauté, le raffinement ne garantissent en rien la démocratie. Le gardien d’Auschwitz pleurait en écoutant Mozart.
Ma pianiste favorite du moment :
http://www.youtube.com/watch?v=Lqorloj2YZY
Commentaire lol :
Cutesyish
A note left for a pianist from his wife: “Gone Chopin, have Liszt, Bach in a Minuet.”
Elle n’a pas que des qualités pianistiques…
C’est beau, rien à dire, c’est beau, il y aussi une certaine fascination à la regarder (spontanément, j’ai pensé « regardé », pas « écouté ») et puis un doute qui s’installe:
Est ce encore une enfant?
Qu’a t’elle sacrifié pour en arriver là ?
Si plus tard, le succès ne perdure pas, tiendra t’elle le coup ?
On peut se battre longuement pour comparer ce qui n’est pas comparable !!
Quand on entend deux interprétations, à quoi bon les classer selon une ligne qui va du moins bien au mieux ?
On n’est pas dans un espace à une dimension !! 🙂 🙂
J’aurais bien aimé entendre Richter quand il avait 20 ans, j’aimerais bien entendre Aimi dans quelques années,
J’aimerais bien entendre du piano qui joue autre chose que Chopin ou Rachmaninov, car certes Chopin requiert de la maturité, mais il a tellement été joué qu’il n’est pas difficile de trouver une (objectivement 🙂 ) meilleure interprétation
j’aimerais bien, par curiosité entendre Chopin sur un piano qui ressemble un tant soit peu à l’instrument pour lequel il a composé, plutôt que sur l’éternel Grand Steinway de 2.75 m
J’aimerais bien entendre Aimi dans une sonate ou un ensemble de musique de chambre, pour entendre un échange musical un peu plus élaboré qu’avec ce tapis orchestral quasi inexistant…
…
Et quant aux musiciens inconnus de la postérité, il est bien difficile de connaître leur « valeur »… Surtout aujourd’hui, avec le marketing culturel qui fonctionne à plein tube ! (Je vais vous épargner ma diatribe contre Korcia)…
Les meilleurs interprètes ne sont pas souvent les meilleurs enseignants, et vice versa, et les enseignants restent inconnus du grand public, malgré leur talent musical.
La critique est aisée, mais l’art est difficile ! Pour moi Aimi a indéniablement beaucoup de talent, et pour savoir si « on » lui a appris à jouer comme ça ou si ça vient du fond de ses tripes, il faut écouter d’autres pièces, d’autres répertoires…. Et qui a appris à Rubinstein, Cicolini, ou Richter ? Et à partir de quand était-il devenu évident que c’est eux qu’on écoutait et pas leur professeur ?
Alors le « pas du tout exceptionnelle » de Pablo75, je trouve ça un peu dur 🙂
http://www.youtube.com/watch?v=jge9uWn_YFc
http://www.youtube.com/watch?v=_sBvZh_GI9A&NR=1
désolé de lire ceci un peu tard.
C’est le médecin pédiatre qui parle ici.
attention lorsque l’on s’extasie devant les exploits des enfants!
En dehors de quelques très rares et authentiques génies, combien d’enfants sont soumis à un réel « esclavage », à des tensions insupportables à cause de leur talent! Même Mozart en a souffert bien plus qu’on ne l’imagine!
Notre monde
Je suis étonné que sur ce blog ce n’ait pas été la première pensée des intervenants. Quand j’entends ces « petits génies », je vois souvent les parents derrière. On est pas si loin du phénomène des mini miss (le talent et le travail en moins, mais pas l’exploitation souvent). Passé le côté toujours très impressionnant, un certain malaise s’installe…
Sinon, pour rester parmi les phénomènes, vous pouvez aller jeter un coup d’oeil ou d’oreille sur Sungha Yung, guitariste junior virtuose…
@ Poussière
La discussion avait commencé ici:
http://www.pauljorion.com/blog/?p=22856#comments
où, à la question de Bernard Laget: « Je me demande ce que vous auriez pu dire ou penser de Mozart, quant Léopold promenait son gamin dans les cours d’ Europe ? » j’avais répondu: » l’exploitation du père de Mozart des talents de son génie de fils c’était du cirque sordide – il en a bavé le petit Wolfgang… C’est ce qui explique la lettre glaciale qu’il écrit à son père quand à 22 ans, dans sa 3e visite à Paris en compagnie de sa mère, doit annoncer la mort de celle-ci à son père resté à Salzbourg – s’il était moins tard je la chercherai et la copierais (je vais souvent les dimanches à l’Eglise St.Eustache écouter les concerts d’orgue de J.Guillou et à chaque fois que j’y rentre je pense que c’est là que Mozart a assisté aux funérailles de sa mère). »
petite erreur due à l’émotion sans doute (de la musoque ou de la situation des enfants?!)
Notre monde a-t-il besoin de ces petits génies? Et combien sombrent effectivement à l’adolescence, cette période si sensible de notre vie?!
Tout de même Paul Jorion, vous auriez pu ajouter ce virtuose dans la compétition :
http://www.youtube.com/watch?v=gWJBfvWjlk0&feature=related
J’avais complétement oublié cette merveilleuse interprétation.
Merçi.
Elle est brillante, et on lui souhaite le même succès quand elle sera adulte, mais çà, malgré un talent incontestable, c’est pas du tout certain car, avouons-le, c’est d’abord son jeune age qui est à l’origine de l’attrait actuel. Ce coté « exhibition » me met quand même un peu mal à l’aise.
mais si vous fermez les yeux, que ressentez-vous ?
Qui sait, peut-être qu’un jour l’économie ressemblera plus à du Chopin qu’à du Rihanna.
@paul
Mille mercis Paul pour Aimi qui jouait en concert hier à New-York, ayant quitté Tokyo le 28 mars avec tout le poids sur le coeur de ce qui arrive à son pays ! Quand je l’ai découverte sur You Tube par hasard il y a trois ans , ça faisait des années que je n’écoutais plus de musique…ce fut une émotion très forte !
La vocation musicale d’Aimi remonte à son tout jeune âge, ses parents l’ont inscrite à un cours de danse parce qu’ils la trouvaient « timide ». Mais je pense que timide veut parfois dire requis intérieurement par l’intensité des sensatlons. Toujours est-il que la seule chose qui l’intéressait au cours de danse, c’était le piano, elle restait près de lui sans pouvoir le quitter quand le cours était fini. Ses parents qui n’avaient pas de culture musicale classique l’ont naturellement inscrite à un cours de piano où on a découvert ses dispositions exceptionnelles. Son père est un simple employé, je ne sais pas si sa mère travaille, elle a je crois un frère et une sœur. J’imagine pour ma part qu’elle a baigné même in utero dans une athmosphère particulièrement harmonieuse, et que quelqu’un dans la maison chantait avec justesse et vigueur des chansons populaires , qui sont toujours pleines de vérité existentielle, vérité véhiculée par les sons !
Aimi ne travaille pas excessivement, est très personnelle dans ses choix…de quoi rassurer ceux qui craignent pour elle un dressage – on n’en voit d’ailleurs pas trace dans sa gestuelle, ni dans sa physionomie, on sent bien qu’elle est dans la jouissance, pas dans la soumission, regardez comme elle bondit de son siège à la rencontre du son !
Je crois que l’adoption par la bourgeoisie, puis par les couches moyennes de la pratique pianistique comme marque distinctive d’appartenance à un monde cultivé nuit non seulement aux enfants qu’on oblige à reproduire quelque chose qu’ils ne ressentent peut-être pas , mais aussi à la simple perception d’un véritable talent comme celui d’Aimi : ces images d’aliénation et d’ostentation y font obstacle. La réussite d’Aimi vient je crois du fait que ses parents justement n’avaient pas d’idée préconçue, et qu’ils ont agi d’après ce qu’ils voyaient, l’attirance irrésistible de leur fille pour les ondes envoyées par les cordes frappées !
La bourgeoisie et la classe moyenne, réduites en une entité qui digère pour elles les émotions.
…. Je trouve que c’est une vue très réductrice, pas forcément compatible avec l’ouverture d’esprit qu’il faudrait pour vibrer à toutes les expressions artistiques.
Je me suis mal fait comprendre!
Il y a dans l’injonction de faire du piano quelque chose de forcé assez souvent. Au lieu d’être à l’écoute de ce qui fait vibrer un enfant, on l’inscrit d’office au cours de piano. C’est tout de même un fait que la pratique du piano a été depuis la naissance de l’instrument l’apanage de milieux bourgeois, et de ce fait, relève dans l’imaginaire d’un statut disons « élevé » . Je ne dis pas que cela oblitère l’accès à l’émotion, mais cela biaise la donne, si l’éducation donnée par les parents est inspirée davantage par le conformisme que par une attention véritable à leur enfant.
Sous les premières vidéos d’Aimi sur You Tube, des internautes se mettaient à raconter ce qu’ils avaient souffert dans leur enfance au nom de ce conformisme. La véritable émotion esthétique n’y avait aucune part.
Cela dit en tant que prof de Français, je me sentais responsable de faire accéder mes élèves au patrimoine artistique et culturel universel, me heurtant souvent aux représentations négatives des élèves…. pusillanime !?!? …mais c’est un mot bourgeois, ça madame ! Il me fallait déployer un argumentaire serré pour les convaincre qu’ils avaient au contraire à s’emparer et s’enrichir de tout le trésor des mots . Je m’apercevais que j’avais gagné en trouvant pusillanimité dans une rédaction deux mois plus tard !
@ Blandine,
Je comprends.
On ne force pas quiconque à « apprendre » à jouer d’un instrument.
On l’y invite, il s’y révèle ou non, mais dans le premier cas, il fait corps avec son instrument, peu importe finalement ce qu’il sera ou fera plus tard.
Concernant les catégories dont vous faites mention, en France je pense que la deuxième partie du 19ème siècle a été l’époque de l’étiquette « pianotesque ;-)) ».
Il me semble qu’à la moitié du 20ème, cette mauvaise habitude s’est perdue.
Mais bon, je ne peux parler que de ce que je connais, c’est à dire ce qu’il se passait dans ma région.
Souhaitons que la porte soit ouverte à toutes les classes de la société, et que l’amour de la musique l’emporte.
@ Blandine
Quand je vois ça, j’ai des doutes:
http://www.youtube.com/watch?v=R_WBdb4Hu_Y
Faites confiance à votre perception ! ne voyez-vous pas les mouvements attentionnés de sa tête, de son buste ? n’entendez-vous pas cet allant vigoureux qui ne peut en aucun cas être obtenu par mimétisme ou dressage ? Sous les première vidéos d’Aimi sur You Tube, si certains internautes ne pouvaient faire abstraction des heures de souffrance au piano imposées toute leur enfance, d’autres parlaient carrément de métempsycose !
Mais qu’est ce qui vous fait douter précisément ? Ou alors vous trouvez qu’elle est trop pomponnée !!… C’est le décorum japonais !
C’est sur qu’elle est mal fagotée…
Je vous recommande les premiers enregistrements à 18 mois…
Comme toujours, Piotr a le dernier mot… (celui qui tue)
Il aurait peut-être fallu à Pablo75 pratiquer un instrument…
Lorsqu’on est musicien, on voit tout de suite la différence entre un enfant dressé, et un enfant « habité », quoique le mot est un peu fort. Comme on décèle immédiatement un faux pianiste dans un film à la seule vue de l’expression de son visage.
Un enfant de 4 ans ne peut jouer ainsi sous la contrainte ou la pression de parents ou du professeur.
Ce n’est pas non plus un singe savant qui imite, ni un concours de miss, on ne tape pas sur un piano comme sur une machine à écrire.
Malheureusement, peu de gens aujourd’hui pratiquent la musique…
Jouer comme Aimi c’est jouer avec son coeur.
Je crains que vous n’ayez raté votre coup dans votre appréciation du jugement de Pablo75… 😉
Il aurait peut-être fallu à Sessa qu’il (ou qu’elle) lisse ce que Pablo75 (faisons un peu le Marlowe) a vraiment écrit. Je n’ai parlé nulle part ni de dressage ni de contraintes ni de pressions. J’ai seulement des doutes. Par contre, vous, en tant que pro du piano qui savez qu’à 4 ans on joue du Clementi avec son coeur, vous allez pouvoir nous assurer que notre amie Aimi va être au moins la nouvelle Clara Haskil.
Mais dites-nous de quoi exactement vous doutez ! Il ne s’agit pas de pronostiquer, il s’agit de dire sur le moment ce que ça nous fait , pour parler prosaïquement sans effets de discours ! Ça m’étonne que vous ne perceviez pas que cette petite pianiste à quatre ans est parfaitement à son affaire, à l’aise, heureuse d’être là où elle est en train de faire ce qu’elle fait. Ça saute aux yeux et aux oreilles et c’est pourquoi je voudrais bien savoir de quoi vous doutez en entendant cette sonate de Clementi en voyant ce bout de chou saluer en lâchant ses bras, opiner du chef tout du long avec décision, tandis qu’elle fait parfaitement chanter la mélodie à la main droite avec parfois des fortissimos très réussis dans les graves à la main gauche. Au début sur You Tube, des gens disaient it’s a fake !
Je crois que ce qui peut rendre incrédule des gens de notre génération, c’est la liberté que peut donner chez un enfant les nouvelles manières de faire avec eux. Une liberté aux effets inconcevables….qui peut faire des jaloux ! personnellement j’en suis jalouse ! Je commets le péché d’envie !!! d’où peut-être ma passion pour cette toute jeune pianiste….que je voudrais partager mais il n’y a pas d’obligation bien sûr !
A 4 ans non pas « on » mais je pense qu’Aimi joue Clémenti avec son coeur, et elle le montre aussi à 10 ans et 15 ans sur les vidéos présentées. Il aurait peut-être fallu à Pablo75 qu’il lise ce que Sessa a écrit plus haut : « On n’ entendra peut-être plus parler d’elle ou pas, aujourd’hui elle a du talent ». Loin de moi de la prédire en nouvelle Clara Haskil.
Vous doutez qu’elle soit inspirée et que cela soit du « cirque » pour reprendre votre expression. Vous faite tout une démonstration afin de montrer que les pianistes sont des malades « psychose ». Et vous préférez leur interprétation à un âge mûr.
Vous ne vous demandez pas comment un artiste peut être épanoui à 40 ans s’il n’a pas eu de public auparavant. L’artiste se façonne aussi au contact du public, et ça n’est pas en doutant ou en critiquant les jeunes artistes parce que leur interprétation n’est pas encore aboutie que vous leur permettrez de s’exprimer.
Il faut venir écouter et encourager les jeunes musiciens talentueux surtout si, comme d’Aimi, ils sont heureux de jouer.
@ Sessa
« Vous faite tout une démonstration afin de montrer que les pianistes sont des malades « psychose ». »
Non, je cite un texte de M.Schneider sur les pianistes (avec lequel je ne suis pas entièrement d’accord, d’ailleurs) parce qu’il me paraît intéressant. C’est tout.
« vous préférez leur interprétation à un âge mûr. »
Non, je préfère les grandes interprétations, indépendamment de tout le reste.
Il me semble que dans votre quête de cette beauté absolue, qui vous est personnelle, vous vous êtes asséché. Le frémissement d’un talent qui s’éveille ne vous émeut pas ou plus.
Personne ne peut contester que ces enregistrements soient magnifiques, bien évidemment, mais
concevez que chacun puisse avoir sa propre conception de la beauté façonnée, probablement, par son parcours de vie.
Chaque artiste peut donner cette variété et apporter à l’auditeur ce qu’il recherche dans sa beauté de la musique.
Pour ma part, « meilleur » ne veut rien dire, car je n’arrive pas « départager » plusieurs interprétations, sans compter qu’un artiste ne jouera pas systématiquement pareil à chaque concert.
Je crois que c’est faire un mauvais procès à Pablo75 que de l’accuser de vouloir imposer son goût (que je partage dans les grandes lignes) au prétexte qu’il le dit peut-être plus fort que les autres.
Ce n’est pas parce que l’on n’est pas ému par le jeu de cette jeune pianiste que l’on est forcément insensible à la beauté ou en quête d’une forme de perfection conceptuelle. Quand bien même le langage de la musique peut offrir par sa richesse un certain degré d’objectivation de l’abstraction subjective provoquée par le rythme, la raisonnance sympathique et les fréquences, notre perpection n’en reste pas moins totalement subjective. Je crois qu’il ne peut être question que de cela.
Merci encore, Alexandre, de dire l’essentiel… Il y a peut-être un problème femmes-hommes dans cette discussion… En tout cas, Sessa, lissez plus bas ma réponse au message nº 32 de Blandine.
Plutôt qu’un problème femme homme, probablement une perception différente.
On s’interroge sur Aimi : mature et heureuse ou dressée et sacrifiée et la perception n’est plus la même. On la considère talentueuse et pleine de promesse ou au contraire on doute sur son jeu et on la plaint.
La façon de l’exprimer : gamines et cirque met le feu aux poudres.
Mais peut-être cette perception est liée à la façon dont chacun voit et exprime les choses dans sa vie : carré, péremptoire, abrupte ou indulgent, compréhensif, ouvert.
Finalement, c’est peut-être un problème homme femme….
Un extrait de « Musiques de nuit » (Ed. Odile Jacob, 2001), de l’écrivain et psychanalyste Michel Schneider (qui a écrit aussi les très intéressants et très beaux « Glenn Gould, piano solo » et « La Tombée du jour. Schumann »):
« Ne cherchez pas son nom. Il est absent de tous les dictionnaires et encyclopédies de musique. Il s’appelle Erwin Nyiregyazy. Américain d’origine hongroise, il fut un pianiste prodige, à l’oreille absolue. Il composa dès l’âge de quatre ans et avait une incroyable mémoire musicale. Mais il ne remplit pas les espoirs mis en lui et disparut de la scène des concerts dans les années vingt. Jouant Liszt comme un «génie», selon ceux qui l’entendirent à Carnegie Hall le 18 octobre 1920, il fit ensuite un procès à son manager et épousa le suivant, puis se rendit en Californie où il gagna beaucoup d’argent comme pianiste dans les studios d’Hollywood. Sept cents œuvres manuscrites et huit mariages plus tard, on le découvrit en 1973, vivant dans une chambre sordide d’un taudis de Los Angeles. Il n’avait même plus un piano. On le persuada pourtant de donner quelques récitals semi-privés en 1974 et il y eut même en 1977 un enregistrement – introuvable évidemment. Il mourut pour de bon en 1987. Il était déjà mort avant. Quand sa créativité s’était éteinte.
Dans les années quarante, aux Etats-Unis, un psychiatre d’origine autrichienne du nom de Leo Kanner donnait son nom à l’ «autisme infantile précoce». Peut-on rapprocher l’autisme de Kanner du comportement de retrait absolu de certains pianistes, qu’on pourrait appeler le syndrome de Nyiregyazy?
A côté des inhibitions propres au jeu du piano, des angoisses envahissantes, au-delà du trac normal, des affections plus ou moins fonctionnelles, telles que contractures, crampes, voire perte de sensations tactiles, véritables faillites de la résidence dans le corps qui peuvent entraver le déroulement d’une carrière d’un pianiste (Leon Fleisher, Michel Beroff, Vladimir Horowitz, Byron Janis, Glenn Gould en furent des exemples parmi bien d’autres), il existe une forme de pathologie assez fréquente, une sorte de repliement autistique du pianiste, pouvant aller jusqu’au silence définitif: plus de concerts, plus de disques et même plus de jeu du piano, fût-on seul et sans témoins.
Les quatre plus grands pianistes de ce demi-siècle (Richter, Gould, Horowitz, Benedetti Michelangeli) ont tous été frappés à un moment ou à un autre de crises de dépression ou de mélancolie qui les réduisaient au silence, parfois pour de longues périodes, en proie à un véritable syndrome de disparition. Martha Argerich a dit d’Arturo Benedetti Michelangeli, peut-être le plus mystérieux des pianistes, qu’il lui avait appris «la musique du silence». De même, Thelonious Monk, pianiste de jazz (1917-1982), traversa quinze ans de silence à peu près total. On le vit un jour de 1969 à San Francisco passer une soirée entière suant à grosses gouttes à enfoncer les touches du piano très doucement, sans qu’aucun son ne sorte. Puis il se leva et dit: «Bon set, non?» Provocation? Non pas. Certitude d’avoir atteint à des rivages où dire et ne pas dire, être et ne pas être, sont au sens strict équivalents. Certains pianistes connurent de telles phases de silence, de retrait, voire d’autisme.
Mais il ne faut pas tout confondre. Se préserver de la société médiatique en refusant toute interview, tout en continuant à enregistrer et à jouer cinquante concerts par an (c’est le cas de Krystian Zimerman), n’est pas à mettre au compte de l’inhibition, du symptôme ou de l’angoisse. S’opposer à la réédition d’enregistrements dépassés par les approfondissements que l’on a gagnés dans l’abord d’une interprétation (comme le même Zimerman pour les sonates de Brahms, ou Pollini pour celles de Beethoven) relève du souci de l’œuvre, sûrement, du perfectionnisme, peut-être, de la névrose, certainement pas. Le refus d’être gravé dans un disque comme sur sa tombe est le signe d’une vitalité créatrice, non d’un refus du piano.
Par ailleurs, nombre de pianistes semblent avoir été atteints de symptômes phobiques. Peur de l’avion (Horowitz, Richter, Gould), peur des maladies (Gould encore), peur des repas en voyage (Horowitz), peur du piano lui-même (Benedetti Michelangeli, Gould, toujours). Les lubies ne sont pas rares non plus: après s’être retiré du concert en 1946, Josef Hofmann (1876-1957) passa les dix dernières années de sa vie loin du piano. Il inventait des mécanismes d’horlogerie et démontait et remontait sans cesse ses inventions pour lesquelles il obtint d’importants brevets. Claudio Arrau, à vingt et un ans, souffrait d’inhibitions qui le faisaient mal jouer en concert des passages ne présentant aucune difficulté. Il fit une psychanalyse brève avec le Dr Abrahamsohn qui le ramena à l’enfance, comme il se doit.
«Pour un enfant, s’en aller jouer devant une assistance de deux mille personnes, c’est tout simplement contre nature», confiera-t-il plus tard. «Et combien d’enfants, parce qu’ils ne se sentent pas à l’aise, se réfugient dans l’échec. A mesure que je grandissais, je trouvais plus embarrassant d’être le centre d’intérêt.» Mais de la souffrance psychique elle-même, le grand interprète saura ensuite retirer des forces créatrices. Arrau parle de l’angoisse comme d’une ressource et non d’un obstacle pour le pianiste: «Le don de ressentir l’anxiété, l’anxiété liée au simple fait d’être homme, nous donne le pouvoir de nous investir dans n’importe quelle autre émotion – dans n’importe quoi d’humain.»
Radu Lupu ou Sviatoslav Richter ne saluant presque pas le public, l’un entrant en scène comme un ours des Carpates, l’autre comme un valet de chambre à l’ancienne, stylé et méprisant, avec, vers la fin, au fond des yeux, la perversité triste d’un Jean Genet empesé, tous deux paraissant ignorer jusqu’à l’existence de la salle, ne semblent pas non plus, pour cette seule raison, des cas pathologiques. On pourrait au contraire voir dans les dernières minauderies d’Horowitz, séduisant son public comme un acteur sur le retour n’oserait pas le faire, un regain d’hystérie, pardonnable certes chez un vieil homme et un grand artiste, mais non moins déplaisant.
Je ne suis pas sûr que François-René Duchâble, qui préfère des programmes atypiques dans des lieux improbables aux grands-messes parisiennes du concert, se considère comme un ermite souffrant d’acédie. De même, le fait que Martha Argerich, depuis 1981, ne joue plus seule en récital, mais (lorsqu’elle n’annule pas) uniquement en musique de chambre (deux pianos, piano et violon) ou en concerto, est une limitation subie par elle, dont j’ignore les raisons, comme elle probablement, et dont je déplore les conséquences négatives: de quelles beautés elle nous prive! Mais ce n’est encore là qu’une forme limitée de syndrome de disparition.
Même l’arrêt complet du piano, comme en connut Horowitz à deux reprises (1935-1939 et 1953-1965), n’est pas nécessairement pathologique. Après tout, Chopin non plus n’aimait pas le concert, et Schumann s’arrangea pour se blesser à la main (en 1832), ce qui le força à y renoncer. Lorsque se déclencha la première crise chez Horowitz, il sortait de dix années ininterrompues de concerts, dont soixante-quinze la saison précédente. Et lors de la seconde, il dit, non sans apparence de raison: «Je me suis arrêté comme on arrête une voiture si on ne veut pas brûler son moteur.» Tout le piano ne s’arrêta pas alors: Horowitz enregistra quelques disques pendant son second et terrible effondrement.
Le silence peut être un lieu et un temps protecteurs où l’on se refait une enveloppe psychique afin de contenir les représentations et les affects que suscite le fait de jouer de la musique, non sans violence ni douleur. Refuser d’être figé dans une position sociale ou médiatique est un trait d’enfance ou d’adolescence que l’on retrouve souvent chez les artistes ayant le sentiment aigu que, pour qui veut rester proche de son art, la fonction est un danger. Il y a donc silence et silence. Comme le dit fort justement Laurent de Wilde à propos de Thelonious Monk: «Il y a deux silences chez Monk. Il y a celui de l’homme qui vit et qui observe ce qui se passe autour de lui, et il y a celui du musicien qui fabrique de la musique. Ils sont très différents, car l’un subit le temps et l’autre le crée.» En revanche, le silence subi de Monk, ce silence qui parsème ses compositions et finit par tout envahir, a bien quelque chose de pathologique, lui.
Il en va de même d’autres silences de pianistes. Ses proches racontent que Radu Lupu, enfant, fut longtemps infans, dépourvu de paroles. Il ne parla que vers six ou sept ans, et sut le piano avant les mots. Il fallut l’intercession d’une grand-mère et d’un instrument auquel elle l’ouvrit pour le faire peu à peu entrer dans le monde de l’altérité et de la parole. Sans doute cette histoire est-elle exceptionnelle et peut-être romancée, mais elle recoupe une vérité d’évidence: Lupu est de tous les pianistes vivants le plus autiste. Non pas qu’en privé il se taise, mais en public, assis sur sa petite chaise (comme Gould), il redevient l’enfant taiseux. Parfois, au concert, il a des absences à lui-même et à la musique qui peuvent durer tout un mouvement de sonate. Puis, il revient à lui et à nous, en quelque sorte, et alors, c’est la parole musicale la plus directe, la plus intense, la plus intimement déchirante.
Quand Glenn Gould dans sa dernière saison voulut abandonner le piano, pour devenir chef d’orchestre, ou écrivain, ou réalisateur de films, ou gardien d’une arche pour animaux abandonnés – il ne savait pas, mais quelle enfance dans tout cela! -, eut-il la prémonition que la fin du piano serait pour Gould la fin de Glenn? Que le Yamaha trouvé chez Ostrovski un jour de 1980, qui fut son dernier piano et lui rappela si fort son tout premier, le vieux Chickering, serait vraiment le dernier? Ce à quoi il songeait était certes la répétition de l’abandon du concert, dix-huit ans plus tôt, mais cette fois-ci sans retour, car il fut pris au mot. Alors, les uns l’entendirent annoncer qu’il ne jouerait plus jamais de piano, d’autres qu’il ne ferait plus que ça, toute la nuit, toutes les nuits.
Pourquoi ce syndrome de silence chez ceux qui ont fait profession de communiquer avec autrui par des sons, certes, mais d’âme à âme? Je ne me hâterai pas de prononcer à la légère le mot de folie. On relie souvent, non sans quelque paresse intellectuelle, la création artistique et la maladie mentale. La littérature, notamment cette plaie à poncifs que fut le surréalisme, a répandu cette idée fausse: pas de littérature, pas d’art, pas de musique, surtout, sans folie. On connaît le mot d’ordre général et imprudent d’André Breton: «La beauté sera convulsive ou ne sera pas.» Bach, convulsif? Ou Mozart? Sottise totalisante et totalitaire que cette généralisation, comme toutes celles se terminant par: «ou ne sera pas».
A quoi l’on peut répondre, avec Otto Rank, que les artistes ne souffrent pas tous de pathologies mentales. Ce sont plutôt les névrosés ou les psychotiques qui sont souvent des artistes ratés. L’art nécessite au contraire une forte capacité à soutenir une pensée chargée d’affects, et à recréer une réalité, qualités relevant d’une santé psychique incontestable. Pourtant, il est vrai souvent que des artistes, des compositeurs ou des interprètes (la question de la créativité ne se pose pas de façon très différente dans les deux cas) souffrent de pathologies liées à l’exercice de leur art ou plus globales. Pourquoi?
Cela tient d’abord aux rapports qu’il y a entre la musique et le langage, ensuite au rôle que joue le corps chez l’instrumentiste et chez cet instrumentiste solitaire par excellence qu’est le pianiste. Il est certain que la musique, le plus abstrait mais aussi le plus sensuel de tous les arts, car en elle aucune représentation ne vient mettre les sens au service d’un sens, est davantage l’occasion de troubles de la créativité que les arts plastiques ou la littérature. La musique incarne l’énigme d’une langue sans parole et ce trait fait d’elle l’art qui sans doute noue le plus fort la création à la folie.
Il est indéniable qu’elle est du côté de la psychose, plus que de la névrose. Le névrosé parle pour dire ou ne pas dire, dire son désir ou son absence de désir: il parle pour tout dire (comme l’obsédé), ou pour que ça se taise (ainsi de l’hystérique), mais il ne doute pas que parler et dire soient liés. Le psychotique, lui, dissocie parler et dire. Un dire perpétuel qui ne parle de rien (délire), un silence muré (autisme), une parole hors d’adresse, hors du dire, sans autre (schizophrénie). Ça ne veut rien dire reste l’énigme de l’inconscient, de la névrose. Ça veut parler, sans dire, est le mode de la psychose. La musique est une langue qui dit, mais ne dit qu’elle-même, toute proche justement de ce que Michel Foucault appelait la folie: «Une langue qui n’existe que dans cette parole, une parole qui ne dit que sa langue.»
J’ai déjà cité ici ces mots énigmatiques: «Ce dont on ne peut pas parler, il faut le taire.» Ainsi se clôt le Tractatus logico-philosophicus de Ludwig Wittgenstein, composé entre 1916 et 1919. Au moment où Freud conçoit la pulsion de mort, Wittgenstein, qui ne l’aimait pas, mais aimait la musique, que Freud n’aimait pas, écrit: «Qu’un événement réduise au silence mon désir ne signifie pas qu’il le comble.» Cet événement, divers fragments de ses Remarques philosophiques montrent qu’il prend d’abord pour le philosophe la forme d’une musique, jouée ou entendue. La musique commence où s’arrête la psychanalyse. La psychanalyse, c’est: ce qu’on ne peut taire, il faut en parler. La musique, c’est: ce dont on ne saurait parler, il faut le dire.
L’œuvre se fait contre la folie et à l’intérieur d’elle. C’est ainsi que Freud donne une clef aux différentes inhibitions de la créativité artistique. L’écrivain hanté par l’angoisse de la page blanche, le peintre qui ne peint plus, le musicien du silence sont en fait saisis par la peur de devenir fous. Le rêveur et l’artiste ne se distinguent que par la durée plus ou moins longue de «la honte ou de la crainte de cette folie temporaire que l’on retrouve dans tout vrai créateur».
Le silence constitue une métaphore de l’inconscient. Quand il survient dans la cure psychanalytique, une pensée jusqu’alors inconsciente commence à se dire. Mais plus profondément, les grandes structures psychopathologiques peuvent être opposées selon les rapports que chacune entretient avec le silence fondamental de la psyché. Le latin dispose de deux mots pour dire le silence: sileo (je suis dans le silence) et taceo (je me tais). Dans le premier cas, il n’y a rien qui puisse être dit, c’est le silence de la pulsion, ou de la jouissance. Dans le second cas, il y a quelque chose à dire, mais je dois le cacher.
Pour schématiser, on peut avec Freud voir dans le premier l’empreinte de la mort (le silence est le refoulement lui-même), et dans le second la trace de la vie (une romance sans parole où le silence est le résultat du refoulement qui sépare ce qui est dit de ce qui ne l’est pas). Avec le silence des pianistes, il s’agit certes d’un trait répandu dans certaines psychoses, mais de celles qui ne présentent ni délires ni hallucinations, une sorte d’absence croissante à soi-même, de déficit absolu du sentiment d’exister (être vivant et non mort) et de la sensation de continuité (être celui qu’on est, et pas un autre). Les classifications de la nosographie psychiatrique ont un mot savant pour désigner ce trouble: hébéphrénie, et les gens ordinaires parleront de repli, d’impénétrabilité. »
C’est extrêmement captivant, et formidablement bien écrit.
Merci de nous avoir fait profiter de cela.
Texte digne des meilleures publications, merci!
L’usage non commun de la mémoire par les musiciens qu’on peut mettre dans le spectre autistique me semble logiquement aller de pair avec un besoin de silence plus précoce dans leur vie.
La protention, la capacité du cerveau à se projeter, et donc à « entendre la musique en avance — avant ou même sans qu’elle ne soit jouée par les doigts » s’exacerbe, alors que à l’inverse l’empathie pour l’auditeur est ténue voir effaçable.
Les neurones miroirs, si tant est qu’ils « expliquent » quelque chose, basent alors leur fonctionnement sur la musique « enregistrée », au détriment de la musique jouée-ressentie-par -un-public.
Le besoin obsessionnel d’avoir un piano précis (Gould) se conçoit comme atteinte du maximum d’information possible dans la sphère qu’on s’est définie, les autres dimensions (sociologiques) de la musique ayant disparu.
ce type d’analyse, (si je ne vous ai pas trop trahi), recoupe le texte que Paul Tréhin nous avait soumis il y a qq temps sur l’idée que les premiers peintres (Altamira …), étonnamment capable de détail dans la reproduction visuelle, étaient peut être des gens du spectre autistiques, peut être chamanisés ou pas, je ne me souviens plus ce qu’il en disait. Ce sont les imperesarios qu ijoueraient aujourd’hui ce rôle de chamanisation de ces artistes hors du commun ( je n’aime pas hors norme !)
La créativité est une action mentale qui peut fonctionner indépendament d’autres fonctions mentales. En d’autres termes: un artiste peut mener une vie chaotique, voire marginale, immorale, complètement névrosé si vous voulez, et pourtant être capable de créer des beautés. Je pense que nous avons tous un sens inné pour la symmétrie.
Beethoven est un cas das ce genre: vie chaotique, abus d’alcool, comportement marginal dû en partie à sa sourdité, à la limite d’un cas « borderline ». Mais quelle écriture musicale sublime! Elle est d’une grande beauté symmétrique. Je le joue assez souvent au piano, notamment les sonates de maturité opus 109, 110, 111 et partiellemt, car très difficile, la 106.
J’ai beaucoup travaillé sur ce thème quand j’étais médecin-psychiatre (je fais autre chose aujourd’hui) , mais je trouve que la création reste invariablement un fascinant mystère.
Deux personnes écoutèrent une pianiste, l’un y trouva plutôt les termes suivants à y redire dans sa bouche, cirque, gamine, pour une autre quelque chose d’un peu plus respectueux quand même envers une enfant.
Quand on préfère manger du poulet à la viande, à quoi bon écouter Rubinstein si je ne me montre plus capable d’écouter la musique jouer également par une enfant en bas age.
Il y a toujours des choses à apprendre et à s’émerveiller venant parfois de la part des enfants,
y aurait-il donc un Age légal en musique ?
Joue, joue du piano ma petite fille et n’écoute pas plus longtemps toutes ces mauvaises langues de plus à ton sujet.
On rencontre même parfois des gens et des experts en musique et qui avec beaucoup de sérieux et d’analyse freudienne vous disent que vous n’auriez jamais du apprécier telle ou telle chose. Et puis le cirque c’est pas mal aussi pour les enfants, la bonne nourriture de l’un empoisonne l’autre.
discours versus perception !
@ Jérémie
« Quand on préfère manger du poulet à la viande, à quoi bon écouter Rubinstein… »
J’allais le dire…
C’était ma réponse à Pablo, pas à Jérémie au style rare, inimitable, irremplaçable !
@ Blandine
Après Aimi, Jérémie… Si j’avais besoin d »une attachée de presse, je vous prendrais, vous… 😉
Blandine,
vous avez mille fois raison d’aimer Aimi comme vous le faites ! Je suis un pianiste amateur, de très bas niveau certes, mais j’ai peut-être fini par comprendre quelques petites choses….et il me paraît évident qu’on ne peut jouer comme Aimi le fait par « dressage » ! Elle vit sa musique avec une telle intensité, toutes ses phrases sont si expressives qu’on ne peut imaginer qu’elle ait appris tout ça par coeur, comme une automate. Je me demande combien, parmi ceux qui voient les choes comme ça, ont seulement touché un piano avant d’en parler.
Il est vrai qu’on a certainement « cassé » de très nombreux enfants en voulant en faire à tout prix des prodiges. Mais pour Aimi, c’est différent. Je suis sûr qu’elle a montré elle-même une vraie passion pour la musique. Quel immense gâchis si un tel talent n’avait pas pu s’exprimer !
Finissons-en une bonne fois pour toutes avec les classements, et les pronostics. Même si Aimi devait arrêter demain (ce que je n’imagine pas !) elle aurait déjà laissé derrière elle des vidéos bouleversantes que, pour ma part, je pourrais regarder des centaines de fois sans m’en lasser. Certains prétendent que c’est de la musique « morte » parce qu’elle a été jouée trop souvent…il n’empêche que les vrais chefs d’oeuvre peuvent être joués pendant des siècles. S’ils en ont assez, ils peuvent toujours écouter autre chose !
oui, Antonello, c’est étrange de constater à quel point il peut y avoir parfois étanchéïté complète entre les sons et l’esprit, à quel point les clichés peuvent être plus puissants , empêchant l’esprit d’entendre ce que les sons disent de façon si évidente, et les yeux de voir ce qui émane d’un être habité par la musique . Vous parlez de l’expressivité de chaque phrase chez Aimi et c’est vrai, son jeu articule quelque chose de ressenti et pensé intimement . Dans cette sonate n°9 de Beethoven, par exemple, dont les trois mouvements viennent d’être postés ensemble :
http://www.youtube.com/watch?v=AkJ4wG5aVsw
Je suis restée sur ma faim après le « match », j’aurais voulu savoir ce qu’entendaient ceux qui parlaient de dressage et de cirque , comprendre comment il se faisait que ces phrases limpides pour moi étaient opaques pour eux, mais mes questions insistantes n’ont pas eu de réponse !
Je crois que nous avons beaucoup de chance de pouvoir entendre ce qu’Aimi a à nous dire !
@ Blandine Keller,
Bonjour,
Lente heure deux: l’âme
mante-rat à muse en soie d’échine
Plénitude Mystère à surgir Tristesse
Division de l’Etre, an dix visions première, unis thés mystiques,
Triangulation, ail heure en soie, sens dû alité, joie hait paix
Iles nous vêlent, an que rage des bords amours frontières
Des cous verts te magnétisent, an ici bas que terre n’est point
Tu es, Mystère rayonnant soudain, définissant l’étrange,
Sensation nouvelle, sensualité de joie frissonnante en abstraction
Cénesthésique sens poussé en végétale orgasme d’Etre, infiniment petit
Chaos de joie, mais comment se peut-il que tristesse…m’ai mené là?
J’entends sourdre, infime, apaisements des émois, le chant du monde
An tué toujours Amour toujours tuer, multiplication des voiles, symbole du rythme,
Silence…enfin Beauté se forme fige matérialisée, joie suspendue or être n’est pas tes nues
Toupie identifiante signifiée, matrice dilatoire en affect dément ciel, désunis tes opérations
An cours, le dix que tu croix de fer est en ail heure, mantre-rat de soie d’échine…
Belle journée et merci à vous!
Léonard Cohen ( Bird on a wire ) -Bunuel.
http://www.youtube.com/watch?v=Yp18sKXaFlE&feature=youtube_gdata_player
Pour mettre tout le monde d’accord: Richter jouant Scriabin (en direct à Varsovie en 1972)
L’étude opus 8 nº 11
http://www.youtube.com/watch?v=XeEVFkEHqGc
L’étude opus 42 nº 5
http://www.youtube.com/watch?v=POU-h9A-2Oo
merci Pablo un grand merci pour ces deux études que vous me faites découvrir, si différentes et si poignantes toutes les deux, l’une avec sa fièvre triste et bourgeonnante qui ne veut jamais s’apaiser, l’autre d’une mélancolie sans remède non plus… peut-être davantage acceptée …
Richter raconte dans le magnifique film de Montsaingeon que je découvrais aussi hier,
qu’il avait eu à 15 ans un public de huit voisines , huit sœurs excentriques devant qui il joua le concerto de Schuman, avec succès….ce qui le décida à devenir pianiste…heureusement qu’elles se sont intéressées à ce « gamin » !
Merci à vous quand même pour avoir employé ce mot provocateur qui m’a fait monter sur mes grands chevaux , occasion d’un beau match suscité par notre hôte !
Je reste un peu sur ma faim ne sachant pas finalement ce qui vous retient et vous fait doûter devant la toute jeune Aimi si à l’aise et décidée dans Clémenti.
Mais il y a tant de conflictualité partout, ce serait dommage que la musique entretienne de la discorde au lieu de garder sa vocation première qui est comme chacun sait d’adoucir les mœurs ….. Vous préférez célébrer des valeurs consacrées, moi j’ai un faible pour un jeune talent en plein épanouissement…comme disait Octobre hier, Aimi et Richter tous les deux nous appellent à la vie !
http://www.youtube.com/watch?v=ugLOPcvmduU
@ Blandine
« Vous préférez célébrer des valeurs consacrées, moi j’ai un faible pour un jeune talent en plein épanouissement ».
Non, vous vous trompez: je suis un « absolutiste » ou un fanatique de LA BEAUTÉ de la musique (et uniquement d’elle). C’est elle qui m’intéresse, pas l’interprète, sa technique, son âge ou sa culture musicale (je n’aime pas Brendel par ex., qui a écrit des choses très intéressantes sur la musique).
Et après 30 ans d’écoute (plusieurs heures par jour) et de fréquentation de concerts, je suis obligé de constater qu’il y a très peu d’interprètes qui savent « extraire » TOUTE la beauté d’une partition. Et je constate souvent que ce sont toujours les mêmes qui savent le faire, une petite poignée, et que quelqu’un comme Richter est très souvent « le meilleur ». Mais pas toujours: en Bach, par exemple, je lui préfère, et de très loin, Rosalyn Tureck, bien supérieure a Gould, d’ailleurs, pour moi – elle était le seul pianiste que Gould admirait en Bach, et pour cause, la Tureck c’est du Gould avec l’émotion en plus. Regardez ça (en direct, donc, chose que Gould ne faisait pas):
http://www.youtube.com/watch?v=4PSUL_aRGZU
Ou comparez la sublime sarabande de la Partita nº 4 par elle:
http://www.youtube.com/watch?v=IgsC3egOxPY&feature=related
et par Gould: http://www.youtube.com/watch?v=buq-p8vSCLQ
Mais pour revenir a Richter, je connais une trentaine de versions de la sonate nº 29 de Beethoven. Et pour moi personne a compris toute la beauté qu’il y avait dans son Adagio mieux que S.Richter:
http://www.youtube.com/watch?v=KGMVIsceCpg
(et encore il y a une version encore plus belle, d’un concert à Londres dans les années 70).
Autre cas: la sublime sonate nº 30 du même Beethoven, massacrée ici par Gould:
http://www.youtube.com/watch?v=dQRMADrVVKQ&feature=related
Et jouée ici de façon inégalée par Yves Nat (surtout son 3e mouvement, l’une des plus belles choses que je connaisse pour le piano):
I- Vivace-Adagio
http://www.youtube.com/watch?v=U18MbZ_LV8Q
II – Prestissimo
http://www.youtube.com/watch?v=cZHu_5zOQBc&feature=related
III-Tema con variazioni
http://www.youtube.com/watch?v=pHgc9rNo710&feature=related
Si vous connaissez des interprétations plus belles de ces oeuvres, je suis prenant…