RECIPROCITE OU RAPPORT DE FORCES ? – REPONSE A PAUL JORION, par Dominique Temple

Billet invité. Originellement publié ici, le 14 février 2011.

Dans les années 90, nous avons lu un article de Paul Jorion sur la relation des courtiers et pêcheurs de l’île de Houat (Bretagne) [1]. La loi de l’offre et de la demande ne fonctionnait pas comme prévu car des ententes cordiales entre les uns et les autres modifiaient le principe ou lui substituaient des relations de réciprocité : les prix étaient alors déterminés selon certaines conventions non écrites dans lesquelles la solidarité, l’amitié, la confiance jouaient un rôle important. Il nous semblait que deux dynamismes différents de marché, l’un de libre-échange et l’autre de réciprocité, étaient superposés.

À la même époque, nous faisions des observations qui paraissaient de même type, à la différence qu’à Palavas-les-flots (Hérault), la relation était le plus souvent directe entre les pêcheurs et les consommateurs. Il n’existait de relation médiatisée par des courtiers que pour quelques pêcheurs, et seulement lorsque la pêche excédait les possibilités de consommation locale. Pour les autres, lors d’un “gros coup”, on portait ses prises à la criée de Sète. À la criée, la loi de l’offre et de la demande s’imposait. Mais entre les pêcheurs et les consommateurs directs, les relations étaient du même type que celles observées entre les pêcheurs et leurs mareyeurs à l’île de Houat. Cependant, de ces observations nous n’avons pas tiré les mêmes conclusions.

Jorion pense que c’est en fonction d’un certain quotient d’amitié ou de toute autre valeur de nature éthique “constituée” en statut que le marché de libre-échange est modifié. Nous soutiendrons, au contraire, que c’est la pratique de la réciprocité qui génère les liens d’amitié en question.

Dans l’article publié par le M.A.U.S.S. en 1994 [2], Jorion revient sur ses observations et se propose d’en donner une interprétation sans équivoque. Il résume :

« J’avais pu constater, au cours d’une expérience de terrain couvrant la plus grande partie du littoral de l’Afrique occidentale ainsi qu’une petite partie de l’Europe côtière, que la formation du prix du poisson dans les transactions entre producteurs et revendeurs n’est pas fonction de la rencontre de pures quantités de marchandises offertes et demandées, mais d’un rapport de forces entre acheteurs et vendeurs en présence et où la qualité de chacun de ceux-ci semble jouer un rôle crucial dans la fixation du prix. J’ajoutais que la notion de philia, introduite par Aristote pour rendre compte du sacrifice occasionnel de l’intérêt personnel au bénéfice de la survie du marché lui-même, rendait compte de comportements effectivement observés » [3].

Dès cette introduction, on comprend que s’il y a bien deux sphères interactives, l’une quantitative, l’autre qualitative, les deux sphères sont ramenées à un rapport de forces

Polanyi, Sahlins, etc., estiment que les rapports quantitatifs sont ennoyés et modifiés par des considérations qualitatives qui leur paraissent non économiques mais éthiques, au moins dans les sociétés traditionnelles où n’existe pas de libre-échange. Cependant, ils ne précisent pas d’où viennent ces sentiments éthiques.

Bourdieu soutient, lui, que les références qualitatives des personnes qui nouent entre elles des relations de réciprocité obéissent en fait à des statuts, et que leurs transactions expriment également des rapports de forces, mais il imagine une stratégie consciente des acteurs économiques comme échangistes qui utilisent ces rapports de forces politiques à la façon dont procèderaient des joueurs d’échec avec la claire intention de se placer dans une position favorable pour réussir des échanges très fructueux.

Jorion avance l’hypothèse que les rapports qualitatifs entre les protagonistes se ramènent à des rapports de forces qui modifient les rapports d’échange.

« La particularité de ces marchés que j’avais eu l’occasion d’étudier, où le vendeur et l’acheteur s’affrontent en “face à face” dans des transactions dites de gré à gré, a pu faire penser que je faisais du rapport immédiat entre vendeur et acheteur un élément déterminant du mécanisme mis en évidence. Telle n’était pas mon intention : si je me suis penché plus spécialement sur le processus de marchandage d’une part, et d’autre part sur celui des ententes collectives entre pêcheurs et conserveurs qui caractérisèrent la pêche à la sardine dans la Bretagne entre 1910 et 1960 (…), c’est que tous deux présentent l’avantage analytique de faire affleurer en surface la vérité de la formation des prix, à savoir que le prix est un effet de frontière reflétant le rapport de forces instantané entre vendeur et acheteur. » (souligné par l’auteur) [4].

L’hypothèse d’une relation de réciprocité matrice d’un sentiment commun n’est en tout cas pas envisagée.

Or, les rapports entre pêcheurs, consommateurs et courtiers nous sont apparus effectivement comme des rapports de forces lorsqu’ils dépendent d’un marché qui se joue sur une autre scène : la criée et la vente à l’échelon national. Il existe néanmoins des relations de gré à gré qui les modifient. Mais ces relations sont-elles des rapports de forces entre rangs et statuts établis ?

Si on s’inquiétait de la façon dont s’acquiert le rang et se crée la valeur de la marque ou de la renommée qui se traduit par le rang social, on s’apercevrait aussitôt que dès le début du cycle économique, le rang est proportionnel à la générosité, que le don vaut du nom ou de la renommée au donateur en proportion de sa donation…

Jorion, quant à lui, illustre son idée de rapports de forces entre statuts par l’exemple d’une vente aux enchères des biens d’une princesse qui tiraient leur prix non de leur valeur d’échange escomptée en fonction de leur utilité sur le marché, mais de la marque qui leur était assignée et qui se rapportait au rang de cette princesse. L’interaction qualitative est ainsi ramenée au statut officiel des protagonistes [5]. Pour appuyer l’idée que ces interactions qualitatives sont bien des rapports de forces, il précise :

« (…) le rapport de forces entre acheteur et vendeur étant représenté sur l’objet par une marque symbolique rappelant l’identité de la famille qui fut à l’origine de sa création » [6].

À notre avis, il réduit ici les interactions qualitatives aux relations interactives qui interviennent dans un cycle de prestations qui concerne la valeur fétichisée dans la marque, ce qu’il précise lui-même :

« Lu dans une logique maussienne, le phénomène s’apparente ici à celui du transfert d’un bien inaliénable, la marque étant non seulement indélébile, mais le fondement même de la valeur de l’objet » [7].

La fétichisme de la valeur de renommée autorise l’investissement des objets qui la représentent (les sacra) dans un deuxième cycle de réciprocité où ils jouent le rôle de monnaie de renommée. La représentation de la valeur éthique issue de la réciprocité positive pétrifie en effet cette valeur, la “réifie” en quelque sorte, et induit dès lors le désir de sa possession. Qu’une telle passion l’emporte sur le désir de la valeur elle-même qui confère l’autorité morale et la dignité du sujet humain social, la genèse de cette valeur est interrompue. L’inversion fétichiste conduit au primat de la possession en lieu et place de la genèse de la valeur.

La transmission de la valeur acquise peut devenir l’enjeu des relations sociales. La filiation qui requérait l’élection (surnaturelle, divine) est remplacée par le référent de celle-ci : la succession généalogique matri, patri ou bilinéaire, mais biologique. La filiation génétique scelle la possession du titre qui n’est plus symbole d’autorité morale mais pouvoir politique ou religieux. Dans un tel système de réciprocité aliéné qui ignore le principe de réciprocité, les statuts deviennent des rapports de forces qui justifient les interprétations de Jorion, de Lévi-Strauss, de Polanyi ou de Sahlins, etc., car ils apparaissent comme l’armature du pouvoir de domination. Mais peut-on pour autant grever toutes les relations de réciprocité, et notamment celles des pêcheurs de l’île de Houat, d’être aliénées ? Avant que de pouvoir être aliénées, les valeurs éthiques ne doivent-elles pas être engendrées ?

Dans le chapitre “Le don du nom” de notre essai (cf. La réciprocité et la naissance des valeurs humaines), nous rappelons que l’on ne peut confondre la genèse de la valeur dans le cycle de réciprocité (la genèse de la valeur dite sacrée des objets symboliques) avec la représentation de cette valeur lorsqu’elle est investie dans un deuxième cycle de réciprocité. Et encore moins avec son investissement dans un cycle d’échange lucratif. Si la “princesse” a vendu ses biens de famille (signés d’armoiries) sur le marché de l’échange, il s’agit d’un transfert d’un système à l’autre, d’un système où la valeur du nom est inaliénable à un système où la valeur est aliénable ; mais parle-t-on dès lors de la même valeur ? L’une est valeur de renommée et l’autre valeur d’échange.

Jorion le confirme lui-même :

« En d’autres circonstances et en l’absence de numéraire susceptible d’être soumise aux opérations classiques de l’arithmétique, le qualitatif est condamné à demeurer du qualitatif et, comme l’avait déjà observé Baric à l’île Rossel : les biens échangés (au cours d’un processus différé où l’échange a lieu sous la forme de dettes imbriquées) occupent un rang qui reflète exactement le rang des partenaires de l’échange (…) » [8].

Les théories fonctionnalistes considèrent comme établi ce qu’il faudrait commencer par établir : le rang, le statut, la valeur. La genèse de la valeur de renommée est escamotée au bénéfice de l’exploitation d’une valeur constituée et représentée par le statut ou les sacra, investis ensuite dans le marché de l’échange. Mais comment s’est constituée la valeur des sacra ?

Jorion soutient que : « Dans cette perspective encore, l’économique s’efface devant le sociologique dans la mesure où le prix représente une proportion entre conditions, c’est-à-dire entre classes sociales, celles-ci n’étant à leur tour que l’expression d’un système politique. » ; thèse lévi-strausienne qui fait de la paix le prix de la réciprocité. Non seulement Lévi-Strauss estime que l’échange réciproque des femmes assure la paix où menacerait la guerre si les échanges étaient jugés inégaux, mais encore il explique la polygamie comme un échange de femmes contre la paix assurée par celui auxquelles elles sont cédées. La paix est ici non pas une valeur éthique mais un équilibre de forces.

Si l’on évince de l’analyse économique tout autre principe que celui de l’intérêt, il faut trouver une justification aux transactions qui dérogent à ce principe. Celles-ci sont aussitôt renvoyées au politique par le biais de classes sociales dûment constituées. La démarche de Jorion est parallèle à celle de Polanyi, parallèle à celle de Bourdieu, parallèle à celle de Lévi-Strauss : au commencement règne la force, l’échange la relativise, et la réciprocité l’équilibre.

Mais peut-on séparer l’économique du politique pour les besoins de la cause ? L’homme n’est pas un animal d’une part, un politique d’autre part. C’est immédiatement qu’il prend en considération l’Autre comme autre, l’Autre comme humain dans ses conditions d’existence : il ne lui est pas possible, en effet, d’établir une interaction humaine avec autrui (une relation de réciprocité anthropologique) sans lui offrir à boire s’il a soif, sans lui offrir du pain s’il a faim, la protection s’il est en danger ; ce pourquoi, dans bien des langues, le mot hospitalité est le même que le mot réciprocité.

Selon nous, la réciprocité subordonne les rapports de forces à une référence commune de nature éthique dont elle est la matrice : amitié lorsqu’elle est restreinte au face à face singulier, responsabilité lorsque la réciprocité est ternaire, justice lorsque celle-ci est généralisée. Cette conscience éthique devient la Loi (nomos) et définit entre les choses le prix juste (l’équivalent de réciprocité), elle donne son nom à la monnaie de réciprocité (numisma). La réciprocité généralisée conduit à un marché de réciprocité qui défie les rapports de forces entre intérêts privés, fussent-ils généralisés et relativisés moyennant une réciprocité minimum (l’échange réciproque lévi-straussien).

L’économie politique est donc confrontée à la contradiction d’un système fondé par la force, qui évacue sur le “politique” des rapports entre statuts eux-mêmes interprétés comme rapports de forces, et un système où la réciprocité ne cesse d’être la matrice des valeurs humaines

Jorion n’évite pas la difficulté :

« (…) dans une société moderne de type démocratique (par opposition à une société du don ou à un système de castes), ce qui détermine le statut réciproque des catégories sociales entre elles, c’est la rareté relative de leurs représentants au sein de l’édifice social » [9].

La rareté vient expliquer non plus le prix des choses, mais le prix des intervenants sur le marché : « ce qui fait le prix élevé d’un roi (…), c’est qu’il n’y en a qu’un ». Il met de côté les sociétés qu’il nomme du don, les sociétés de réciprocité positive, de sorte que le raisonnement risque de pécher par tautologie. C’est néanmoins une sage précaution car, dans la société de réciprocité, tout le monde est roi, sauf celui qui ne participe pas de la réciprocité qui est esclave, et le problème de la rareté du roi est éliminé. Certes, dans les systèmes de réciprocité centralisée, un seul est roi pour tous, mais nous n’entrerons pas ici dans la discussion des mérites respectifs des différents systèmes de réciprocité (réciprocité de marché ou redistribution).

Pour soutenir sa thèse, Jorion interprète la théorie d’Aristote comme une analyse de l’échange rapportée à des conditions statutaires données par l’institution politique, et la philia comme un correctif pour protéger le marché…

« Ainsi, le lien était évident entre le modèle que je présentais et celui qu’avait proposé autrefois Aristote : le prix exprime sous forme quantitative le rapport qualitatif entre le statut du vendeur et celui de l’acheteur (étant entendu dans mon interprétation qu’un rapport de statuts n’est rien d’autre qu’un rapport de forces au sein d’un système social) » [10].

Il nous semble, au contraire, que Aristote interprète l’économie d’échange à partir de l’économie politique de la réciprocité, et que pour lui, c’est la réciprocité des dons qui institue le rang de chacun. Ainsi, dans l’Éthique à Nicomaque, Aristote écarte d’emblée l’idée de présenter un catalogue des vertus morales auxquelles les hommes seraient censés faire appel. Il précise que son objectif est de reconnaître quelles sont les actions qui permettent aux hommes d’acquérir les valeurs qui les définissent comme humains. Et la réciprocité est proposée comme la matrice de ces valeurs. Nous laisserons cependant cette discussion de côté [11].

Aristote traite de l’échange mais il rapporte la détermination des prix des choses échangées non pas à une théorie de la valeur d’échange mais à une théorie de la valeur de réciprocité incarnée dans le statut ou le rang social. Schumpeter a sans doute raison de dire qu’il n’y a pas de théorie de la valeur (d’échange) dans l’Éthique à Nicomaque. En réalité, Schumpeter réduit la notion de valeur à celle de valeur d’échange et ignore délibérément la théorie de la valeur de Aristote. On ne comprendra la détermination du prix des choses dans l’économie politique de Aristote que si l’on établit au préalable la proportionnalité entre les choses échangées et les rangs ou statuts sociaux des intéressés. Or, ceux-ci se définissent à partir de la genèse de la valeur de réciprocité. La mesure de la valeur d’échange paraît dès lors impossible. Néanmoins, Aristote ramène toutes les valeurs éthiques à la justice qui, elle, peut (et elle seule) se traduire de façon matérielle et par conséquent donner prise à la mesure : la justice, en effet, est fondée par l’égalité qui permet de définir le prix juste. La quantité de travail socialement reconnue dans la réciprocité généralisée institue le principe de la valeur. Celle-ci s’ajuste alors aux services rendus à la communauté (au Bien commun).

Revenant à sa théorie générale, Jorion conclut :

« La généralisation du concept de statut réciproque passe par le concept de rapport de forces qui le sous-tend. La “théorie restreinte” du prix est fondée sur le concept de statut réciproque (stable), la “théorie généralisée” sur celui du rapport de forces (mouvant) en tant que vérité du rapport qui règle le commerce des catégories sociales entre elles. Mais au sein d’un système social où les classes sont dans un état de mouvance permanente les unes par rapport aux autres, le statut réciproque se détermine par une évaluation du rapport de forces instantané qui passe par la représentation que s’en font vendeur et acheteur.

C’est le rôle pivot que joue dans l’établissement du rapport de forces sa représentation qui permet aux agents économiques de le définir désormais sur la base subjective de la croyance plutôt que sur des bases plus objectives (…), et autorise des effets rhétoriques portant sur la conviction et visant à suggérer une modification du rapport de forces » [12].

Si l’on part du primat du rapport de forces entre intérêts rivaux, la solution la moins coûteuse est d’instituer une règle d’échange, mais s’il est possible de modifier la règle à son bénéfice en fonction d’un statut préétabli, qui s’en priverait ? Il est alors certain que la représentation peut jouer un rôle important, le calcul de son intérêt est, comme le dit Jorion, subjectif, (« non pas au sens d’“arbitraire” mais au sens propre d’être fondé dans la représentation d’un sujet »). Et l’on pourrait même préciser, d’un sujet privé.

On peut rapporter cette argumentation à celle de Lévi-Strauss qui interprète les relations de réciprocité entre Nambikwara comme des échanges. Lévi-Strauss relate la rencontre de deux groupes de Nambikwara comme un processus ininterrompu d’offrandes faites dans un climat à la fois de bienveillance et de défi qui relève de la pure réciprocité. Mais il estime que, revenus chez eux, les Nambikwara s’inquiéteraient de ce qu’ils auraient offert et de ce qu’ils auraient reçu, compareraient gains et pertes et, dans la mesure où il y aurait bénéfice, engageraient de nouvelles rencontres qui finiraient par établir des relations d’échange. Le problème est que la première partie de l’exposé de Lévi-Strauss relate une observation ethnographique, la seconde une spéculation ethnologique à partir de catégories économiques préétablies (dans un autre contexte). Cette spéculation efface le rôle majeur de la réciprocité des offrandes en fonction du besoin ou du désir d’autrui (ce désir fût-il présumé), et que ce souci de l’autre est la condition sine qua non de la relation de réciprocité pour autant que celle-ci instaure entre les hommes une valeur humaine (ici, la philia, mais qui dans d’autres structures de réciprocité sera ou la justice ou la responsabilité…).

D’un côté, Lévi-Strauss a démontré le primat de l’altérité sur l’identité pour fonder une structure sociale de réciprocité (l’Alliance), mais d’un autre côté, il a soumis la réciprocité, qui est la raison du primat de l’altérité sur l’identité, à l’échange, de sorte que l’on en revient par le biais de l’intérêt, à l’identité. Dès lors, la seule justification possible de la réciprocité dans les échanges, pour Lévi-Strauss comme pour Jorion, est qu’elle assure la paix entre ces identités rivales en instituant un rapport de force équilibré.

Or, lorsque le calcul (la manipulation) joue sur la rareté des services que l’on peut rendre à autrui pour valoriser sa propre prestation et en augmenter le prix, il ne soumet pas seulement la réciprocité à l’échange, il la dénature, car la représentation d’un sujet individuel modifie les sentiments éthiques partagés.

« La manipulation peut être délibérée dans le bluff, elle peut être involontaire lorsque les apparences jouent en faveur de l’une des parties au détriment de l’autre » [13].

Il suffit de se représenter les relations de réciprocité comme des relations de forces en fonction de son intérêt pour pouvoir ramener la qualité à la quantité. Et, dès lors, la rareté est le ressort de l’envie (c’est toujours la thèse de Lévi-Strauss).

« De là un principe de la “théorie généralisée” de l’économique : le statut réciproque des catégories sociales, qui définit leur rapport de forces, est déterminé par une représentation de la rareté relative de leurs représentants. Beaucoup de médecins, et le prix de la consultation baisse, et comme le prix de la consultation diminue, le statut relatif des médecins par rapport aux autres catégories sociales se détériore, la causalité s’exerçant dans ce sens-là et non pas dans le sens inverse. » [14]

commente Jorion… du point de vue d’une interprétation libérale sans doute… puisque le statut du médecin peut être réifié en marchandise tout comme le travail de l’ouvrier….

Dans notre théorie qui remet en cause le primat du rapport de forcesle statut du médecin n’est pas soumis à la loi de l’offre et de la demande justement parce que c’est un statut. En tant que statut, il est déterminé par des relations de réciprocité et défini comme l’incarnation d’une éthique née d’une pratique qui satisfait la “chreia” (besoin) d’autrui.

Les échanges entre statuts de niveaux différents, quand échange il y a, sont alors proportionnels aux rapports des statuts entre eux, mais ces statuts sont déterminés par les relations de réciprocité. Si un statut doit être valorisé ou infériorisé par rapport à un autre, le prix de ses prestations se modifie sans doute, mais c’est le changement de statut qui détermine la modification du prix de la prestation, et non pas l’inverse (la réciprocité proportionnelle de Aristote).

La conclusion de Jorion est sans équivoque :

« Fondamental à l’économique est pour moi le fait que des choses matérielles ou immatérielles circulent par la voie de l’échange et que ces choses circulent dans une proportion particulière : tant de X contre tant de Y dans le troc, tant de biens Z contre tant de monnaie dans le système marchand. Cette proportion, c’est le prix : le prix de X par rapport à Y dans le troc, et le prix ramené à l’étalon-or ou évalué en une monnaie fiduciaire dans le système marchand. (…) Lorsque Chris Gregory synthétise d’un coup Marx et Lévi-Strauss en affirmant qu’en Nouvelle-Guinée, un terme de parenté est un prix, il pose le premier pas révolutionnaire d’une physique de l’interaction humaine, au-delà de Marcel Mauss (Gregory, 1982, p. 67) » [15]

Ici, les sociétés mélanésiennes sont incluses dans le champ d’une analyse où la réciprocité est subordonnée au troc. Et l’on peut se demander si Jorion ne fait pas la même extrapolation que Gregory qui consiste à appeler échange ce qui est réciprocité ?

D’après nous, au contraire, il existe deux systèmes : un système d’échange et un système de réciprocité, orientés en sens inverse l’un de l’autre ; l’un par l’intérêt privé, l’autre par le bien commun ; le premier définissant les rapports humains comme rapports de forces, le second comme des rapports relativisant la force ; l’un engendrant la valeur d’échange dont l’accumulation conduit au pouvoir de domination des uns sur les autres, le pouvoir d’asservir, l’autre engendrant les différentes valeurs de justice, de confiance, de responsabilité et d’amitié, selon la structure de base actualisée, et conduisant au pouvoir de servir ou de se rendre utile les uns aux autres. Nous avancerons également que, dans la réciprocité, la valeur symbolique fait sens simultanément pour toutes les parties en jeu et s’impose comme référence qualitative à tous les partenaires.

L’analyse de Paul Jorion ne sort pas du cadre de l’échange où tout est réifié, jusqu’au sentiment lui-même, et échangé grâce à une logique de la représentation.

Or, aujourd’hui, l’agonie du système capitaliste impose de changer de système, de changer la machine, de modifier le cadre. Et l’on n’y parviendra pas si l’on ne reconnaît pas d’autres définitions, d’autres formes ou d’autres dimensions de la valeur que la valeur d’échange, si l’on ne reconnaît pas les structures de production de la valeur de réciprocité et les conditions de sa genèse.

D’une manière plus générale, l’idée de ramener les interactions humaines à des interactions physiques (des “rapports de forces”) est liée non pas à la Raison, comme le suggèrent de nombreux auteurs, mais au fait que la Raison fasse appel à l’organon de la logique d’identité, logique apte à rendre compte de toute représentation et de surcroît d’une partie de la Physique, la Physique classique…, mais dont le champ d’action est limité. La logique d’identité est certes la logique de la connaissance qui étaye la science. Mais cette logique n’est pas celle du réel, et en particulier, elle n’est pas celle de l’énergie psychique, de la conscience ou de la pensée.

Les “interactions humaines” dites de réciprocité ne sont pas des interactions physiques ! Elles font intervenir des partenaires qui sont en eux-mêmes à la fois donateur et donataire, si on prend l’exemple du don (et dans l’exemple du marché, si l’on est à la fois vendeur et acheteur). Leurs consciences relatives l’une à l’autre ont pour “médiété” un sentiment sur-naturel (si l’on réserve le mot de naturel à la physique) qui se révèle de lui-même comme conscience éthique : la responsabilité, la justice, l’amitié, la confiance, selon la structure de réciprocité mise en jeu, qui sont autant de défis à la force.

Dans une intervention récente sur son blog, Paul Jorion faisait un raccourci saisissant entre la banque Goldman Sachs (la pointe de l’iceberg capitaliste de la production industrielle moderne, disait-il) accusée devant le Sénat américain d’immoralité, et les pêcheurs de l’île de Houat qui dans leurs transactions économiques engagent leur prestige ou leur honneur. Que les prestations des pêcheurs de l’île de Houat soient déterminées par des rapports de forces signifierait que leurs qualités humaines expriment aussi des rapports de forces : il reviendrait à chacun d’être à la hauteur de son statut politique. Comment se fait-il que les pêcheurs de l’île de Houat disposent d’une puissance éthique (“l’intégrité, la moralité, l’honnêteté”…) caractéristique de leurs prestations, et que les dirigeants de la Goldman Sachs en soient dépourvus ? Pourquoi les valeurs éthiques en question ne caractériseraient-elles pas les rapports de forces entre la Goldman Sachs et ses clients ou l’État américain selon le rang social de chacun dans le système capitaliste ? Jorion n’inverse-t-il pas l’ordre logique des faits lorsqu’il interprète la réputation, le prestige, l’honneur comme des caractères préalables aux relations de réciprocité des pêcheurs de l’île de Houat ou d’Afrique ?

Il ne s’agit pas ici de nier l’efficience des valeurs éthiques : l’amitié engage vis-à-vis d’autrui…, la responsabilité également, etc. Les obstacles qu’elles rencontrent conduisent la société à lui assurer des garanties (de la Loi ou de la Tradition).

Selon nous, la réciprocité est la matrice de ce que Jorion appelle “la considération, l’être social, les valeurs éthiques”… Et nous pensons que cette interprétation est conforme à la théorie aristotélicienne selon laquelle la qualité s’accroît à mesure que la réciprocité se déploie (engendrant successivement dans la réciprocité positive, la générosité, la magnificence, la magnanimité et la grâce).

Aristote disait lui-même qu’il existe plusieurs sortes d’amitié, et que si les membres d’une société de réciprocité n’ignorent pas que la réciprocité engendre le Bien commun, ils savent aussi combien elle est utile, de sorte que, disait-il, si certains pratiquent la réciprocité pour la valeur qu’elle produit, d’autres l’estiment davantage pour son utilité ! Mais, encore une fois, pour escompter l’utile de l’amitié, encore faut-il engendrer l’amitié.

Dès lors, on comprend que si la réciprocité est totalement subvertie par son contraire – l’échange entre intérêts privés – il soit logique que la valeur qu’elle produit disparaisse au profit de la valeur d’échange, et que les animateurs de la Goldman Sachs n’estiment n’avoir aucun compte à rendre au nom de l’éthique à leurs clients.

Par contre, selon notre analyse, il serait possible d’entrevoir une issue à la “crise” du capitalisme : en effet, la maîtrise rationnelle des structures fondamentales de la réciprocité comme matrices de la valeur, pourrait permettre de construire une économie plus humaine !

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Notes

[1] JORION, P. “Les déterminants sociaux des prix de marché”, La revue du M.A.U.S.S., n°9, Paris, éd. La découverte, 1990, pp. 71-105, et n°10 (suite), pp. 49-64 ; texte intégré dans JORION, P., Le prix, Broissieux : Le Croquant 2010.

[2] JORION, P. “L’économique comme science de l’interaction humaine vue sous l’angle du prix”, La revue du M.A.U.S.S. semestrielle, n°3 “Pour une autre économie”, Paris, La découverte, 1994, pp. 161-181 ; texte intégré dans JORION, P., Le prix.

[3] JORION, P. “L’économique comme science de l’interaction humaine vue sous l’angle du prix”, op. cit., pp. 161-162 ; Le prix , p. 301.

[4] Ibid., p. 162  ; Le prix, p. 301.

[5] La princesse n’hérite pas de l’autorité déposée dans les armoiries de sa famille en reproduisant la générosité qui a valu cette autorité à ses aïeux, elle hérite du signifiant biologique de la filiation, c’est-à-dire du référent du symbole et non de son signifié. Elle entre alors dans le système de l’échange où elle entend tirer parti de tout y compris du respect d’autrui pour la réputation de sa famille.

[6] Ibid.

[7] Ibid.

[8] Ibid., p. 163 ; Le prix, p. 302.

[9] Ibid., p. 164 ; Le prix, p. 304.

[10] Ibid., p. 163 ; Le prix, p. 302.

[11] cf. D. TEMPLE & M. CHABAL, “L’échange chez Aristote”, in La réciprocité et la naissance des valeurs humaines, Paris, L’Harmattan, 1995.

[12] JORION, P. “L’économique comme science de l’interaction humaine vue sous l’angle du prix”, op. cit., p. 171 ; Le prix, pp. 210-211.

[13] Ibid. ; Le prix, p. 211.

[14] Ibid., pp. 172-173 ; Le prix, p. 212.

[15] Ibid., p. 180 ; Le prix, p. 308.

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99 réponses à “RECIPROCITE OU RAPPORT DE FORCES ? – REPONSE A PAUL JORION, par Dominique Temple”

  1. Avatar de jean-luce morlie
    jean-luce morlie

    Vous proposez une typologie des formes de réciprocités, dont la réciprocité centralisée que vous définissez de la manière suivante :.

    « Lorsqu’un seul intermédiaire intervient entre tous les membres d’une société de réciprocité, il devient à la fois prêtre, juge et régisseur. Les valeurs des autres s’en trouvent modifiées : confiance vis-à-vis de l’intermédiaire commun et solidarité les uns vis-à-vis des autres. On peut appeler cette structure la redistribution . »

    Dans votre cadre théorique, voyez-vous un pouvoir explicatif au fait social suivant :

    Nous observons régulièrement l’installation de réseaux organisant l’abus de biens sociaux au sein de l’appareil politico-administratif des villes petites ou grandes, ou dans diverses organisations à orientation sociales, logement, politique des handicapés, etc …

    Pour avoir fréquenté longtemps ce type de milieu et rencontré de nombreux cas d’abus, je puis dire que ces personnes se savaient en dehors de la loi, mais n’avait pas de sentiment de culpabilité. C’est-à-dire que contrairement au délinquant qui se sait délinquant et qui sait que ses actes relèvent du mal, les acteurs de cette forme de redistribution interprètent leurs actes dans un autre cadre de référence que celui de la loi commune, lequel est justement une éthique de redistribution

    En Belgique, le Bougmestre de Charleroi ,Van Cauwenbergue, semblait avoir parfaitement introjecté les trois fonctions de « prêtre, juge et régisseur » Le vaste système de délinquance, révélé aujourd’hui par la justice, fut organisé pendant la durée du règne de celui qu’on appelait le Roi Van Cau – Lors des affaires, « Van Cau » s’est un moment trouvé débordé de toute part, au point de se lâcher devant un journaliste en se plaçant au dessus des lois, il déclara à un journaliste (en substance) « je suis élu par le peuple, les juges n’ont rien à me dire », il y avait là manifestement une sorte de « schizophrénie éthique » de la part d’un Bourgmestre, juriste de formation et « organisateur » d’un très gros bureau d’avocat parallèlement à sa fonction politique.

    Pensez-vous que votre typologie et vos concepts interprétatifs rendent compte de ce type de comportement (dans la catégorie des faits sociaux, à expliquer par d’autres faits sociaux), ou bien pensez-vous que je « surinterprète » ce qui ‘n’est au fond rien de plus qu’une tactique de défense de défense individuelle ?

    N. B. Pour l’analyse dans les termes de votre modèle, je remplace « un seul acteur » par « un seul acteur collectif organisé en un seul réseau » monopolisant l’essentiel des filières de redistribution. Par ailleurs, je prends en considération une chaîne de redistribution élargie et ouverte, la redistribution est indirecte, une part des impôts locaux et une part provenant de « l’extérieur » du système, mais naturellement faisant toujours partie « du circuit de l’argent des citoyens faisant retour aux citoyens ». De plus, je fais également l’hypothèse que l’usage d’un modèle affiné ne contredirait pas l’analyse globale effectuée sur des données simplifiées.

    Mediapart, relevait récemment l’usage du terme « redistribution » dans l’autojustification des protagonistes du système Guérini à Marseille.

    1. Avatar de Temple

      À partir du principe de réciprocité dont la structure la plus connue est le face à face et dont la formule de référence est l’Alliance pour la réciprocité positive et symétrique (et pour la négative, le duel ou le talion), il existe un autre type de structure (ternaire cette fois) qui joue le même rôle et dont le nom de référence est la Filiation.
      Mais il existe aussi dans ces deux classes plusieurs structures de base….

      Parmi les structures ternaires deux apparaissent comme des paradigmes: la structure ternaire généralisée qui organise le marché: elle engendre le sentiment de responsabilité et le sentiment de justice pour chacun de ses protagonistes. Autrement dit, pour être provocateur dans une économie de réciprocité, le prix juste n’a pas d’autre origine et sa détermination est infaillible.
      L’autre est la ternaire centralisée, la redistribution, qui développe deux caractères importants:
      1) Seul le centre peut se sentir investi de la Loi, car il est seul dans la situation que nous disons contradictoire parce que simultanée de recevoir et de donner, d’agir et de subir, etc… Il s’agit de la figure du Roi.
      2) Les autres donnent et reçoivent (mais pas en même temps), et ils ne sont pas en position d’équilibrer ce qu’ils donnent ou reçoivent ou de juger du prix juste, ni même d’être responsable d’autrui dont ils sont séparés par le Roi. Le prix est déterminé par le Roi, et il est infaillible !
      Entre le Roi et les sujets… il y a les préfets, etc. Tout cela conduit à la hiérarchie des pyramides, et bien sûr – en relation avec les autres structures de réciprocité – à des systèmes complexes.

      Pour en venir à votre question, vous situez le problème dans un système démocratique où la Loi organise entre elles des structures de partage (la sécurité sociale), de redistribution (les allocations familiales), de réciprocité ternaire unilatérale (l’enseignement), de réciprocité généralisée, de libre-échange, etc… mais aussi des structures semi-complexes plus ou moins bâtardes parce que l’on n’en maîtrise pas les caractères. Dans le cas que vous relatez: il semblerait qu’elle laisse s’instaurer des sous-systèmes de redistribution, et que les préposés à ces juridictions locales se prennent pour des Rois au-dessus des Lois. Vous avez sans doute raison de dire

      «… que ces personnes se savaient en dehors de la loi, mais n’avaient pas de sentiment de culpabilité»

      . Ces personnes sont non pas justifiées mais logiques avec elles-mêmes. Vous le dites quand vous reconnaissez que Le Roi Van Cau déclare: «je suis élu par le peuple, les juges n’ont rien à me dire». Vous-même décrivez qu’il se reconnaît comme Roi.
      Mais les choses se compliquent car le système de redistribution dans lequel les divers niveaux de responsabilité entrent en compétition est probablement tout entier subsumé par l’intérêt privé, de sorte que les potentats locaux ne détournent pas la redistribution nationale au bénéfice de redistributions locales comme c’est le cas dans les administrations africaines où chaque ministre détourne la redistribution de l’État au bénéfice de sa famille ou de son village. Ici, il est fort probable (et c’est tout le problème de l’économie mixte) que les despotes en question détournent la redistribution nationale dans leur compte privé (en Afrique aussi, cela arrive…!)

      J’hésitais à vous répondre car il est très difficile de prétendre traiter un problème particulier hors de son contexte: il faut tenir compte des formes de réciprocité en jeu, des structures de base en jeu et de leurs modalités et de leurs articulations entre elles et de leur niveau hiérarchique, enfin de la façon dont elles constituent, grâce aux interfaces et à leurs territorialités spécifiques, des systèmes. Il faut tenir compte aussi des niveaux où les valeurs produites se montrent à leur tour efficientes. Tout cela apparaît, certes, difficile, vu de Sirius. Par contre, lorsque l’on se donne la peine d’envisager la situation avec les catégories que nous essayons de définir et/ou préciser, beaucoup de problèmes actuellement insolubles (comme la corruption ou encore les guerres ethniques en Afrique) apparaissent plus simples comme si le complexe engendrait ce qui est simple alors que le simplisme, lui, engendre le compliqué. C’est pourquoi il me semble que l’on doit suggérer l’idée que les organisations qui sont manifestement gangrenées par des dysfonctionnements de plus en plus graves mériteraient d’être reconsidérées avec des paramètres qui tiennent compte de la réciprocité et pas seulement de l’intérêt privé.

      Pensez-vous que votre typologie et vos concepts interprétatifs rendent compte de ce type de comportement (dans la catégorie des faits sociaux, à expliquer par d’autres faits sociaux), ou bien pensez-vous que je «surinterprète» ce qui n’est au fond rien de plus qu’une tactique de défense de défense individuelle ?

      Je prends le risque d’une réponse sans ambiguïté: oui, cette typologie serait utile car on peut espérer que vos interlocuteurs sont encore simplement atteints de ce que vous appelez joliment une sorte de schizophrénie éthique caractéristique de l’emballement de l’imaginaire lorsque le symbolique défaille.

      Cependant, Amartya Sen estime que la logique de la réciprocité est l’atout des maffias lorsque le système capitaliste ne peut s’installer par la violence sous forme généralisée comme au Rwanda. Dans ce cas, il opère par subsomption de la réciprocité, comme en Russie. Et là ce serait plutôt la défense de l’intérêt privé qui l’emporterait, et donc le pervers sur l’imaginaire et non pas l’imaginaire sur le symbolique, ce que vous appelez la tactique de la défense individuelle.

      Mais nous ne savons pas encore résoudre les problèmes concrets à partir de nouveaux critères d’analyse car ceux-ci sont pratiquement laissés en déshérence par la philosophie politique, la sociologie et l’anthropologie; nous essayons seulement d’attirer l’attention sur la nécessité d’un changement d’attitude: au lieu de se contenter de concepts si importants soient-ils (Durkheim… Bourdieu) dans le cadre de la théorie de l’échange, il faudrait sans doute ouvrir un espace de réflexion sur d’autres concepts de base non moins importants puisqu’ils permettent de concevoir les rapports humains non comme des rapports entre valeurs constituées mais comme des rapports créateurs des valeurs de référence pour l’humanité.

    2. Avatar de Kercoz
      Kercoz

      @Temple
      J’ai parcouru votre site sur l’etude des structures . Il est des plus intéressant mais il me semble que vous n’envisagez pas la structure la plus courante des systèmes naturels . Je sais que je finis par lasser avec mes « systèmes » fractals ou parcellisés  » , mais leurs anteriorité est une garantie de fiabilité . Je vous conseille une approche des systèmes complexes ou de la tH; du Chaos , notament le texte de Gleick .
      L’argument principal que je développe pour defendre ces structures , outre leur grande stabilité , c’est que les caractères « négatifs » des individus: agressivité , avidité etc ….ne le sont que ds un modèle centralisé hypertrophié et qu’ils peuvent meme etre considérés comme vertueux ds un système de groupes restreints , car ils sont structurants (hierarchisation) et leur perversité est contrainte par la proximité ou l’affect.

      1. Avatar de jean-luce morlie
        jean-luce morlie

        @ « Kercoz »,

        Curieusement Alain Caillé caractérise l’entreprise totalitaire du capitalisme par l’établissement d’une idéologie et d’une organisation parcellitariste :

        C.F. Le parcellitarisme » peut-il servir d’anti-modèle pour un recentrement démocratique ?

        La « stabilité par la diversité » est une chose, et « diviser pour régner « en est une une autre, comment articuler ce paradoxe?

        D’un point de vue sociologique, ce retournement – au sens de Volkov – des modèles de société qui font tout le contraire de ce comment il se présentent me semble assez intéressant. Qu’entendez-vous exactement par  » … ils sont structurants( hierachisation) … » De plus, pour l’avenir immédiat, la conversion vers la diversité chatoyante des communautés décroissantistes offre-t-elle des garanties contre l’exploitation de beaucoup par quelques-uns?

      2. Avatar de Kercoz
        Kercoz

        @J.L.Morlie:
        ///Alain Caillé définit la forme d’organisation sociale dans laquelle nous sommes de plain-pied comme un parcellitarisme, ///
        Nous ne parlons pas de la meme chose .
        Mon parcellitarisme « a moi » est archaique et respecte l’unité de lieu . Ce que fait le capitalisme ou plutot le Liberalisme c’est d’aggréger les groupes anciens pour empecher l’affect de proximité , et revenir a l’individu « nu » qui en soi n’existe pas …On peut meme dire qu’il va plus loin : il  » divide » l’individu ! sacrilège . Ensuite il regroupe les morceaux par affinités en esperant des gains de productivité (aussi bien comme production que comme consommation) .

        ////Qu’entendez-vous exactement par » … ils sont structurants( hierachisation) ///
        J’entends par là que ds un groupe restreint ou chacun connait chacun (groupe qui s’est auto-structuré avec l’individu avant l’homminidé) , les caractères considérés comme « défauts » ou négatifs : l’avidité , l’agressivité , etc … sont structurants et par là vertueux , car ils structurent le groupe , par des rapports dominés/dominants hierarchisants et sans passer par la violence , mais par des rites qui se sont progressivement substitués a cette violence (jeux ,coutumes , règles ..)
        Ces défauts, par contre , deviennent pervers lors d’un changement structurel par augmentation du groupe en interdisant la « connaissance de chacun avec l’autre » .
        Pour faire court : vous pouvez etre exploité ou affamé par un fond de pension , mais ne serez pas trop exploité par votre voisin plus fort ou malin , parce qu’il vous connait , joue au boules avec vous et drague votre fille ….. DE polus son interet n’est pas l’accumulation mais la valorisation de sa « Face » et ses actes relationnels sont mis en spectacle (public) .
        Le modèle morcelé est le modèle naturel . L’agressivité intra-spécifique qui existait entre individu non socialisé réapparait au niveau d’une agressivité entre groupes …territoires , resources , relations . Un assemblage de groupes de groupes (villages , bourg , villes /voir F Braudel, ) peut a son tour se « socialiser » , de façon similaire sans etre identique , ce qui fait penser au Chaos et aux systèmes fractals.
        Le système est tres stable tant que la tentation de l’agglomération des groupes ne s’impose pas . Cette tentation semble évidente au calcul simpliste de « gain de productivité » .L’etre humain n’ y résiste pas par la seule raison , seule lacontrainte de la chereté de l’é&nergie peut l’ y contraindre.
        Si l’on ramène le « beaucoup » par qqs uns ds un groupe inf a 100 personnes ça ne fonctionne pas .
        D’un autre coté , il n’y a pas de mine de cuivre ds chaque village , et donc , un système parcellisé doit etre doublé d’un système linéaire plus ou moins centralisé pour conserver un minimum de modernité .

      3. Avatar de timiota
        timiota

        @Kercoz

        je suis confusément d’accord avec vous sur la nature parcellisée/fractale et son rôle de consolidation.
        Et pour ramener aussi mon éclaireur de ces dernières années, Bernard Stiegler, j’ai apprécié qu’il décrive certes les rétentions/protentions/sublimations, mais aussi de ci de là, il reprend des notions d’intermittence. Du grain à moudre ?

        « Vers un nouvel esprit du capitalisme. Technicité, hostilité contre la civilisation, et intermittence du passage à l’acte noétique. »

        glané là un peu par hasard

      4. Avatar de kercoz
        kercoz

        @Tmiota:
        //glané là un peu par hasard//
        Merci pour ce lien . D’accord avec Stiegler pour le détournement mais de façon moins psy . Le surmoi corespond a la notion de « FACE » de Goffman …que je préssent comme le dernier refuge de l’agressivité de l’animal domestiqué ou socialisé .
        La sortie du modèle de groupe traditionnel isole l’individu qui n’a plus de repères hierarchiques et va suivre des » leurres » pour tenter de se valoriser aux yeux d’inconnus ….. Cette ostentation (4×4 , cravate ..etc .. ) ne prouvant rien , il ressent l’echec sans le verbaliser et frustré il va chercher a mettre « en scène » une autre preuve de sa valeur …… Ce processus est consciemment ou inconsciemment « compris » par le marché qui va exploiter cette resource productive de travail et de consommation………
        ……Alors que ds le système archaique non dé-naturé , l’individu qui a valorisé sa position ou confirmé cette valorisation (quelle que soit son niveau hierarchique) , retourne a son hamac .

      5. Avatar de Temple

        @ kercoz,

        La sortie du modèle de groupe traditionnel isole l’individu qui n’a plus de repères hiérarchiques et va suivre des » leurres » pour tenter de se valoriser aux yeux d’inconnus ….. Cette ostentation (4×4 , cravate ..etc .. ) ne prouvant rien , il ressent l’échec sans le verbaliser et frustré il va chercher a mettre « en scène » une autre preuve de sa valeur …… Ce processus est consciemment ou inconsciemment « compris » par le marché qui va exploiter cette ressource productive de travail et de consommation………
        ……Alors que ds le système archaïque non dé-naturé , l’individu qui a valorisé sa position ou confirmé cette valorisation (quelle que soit son niveau hiérarchique) , retourne a son hamac .

        Votre thèse est claire, et vous aurez trouvé sur le site de la réciprocité puisque vous l’avez visité de longs plaidoyers en sa faveur: la problématique des peuples indiens d’Amérique est établie sur le principe que vous défendez. Toutes les communautés amérindiennes de la Patagonie à l’Alaska ont adopté la création des conseils et la fédération de ces conseils. Face à l’alternative socialiste qui proposait ou bien l’intégration au collectivisme sous forme de coopératives de production (la propriété collective) ou l’intégration à la lutte marxiste armée, les communautés ont répondu par la définition d’une interface de système, c’est-à-dire la revendication de “territoires”. L’intégration des communautés indiennes à la lutte armée a été refusée à Tripoli lorsque Kadhafi espérant prendre le relais des Soviétiques a voulu constituer un réseau de foyers révolutionnaires motivés par la lutte anti-yankee en y invitant les mouvements indiens d’Amérique. Quant à l’intégration de la communauté de base dans un système de type marxiste, j’essaie de la traiter dans le livre : Ideología marxista y teoría moderna de la reciprocidad , publié prématurément en ligne…
        Mais comment passe-t-on d’une communauté restreinte à une communauté nationale sans perdre la valeur produite dans la réciprocité locale, et qui transfigure le visage d’autrui, transfiguration qui témoigne qu’il a lui aussi franchi le seuil du rapport de forces pour entrer dans le champ de l’éthique ?

        1) Il n’y a pas que des relations de réciprocité binaires (face à face), il y a des relations de réciprocité ternaires, et la réciprocité ternaire généralisée (qui organise le marché) crée le sentiment de responsabilité (qui se caractérise justement par l’absence du visage d’autrui !), ce qui origine l’obligation de répondre de tout autre.
        Néanmoins, si le marché étend le groupe, il ne supprime pas l’aporie.
        2) On peut dire aussi que la réciprocité peut se reproduire au niveau symbolique. La communauté scientifique de ce point de vue est une première communauté de réciprocité généralisée. Les objets médiateurs du respect mutuel sont… les idées. La seconde communauté de ce genre est l’Internet (style Wikipedia, blog de Paul Jorion….). Le marché de réciprocité couvre alors la planète. Le sentiment créé ne sera peut-être pas le même sentiment que celui de l’amitié que l’on apprécie dans son village mais une forme de respect qui y ressemble beaucoup. Chaque structure de réciprocité (et partant chaque système de réciprocité) produit un sentiment éthique différent.

        Mais il n’empêche que lorsque le gouvernement français interdit l’entraide paysanne sous le prétexte qu’elle peut constituer du travail au noir qui soustrait des contributions sociales à la solidarité nationale, il détruit la matrice initiale du sentiment d’amitié… alors que si l’on comprend que le « face à face » génère la philia, il devient évident qu’il faut rétablir et protéger les structures de réciprocité locales. Dans le cas contraire en effet ou bien le manque nourrit le leurre de l’exploitation capitaliste comme vous le dites, ou bien l’intégrisme et le communautarisme de type Le Pen viennent s’imposer au nom de valeurs constituées.

        C’est donc la Constitution qui doit prévoir l’articulation des structures de réciprocité entre elles : une nouvelle constitution « économique » si l’on veut, mais si l’économie s’entend en intégrant les structures de réciprocité…

        @ kerkoz,

        L’argument principal que je développe pour défendre ces structures , outre leur grande stabilité , c’est que les caractères « négatifs » des individus: agressivité , avidité etc ….ne le sont que ds un modèle centralisé hypertrophié et qu’ils peuvent même être considérés comme vertueux ds un système de groupes restreints

        Les valeurs produites par la réciprocité négative (dont rend compte l’imaginaire de l’honneur) paraissent en effet toutes issues de structures locales (le duel). La vengeance (le talion) s’inscrit presque toujours dans une relation où l’autre est reconnu, même lorsque les entités en lutte sont des sociétés assez vastes comme dans les guerres de religion: le visage d’autrui est celui de son Dieu.

        Mais ici aussi on peut changer de niveau: le sport est la reproduction dans l’imaginaire de la guerre (de réciprocité), et l’on doit pouvoir créer des valeurs éthiques à partir de champs d’expérience élargis (les jeux olympiques).

      6. Avatar de kercoz
        kercoz

        @Temple:
        ////Mais comment passe-t-on d’une communauté restreinte à une communauté nationale sans perdre la valeur produite dans la réciprocité locale,///
        La vraie question serait « Pourquoi passer a une communauté nationale » puisqu’on va dé-naturer l’indvidu.
        Il faut bien comprendre que notre formatage comportemental est aussi rigide que l’aile du corbeau ou le sabot du cheval , et que modifier la structure adjointe , c’est faire de nous des « dodos » dont les ailes ne servent plus ……. Quid de notre capacité d’adaptation ? énorme plasticité puisqu’au goulag ou a dachau , on finit par aimer ses bourreaux .
        La communauté restreinte DOIT primer sur les autres .
        ///1) Il n’y a pas que des relations de réciprocité binaires (face à face), il y a des relations de réciprocité ternaires, et la réciprocité ternaire généralisée (qui organise le marché) crée le sentiment de responsabilité (qui se caractérise justement par l’absence du visage d’autrui !)///

        Selon mois les relation sont historiquement affectives , binaires ou tertiaires etc … sans perte de responsabilisation:
        ex: le « flic ds la tete » (ou le juge ) ne peut etre remplacé par un CRS en bas de l’immeuble .
        La responsabilisation de l’individu passe par là , sinon il reste un eternel ado .
        iln’y a guère , un ministre n’aurait pu avoir 2 freres en taule ! . Qd on fait une connerie , on implique , outre sa sois meme , mais sa famille , son quartier … et l’on est responsable des conneries faites par ses proches ….c’est ça le « flic ds la tete » , c’est une aliénation forte , mais peut etrepréférable au car de CRS ? et ça place l’individu sur une responsabilisation salutaire …et ça économise des fonctionnaires …
        RElire le « Cheval d’ orgueuil » , meme si c’est critiqué Bisounours , ça décrit bien les interactions de groupes contraints localement.

        ////On peut dire aussi que la réciprocité peut se reproduire au niveau symbolique. La communauté scientifique de ce point de vue est une première communauté de réciprocité généralisée. Les objets médiateurs du respect mutuel sont… les idées. La seconde communauté de ce genre est l’Internet (style Wikipedia, blog de Paul Jorion….).////

        C’est ce que je critique justement : l’individu dé-naturé , isolé de son groupe , cherche a se « re-grouper » . Il y arrive par affinité puisque des moyens lui sont offerts : holligans , cyclistes , scientifiques ….et le succes des forums ….Mais ce sont là des substitus , sinon des leurres qui satisfont certe un besoin essentiel : valoriser son ego par des interaction ..et ce de façon facilité puisque les interactants co-incident …mais ce regroupement « virtuel » est endogame et donc accélère l’entropie .
        En d’autres termes , ces regroupements par affinités, en supprimant l’unité de lieu (et de temps) , exacerbent le communautarisme et ses éfauts . S’ils réent une plus-value immédiate ils sont source de conflits et problèmes : un ex ; je peux insulter les usager de 4×4 sur le net ….mais mon voisin en a un , est assez sympa par ailleurs , et sa fille est mignonne …
        L’unité de lieu est important …l’altérité , me semble t il dopit etre recherché au plus bas niveau des groupes , comme les fonction régaliennes …..C’est une théorie libertaire agréable .

        ///Les valeurs produites par la réciprocité négative (dont rend compte l’imaginaire de l’honneur) paraissent en effet toutes issues de structures locales (le duel). ///
        Les cours d’assise sont pleines de gens qui ont préféré perdre la liberté (ou la vie) plutot que perdre la face .
        Goffman (rites interactifs) , dit que faire perdre la face est aussi humiliant que de la perdre . (utilisé instinctivement par qqs vendeurs) …. Par contre dénoncer publiquement un de ses travers , un manquement aux rites est valorisant . s’ humilier devant le groupe rehausse la valeur de la « FACE » . De sorte que le fautif a tout interet a avouer , puisqu’il sera cajolé et plaint !
        cette inversion , comme celle du Don qui ne doit pas offenser sont des des comportements commerciaux et relationnels structurants .

        //Mais ici aussi on peut changer de niveau: le sport est la reproduction dans l’imaginaire de la guerre (de réciprocité),//
        Quand tu lances un baton a un chiot , il te le ramène …non pas pour que tu le relances (d’ailleurs il ne veut pas le lacher) , mais pour que tires dessus pour juger du plus fort et savoir celui qui , sans violence aura acces le premier a la mamelle ou a la femelle .
        les « rites »(rituels inconscients) se substituent a la violence et la remplacent (pour la dé-saffecter) afin de hierarchider le groupe et autoriser la socialisation .

        Je sais que je me répète et ça lasse , mais tout part de l’agressivité intra-spécifique des animaux non socialisés ….il faut relire K.LOrenz (l’agression , une histoire du mal) . Ou l’ homme ds le fleuve du vivant , ou il y revient .

      7. Avatar de timiota
        timiota

        @ kercoz

        Que pensez vous de la description anthropologique (en partie) de J. Généreux ?
        IL parle d’une « spirale » autour de nous, ou chaque « tour » correspond à un cercle de relation, de la famille à l’humanité.
        Il parle aussi de « liens qui libèrent ».
        Tient il faut que j’écoute le « Grain à Moudre » Sur FranceCulture hier soir avec Aldo Naouri, qui parle de l’éducation dont il dit qu’elle rend démocrate si on la commence dès le 1er âge en mode « dictateur » (pas de complaisance dans l’autorité, pas d’enfant-roi, dur pour les grecs…) pour cadrer les N pulsions dont nous avons hérités de notre très lointain passé qui fut moins néoténique que notre vie de ces 3000 dernières années…

      8. Avatar de kercoz
        kercoz

        @Timotia
        Il y avait CICERO , un indien quebequois de niveau universitaire , retourné ds sa tribu en chasseur ceuilleur qui intervenait sur OLeocene . Il disait que les chercheurs anthropo démontraient qu’on pouvait avoir des relations interactves soutenues avec une 50aine d’individus dont une douzaine d’intime.
        Pour l’éducation , perso , je pars sur le meme mode de reflexion : la période actuelle est un épiphénomène …Le modèle qui a géré 99, 99% de l’existance humaine c’est des fratries nombreuses de 6 à 10 enfants . On ne peut eduquer 8 enfants comme on fait actuellement avec 1,2 enfants … Je pense que passé 2 ans , l’enfant est éduqué , surveillé , hierarchisé par sa fratrie et les fratries voisines ….8 petits cons c’est dur a tenir ds un 2 pieces cuisine. ….
        Ce n’est donc pas Bisounours , et la violence n’ y a pas court non plus puisque les rites anciens s’installent d’eux memes …
        Il serait interessant de développer ce modèle : la justice exterieure (adulte) n’intervient que lors de rares conflits non auto-maitrisés par la hierarchie ……..Tout comme pour le groupe adulte ne fait appel a la police ou aux juges que lors de rares … (nous sommes encore ds le modèle fractal)
        C’est l’enfant qui modèle le monde adulte en terme de rites profonds .
        L’adulte sera perverti par des rites plus récents et opportunistes (liés au contingences socio , climatiques etc ..) qui peuvent etre dangereux pour l’espece ou la civilisation.
        Ce matin sur FR Cult , ne pas rater « le salon noir » sur l’agriculture archeologique en Guyanne:
        http://www.franceculture.com/emission-le-salon-noir-archeologie-et-ecologie-des-savanes-de-guyane-2011-03-02.html
        Cultures sur buttes , buttes abandonnées depuis des siecles et encore fiable et habitée d’une nombreuse pédofaune.

      9. Avatar de timiota
        timiota

        Merci de vos liens et réflexions, kercoz
        (vive ce blog !)

  2. Avatar de moins que rien
    moins que rien

    Bonjour à tous,
    mon insignifiance m’amène à me poser la question : où se situe la nécessité (pas la née cécité…)
    Par exemple le commerce du sel via le Ténéré et le statut des Touaregs en résultant…
    Si quelqu’un(e) pouvait éclairer ma lanterne, et surtout ce qui se trouve autour, j’en serais grandement reconnaissant.
    En vous remerciant à l’avance …etc
    mqr

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