Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Je regardais hier les chiffres de fréquentation du blog : 364.000 visites en mai, 235.000 en septembre. Ma vidéo du vendredi : « Le temps qu’il fait », du 7 mai a été vue par 13.000 personnes, celle de vendredi dernier par 4.000. Et je me dis : « Nous sommes en train d’échouer dans quelque chose que nous voulions entreprendre ».
Hier dans la nuit, je lis dans Le Monde, un article intitulé : « La Grèce, « porte d’entrée » de la Chine en Europe ». Et je vais me coucher. Et au réveil, j’ai cette image qui me vient : celle que j’ai mise en titre : de l’adolescent qui a fait une connerie, et que son père vient chercher au poste de police.
Automne 2008 : le système financier américain s’effondre aux États-Unis. Leurs dirigeants sont désemparés. Les Chinois doivent les rassurer : ils ne se débarrasseront pas de la dette américaine qu’ils détiennent en quantité faramineuse. La situation catastrophique des Government-Sponsored Entities, Fannie Mae et Freddie Mac, susceptible de déstabiliser le pays tout entier, est provisoirement résolue non pas par des conversations à Washington mais par des coups de téléphone entre Pékin et Washington, où les Américains écoutent et prennent des notes. Printemps 2010 : la zone euro va exploser d’un instant à l’autre, un coup d’arrêt est donné au pourrissement de la situation quand on déclare en Chine que les fonds souverains continueront à diversifier leurs avoirs entre un panier de devises représentant les différentes puissances économiques. Il y a quelques jours, c’est la Grèce, dont la situation était jusque-là désespérée – ou le serait en tout cas dans trois ans – qui est sauvée d’affaire par la Chine. Demain, ce sera l’Irlande, et après-demain, l’Espagne, et le jour suivant : nous tous.
Au plus fort de la crise, nous nous sommes dits : « Un système s’effondre, nous allons rebâtir ! » Et qu’est-ce qui s’est passé ? Aux États-Unis, on s’attendait à ce qu’Obama mette à la tête de l’économie Joseph Stiglitz ou Paul Krugman. À la place, on a eu Larry Summers, un personnage dont j’ai brossé le portrait récemment, qui avant même sa nomination avait déjà acquis la réputation d’économiste le plus calamiteux de toute l’histoire des États-Unis. En Europe, on a confié le soin de réparer aux responsables de la crise. J’ai rapporté ici ma déposition devant la commission du Parlement européen qui enquête sur les causes de la crise : nous étions huit, et je me demandais ce que je faisais là aux côtés de sept apparatchiks de banque ou de gouvernement, ânonnant la com de leur organisation. Les décisions sur les hedge funds européens ont été ajournées pour permettre à Mr. Gordon Brown d’essayer de gagner des élections parlementaires perdues d’avance, et l’aide à la Grèce a été retardée de plusieurs mois pour permettre à Mme Merkel d’essayer de gagner des élections régionales perdues d’avance. En Occident, Europe et États-Unis confondus, il n’est pas nécessaire de nous infantiliser : nous faisons cela très bien nous-mêmes.
Nous ici, sur le blog, nous avions dit : « C’est à nous de résoudre nos problèmes, c’est à nous de prendre les choses en main ! » Mais à quoi bon, la Chine veille, la Chine dans le rôle du père de famille responsable, qui vient chercher au commissariat son fils qui accumule les conneries. Et qui a plusieurs fils aussi stupides. Et qui ne dit rien, en espérant qu’ils apprendront.
La Chine a sauvé la Grèce. Tant mieux pour elle. Mais je ne sais pas, ce matin je me sens vieux.
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
514 réponses à “L’ado que son paternel va chercher au commissariat”
Jérome Kerviel, condamné à cinq ans de prison dont trois ferme, devra rembourser 4,9 milliards d’euros à la banque.
La dette de Jérome Kerviel est à l’image des immenses dettes privées et publiques : elle ne sera jamais remboursée ; ce qui est une évidence dans son cas, mais pas encore une évidence pour les autres dettes.
la Société Générale (pub),
elle, s’en sort banque comme neige
@Paul * : j’ai dû vérifier l’info sur le net tellement ça me semble incroyable. Au passage, j’ai appris sur l’express.fr que « La Société Générale ne réclamera pas à Kerviel les 5 milliards d’euros » : ah bon ?! Mais pourquoi donc ?
C’est une décision totalement scandaleuse. Pas seulement parce qu’elle est irréaliste, (alors que la Justice n’a à connaître que vérité ET réalité), mais aussi parce que cette même Justice devrait condamner les banques pour tous les motifs, faciles à trouver, dont on peut les accuser.
Pour Maître Eolas, la condamnation de Kerviel aux dommages et intérêts n’est pas scandaleuse, mais 100% normale car strictement conforme au droit.
Reste que je n’ai pas compris l’affaire sur le fond. Kerviel s’est donc rendu coupable de « faux et usages de faux » qui lui permettaient, sous des noms d’emprunt, de répondre aux questions gênantes et d’endormir la méfiance des quémandeurs. Mais les 52 milliards d’engagements, imputables à lui seul, ils devaient quand même bien se voir, non ? Maître Eolas explique :
Le tribunal a estimé qu’aucune preuve n’était apportée, et a retourné cet argument [la complicité tacite de la banque] contre le prévenu, en en déduisant qu’il niait sa responsabilité et imputait cyniquement ses erreurs à la victime.
Je ne voudrais pas médire de la banque, (ni de Maître Eolas qui explique tout sans critique aucune), mais n’a-t-elle pas cyniquement laissé son collaborateur faire des erreurs ? Parce que sinon, faudrait expliquer comment ces 52 milliards ont pu passer inaperçus.
Comment faire de l’audience Vendredi ? C’est simple, invitez une jolie fille 🙂 (tant pis pour les lectrices 🙂
Il se pourrait que votre côté St Just ait pris le dessus et a été perçu comme trop radical par certains qui ne sont pas prêts, et n’ont pas le courage de se poser les vrais questions….
Avant d’aborder le fond, une remarque de forme sur : « on a confié le soin de réparer aux responsables de la crise » : il eût été un peu plus joli d’écrire : « on a confié le soin des réparations aux… » car le verbe est transitif. Sans COD, le lecteur ressent un manque, même si la phrase est syntaxiquement correct.
Dans ce cas, l’emploi intransitif peut être admis, car l’objet est connu par le contexte.
Julien, l’objet est même tellement connu par le contexte que ce n’est pas la peine de le citer. Mais là n’est pas le problème, qui est syntaxique. Le mot réparation n’a pas été inventé pour rien, mais précisément pour éviter l’emploi de réparer sans objet. Avec réparation, on a le verbe et le COD en un seul mot.
Et si j’étais sévère, j’ajouterais que mon Petit Robert fétiche ne signale pas l’emploi intransitif de réparer…
« soin de la réparation » est un peu lourd et inutile.
« On a confié la réparation » suffit.
De toutes façons c’est à tort.
Et pas à « tord » comme on voit souvent.
Par ailleurs On voit souvent « hors » pour « or » conj de coordination.
Un père affectueux et soucieux de l’avenir de son fils irresponsable, ou un père inquiet de l’attitude de son fils, mais qui a encore besoin de lui dans l’immédiat pour ne pas faire ombre à sa propre carrière ?
@ Paul Jorion
Prendre comme référence le mois de mai 2010 où beaucoup découvrirent, stupéfaits, que l’euro était une machine en trompe l’oeil, et donc se passionnèrent soudain pour tout ce qui paraissait sur le sujet, est forcément discutable. Une diminution de la fréquentation de 35% par rapport à ce moment crucial me semble inévitable. Aucune raison de se décourager. Les contributions à ce blog sont souvent de qualité, les commentaires un peu plus folkloriques mais c’est la loi du genre, continuez, il nous manquerait.
Quant à influer sur la marche de l’histoire, c’est autre chose, mais on en vit de plus surprenantes…
Et quant à la Chine, et bien nous lui souhaitons bien du plaisir …
D’ailleurs je vais voter avec mes sous.
Il faut arrêter de rêver sur ce Blog, aussi instructif soit il.
Tant que nous continuerons de devoir financer notre esclavage à travers ces 5 piliers:
– énergie,
– nourriture,
– eau,
– logement,
– communication
Absolument rien ne changera.
Nous sommes coincés et la sélection par l’argent fera son office. C’est strictement la même chose, c’est juste le critère de sélection qui s’est déplacé. Mais sur le fond, rien n’a changé.
Bonjour à tous,et plus particulièrement a Mr Jorion
Mr Jorion surtout continuez à nous informer et oubliez la quantité (des chiffres de fréquentation)
ICI NOUS CHERCHONS LA QUALITE………….
SIEMPRE LA LUCHA !!!!!!!!!!
La gueule de bois ne dissuade pas les alcooliques…
…et ils ne veulent surtout pas entendre parler de cure de désintoxication… car ils veulent oublier qu’ils sont malades. Mais quand le cancer se fera de nouveau sentir, vous verrez la fréquentation de votre site à nouveau augmenter…
Bonjour, ceci est mon premier commentaire sur ce blog que je parcours chaque jour depuis plus d’un an. J’y trouve ce que je cherche, c’est à dire des explications sur notre environnement, notre histoire et des projections sur ce que sera notre destin.
Ce blog, ainsi que ses contributeurs (de très grande qualité) sont pour moi dans la sphère cognitive. Une démarche purement intellectuelle, d’apprentissage, de formalisme et de spéculation. Nous sommes ici sur le web, qui n’est en fin de compte qu’un lieu d’échanges immatériels. Pour les actions à entreprendre, c’est à nous citoyens (IRL) de les mener avec nos moyens.
Dans ce cadre il faut revoir
http://www.arretsurimages.net/contenu.php?id=2152
Je partage tout à fait l’expérience d’Arnito : on me dit autour de moi que je suis un oiseau de mauvais augure, que la relance est en marche et que les supermarchés sont pleins, que des chômeurs il y en a toujours eu et que les banques ne se sont jamais aussi bien portées. Je les laisse donc à leurs certitudes et garde pour moi mes réflexions et mes doutes : ils sont dépourvus des unes et des autres en ce qui concerne l’économie.
Tant que les gens ne manqueront pas de cash pour faire les courses ou payer leur loyer le monde tournera impeccablement, et je puis vérifier que dans mon entourage, pourtant constitué de personnes intelligentes et éduquées, et ouverte par dessus le marché, on ne veut rien voir : l’un parce qu’il vient de rentrer sur le marché de l’emploi et qu’il a la tête pleine d’Avenir, l’autre parce que sa petite fille a deux ans et qu’il est très heureux et fier de sa réussite de trentenaire qui s’est fait tout seul, un autre encore parce qu’il pense fondamentalement que l’Homme s’en sort toujours d’une manière ou d’une autre et que le catastrophisme est une faute intellectuelle…
Que dire ? que faire ? D’un autre côté, force est de constater que le monde tourne très bien malgré des dizaines de milliers de milliards de dette toxiques, ça flanche sur les côtés, à la marge, mais la preuve éclatante que constituerait une implosion du système n’est toujours pas intervenue pour valider aux yeux des incrédules la faillite du système. Et d’une certaine manière c’est heureux. Il est vrai, monsieur Jorion, que ce canard sans tête a une certaine endurance, et je comprends votre désarroi, que je partage, mais il faut tenir malgré tout : faire acte de pensée est un sacerdoce, et vous ne disposez pas du verbe efficace. Vous n’êtes qu’humain après tout. Courage !
Oui, et non,
Votre blog Mr Jorion depuis 2008 a énormément compté dans ma compréhension des mécanismes de cette mondialisation.
Depuis j’ai dévoré de nombreux livres économiques, sociologiques, politiques, d’histoire….
Je faisais parti de ces gens qui pensait naïvement que tous ces politiques ne faisaient pas trop mal leur travail (en tout cas plus compétents que moi ; ) puisque la société Française malgré des dysfonctionnements, malgré tout dans sa globalité était plutot agréable (niveau de vie, paix, etc)
Et je découvre avec stupeur avec la crise des subprimes que nous avons évité de justesse une crise systémique!!!!
Depuis grâce a votre blog et bien d’autres lectures, j’ai compris que nos « têtes pensantes et dirigeantes » nous emmènent droit dans le mur en chantant.
Eh bien, je m’investis depuis peu, politiquement au niveau local et je découvre que mon Maire adopte les recettes de la mondialisation « moins d’état » (privatisation des crèches, parking, piscine « municipale », …) tous les biens communs sont mis entre les mains des intérêts privés qui ne réfléchissent qu’en terme de profit a court terme. Cela engendre des déséquilibres dangereux en particulier au niveau de l’urbanisme de la ville, dans les meilleurs quartiers, les promoteurs font pousser des résidences comme des champignons, dans les quartiers « pauvres » rien n’est fait. Les crèches privées apparaissent dans les bons quartiers, pour les autres rien….etc
Alors évidemment je ne suis pas encore en mesure de faire peur a la Chine, mais je vous jure que je donne du fil a retordre a mon Maire….
Bonne nouvelle je ne suis plus un enfant!!!! plus besoin de venir me chercher au commissariat …
@ Paul et Lau
Une réalisation et une désillusion similaires ont frappé Étienne Chouard après des mois de lutte pour tenter de sensibiliser les gens à la pourriture de notre système politique et à la nécessité de le réformer pour avoir une chance de nous en sortir. En ce sens, l’analyse d’Arnito et Hard Roc est bonne : je crains qu’on ne puisse pas lutter contre le je m’en foutisme béat ambiant…
@ Didier
Il existe un magnifique proverbe qui dit ceci : Le temps se venge toujours des choses que l’on a voulu faire sans lui.
Si la Chine se développe trop vite, elle en payera la prix.
Comme l’a suggéré BA, la roue tourne et l’Asie semble en phase ascendante. Mais pour combien de temps ? Car sur quoi se base cette ascension ? Si c’est sur les ressources naturelles, vieille recette qui a amené le monde là où il est actuellement, la suite est prévisible.
Et si l’Occident quitte le devant de la scène, cela ne veut pas dire qu’il est fini. Qui prendra la relève lorsque la Chine, à son tour s’écroulera ? Nous sommes un laboratoire d’idée, bien plus puissantes et originales que celles engendrées aux USA.
Alors, Paul, le combat continue. Merci à vous, et merci à tous !
Après cigarette et café, je peux me prononcer sur le fond : ces stats de fréquentation signifient donc que l’on s’inquiète quand on entend des craquements et, qu’après qu’ils s’arrêtent parce qu’une solution toute provisoire a été trouvée, on se dit que tout ne va pas si mal, ce n’est plus la peine de venir voir ce que Paul Jorion raconte sur la crise. Les visiteurs occasionnels n’ont rien compris. Ou bien ce sont des gens par ailleurs fort occupés. Mais si les mêmes occupent leurs loisirs à discuter sur Internet, c’est à désespérer, car ils feraient mieux de venir ici plutôt qu’ailleurs.
Oui, crapaud.
Mais il y a aussi un certain découragement de certains conscients qui, ne pouvant passer à l’action concrète, se contentent de ne suivre maintenant que les plus gros soubresauts, annonciateurs de la tempête.
Le calme avant la tempête fait aussi cet effet en mer. Un relâchement parfois bénéfique.
Il ne faut pas abandonner le but premier : INFORMER.
Contre la désinformation (dont aussi de certains courants politiques qui veulent profiter de la situation d’angoisse)
@crapaud :
« et, qu’après qu’ils s’arrêtent…. »
et, lorsqu’ils s’arrêtent… » eût été mieux, non ?
Vous savez que c’est trèèèèès mauvais la cigarette pour les batraciens !
@louise : j’ai failli utiliser votre solution, mais c’est bien « après » que les craquements ont cessé de se faire entendre qu’il se passe quelque chose, car il n’y a pas de moment précis qui corresponde à leur fin. Votre solution est plus élégante, mais je suis un maniaque de la précision, et je n’avais pas le temps de chercher un truc plus élégant.
@Martine et louise : 🙂
Donc :
« et après, alors qu’ils se sont arrétés…… »
J’aime bien quand çà chante bien 🙂
@louise : je vous engage comme agent littéraire ! 🙂
Monsieur Jorion , pour le coup votre billet est plus celui d’un adolescent ( avec sa fraîcheur prétentieuse) que celle d’un vieux (sage ) .
Il faut une bonne dose de paranoïa pour imaginer sauver l’occident , le monde , être un phare et faire l’histoire .
Les chinois n’ont pas plus que d’autres et seuls la clef de l’avenir .
Votre travail de décryptage et de repérage des erreurs , reste vital comme des milliers ( mais peut être pas tant que ça ) d’autres productions d’esprits libres et res^ponsables .
Je ne reciterai pas une nouvelle fois Tolstoï et l’épilogue de » Guerre et paix » mais je reste fidèle à cette lecture d’adolescent dans mon vieil âge .
L’automne a Pekin?
bonjour,
La Chine ne sauve pas la Grèce
elle a vu une dépouille, elle regarde ce qui est intéressant et elle se sert.
je ferais la même chose.
il n’y a rien qui sauvera la Grèce.
où que l’on regarde le feu est partout, un seau d’eau que l’on jette retarde le feu
mais aucun pompier n’est capable s’éteindre les feux.
la question est qui cramera en 1er.
la chine non plus n’est pas au mieux, elle a ses propres problème
mais elle a connue des moments difficiles, elle se relèvera.
mais pour l’Europe et les usa, ils sont habitués a un certains niveau de vie
se serrer la ceinture ne sera pas facile
plus dure sera la chute.
Monsieur le renard,
Les européens, dans leur ensemble, sauf récemment, ont connu bien des vicissitudes … et, ils ont un certain sens de l’histoire, et pas seulement de la leur …
Ne pas confondre nos élites, qui « manquent de classe » – c’est ce que je trouve de plus aimable à dire, avec la population …Il faut le temps qu’il faut pour un changement intérieur radical …
Je pense qu’ayant vécu autant, il nous faut une pause…active : les neurones tricotent …
» Ne pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué » : conseil que l’on ne devrait pas avoir à dispenser à un rusé renard…
J’aurais pu intervenir en me joignant au concert de consolations en rappelant une expression entendue récemment: « pessimisme enthousiaste ». Mais non, parce que ce n’est pas vraiment dans mon caractère, et parce que je ne crois pas à l’idée d’un quelconque sursaut moral (pas chez ceux qui n’ont de toute évidence pas un sens moral très développé dès le départ en tout cas).
En revanche, ce qui me correspond mieux, c’est une remise en question permanente de tout. Or ce matin ce sur quoi je m’interroge c’est cette idée que la Grèce serait désormais sauvée… Mais sauvée de quoi, et comment?
La Chine vient en quelque sorte de redorer le blason de la dette Grecque si j’ai bien compris, c’est à dire, toujours sous réserve que je comprenne bien, que cette dernière va pouvoir continuer à émettre de la dette à des taux avantageux… C’est une bonne nouvelle, ça?
La métaphore du père, parlons-en: Si c’est lui qui assume les conneries de ses fils, cela veut donc littéralement dire qu’il pérennise leur irresponsabilité. Ce qui correspond assez bien à ce que je viens d’envisager pour le cas grec, non?
En tout état de cause, je ne comprends pas bien ce qui justifie une telle considération à l’égard de la Chine. En quoi la pertinence serait-elle d’avantage là-bas qu’ici?
D’autant que la Chine ne fait qu’emprunter le chemin que l’Europe a pris il y a bien longtemps.
La Chine dans le rôle de Péchenard ?
@ Paul Jorion :
Je crains que le désir de paternité ou du moins la reconnaissance de celle-ci connaissent, aussi, rapidement des limites :
http://www.lemonde.fr/economie/article/2010/10/05/moody-s-place-sous-surveillance-la-note-aa2-de-l-irlande_1420300_3234.html#mf_sid=241710062
Car si l’Irlande s’y met, ainsi que l’Espagne, je crains que le vieille Chine ne vienne plus chercher ses ‘rejetons’ au commissariat (d’ailleurs, par ‘commissariat’, vous entendez quoi ? Personnellement, j’entends ‘FMI’ 🙂 ), ou ne les y laisse croupir pour leur apprendre à apprendre …
A priori, je sens plutôt que la Chine essaye d’éviter à ses ‘rejetons’ de faire des conneries et donc d’aller au commissariat : vous croyez pas que la Chine a suffisamment à s’occuper avec ses propres rejetons chez elle, pour s’occuper de ses enfants ‘naturels’ ?
D’autant que les siens risquent d’être légèrement remuant …
Je crois ainsi que la Chine se positionne pour éviter d’avoir, de toute manière et indirectement, à devoir payer les conneries de ces rejetons là : Grèce, Irlande, Espagne, … (liste non exhaustive).
Je ne crois donc pas que la Chine souhaite devenir maître du monde : c’est un job à plein temps. Et historiquement, qu’elle n’a jamais (sauf dynasties mongoles) souhaiter endosser.
A la limite même, plus les rejetons feront des conneries et plus Papa devra prendre les devants et imposer des règles, notamment au fils ainé : les US. L’explication promet d’être ‘cordiale’ … 🙂
Donc, pessimiste optimiste suis-je …
😉
A-t-on besoin d’avoir les deux pieds en Méditerranée ? un seul pied ne suffit-il pas ?
Je sens que le pessimisme grandit et que l’enthousiasme faiblit.
D’un côté, un infime pourcentage de gens extrêmement puissants, extrêmement actifs qui utilisent parfaitement les manipulations de masse et de façon très efficace. Avec la complicité des médias, le manifeste de 600 économistes aura infiniment moins d’impact dans l’opinion que le discours manipulateur de deux ministres.
De l’autre, 70% des gens qui partagent les idées développées ici, mais qui, dans leur majorité, pensent que c’est utopique, pas vraiment réaliste, et qu’il faudra bien se résigner.
Je crois que Paul découvre qu’on ne convainc que des convaincus. Et ce ne sont pas ses passages à la télé qui feront grossir les troupes. Il n’est pas invité dans ces émissions de pseudo-débats pour expliquer ou pour convaincre, mais pour permettre à la télé de faire à bon compte du remplissage people. La présence de Paul permettra juste aux téléspectateurs d’entendre une petite musique sympathique qui entrera par une oreille et sortira par l’autre.
Pour faire vraiment grossir les troupes, il reste l’action politique. Je ne suis inscrit à aucun parti. Mais ma conviction personnelle est qu’il existe une offre politique en adéquation avec les idées développées ici. Les deux démarches, celle de Paul et celle des « politiques » se renforcent elles mutuellement ? Je ne sais pas.
En tous cas, c’est pas gagné. Mais je sais que Paul ne baissera pas les bras. Il a utilisé la formule : « il y a le feu en la demeure »: A propos de feu :
Un jour, dit la légende, il y eut un immense incendie de forêt. Tous les animaux terrifiés, atterrés, observaient impuissants le désastre. Seul le petit colibri s’activait, allant chercher quelques gouttes avec son bec pour les jeter sur le feu. Après un moment, le tatou, agacé par cette agitation dérisoire, lui dit : « Colibri ! Tu n’es pas fou ? Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! »
Et le colibri lui répondit :« Je le sais, mais je fais ma part. »
Extrait de l’association Colibri de Pierre Rabhi.
Pour moi, Paul est un colibri efficace.
Tiens ! raconté par Patrick Chamoiseau dans « les Neufs consciences du Malfini « / 2009…
Il y avait eu un beau texte : Glissant, Chamoiseau … » Manifeste pour les produits de haute nécessité »
trés inspirant !
« Cela ne peut signifier qu’une chose :
non pas qu’il n’y a pas de route
pour en sortir,
mais que l’heure est venue d’abandonner
toutes les vieilles routes. » / Aimé Césaire
Ne vous découragez pas, ce que vous entreprenez est un travail de longue haleine. Il faut beaucoup de temps pour que les idées nouvelles grandissent, envahissent les individus et les influent
bien à vous et avec toute mon estime
Jean
Le jour d’hier qui m’abandonne, je ne saurais le retenir ;
le jour d’aujourd’hui qui trouble mon cœur, je ne saurais en écarter l’amertume.
Les oiseaux de passage arrivent déjà, par vols nombreux que nous ramène le vent d’automne.
Je vais monter au belvédère, et remplir mon verre en regardant au loin.
Je songe aux grands poètes des générations passées ;
je me délecte à lire leurs vers si pleins de grâce et de vigueur.
Moi aussi, je me sens une verve puissante et des inspirations qui voudraient prendre leur essor ;
mais pour égaler ces sublimes génies, il faudrait s’élever jusqu’au ciel pur, et voir les astres de plus près.
C’est en vain qu’armé d’une épée, on chercherait à trancher le fil de l’eau ;
c’est en vain qu’en remplissant mon verre, j’essaierais de noyer mon chagrin.
L’homme, dans cette vie, quand les choses ne sont pas en harmonie avec ses désirs,
ne peut que se jeter dans une barque, les cheveux au vent, et s’abandonner au caprice des flots.
Poème de Li Bai (ou Li Po), le plus grand poète chinois (701-762)
“C’est en accomplissant l’action à faire,
sans être sensible à ses fruits,
qu’on est à la fois le renonçant et l’acteur détaché,
mais ce n’est pas en s’abstenant des rites, en s’abstenant d’agir,
qu’on y parvient.”
Bhagavad Gîtâ
Pour quelques uns, nous savions que ce jour arriverait, tôt ou tard. Mais les combats continuent. Aux peuples de décider de tourner le dos, en toute connaissance de cause, à cette crise globale qui va perdurer, ou de lui faire face avec dignité. La force des peuples c’est le nombre, celle des gardiens de ce système ce sont les armes meurtrières. Les batailles prennent de l’ampleur et la guerre est loin d’être terminée. Les résistances populaires traversent les générations et portent toujours leurs fruits. Paul, regarde-toi un peu. Tu n’as pas honte, d’être si jeune? A ton âge !
Monsieur Jorion, je suis novice en économie et en finances mais petit à petit, je fais mon chemin de compréhension grâce à vos articles et à ceux de vos collaborateurs.
Continuez votre travail d’élucidation : vous tracez des chemins inédits, vous êtes un pionnier qui ne verra pas toujours les traces de son sillage. Mais justement, continuez à tracer, sans relâche, sans vous préoccuper du nombre de ceux qui vous suivent; le principal, c’est la richesse de la voie tracée, et là, vous donnez l’exemple ! Soyez-en grandement remercié !
Ce matin aussi j’ai réalisé le coup de la Chine.
Mais cela m’a énervé…
C’est comme si une idée de l’Europe, communautaire, autonome et indépendante avait été conduite à l’échec par des gourvernants incapables.
Je ne crois pas à la faiblesse des démocraties, je ne me sens pas vieux, et je crois tout simplement à la trahison.
Les résultantes politiques au niveau européen sont le risque de faire monter un nationaliste imbécile et xénophobe, comme déja cela se joue aux Pays-Bas, en Italie (Fini, neo-fasciste, vrai fasciste) etc… Sans compter la chasse aux Roms en France.
C’est pour cela que je parle de trahison, comme si ces droites néolibérales ne voulaient que ça, pour en effet SE FAIRE REELIRE ET GARDER LE POUVOIR, contre les gauches redistributrices sur le modéle Sud-Américain.
La Chine est-elle sage? Ou ne profite-t-elle pas de l’aubaine?
A-t-elle une bonne opinion de nos états « providences »?
N’est -elle pas objectivement l’alliée de la globalisation néolibérale?
Les dirigeants ont laissé trainer les clés de l’Occident ; les Chinois les ont trouvées et s’en servent.
M. Jorion,
Votre comparaison de l’adulte qui va chercher son fils dans le commissariat est très pertinente…oui, la chine peut sauver la grèce (à quel degré, et le peut-elle totalement) non de façon désintéressée parce que cela lui permettra d’avoir un pied-à-terre en Europe.
Cependant, cela ne remet pas en cause les constats que vous avez fait sur le système actuel, dépassé, qui ne peut plus soutenir ce que nous sommes devenus…mais à ce titre, il faut vous ôter l’idée de la tête que votre combat est vain; ce que vous nous avez apporté, de par vos connaissances et de par votre réflexion est immense, et ce serait une erreur de s’arrêter en si bon chemin.
Rien n’est éternel, pas plus moi, que les personnes qui écrivent sur ce blog, que notre système; la seule chose à faire, c’est de prendre la situation avec tranquillité…
Les arbres continueront de bourgeonner au printemps,
Les nuages continueront leur course dans le ciel,
Et il faut cependant accepter la lassitude d’un monde auquel on reproche de ne pas être ce que l’on voudrait qu’il soit.
Vous êtes une puissance tranquille, on nous en avons terriblement besoin! (Continuez!)
@Mr Jorion.
Sur la fréquentation j’ai une hypothèse qui me vient d’ex lecteurs: Ce blog est devenu beaucoup trop généraliste avec un ton beaucoup trop consensuel (audience oblige j’imagine).
Votre fascination pour la Chine à l’image de ce billet est incompréhensible, elle s’est rendue beaucoup plus dépendante de l’occident que l’inverse, elle n’a pas d’autre choix que de soutenir le dollar et pour encore très longtemps, Apple … Wal Mart .. GE .. Carrefour (60% des exportations chinoises vers l’occident sont le fait de multinationales) peuvent aller faire fabriquer leurs jouets, machines … ailleurs, les multinationales plus que n’importe quel pays tiennent la Chine par les raviolis de crevettes.
Les multinationales sont bien les nouveaux arbitres voir legislateurs comme le dit le président de Big Brother (sisi). Big Brother is voting for you
Bref en admettant la métaphore de l’adolescent, son père se comporte de façon extrêmement individualiste, il ne voit son fils que comme un moyen d’assouvir son ambition.
Otto, de plus, une chose qu’il ne faudra pas répéter ici, mais…
La relation père-fils me parait aventureuse car syno-nime de rapport de force. Et un rapport de force par l’argent ne me parait pas franchement non plus très sain…
Même si la mode est au capitalisme décomplexé.
J’ai montré à mes enfants comment les asiatiques comptaient sur leurs doigts comme une différence de culture amusante. Non comme un exemple à suivre.
« trop généraliste »
Ou trop spécialiste ? On est en droit de se poser la question .
Paul en se confiant aujourd’hui ,humanise le blog et va générer je pense un important flux de commentaires et corrélativement peut être ,un plus important nombre de lecteurs.
Je ne parle que de la ligne éditoriale du blog,pas de son ambition,bien que les deux soient pour partie liées.
La folie économique que nous vivons est désespérante. Si seulement les tenants du système pouvaient faire partie d’une ou deux bandes organisées et repérables, on saurait exactement où porter notre combat. Le problème, c’est que c’est comme un cancer qui aurait métastasé.
Pourtant, au mileu de ce monde écoeurant, je vois poindre la possibilité d’une union féconde de l’écologie et du progrès, pouvons nous faire en sorte qu’elle ne nous passe pas sous le nez et qu’elle ne soit confisquée par les grennbusinessmen?
« « C’est à nous de résoudre nos problèmes, c’est à nous de prendre les choses en main ! » » …..
« En Occident, Europe et États-Unis confondus, il n’est pas nécessaire de nous infantiliser : nous faisons cela très bien nous-mêmes. »
Monsieur Jorion, je partage tout à fait votre point de vue, sauf que « nous » est à remplacer par « les dirigeants », les populations étant écartées des décisions prises par les politiques (le choix offert entre bonnet blanc et blanc bonnet lors des élections ne leurre plus personne).
Je me pose aussi la question suivante, au regard de l’énormité qui s’est produite pour la Grèce au printemps, était ce bien de l’infantilisation ou encore une fois des raisons avancées quelques peu douteuses pour cacher la réalité ?
Après tout, les dirigeants européens ont bien ouvert officiellement les portes en 2015 pour le libre échange transatlantique, n’avaient ils pas envisagé d’en faire autant pour la Chine ?
Je ressens plutôt de la colère. Mais ca ne date pas d’hier. J’ai la sensation qu’on gâche notre potentiel immense sur ce continent …