Ce texte est un « article presslib’ » (*)
20h31. Résultats provisoires : baisse des abstentionnistes par rapport au premier tour, 49 % de l’électorat, contre 53 %.
Ensemble, l’UMP et le FN représentent un quart de l’électorat (24,99 %), l’union de toutes les gauches, un peu moins (24,01 %).
24h25. Résultats définitifs : l’union de toutes les gauches rassemble un peu plus d’un quart de l’électorat (26,61 %), l’UMP et le FN réunis, un peu plus d’un électeur sur 5 (21,95 %).
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
103 réponses à “France : Régionales 2e tour”
Bonjour
Dans mon Alsace natale, le combat commence à peine.
Le très libéral vainqueur des élections va faire tout son possible pour nous imposer son projet de GCO (Grand Contournement Ouest) qui sera la première autoroute à péages privée de France.
Où l’on voit les limites de l’abstentionnisme de gauche ….
Le cheval France. Trés bref résumé.
http://www.youtube.com/watch?v=cCG7HWdRtkQ
Envoyez c’est pesé.
Bien alors bilan des courses : remaniement du gouvernement avec accentuation de son caractère droitier dur. On associe bien sûr les timides et les tièdes. Résultat au lieu d’avoir une politique plus juste pour tous, on va avoir une politique plus dure pour tous. « migraine »
Je ne sais pas pour vous, mais moi, j’aimerais enfin un peu de douceur de vivre en France :
(avec votre permission Paul)
http://www.dailymotion.com/video/x3ara0_douce-france-charles-trenet-1963
et ses descendants directs
http://www.youtube.com/watch?v=yA3LWmQhIqw
Il y en a qui aiment les rolex et d’autres les solex :
http://www.youtube.com/watch?v=MVkWLZFqCjg
Quant à nos votes ou non votes :
http://1.bp.blogspot.com/_gGox5p_9bxY/SyU9awo-fXI/AAAAAAAAGUk/2MUZM_7A_HE/s1600-h/arman-accumulation-timbre-briat.jpg
Bonne soirée 🙂
Pour conclure ce deuxième tour, confirmation qu’une élection dans notre pays ne sert strictement à rien :
mardi 23 mars 2010 16h24 : http://fr.reuters.com/article/topNews/idFRPAE62M0FS20100323
Techniquement, en termes d’institution, les élections étaient régionales donc rien à redire.
Foncièrement, le message était quand même celui d’un rejet d’une politique (que ça plaise ou non). La « réponse » est celle d’un groupe d’autistes Versaillais sûrs de leur fait. Ils oublient un détail important : ils viennent de répéter l’erreur de Jacques Chirac en 2002 qui aurait dû faire un gouvernement d’Union Nationale après avoir récolter 80% des voix. Dans notre cas, on aurait du avoir 1/ resserrement des rangs et 2/ changement de politique économique et sociale. L’erreur est sur le 2/. La population n’est plus en état d’encaisser encore des restrictions. Chirac aurait stoppé les réformes après cette élection pour faire une pause de quelques années afin de digérer celles nombreuses qui ont été faites. Le gouvernement est donc en plein délire comptable. C’est triste.
Ils ne font pas la différence entre le « légitime » et le « légal ». Jusqu’à dimanche soir, le gouvernement légal était « légitime » à faire ses réformes comme bon lui semblait. Cette légitimité reposait sur les élections présidentielles de 2007. Les élections régionales – au delà des bavardages statistiques sur les bonus aux sortants etc – avaient pour enjeu de fond : la LEGITIMITE. Celui qui sortait gagnant était le dépositaire de la Légitimité. Le gouvernement le savait car il avait envoyé de nombreux Ministres au combat. Ils ont tous perdu et le gouvernement est écrasé historiquement. Un gouvernement raisonnable doit toujours s’assurer qu’il y a adéquation entre légitimité et légalité. On le voit quand un gouvernement est renversé, il conserve pourtant sa légitimité (exemple récent : la Thaïlande). Un gouvernement légal qui perd sa légitimité ne peut plus gouverner comme il l’entend même si personne (dans un pays civilisé et pacifié – important ce point car c’est un acquis difficile, on le voit dans de nombreux pays qui manquent de maturité) ne lui conteste la légalité.
Appliquer à notre présent, le gouvernement actuel n’a tout simplement plus la légitimité pour prendre la moindre réforme sans risque de clash majeur avec la population. Ce n’est pas très responsable que d’insister dans une voie qui conduit à la confrontation.
Espérons que les socialistes en ont conscience et qu’ils vont faire bloc pour tempérer tout çà.
Je suis d’accord avec D. Cohn-Bendit, « il » ne sait plus ce qu’il fait.
Les abstentionnistes sont celles et ceux qui ont parfaitement saisie l’essence non-démocratique du régime. Elles et ils ne participent même plus. Je vous parie même que les gens vont commencer à ne plus s’inscrire en masse sur les registres.
Le droit de vote : un droit désuet car inutile ! (l’inutile étant l’inopérant).
@ Eliot : voici donc un parfait exemple de ce que c’est que le « déterminisme » tel que je le conçois. On sait d’avance tout ce qui va arriver. L’indéterminé étant réduit à rien.
Cordialement 🙂
ps : un de mes amis dit que l’Art est le seul moyen de transcender tout çà. En vieillissant, je suis en parfait accord avec lui. L’Art refuge de l’Esprit.
Refuge ? Que nenni !
» Le passé , c’est ce que l’homme n’aurait pas dû être , le présent , c’est ce que l’homme ne devrait pas être, l’avenir , c’est ce que les artistse doivent être . »
@ juan nessy
« refuge » au sens de lieu où on peut survivre et s’investir. Donc nous sommes d’accord
J’aime bien « vôtre » définition Juan. 🙂
» mon » auteur était Oscar Wilde .
http://regionales.blog.lemonde.fr/2010/03/23/le-poids-des-sieges-nest-pas-toujours-celui-des-urnes/#xtor=RSS-32280322
Etonnant, non ?
http://dechiffrages.blog.lemonde.fr/
On comprend mieux le ‘triomphe’ modeste d’Aubry. Prévalence que n’a pas eu Frèche, qui a bien pourtant perdu plus de 85 000 électeurs (15%) en 6 ans.
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2010/03/25/l-abstention-en-banlieue-plus-grave-que-les-emeutes-par-luc-bronner_1324280_3232.html
Pour une fois, un article qui sort des sentiers battus, par Le Monde, sur les banlieues.
« Parce que les hommes politiques pourront être tentés par une lecture cynique et considérer ces territoires comme définitivement « non rentables » électoralement. »
A mon sens, ils ne sont pas ‘tentés’. Ils ont déjà une lecture cynique. Particulièrement à gauche.
C’est pourquoi on ne peut que comprendre le rejet global de la population des banlieues (qui représente quasiment 6% de la population française et est la plus touchée par la crise, dans toutes ses dimensions et ce depuis plus de 30 ans).
Comment peut-on oser parler de lutter contre le chômage, l’insécurité, etc. quant AUCUN parti politique n’ose mettre en avant le minimum syndical dans ses programmes politiques, sans mettre derechef l’arabe ou le noir ‘de service’ (et ce quelque soit la qualité de la personne, bien évidemment) ou au contraire stigmatiser ces quartiers ?
On touche là aux fondations de la République. Aucune refondation politique ne se fera sans cette population, sans les banlieues, sans agir pour résoudre les problèmes des quartiers.
Les milliards déversés n’y ont rien fait ? Quels milliards ? Ceux de l’ANRU, qui n’agit que sur la démolition-reconstruction du bâti ? Combien de divisions la politique de la Ville (y compris l’ANRU) ?
Combien de dizaines milliards PAR AN pour les défiscalisations de ‘x’ revenus financiers ?
Quel proportion de chômeurs, d’exclus dans les banlieues en comparaison du nombre total en France ?
A dire vrai, tout le monde s’en fout. Nous y compris.
Comment dès lors croire qu’une élection, quelqu’elle soit puisse venir modifier quoique ce soit sur ce sujet ? Comment ne pas rire effectivement, si on était habitant de banlieues aux réflexions, sans doute intéressantes mais tellement à mille lieux des préoccupations de ces habitants, d’un Cohn-Bendit sur une coopérative politique ?
Ou sur le remaniement ministériel ‘technique’ ? Ou encore l’abandon de la taxe carbone ?
L’objet d’une politique qui aurait encore un sens, en particulier à gauche, est-il ou non la justice sociale ?
J’ai peur d’avoir la réponse …
PS : lors d’une réunion ‘politique’, lorsque j’ai eu le malheur de demander publiquement comment se faisait-il que dans le programme du parti (pour l’élection cantonale), et alors qu’un nombre conséquent de ‘personnalités’ locales étaient montées en tribune pour ‘présenter’ la problématique des banlieues, nul part un plan Marshall du niveau du plan du même nom n’y figurait, alors même que si le dit parti souhaitait s’attaquer aux racines du chômage, de l’insécurité, etc., c’était bien en banlieue qu’il fallait massivement ‘investir’, un silence pesant de quelques secondes se fit.
Puis la réponse fut ‘collective’ et unanime : mais non, on fait des choses. La preuve, un ministère du même nom fut créé. Puis on passa aux choses suivantes et sérieuses.
Bien évidemment, aucunes des personnes présentes en tribune n’habitait en banlieue. Et à dire vrai, aucune non plus de celles qui étaient présentes dans la salle.
@ Zebu
Cet excellent article de Luc Bronner, qui couvre pour Le Monde les banlieues, met en évidence l’approfondissement de la fracture sociale et en décrit la réalité sous un nouvel angle : après l’exclusion économique, l’exclusion sociale. On savait déjà, bien que l’ignorant largement, qu’il existe une culture spécifique des banlieues, dont en particulier une mode…
Cette analyse résonne fortement pour moi. vu ce que j’ai observé au Brésil. Illustrant un phénomène global qui traverse nos sociétés dans leurs différences (et avec des amplitudes qui le sont également), et qui m’a fait dire – très incompris, je dois le reconnaître – que j’avais observé au Brésil l’avenir de la France ! Je me suis efforcé, depuis, d’identifier toutes les similitudes que je pouvais entre les deux sociétés, pour mieux m’expliquer et me faire comprendre, et j’ai été effaré des résultats probants de la comparaison.
@ zebu
J’ai lu cet article. Il tape juste. Alors je vous cite :
« A dire vrai, tout le monde s’en fout. Nous y compris. »
euh, comment dire, le destin des classes moyennes inclus les segments aisés est de redevenir pauvre. C’est dur à croire mais pourtant c’est le mouvement exact du temps.
L’auteur parle de ghettoïsation, il oublie un élement important du phénomène que François L a pu observer aussi au passage au Brésil :
Le ghetto existe depuis des siècles (plus ou moins). En urbanisme, c’est connu et la politique dominante du XXème siècle est de faire en sorte que les quartiers soient équilibrés afin que les gens vivent ensemble en paix. On peut dire que si vous n’encadrez pas politiquement les gens, ils se regrouperont par affinités économiques (mode de vie, idées etc). Si les politiques (les humains) pour x-y-z raisons renoncent à appliquer cette politique (pardon de la redondance du terme), alors le mouvement « naturel » d’homogénéisation reprend le dessus peu à peu.
Donc premier résultat : le « ghetto », c’est la normalité. Après, il faut voir ce qu’on entend car le terme en lui même a une histoire. Au départ, c’était un quartier de Venise où les juifs devaient vivre. Le quartier était ouvert et fermé (matin/soir) pour permettre aux gens d’aller travailler avec le reste de la population catholique sans pour autant vivre-ensemble. Il s’agit d’une relation utilitaire pour les Vénètes.
Donc l’idée de « ghetto » renvoie a deux choses distinctes mais qui peuvent s’agréger : 1/ un groupe social qui n’est pas dans les croyances de la majorité et qui perçue par elle comme différent ethniquement. Remarque : les haineux à l’égard des juifs confondent religion et biologie. Vous noterez ce point qui est quasiment toujours apparent dans leur discours. Il y a un amalgame.
2/ Il y a un élément économique : on place dans un ghetto des gens qui ont des patrimoines ou fortunes équivalentes.
Et là on a l’ambiguïté car :
il y a des ghettos de riches : des gens différents du reste de la population qui sont endogames et se protègent des autres. Eux choisissent de vivre séparés.
il y a des ghettos de pauvres : des gens différents aussi et l’endogamie chez eux est invoulue au sens où ils n’ont pas le choix des riches.
enfin il y a une complication qui peut venir du fait ethnique. On peut être riche mais pas admis à vivre dans le ghetto des riches. Aux Etats-Unis on voit donc des ghettos de noirs devenus riches, idem pour les classes moyennes.
Donc, c’est simple, si vous laissez faire les gens : ils se regroupent disjonctivement (ou non exclusif) par croyances, par ethnie, par revenu.
Ce qui fait le « mort » dans l’affaire, les classes moyennes. Car les Ghettos ont tous besoin de tampons pour communiquer avec les autres parties de la population pour ne pas dire de la société.
Donc Zebu, quand vous dites que « tout le monde s’en fout », vous dites seulement le degré d’inconscience de la majorité. Car si on croit qu’on va rester à distance de ce grand phénomène de séparation des parties…. on se trompe. Les riches sont contents de leur ghetto et la mondialisation harmonise leurs intérêts et leurs idées à tel point que finalement ils n’ont plus besoin de négocier avec les autres parties de la population. Les pauvres sont bien sûrs mécontents et violents pour une minorité, mais ils n’ont pas de pouvoir réel pour changer les choses. Ils ne possèdent rien. Reste les classes moyennes qui n’ont pas forcément conscience que cette situation est leur destin. Les gens vivent sur 200 ans de combats idéologiques et quotidiens pour obtenir des droits.
Le premier travail que chacun devrait faire consisterait à remonter ses lignées et de regarder ce que faisait ses ancêtres. Bien sur ( « je ris » ) nous savons tous que les gens sont d’extraction magique et divine et que leurs ancêtres étaient formidables. mdr
Personne ne descend des gueux, des vilains, de la roture, des gens du commun…
Victor Hugo a inventé Jean Valjean de toute pièce.
Pour conclure provisoirement, vous comprenez que poser le problème revient à parler d’un sujet où des thématiques pénibles (voire dangereuses si en débat public) vont forcément devoir être traitées. La réponse normale est donc de dire « oui oui » et de détourner le regard. C’est là le danger car le phénomène se construit de lui-même sans intervention des politiques.
A retenir que ouvrir ce débat conduit à connaitre la ségrégation par : revenu/croyance/ethnie (endogamie). Les 3 dimensions vont travailler ensemble le sujet et c’est comme le débat sur l’identité nationale… impossible.
Solution : ne rien dire et faire en douceur pour que ça change. Accès aux emplois publics des pauvres + politique d’urbanisme équilibrée (20% de logement social de qualité par commune) + des représentants dans les partis politiques principaux (projection nécessaire) + stabilisation des revenus. Il y a surement d’autres mesures, je ne peux toutes les énumérées. Elles dépendant étroitement de la volonté politique. L’abstention, c’est simplement que la population pense que l’instance politique a décidé de laisser aller.
@ René :
Ce n’est pas si simple. On ‘force’ aussi un certain type de population à résider dans ces quartiers (je n’emploie pas le terme ‘ghetto’, qui correspond à une réalité que les habitants es quartiers eux-mêmes n’utilisent pas : c’est une projection médiatique et politique, qu’ils rejettent d’ailleurs, pour diverses raisons, notamment la victimisation, l’absence d’homogénéité et le fatalisme).
Concernant Hugo, il me semble qu’il a inventé Jean Valjean symboliquement : celui-ci existait en dizaines de milliers d’exemplaires.
Néanmoins, je vous envie votre optimisme malgré tout, ce que l’auteur n’a pas dans sa conclusion : ‘pour les banlieues, le piège se referme’.
Cordialement.
@ François Leclerc :
Merci d’avoir répondu à ce post et désolé d’avoir essayer de le faire ‘remonter’ dans les fils mais il me semblait tellement ‘important’ …
Je ne connais pas ce journaliste mais à mon sens, il fait un travail digne d’Albert Londres. Et comme vous dites, cet article résonne en moi ainsi que votre comparaison d’avec le Brésil. Il y a un peu plus de 12 ans (arf), j’ai fais un mémoire sur une comparaison des transformations sociales au travers de la participation dans des associations dans deux quartiers, un en France et l’autre à Mexico DF. En conclusion et pour faire vite, j’avais trouvé :
1/ il est nécessaire de comparer ce qui à priori semblait incomparable ou difficilement comparable. L’idée dans ce type de comparaison n’est pas d’identifier les points communs (parfois) et les différences (réelles) mais bien les ‘trajectoires’ que vivent les deux ‘univers’. Je serais tenté de dire ‘mutatis mutandis’. Ce type opératoire, à l’époque, n’était guère non plus compris. Heureusement, j’avais une directrice de recherche ‘tout terrain’ (experte intervention catastrophe nucléaire) et un organisme de stage (le CCFD à Paris) très compréhensif.
2/ les dites trajectoires semblaient ‘inverses’, à savoir qu’au Mexique, la ‘colonia’ (terme qui doit vous parler) allait vers moins de ‘participationnisme’ aux transformations sociales, celles-ci étant majoritairement achevées concernant les besoins fondamentaux (pyramide de Maslow) et s’orientait vers un système s’appuyant sur une professionnalisation des intermédiaires et un recours croissant aux partis politiques. A l’inverse, dans le quartier en France, l’association de quartier souhaitait reprendre langue avec une participation qui devenait inexistante mais qui était à l’origine de sa fondation (quartier ‘urbanisé’ fin années 60 : goudronnage, éclairage, tout à l’égout, etc.).
Ainsi, ces trajectoires, en 1998, se croisaient, en des sens différents. 12 ans plus tard, il me semble (bien que n’étant revenu qu’une fois dans la colonia, 2 ans plus tard) que ces deux trajectoires en sont au même point. Au Mexique, la professionnalisation des intermédiaires n’a pu se mettre en oeuvre au sein des populations par manque de moyens et absence de volonté politique (le PAN a bien oeuvré en ce sens, malgré l’appui de Cuauhtémoc Cardenas puis d’Obrador Lopez, Maires de Mexico DF) ou par instrumentalisation politique des mouvements sociaux dans la quête du pouvoir (notamment l’attitude ambivalente du PRD vis-à-vis des mouvements, plus à gauche). Et le retour à une hypothétique participation des habitants en France n’a pas pu émerger, à cause de la volonté politique de restreindre l’émergence de leaders politiques dans ces quartiers.
Au final, dans ces deux ‘univers’, mutatis mutandis donc, les trajectoires ont échoué … et les transformations sociales avec elles.
Je dirais même qu’elles ont empirées, puisqu’ayant et continuant de travailler sur ces quartiers ‘à distance’, nos relais ont pu observé qu’au contraire les dynamiques sociales non seulement sont cassées mais que d’autres dynamiques, notamment ségrégatives quant à une immigration très récente et peu socialisée, renforcent à grande vitesse cet ‘effondrement sur soi’ (la ‘quant à soi’).
Dans les colonias, ceux là même qui se sont battus (certains y ont laissé la vie) pour légaliser leur prise de possession territoriale en sont venus à se battre … contre les nouveaux immigrés illégaux (‘paracaïdos’), niant leur propre histoire.
On arrive donc, in fine, au même résultat : la ‘cloture’ de l’espace (qui était auparavant très ouvert) de ces quartiers et de leurs habitants. Pire, cette ‘cloture’ se retourne contre elle-même, provoquant un ‘effondrement gravitationnel’ : tout ce qui ‘touche’ aux quartiers est aspiré par cet effondrement (école, institutions, etc.).
Jean-Louis Borloo, qui ne dit pas que des conneries, avait déclaré que les banlieues étaient le cancer de la République, ce qui est vrai, pas dans le sens évidemment où les banlieues n’étaient pas en soit la peste ou le choléra qu’il fallait combattre mais bien plutôt le symptôme d’une République française malade, atteinte de cancer dont les métastases pouvaient s’observer dans ces banlieues.
Le seul problème pour Borloo, c’est que ce qu’il analyse bien en le disant, il le fait mal en agissant car sa politique de la ville n’a fait qu’effleurer la surface des choses (urbanisme). A sa décharge, être ministre d’un gouvernement de droite qui a si peu d’intérêt et trop de mépris envers ces banlieues n’a ps dû lui faciliter les choses. D’autres, à gauche, n’ont pas eu ces difficultés mais n’ont pas non plus ses appuis, encore moins financiers.
A mon sens, la maladie s’appelle ‘absence patent ou déficience grave de système immunitaire contre l’injustice sociale’.
Je crois aussi que les banlieues sont les préfigurations de ce quoi on souhaite nous faire tendre et que le système capitaliste est arrivé à créer, comme des monstreuses expériences in vivo des transformations sociales qu’il a souhaité et qu’il a créé.
C’est pourquoi j’affirme très clairement que tous ceux qui souhaitent lutter contre cette exploitation financière en cours dans maintenant tous les pays du monde doivent d’abord commencer par dire ce qu’ils souhaitent faire pour les ‘banlieues’, qu’elles s’appellent ainsi ou ‘colonia’. Si on veut VRAIMENT lutter pour la justice sociale, alors c’est dans ces quartiers qu’il faut agir et vite car il y a encore une réserve phénoménale de gens motivés et dignes qui se battent tous les jours pour ne pas sombrer et qui attendent, encore (ce qui est très impressionnant vu de l’extérieur), que l’on veuille bien enfin non pas leur déverser des tombereaux de fric mais bien l’écoute et les outils politiques pour agir. Très sincèrement, il y a là une ‘réserve’ d’énergie fantastique, pour peu que l’on veuille bien la ‘libérer’ (comme dans les trous noirs, où une énergie trop dense provoque un effondrement gravitationnel).
Mais qui se penchera pour écouter et murmurer aux oreilles des quartiers ?
A défaut et hors du silence des urnes, il n’y aura plus que Le Pen à le faire …
Cordialement.
PS : je ne sais pas si j’ai été clair dans ma présentation. Je voulais juste dire que tel un médecin, on peut lutter contre les effets de la maladie (les ‘métastases’) que sont les banlieues mais on ne pourra pas les en guérir tant que l’origine de la maladie n’aura pas été vaincue, à savoir la financiarisation qui PRODUIT les banlieues, comme résultat. Et tant qu’on n’aura pas compris cela, on continuera à lutter avec un extincteur contre une incendie de forêt menaçant une maison : dérisoire et épuisant pour les acteurs sur place. Il est nécessaire de faire, enfin, intervenir l’appui feu idoine : les ‘canadairs’ de la régulation financière.
La gauche ne l’a pas compris ou s’est toujours voilé la face. La droite, elle, ne l’a que trop bien compris et résiste farouchement à ce que le fil soit tiré logiquement : si l’on veut que les banlieues puissent régler leurs problèmes (et non que les problèmes des banlieues soient réglés), alors il faut intervenir sur la justice sociale, ce qui implique d’intervenir sur les tensions engendrées par les exploitations exercées, ce qui fait advenir à remettre en cause le système actuel. En lieu et place, un bon foulard ou une solide burqua (ou à défaut une méchant capuche) feront l’affaire.
Luc Bronner, à qui a été décerné en 2007 le prix Albert Londres pour ses papiers sur les banlieues dans Le Monde, a depuis publié chez Calman Lévy « La loi du ghetto ».
@ F. Leclerc :
Excellent !!
Je vous le jure : c’est dans la totale méconnaissance de son travail (je n’ai pas, pour une fois, regardé google mon ami), que j’ai dis qu’il faisait un travail digne d’Albert Londres !!
Et donc le prix … Cela ne m’étonnes pas.
Je vais noter cette référence. Merci.
Je n’ai pas osé vous demander tout à l’heure quelques résultats de vos comparaisons d’avec le Brésil et la France. Serait-ce envisageable ? Merci par avance.
Au Brésil, les rapports entre les deux sociétés de ceux d’en bas et de ceux d’en haut – toutes les deux dans leurs murs – sont complexes car elles sont à la fois distinctes et imbriquées. Formalité et informalité vont de pair.
Le plus frappant, ce ne sont pas les murs réels qui les séparent, qu’une ségrégation géographique exprime, mais les murs virtuels. Le monde d’en haut occulte la réalité de celui d’en bas, qui perturbe la vision de son avenir. Dans l’ignorance, il ne sait pas le décrire car il ne sait pas comment il fonctionne.
Certains – ils sont peu – font référence à la présence dans l’imaginaire collectif des Brésiliens de l’esclavage pour expliquer cette véritable ségrégation, le Brésil ayant été le dernier pays a l’avoir aboli.
@ Zébu et François Leclerc,
Dans le prolongement de vos échanges.
L’autre jour sur la toile, je suis tombé sur cette interview. Je ne connaissais pas ce Mike Davis, et j’ai aimé ce petit aperçu :
http://www.vacarme.org/article1716.html
Amicalement,
frédéric
@ F. Leclerc :
« Le monde d’en haut occulte la réalité de celui d’en bas, qui perturbe la vision de son avenir. Dans l’ignorance, il ne sait pas le décrire car il ne sait pas comment il fonctionne. ». Mêmes processus en France il me semble (+1 pour votre anthologie des comparaisons France/Brésil). Et même l’inverse, à force : le monde des quartiers ignore de + en + l’autre monde il me semble (auto-centration), les deux processus s’auto-renforçant.
« Certains – ils sont peu – font référence à la présence dans l’imaginaire collectif des Brésiliens de l’esclavage pour expliquer cette véritable ségrégation, le Brésil ayant été le dernier pays a l’avoir aboli. ». En France aussi (+1 pour anthologie). C’est un point de vue que pourrait certainement partager avec vous les auteurs d’un livre que vous connaissez sûrement : ‘La fracture coloniale’, sous la direction de Pascal Blanchard, Nicolas Bancel et Sandrine Lemaire (La Découverte, 2005).
Avec un sous titre évocateur : ‘La société française au prisme de l’héritage colonial’.
Autant la société brésilienne est issue de l’esclavagisme, autant une partie de l’héritage moderne de la France est issue du colonianisme, ce qui n’est pas équivalent par rapport au Brésil mais explique bien des choses. Dans les deux cas, il me semble que nous ne sommes pas encore dans des sociétés post-colonisatrice/colonisées, ce qui implique que des processus de ségrégations internes profondes sont encore en oeuvre (de + en + ?), qui se ‘matérialisent’ dans ces banlieues.
L’imaginaire républicain par exemple n’est pas dégagé de ses scories colonisatrices en France (preuve en est le vote d’un texte que Chirac finira par faire enlever sur l’aspect ‘positif’ de la colonisation). Le ‘parti colonialiste’ (expression en vigueur sous la IIIème République) n’est à priori pas mort. Selon ces auteurs, le colonianisme a fini par coloniser (vampiriser) l’imaginaire français et républicain, les anti-colonianistes ayant toujours été minoritaires, sauf à des moments spécifiques et ‘hors normes’ (crises, guerres, révolutions) : De Gaulle pour l’Algérie l’était, Jaurès pour le Maroc (qui se fit injurier, comme ‘traître’).
Cette histoire passe d’autant plus mal que c’est bien la 3ème République française qui a systématisé le colonianisme et l’a intégré dans son fonctionnement, et non l’ancien régime ou les deux empires napoléoniens. Tant qu’on n’aura pas résolu cela, on n’avancera pas.
Seul De Gaulle et Mendès France dans la 4ème puis 5ème République, apparemment, l’avaient compris.
Cordialement.
Mike Davis a écrit de nombreux livres, dont certains traduits en Français. Le titre de l’un d’entre eux, paru aux éditions La Découverte, est évocateur de l’ensemble de sa réflexion : « Le Pire des mondes possibles : de l’explosion urbaine au bidonville global. »
@ zébu
disons que j’attends que Sarkozy parte. Je regarde notre modèle, l’Amérique. Tous les excès y ont cours. Pourtant, un Obama y est possible. Ce n’est pas encore le cas en France. Je suis en attente que les efforts d’Obama pour redresser leur situation (droits sociaux, contrôles boursiers etc) fassent « modèle ». Nous devons patienter encore 2-3 ans. Sarkozy est une sorte de Bush. Il a déjà lassé tout le monde. Il n’aura autour de lui, dans quelques mois, qu’une garde de fidèles réduite. Je vois ce que les journalistes disent. Il n’y a pas de relance pour lui. C’est terminer. Son enjeu est de finir son mandat sans clash. Il n’en a pas encore conscience mais ça va venir.
@ René :
Puisse-t-on vous entendre en ‘haut lieu’ !! (lol)
Cordialement.
« Il faut qu’il parte » (regardez la date. Prémonitoire.)
http://www.bakchich.info/article3983.html
@ F. Leclerc :
Une interview de Loïc Bronner par Bourdin à BFM au lendemain de l’élection (commentant entre autres les résultats de l’abstention mais du premier tour) :
http://www.dailymotion.com/video/xclkcr_la-loi-du-ghetto-d%C3%A9cryptage_news
Et puisqu’on s’échange des liens, un auteur que j’avais bien aimé puisque j’avais lu d’une traite son opus ‘Les prisons de la misère’, Loïc Wacquant, qui a écris un livre sur le sujet, comparatif entre US et France, ‘Parias urbains. Ghetto, banlieues, Etat. Une sociologie comparée de la marginalité sociale’ (2006).
Une critique du livre :
http://www.liens-socio.org/article.php3?id_article=1331
Son approche sur le ‘précariat’, très présent dans les quartiers, est très intéressante.
J’avoue pencher plutôt vers la thèse de Wacquant, sur l’absence de ‘pertinence’ (au sens d’utilisation généralisée) du mot ‘ghetto’ pour les banlieues françaises. Ceci dit, apparemment, ses connaissances sont datées (fin années 90, début 2000 pour les banlieues françaises), ce qui tendraient néanmoins à rendre la position de Bronner plausible quant à l’utilisation du terme ‘ghetto’ (2007, ‘en situation’). Il est vrai que les processus que j’ai décris et que me retransmettait une sociologue sur le renouvellement sociologique des banlieues dans un sens plus auto-centré encore (nouveaux arrivants, dont parle je crois Loïc Bronner) en 2006 a dû s’effectuer en 4 ans. La sociologue en question me décrivait d’ailleurs son ‘effroi’ devant la rapidité de la transformation en cours, elle qui intervenait pour nous sur … 3 ans !! C’est dire si les choses ont dû évoluer en 4.
Par ailleurs, un élément important de distinction entre France et Brésil : la présence de budgets participatifs de quartiers (créés par le PT à Porto Alègre). Cela n’existe quasiment pas en France, car cela remet en question une certaine représentation de la démocratie représentative : on y revient donc sans arrêt.
Je dirais que le Brésil est plutôt en avance sur la France en l’espèce …
Méfiez-vous, l’organisation et le fonctionnement de la société d’en bas est une chose, la démocratie participative une autre, phénomène parfaitement marginal dans la société brésilienne (sauf à Porto Alegre).
Cela signifie ni l’absence de pouvoir local – indépendant de celui de l’Etat, très inexistant sauf quand il se manifeste par une très brutale présence policière – ni celle de solidarités.
Absolument. Mon expérience de vécu au Mexique confirme ce que vous dites. L’intégration d’une démocratie participative, à fortiori minime, ne peut pas (ne doit pas ?) remplacer les systèmes politiques de représentation aux niveaux supérieurs et de solidarité (national : programme pour la tortilla, etc. ou local et communautaire : création de tortillerias collectives, parc écologique, etc.) car sans celles-ci, la première ne pourrait exister. On peut le regretter mais c’est ainsi. Ainsi, sans l’appui du PRD à la mairie de Mexico DF, les mouvements sociaux n’auraient pas eu gain de cause ou en tout cas, pas aussi rapidement. Ils en étaient d’ailleurs très conscients, tout comme ils étaient conscients de leur instrumentalisation pour la conquête du pouvoir national, mais en même temps partisans et instrument (de pointe) de cette conquête.
A priori, d’après ce que je connais sur Porto Alègre, c’est ‘grâce’ au PT, advenu lors d’élections au pouvoir, que ces budgets participatifs se sont mis en place. Et non l’inverse.
Je voulais dire que le Brésil est en avance sur la France SUR CE POINT uniquement (budgets participatifs). Pour le reste, je ne sais pas. Et la question à mon sens n’est de jauger à l’aune d’une échelle inexistante de ‘valeur’ …
Cordialement.