BFM Radio, lundi 15 mars 2010 à 10h46 – La fraude ordinaire

Ce texte est un « article presslib’ » (*)

Le gros rapport publié la semaine dernière sur la fin de Lehman Brothers a créé la surprise. Les choses qu’on y découvre ont un parfum de déjà vu. Et ce qu’on a déjà vu a un nom dont la plupart se souviennent, c’est Enron, la compagnie « modèle », septième entreprise aux Etats-Unis en son temps, spécialisée dans le négoce de l’énergie qui, en 2001, s’effondra en quelques semaines.

Quand Enron est tombée, les écrans de fumée se sont dissipés et on a découvert qu’au-delà des jeux de miroirs, il n’y avait pas grand-chose. Le rapport de 2 000 pages, mandaté par ceux qui ont perdu des plumes dans la faillite de Lehman Brothers, révèle que, pour ce qui touche aux tripatouillages de sa comptabilité, la quatrième firme de Wall Street n’avait rien à envier à Enron. Quand la fin du trimestre financier approchait, on déguisait un « repo », une mise en pension de titres, en une vente, et on améliorait de cette façon le bilan de 50 milliards de dollars environ. Une fois les chiffres publiés, on rapatriait la dette et on rendait les sous. Ça arrangeait tout le monde : les investisseurs étaient contents, la notation de crédit était dopée, et quand cela a commencé à sentir le roussi, la direction de Lehman a pu dire sur un ton d’autorité, que la firme avait pris des mesures draconiennes pour réduire son endettement. Elle ne l’avait pas fait, et n’avait aucune intention de le faire. Entre le début de ses ennuis et sa faillite, Lehman est même arrivé à multiplier son exposition au risque, par trois.

Et ces manipulations étaient légales. Enfin presque. Lorsque de nouvelles règles de comptabilité furent mises en place aux Etats-Unis en 2000, une équipe chez Lehman s’est mise au travail pour trouver comment les contourner – ce n’est pas exactement ce qu’on appelle : « respecter l’esprit de la Loi ». Comme la combine trouvée était trop grosse pour l’Amérique, on s’adressa à un cabinet d’avocats à Londres, prêt à jurer qu’une fausse mise en pension était parfaitement légale en Angleterre, on trouva aussi – comme dans le cas d’Arthur Andersen avec Enron – une grande firme d’audit prête à détourner la tête le temps qu’il faudrait à la fin de chaque trimestre.

Certains commentateurs s’empressent de dire que l’opération « Repo 105 », parce que c’étaient les 105 % de collatéral qui permettaient de faire passer la mise en pension pour une vente, était une invention originale de Lehman Brothers. Mais qui mettrait la main au feu que rien de tel n’existait dans les comptes de Bear Stearns, qui avait précédé Lehman dans sa chute de très peu ? Et je ne parle encore là que des morts ! Combien d’autres Enron parmi ceux qui sont toujours en vie ?

Pourquoi le font-ils ? Vous savez très bien ce qu’ils diraient : « Parce que les autres le font, et que ce serait un tel handicap pour moi si je ne le faisais pas : je ne m’en sortirais jamais ! » Ce genre d’arguments, on l’a beaucoup entendu ces deux dernières années : « Si on l’interdit ici : d’autres le feront ailleurs », sous-entendu : « D’autres… et moi y compris ! ». N’empêche, même si c’est vrai, on aimerait bien entendre de temps à autres, la phrase qui présente ce genre d’arguments, précédée par : « Je sais que c’est malhonnête mais… » Mais ce « Je sais que c’est malhonnête… », on ne l’entend en réalité jamais. Et c’est pourquoi le meilleur terme pour ce qui vient d’être découvert à propos de Lehman Brothers, c’est : la « fraude ordinaire ».

(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.

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159 réponses à “BFM Radio, lundi 15 mars 2010 à 10h46 – La fraude ordinaire”

  1. Avatar de Mathieu
    Mathieu

    Notre société est tombé bien bas: j’ai l’impression que la doxa actuelle est: ce qui est légal est OK. Dans les conversations qu’on peut avoir avec des amis autour d’un verre, quand on dénonce un comportement sur base morale, on entend répondre « Mais c’est légal. Ou est le problème? ». L’interlocuteur ne perçoit bien souvent même pas que l’argument est moral, donc sur un autre plan. Et quand il s’en rend compte intuitivement, la réaction est bien souvent de rejet: ce n’est pas un plan sur lequel il est accepté de discourir/argumenter.

    Comment notre société a-t-elle pu rejeter l’idée morale à ce point? Je vais peut-être aller relire de Tocqueville…

    1. Avatar de Marc
      Marc

      Que nous soyons bien bas, c’est incontestable. Mais tombés? Quand avons nous été plus haut? Les années 50? L’entre deux guerres? Ce qui nous apparait actuellement comme une absence de morale n’était que parfaitement légitime il y a cinquante ans et plus. Je serai plus positif: la circulation de l’information et l’élévation du niveau d’éducation moyen (il y a maintenant plus de gens n’appartenant pas à la classe manipulante qui sont en mesure de comprendre ce qui se passe) mettent en évidence cette « faiblesse » morale.

    2. Avatar de Mathieu
      Mathieu

      Mmmmmh…J’ai parfois l’impression que le monde n’était pas plus moral avant qu’aujourd’hui, mais qu’au moins une plus grande proportion de personnes en avait conscience. On peut être fataliste parce que conscient du rapport de force mais néanmoins lucide sur la situation. Cela me semble en tous cas plus encourageant que la situation actuelle où une grande partie de la population en parvient pas à clairement exprimer: ceci ou cela est immoral.

  2. Avatar de jeannot14
    jeannot14

    Mr Jorion, permettez-moi d’ajouter un mot à votre: « la fraude ordinaire »

    Rajout: la fraude C’EST l’ordinaire!!!!!!!!!!!du:

    Citoyen citoyennant lambda jusqu’aux Zélites élus démocratiquement à la majorité non qualifièe.

    Tant que le Si ce n’est pas moi çe serait un autre, dérivé du, si ce n’est pas toi c’est donc ton frère, la référence fratrie ayant disparue, du clan restreint l’ouvertutre au monde puis retour sur le sectaire des marchés financiers, la boucle est bouclée.

    Bon courage à tous, citoyenne salutations.

    1. Avatar de Parpalhol
      Parpalhol

      C’est très juste.
      La fraude ordinaire est même légitimée par un Berlusconi en Italie !

  3. Avatar de Grosjean
    Grosjean

    Le droit !

    la justice, des moyens, et la fin de la dépénalisation du droit des affaires !

    Voilà une bonne raison de voter

  4. Avatar de charles
    charles

    Cher Paul Jorion,

    ALors que l’on apprend ce matin la confirmation par la presse néerlandaise de la participation dans la combine d la banque néerlandaise ABN-AMRO dans la fraude de Lehman, avec Barclays, Mizuho, UBS, Mitsubishi, Deutsche Bank, et KBC, je pense que sur ce commentaire, il n’y a pas lieu de prendre des ‘précautions oratoires’ et de bien souligner que la firme d’ audit impliquée est Ernst et Young

  5. Avatar de yvan
    yvan

    « fraude ordinaire »… Juste constat et au combien écoeurant.

    Une chose me gène, néanmoins. Et j’espère que vous me rectifierez si je sors une bêtise.
    J’ai en effet lu, sur un blog d’économiste, et je ne veux, par là, pas entrer dans les fumeuses théories du complot, que Lehman avait été poussée à la chute à grands coups de spéculation à la baisse sur 15 jours…
    Les crabes se mangeant entre eux, ce n’est pas sentimental, c’est pour affaire.
    Et, rappelez-vous, le système a failli s’arrêter complètement car tout le monde savait que personne n’était à l’abri d’une attaque… autant que de chuter par la faute de la faillite d’un « partenaire »…

    Le fameux « rapport » ne serait-il pas une vaste propagande destinée à détourner l’attention sur les causes réelles de cette magnifique faillite…???

    1. Avatar de Didier
      Didier

      Yvan,

      J’ai lu l’histoire de la spéculation à la baisse sur Lehman bien avant aujourd’hui. Je confirme ce bruit. Pour la manipulation de l’opinion, je réserve mon opinion personnelle.

  6. Avatar de ybabel
    ybabel

    Oui on connait la réponse toute faite : « ce n’est qu’une pomme pourrie » … le reste du panier va bien, dormez tranquille braves gens, on s’occupe de tout.

    Mais c’est le système de libre concurrence qui veut ca !
    Pour faire de l’argent, c’est facile : tricher avec les lois, s’évader fiscalement, obtenir du cash de la FED et prendre un gros pourboire, et maquiller tout ça pour que l’ignorant n’y voit que du feu.
    Ensuite, histoire de boucler la boucle, avec l’argent gagné : financer les politiques, les lois, et les surveillants pour avoir les bon tuyaux et s’assurer de ne pas être inquiété.

    Et ils estiment avoir les esprits les plus brillants de la planète a leur service ! quelle blague …

    1. Avatar de claude roche

      @ mais pourquoi Diable voyez vous des complots partout ?
      Et si ce rapport n’était que le produit normal d’un comportement normal des institutions américaines ?
      Notez bien d’ailleurs que rien de tout cela n’est encore public, et le doute doit toujours bénéficier à l’accusé, même s’il est financier
      amicalement

  7. Avatar de De la merKantique
    De la merKantique

    le débat se situe entre le LEGAL et IMMORAL :

    ce que font des sociétés comme enron ( ou carrefour ) ,à savoir une intégration verticale de la finance est tout à fait légal :

    on peut empiler assurance qui couvrent les suivantes: banque commerciale où les salariés mettent leur salaires ,banque d’entreprise où les filiales empruntent ,consulting où états et entreprises concurrentes montent leur projet financier sans personne n’y retrouve à redire même en cas de faillite !

    mais enron etait un petit joueur en étant intégré quand ça krach ça krah ! ,les systemes distribués tel kpmg/morgan chase,goldman sachs/deloitte et leurs agences de notation affiliées fonctionnent plus comme des famiglia de mafia et réagissent mieux aux tentatives d’immunisation citoyenne .

    il est absolument IMMORAL que des agences de notation ,des cabinets d’audit et des banques fonctionnent en vase clos et controlent le monde mais c’est pourtant encore LEGAL

    1. Avatar de Marc
      Marc

      Non. Les combines d’ENRON étaient (en plus) illégales. D’où le procès. Si la tricherie de Lehman est avérée (et il semble bien qu’elle le soit), elle est illégale. Il ne faut pas confondre respecter la loi et ne pas se faire prendre.

  8. Avatar de Maître Dong
    Maître Dong

    La chute d’ENRON m’avait impressionné, à une époque où ma petite boite travaillait pour un grand groupe auquel il fallait « reporter » chaque trimestre (quarter) : Q1, Q2, Q3 et Q4. Je pressentais que cette fraude gangrenait probablement des pans entiers de l’économie, comme le dopage dans le monde sportif : même les golfeurs prennent des beta-bloquant pour rester zen !

  9. Avatar de Etienne
    Etienne

    Doit-on encore s’étonner de cette réalité alors que nous savons depuis longtemps que « Tout ce qui n’est jamais sanctionné est véritablement permis. Il est donc archaïque de parler de scandale. » Guy Debord, Commentaires sur la société du Spectacle. 1988 !

    1. Avatar de yvan
      yvan

      Je ne sais pas si c’est le terme archaïque, mais…

      Ne serait-ce pas le début de l’anarchie, à ce moment-là…???
      Plus de Justice ni de lois pour le financier…

      En fait, on arrive à un ordo-libéralisme parfait : les seigneurs règnent tels des dictateurs.

    2. Avatar de juan nessy
      juan nessy

      Une illustration de cette réalité : en matière de prévention routière , le nombre de morts et de blessés sur les routes de France n’a commencé à baisser que lorsque les sanctions sont devenues effectives et significatives.

      La règle du pas vu-pas pris n’a commencé à perdre des adeptes qu’avec l’arrivée des radars automatiques qui voient , qui verbalisent et qui envoient le courrier .

      Il faut donc une sanction ( la force dirait Montesquieu ) avec la loi .

      D’où l’immense responsabilité de celui qui édicte et pèse la loi .

      Et l’importance de la démocratie pour ce faire .

    3. Avatar de claude roche

      @ yvan
      Etes vous sûr de ce que vous avancez ? Historiquement parlant en tout cas, le libéralisme a toujours été du côté de la loi. C’est bien ce que lui reprochaient les 68 ards . Il lui opposaient l’anarchie
      On aurait alors un retournement des choses assez bizarre , vous ne trouvez pas ?.

    4. Avatar de Amsterdamois
      Amsterdamois

      @ Claude Roche
      Le libéralisme, historiquement, oui.
      Mais le néo-libéralisme, non. Dérégulation et retrait de l’Etat, auto-régulation et contrôleurs contrôlés par les contrôlés, depuis Reagan et Thatcher, les gangsters en col blanc ont pu mener leurs affaires comme bon leur semblait. On voit le résultat.

    5. Avatar de yvan
      yvan

      Non non, Monsieur Roche.
      Nous ne parlons pas de Justice s’appliquant aux mêmes sortes de délinquants.

      Ainsi, on peut très bien renforcer les sanctions pour un voleur de pomme, et dans le même temps, permettre à un financier de présenter un bilan de société complètement faux.

      Et j’insiste pour bien dire que ce n’est pas un comptable qui fait preuve de créativité car son job consiste à suivre le mode d’emploi.
      C’est par contre le financier qui decidera qu’un actif devenu subitement pourri aura une certaine valeur n’ayant pas de valeur certaine.

    6. Avatar de yvan
      yvan

      Et, dans mes nombreux souvenirs professionnels, me revient à l’esprit ce patron qui a essayé pendant 2 jours de me convaincre de faire en sorte que l’ordinateur sorte les chiffres qu’IL voulait…
      Extraordinaire commercial, par ailleurs, qui a fini de m’achever au bout des deux jours en me disant dans les yeux : « Mais je voulais voir si ça marchait… »
      Il m’a tuer sur place, le gars.

    7. Avatar de claude roche

      @ amsterdamois et les autres
      Attention aux poncifs ! Cela évitera de faire comme le blogueur qui s’écriait « qui donc aurait prévu que l’europe cherche à interdire la spéculation sur les CDS! Je suis d’accord avec votre distinction entre libéralisme et néolibéralisme , d’accord pour en noter la tendance anarchisante du néloibéralisme. Mais c’est d’abord ‘anarchisme qu’il faut condamner.
      Car dire que le déni de la LOI a commencé avec Reagan et Teatcher cela peut faire plaisir ici, mais c’ est une plaisanterie . ( j’ai été longtemps été examinateur à Science Po, et croyez moi vous n’auriez pas tenu longtemps sur un tel terrain). L’anarchisme historiquement a toujours été porté par la gauche des syndicats ouvriers. Et croyez moi il y en avait plus « d’un sur cent » comme disait L Ferre . Dans la période moderne c’est l’univers 68, et l’univers hippie qui lui ont redonné des ailes : le néolibéralisme est d’abord un produit de cette tendance lourde

      Maintenant, je crois que le mieux est de faire l’expérienxce vous même : pernez des gens au hasard et parlez leur de la nécessité de rétablir la force de la LOI .. vous verrez bien qui vous comprend et qui ne vous comprend pas. Pour Yvan : vous entendrez d’ailleurs souvent parler de cette histoire de voleurs de pomme.. et vous verrez bien qui l’emploie
      amicalement

    8. Avatar de Parpalhol
      Parpalhol

      @ Etienne, la lecture de debord est un instrument très intéressant pour comprendre notre société aujourd’hui.
      @Yvan, anarchisme n’est pas le désordre, mais bien au contraire une société avec des règles, ne reproduisez pas comme beaucoup cette fausse idée sur l’anarchisme de chaos. 🙂

    9. Avatar de Parpalhol
      Parpalhol

      @Claude Roche, Anarchisme ne veut pas dire chaos et les libertaires ne refusent pas les lois. La doctrine de Bakounine et de Proudhon entre autres n’est pas fondée sur l’inexistance de règles de vie ensemble, bien au contraire. 🙂

  10. Avatar de Piotr
    Piotr

    Justice immanente pour le frères Lehman:REPO ETERNEL.

    1. Avatar de yvan
      yvan

      Exxxxxxxxxceeeellent Piotr.

      :-))

  11. Avatar de liervol
    liervol

    Et dire qu’il y a parmi ces braves gens les mêmes qui critiquent la Grèce !!!
    Vous parliez de mondes parallèles Monsieur Jorion, nous sommes bien dans des mondes parallèles les mêmes attitudes dans un monde c’est légal dans l’autre pas et pour le citoyen ordinaire comme vous et moi il reste le système D.

  12. Avatar de liervol
    liervol

    Au juste s’il y a quelqu’un parmi vous qui peut m’expliquer à quoi sert le Repo en général, qui est la même fonction que le vieux Réméré de notre droit ?
    Et si ces pratiques sont légales ne pas les déclarer comme dans le cas de Lehman et autres, je ne crois pas que cela soit légal.

    Loin s’en faut.

    C’est un peu comme Altran à la grande époque avec ses acquisitions en earn out, dont les profits faisaient monter l’action mais dont la dette se cachait en hors bilan…

    Et quid des pratiques de Parmalat, et pourtant on va encore taper sur le chômeur, celui qui touche le RSA mais pas sur ces gens là, Monsieur,
    Pour plagier Brel,
    Il faut dire Monsieur que chez ces gens là, on ne triche pas Monsieur, on fait de la finance…

    1. Avatar de Fredéric
      Fredéric

      @liervol

      Comme je ne vois pas de réponse à votre demande d’explications concernant les repos, je vais tenter de m’y lancer.

      Tout d’abord, il s’agit d’un diminutif d’origine anglo-saxone (américain pour être précis) mais qui est couramment employé dans le monde entier qui signifie « repurchase agreement ». En français, on parle de pension livrée (voir plus loin pourquoi livrée). Il s’agit d’un exemple typique d’instrument du marché de gré à gré (OTC pour Over The Counter comme disent les anglo saxons).

      En quoi cela consiste? C’est tout simple. Comme pour de nombreux instruments financiers, vous avez deux parties qui s’engagent à respecter un contrat non révocable (au sens juridique) de vente temporaire de valeurs, titres (en finance on parle d’effets) généralement à finalité de financement de celui qui met en pension ses effets. Cela lui permet de se financer sans perdre à terme la propriété de ses effets. Bien entendu, tout cela n’est pas gratuit: le prêteur d’effets devra reverser des intérêts au prêteur de numéraire (en finance on dit à la contrepartie) à une date prévue dans le contrat (le terme) et en principe non renégociable. Les effets en question servant de garantie (en finance on dit collateral).

      Dans la pratique, il y a deux transactions:
      1°) La cession des titres avec transfert de compte suivie du versement du numéraire,
      2°) Le remboursement du collatéral intérêt compris à la date convenue suivie de la restitution des titres.

      On constate donc que les titres changent de comptes lors de la cession et la rétrocession. C’est pour cela que l’on parle de pensions livrées car il existe également des pensions non livrées.

      Donc comme l’indique M. rien de mal là dedans.

      Où est donc le problème? Eh bien, dit comme cela il n’y en a pas. Il faut bien entendu avoir un regard critique pour voir l’usage que l’on peut faire de ces instruments financiers:

      1°) Avant la crise financière dite des subprimes, l’évaluation du risque sur ce type d’opérations était principalement centrée sur le risque de contrepartie (les rôles changent par rapport à ce que j’ai exposé olus haut. Ici on prend alors le point de vue du prêteur de numéraire). Donc si la contrepartie s’appelait Lehman Brothers, Bear Stearns, City Group, Goldman Sachs ou autre grand nom de la finance autant dire que le risque était évalué à quasi nul. Bref, le rôle de la valeur des effets était non pas occulté mais énormément minoré car de toute façon une telle banque ne pouvait manquer d’honorer son contrat. Dans l’affaire Lehman, je ne sais pas d’où venait le problème. L’enquête le dira peut être et encore cela n’est pas sûre. Mais je ne serais pas surpris que la valeur du collateral était le problème. Mais il faut être deux dans la combine pour faire ce genre de magouille car après Juillet Août 2007, toutes les banques se méfiait de toutes les banques et craignait ce type de problème en toute bonne foi. Elles avaient donc toutes passé des consignes très fermes pour que les collaterals soient passées à la loupe et pour que les contrats soient signés au plus haut niveau. Non, vraiment si le problème vient de là il y a forcément une contrepartie qui moyennant une forte rémunération (probablement pour se refaire après de lourdes pertes) à accepter de fermer les yeux.

      2°) Le Diable est dans les détails. Quand on creuse la question, on se rend compte vite que tout tourne finalement sur la nature des effets que l’on accepte comme collateral. Et là, de grandes divergences apparaissent entre l’Europe continentale et le monde anglo-saxon (principalement États-Unis et Royaume Uni). En France, je parle sous le couvert de M° Gauvin Alain, les pensions (livrées ou non) sont régies par l’article L.432-12 du Code monétaire et financier qui donne un cadre juridique assez précis. Le législateur anglo-saxon est beaucoup plus flou et laisse finalement les contractants libres de négocier, libres de prendre des risques que eux seuls sont aptes à évaluer, vis-vis de partenaires que eux seuls choisissent. Bref pas de régulateur et pas de législateur ou si peu.

      3°) De telles opérations financières ont bien entendu un impact sur les bilans des entreprises cotées qu’elles sont toutes. De là a penser qu’elles puissent être utilisées pour maquiller des pertes qu’il faut bien honorer en numéraire, il n’y a qu’un pas. On nous dira mais où est le problème lors de la restitution des titres, les problèmes réapparaitront donc les comptes retrouveront leur valeur et même en dessous car des intérêts ont été versées. Oui, si vous êtes un péquin de la finance mais pas lorsque l’on s’appelle Lehman Brothers (mais ils n’étaient pas les seuls à demander cela en menaçant d’une catastrophe internationale qui s’est tout de même produite) car vous disposez d’appuis politiques et du brouhaha médiatique pour faire passer une idée crapuleuse comme une nécessité nationale devant faire loi, à savoir évaluer les titres et donc les répercuter dans les comptes, non pas à leur meilleure valeur du marché pour le trimestre en cours (strictement nulle puisque personne n’en voulait. Marché devenu totalement non liquide comme ont dit dans la finance), ce qui est tout de même un comble pour des banques qui constituent lme coeur du capitalisme, mais à leur meilleure valeur pour l’année en cours. En clair on évalue les titres à leur valeur en début d’année. Là encore les règles sont beaucoup plus strictes en Europe continentale et les règles comptables françaises n’autorisent pas ce type de manœuvre. Malgré tout, cela n’a pas suffit. Il a fallu que la Fed intervienne. Paul Jorion en a déjà parlé. Mais malgré cela Lehman y est passé. Là encore, les liens entre politiques et milieu des affaires qui ne font qu’un aux Etats-Unis ont permis cela. Pour vous en concvaincre, regardez le nom des administrateurs du NYSE, du NASDAQ ou encore de certains fonds d’investissement comme Carlyle. Vous y trouverez tout le Gotha du parti Républicain et du parti Démocrate.

      Cordialement.

    2. Avatar de gilloox
      gilloox

      Merci Frederique sur ces éclaircissements.

  13. Avatar de FreeDem
    FreeDem

    Bjr Paul,

    vous concluez ainsi votre intervention :
    N’empêche, même si c’est vrai, on aimerait bien entendre de temps à autres, la phrase qui présente ce genre d’arguments, précédée par : « Je sais que c’est malhonnête mais… » Mais ce « Je sais que c’est malhonnête… », on ne l’entend en réalité jamais. Et c’est pourquoi le meilleur terme pour ce qui vient d’être découvert à propos de Lehman Brothers, c’est : la « fraude ordinaire ».

    Ceci fait pleinement écho au commentaire que j’ai posté hier en réaction à votre billet
    « Le duc d’Aiguillon, le vicomte de Noailles, le vicomte de Beauharnais et le duc du Châtelet »

    J’ai écrit notamment :
    « Que valent les arguments face à des personnes coupables de malhonnêteté et de mauvaise foi ?
    Pensez-vous réellement que vos propositions de solutions « techniques », aussi pertinentes soient-elles, les amènent à des réflexions nouvelles sur ce qu’est l’intérêt général ?
    A ce titre, je rentre dans la catégorie de vos amis « ennemis centrés » mais avec ce distinguo fondamental :
    Mon objectif n’est pas celui que vous m’attribuez : « me débarrasser de mon ennemi »
    Mon objectif est identique au votre : « rallier le plus grand nombre à mes idées ».
    Et mes idées sont que nous avons affaire à une caste dominatrice malhonnête et de mauvaise foi. Ces gens-là fonctionnent en cercles fermés et qui n’ont que faire des arguments que nous opposons à leur action.
    Et mon objectif est que « le plus grand nombre » les reconnaissent pour ce qu’ils sont, que « le plus grand nombre » leur retire leur « supposée » légitimité, que « le plus grand nombre » fasse entrer la contradiction au sein des « cénacles », en portant à la direction des affaires de nouvelles personnalités issues de courant « non alignés ».
    Parce qu’aussi longtemps qu’on laissera les manettes économiques, politiques et médiatiques entre les seules mains de ceux qui ont franchis « le plafond de verre », nos idées seront regardées avec condescendance et mépris ».

    A la dénonciation des « coupables » et au rapport de force pouvant déboucher sur des violences « émeutières »,
    vous opposez une approche se voulant plus constructive, plus subtile, plus diplomate, plus stratégique : rallier des « responsables » à vos idées, leur faire admettre qu’ils sont entrés dans une impasse et finalement…leur proposer une porte sortie honorable.
    Ce que je résumerais ainsi : « Faites un effort et on tâchera de passer l’éponge ».

    Cette approche sous l’angle du compromis, équivaut simplement à une « négociation » non ouvertement présentée comme telle. Vous souhaitez visiblement vous inscrire dans une démarche gagnant-gagnant et cela ne fait certainement pas de vous un « vendu », comme certains l’ont apparamment suggéré.
    Recherche de compromis n’est pas compromission.

    Simplement, êtes-vous sûrs que ces « responsables », ces « ennemis » (aux yeux de certains de vos contradicteurs), sont réellement intéressés par « une porte de sortie honorable ?
    Sont-ils concernés par l’honneur ?

    De combien de responsables (financiers, politiques) les « malversations » comptables d’Enron étaient-elles connues avant qu’elles n’éclatent au grand jour ?
    La justice est-elle passée ?
    Le citoyen a-t-il pu apprécier l’équité de traitement entre fraudeur « oligarque » et fraudeur simple particulier ?
    Non.
    Le dossier Enron a été enseveli sous les décombres du WTC7 (bâtiment 7 du World Trade Center, qui s’est effondré, comme les Tours jumelles, le 11 septembre 2001)

    De combien de responsables (financiers, politiques) les « malversations » comptables de Lehman Brothers, Bear Stearns, etc, etc… sont elles connues ?
    La question n’est pas bonne.
    En voici une plus pertinente :
    Pensez-vous qu’il existe des responsables (financiers, politiques) qui ignoraient les « malversations » comptables dont se rendaient coupables Lehman Brothers, Bear Stearns, etc, etc… ?

    Vous apportez vous même l’illustration de ce que j’ai écrit hier :
    « nous avons affaire à une caste dominatrice malhonnête et de mauvaise foi. »
    …qui tient les commandes d’un système basé sur de gigantesques « fraudes ordinaires ».
    et qui se soucie de l’honneur et de l’intérêt général comme de leur dernière déclaration fiscale honnête.

    Et c’est là où intervient finalement la symbiose entre votre position (ralliez à vos idées) et celle que vous prêtez à vos contradicteurs sur votre blog (« me débarrasser de mon ennemi »).
    Le seul véritable argument qui peut amener les « oligarchies dominantes » à entrer dans le jeu d’une négociation gagnant-gagnant, ce n’est pas l’argument moral ou rationnel (« Parce qu’aussi longtemps qu’on laissera les manettes économiques, politiques et médiatiques entre les seules mains de ceux qui ont franchis « le plafond de verre », nos idées seront regardées avec condescendance et mépris »).

    Le seul véritable argument qui peut amener les « oligarchies dominantes » à entrer dans le jeu d’une négociation, c’est au contraire le sous-entendu qui diffuse cet avertissement :
    « faites vite, ils sont furieux et je ne sais pas combien de temps on va pouvoir contenir leur soif de vengeance ».

    1. Avatar de Roland
      Roland

      Globalement assez d’accord avec votre position. Si bien entendu « la raison devrait l’emporter », c’est rarement le cas sans rapport de force important (politique, j’insiste).

      Il faut revenir en peu en amont, comment a était « négocié » le passage du GATT a l’OMC (élaboré dans le secret le plus total. Interdiction aux élus et tout autres de divulguer le contenu ne pouvant être lu que dans un local étroitement gardé, interdiction de copie, etc..) Même démarche pour le célèbre AMI, c’est reparti de plus belle actuellement avec l’ACTA ….. Quand aux DROIT et au LEGAL, c’est quoi ? Le vote par le dominant du moment de lois et règlement a son avantage, donc depuis…… pas mal de temps, de l’« oligarchie dominante ».

      Et que les dénonciateurs de « la théorie du complot ou contre les complotistes, ouvrent un peu les yeux et les oreilles (ça évitera de perdre du temps à dire des âneries) Il n’y a pas de complot (quoique que ? Quand ils font dans le secret, en privé, sans débat, ça y ressemble fortement) mais un faisceau d’intérêt convergent qui unifie l’alliance de la dite oligarchie contre les peuple (vulgairement nommée ‘’lutte des classes’’.. Warren Buffet)

      C’est la Démocratie qui doit reprendre ses droits (Un peuple éduqué et informé) et le contrôle des institutions qu’il se donne (mais le souhaite il vraiment ?) car, c’est fatiguant, la démocratie, compliqué, pas simplement je vote et débrouille toi ! (c’est même je vote pas et j’accuse)

      L’ensemble du système financier en place n’est qu’une arnaque, il faudra faire un virage a 180° et ce n’est pas avec les actuels ‘’zélites’’ que ça va et peu changer. Alors, voui il faut des argument pour convaincre (c’est plus civilisé), mais, c’est contraint et forcé que le virage pourra se prendre. Et quant on voit le résultat des élections françaises, c’est pas gagné ! Cordialement

    2. Avatar de liervol
      liervol

      La meilleure défense c’est bien l’attaque.

  14. Avatar de Enrique
    Enrique

    Et oui, lorsqu’il s’agit de faire du fric tout peut se justifier, c’est la valeur suprême, le « veau d’or » contemporain. Faire de l’argent c’est malin, s’en détourner est vu comme ringard ou stupide. Et les Etats-Unis donne le ton. Le pire c’est que cette sorte de religion a contaminé toute la Terre, transcendant les civilisations et les individus. Partout le fric, le fric, le fric c’est chic…

  15. Avatar de Jean-Pierre
    Jean-Pierre

    De telles magouilles existent depuis longtemps. Les produits dérivés sont continuellement utilisés à ces fins. Et généralement sur l’initiative des banques.

    Dès le début des années 90, les banques anglaises et les filiales américaines sises à Londres (les institutions de la City), approchaient les sociétés et entreprises disposant d’une trésorerie importante. Elles leur proposaient d’acheter des actifs financiers détenus par les banques, au cours du jour. Simultanément, elles conviaient ces sociétés à leur émettre une option d’achat (call) d’une durée dépassant rarement les six mois. Le prix d’exercice de ces options était d’une unité (un dollar, un livre, un franc,…) mais leur prime (leur valeur marchande) équivalait à la valeur totale des actifs achetés.

    Le but était simple : officiellement les actifs disparaissaient des comptes de la banque, puisque devenus propriété des acheteurs étrangers. De cette façon la banque esquivait ses obligations en matières de ratios, camouflait des profits imposables. L’achat de l’option, lui, ne figurait pas sur les comptes ou, à tout le moins, était difficilement perceptible. L’acheteur, lui, profitait aussi de l’affaire, réalisant une plus-value sur son achat, sans débourser un centime. Il rendait finalement service. Les titres en question ne quittaient jamais la banque et si officiellement ils n’étaient plus sa propriété, la banque en conservait l’usufruit.

    Au bout des six mois, la banque exerçait son option, payait le dollar, la livre ou le franc, et récupérait la propriété officielle des titres.

    Alors, les affaires Enron, Lehman et bien d’autres, il en existe à la pelle. Les experts comptables le savent pertinemment mais n’osent pas le divulguer de peur de perdre un bon client.

    1. Avatar de Bertrand
      Bertrand

      @Jean-Pierre,
      Limpide ! Donc grâce à cette astuce comptable, les établissements financiers « offshorisent » leurs gains/Pertes pour ne pas que « cela se voit ». A mon petit niveau, cela ressemble à un tripatouillage dans une grosse arnaque à la Ponzi : Seuls les premiers de la liste seront servis, diluons les noms des ayants droits et leurs responsabilités des livres comptables, formalisons de nouvelles règles pour reculer l’échéance inéluctable parce qu’un jour l’investisseur qui aura déposé son argent à la banque Lehman découvrira qu’il n’a rien investit, sinon que son capital a servi à payer les intérêts des ayants-droits présents avant lui ou les pertes au nom de la banque. Si c’est ça à cette échelle, c’est du grand art (j’espère me tromper).

  16. Avatar de Homard
    Homard

    « Je sais que c’est malhonnête mais… »

    Je rêve d’entendre un politicien dire : « Je me suis trompé mais… » ou « Pardonnez-moi mais… »

    Reconnaître ses torts, un défi insurmontable dans les hautes sphères…

    1. Avatar de yvan
      yvan

      Homard :
      Nicolas Machiavel : « Lorsque l’on est puissant, on a pas besoin d’être transparent »

    2. Avatar de Jérémie
      Jérémie

      Comme vous Homard

      Je rêve d’entendre un jour un politicien nous dire : « Tout ma vie je me suis trompé, toute ma vie
      j’ai cru faire le bien de mon pays comme de mon parti, hélas plus les jours passent et plus je m’approche de l’heure fatidique, et plus je me rends compte que je n’ai guère mieux contribué à changer le cœur et l’esprit des gens en société, oui toute ma vie je me suis trompé, oui toute ma vie j’ai cru bien faire le bien du monde c’était surtout le seul objectif de ma vie sur une tribune comme de mon parti. »

    3. Avatar de yvan
      yvan

      Hhmm… impossible.

      La politique est devenue aussi une affaire commerciale juteuse.
      Dans ces cas-là, on ne « fait » pas d’erreur. On est juste responsable mais pas coupable.

  17. Avatar de Lisztfr
    Lisztfr

    How doth the little crocodile…

    HOW doth the little crocodile
    Improve his shining tail,
    And pour the waters of the Nile
    On every golden scale!

    How cheerfully he seems to grin
    How neatly spreads his claws,
    And welcomes little fishes in,
    With gently smiling jaws!

    Lewis Carroll

  18. Avatar de François78
    François78

    Il est clair que l’on peut envoyer la firme en question (Ernst & Young) se faire appemer « Arthur ».

    1. Avatar de Didier
      Didier

      Andersen était un conteur remarquable.

      J’aime « La Petite Fille aux Allumettes ».

  19. Avatar de ANGE
    ANGE

    @Freedem
    Je vous rejoins dans votre approche des oligarchies dominantes qui ont réussi à rassembler quasiment tous les pouvoirs. Il y a du mépris, de la condescendance, de l’indifférence mais
    la conviction ancrée au plus profond de leur être que s’ils sont là où ils sont c’est qu’ils sont
    suprêmement « intelligents » et que vous si vous êtes là où vous êtes c’est que vous ne méritez pas mieux. Il y a aussi cette supériorité qui arrive à nier les besoins de l’autre parce qu’il n’est pas comme moi et donc je ne vais pas l’autoriser à faire comme moi. Rappel : les vacances étaient
    pour les riches qui avaient la Côte d’Azur. Il a fallu que les générations précédentes luttent pour avoir des congés payés pour aller sur le côte d’azur.

    « faites vite, ils sont furieux et je ne sais pas combien de temps on va pouvoir contenir leur soif
    de vengeance ». Je pense que le décompte a déjà commencé. Quand le bateau coule ne dit-on pas que les rats se sauvent.
    Je signale un article de l’expansion de mars 2010 Le réseau politique de Bernard Arnault.
    Son bateau pourrait être celui de l’arche de noé.

  20. Avatar de luami

    Bonjour à tou-tes- et Merci,

    « Anti-dédicace à l’ordinaire »

    Le temps de « la fraude ordinaire »
    N’est pas fini et loin s’en faut
    Tellement il gangrène notre Terre
    Mettant les gens en porte-à-faux !

    L’Etat facteur de transparence
    Au lieu de remplir sa mission
    Est complice de cette décadence
    Tellement est forte la tentation !

    Il perd sa légitimité
    Au fil de pâles élections
    Qui n’attirent plus dans la cité
    Que des visages sans vocation !

    « Il y a feu en la demeure »
    Disait Paul Jorion ici-même
    A la recherche d’un monde meilleur
    Où les gens rediraient : « je t’aime ! »

    luami
    Bon voyage dans la Vie !
    http://luami.viabloga.com

    1. Avatar de Paul Jorion

      Merci pour vos poèmes.

  21. Avatar de nol
    nol

    Il faut de temps en temps parler de moralité. Car les banquiers, firmes d’audit et expert-comptables ne savent pas ce que c’est. Non pas qu’ils soient « mauvais » ou foncièrement malhonnêtes. Ils font ce qui est permis de faire, et même plus. Pour ces catégories professionnelles, le résultat de leurs actions n’est ni bonne ni mauvaise, elle est chiffrée. Ces gens sont en guerre, en guerre économique, mais il n’y a pas de morts en face, pas de blessés, il y a des perdants, des moins malins, des moins rapides, des moins intelligents. Au niveau spirituel, ces gens sont au niveau du gamin de 12 ans, de bonne famille, brillant, parfaitement égocentrique, bourré d’ambitions. La vie est un jeu. Le monde de la finance leur offre un terrain de manoeuvres, de combat virtuel, il s’agit de se comporter en parfait pirate, en prédateur, en fauve ( une variété d’animal qu’on adore dans les bureaux des Executives), faire preuve de ruse, jouer et ne pas se faire prendre. Cette attitude est non seulement admise elle est encouragée. Le monde de la finance recrée une sorte de jeu tribal, de guerre virtuelle, non pollués par le sang, les tripes, la boue, la souffrance, la mort. Il n’y a qu’un seul moyen de moraliser cette industrie, c’est de lui taper sur les doigts, encore et encore.

    1. Avatar de yvan
      yvan

      Pas de morts…??? Un doute m’habite.

      Si l’on met à part les millions de morts de faim ou d’absence de soins, les chômeurs de tous les pays qui ne peuvent plus avoir de projets de vie, les patrons de PME qui se suicident, les guerres par procuration dans quelques coins de la planète,…

      Alors, oui, si on ne considère pas les dégâts de la finance, elle ne fait presque pas de mal.

      Cette « industrie » ne doit pas se faire taper sur les doigts. Mais se faire strictement encadrer et encore…
      Il y aurait toujours un zouave pour contourner les règles.
      Par contre, bloquer strictement un enrichissement à un maximum mondial semble la seule solution.

    2. Avatar de nol
      nol

      @ Yvan
      Les morts et la misère, vous les voyez
      Je peux vous garantir qu’eux ne les voient pas.

  22. Avatar de Pierre *
    Pierre *

    Une petite remarque sur ce rapport et ses conséquences,

    le temps passé à légiférer sur Sarbanes Oxley semble donc du temps perdu puisqu’il n’a rien empêché. Il est couteux et très compliqué pour tout le monde. Donc est-il aussi judicieux que celà de se lancer dans un resserement à grande échelle des contraintes législatives concernant des oéprations financières comme les CDS (dont le régulateur allemand affirme qu’ils n’ont pas de responsablité dans les problèmes de la Grèce), l’encadreement à venir des ventes à terme ou l’augmentation de l’equity des banques en fonction des risques? Avons-nous bien engagé le débat? Avons-nous raison de laisser croîre que plus de régulation évitera la prochaine crise financière? ce genre de métiers est par nature basé sur la confiance? Se décrete-t-elle par la puissance publique ?

    1. Avatar de Paul Jorion

      Non : le régulateur allemand affirme n’avoir rien trouvé dans ce qui n’est qu’un échantillon des données.

    2. Avatar de yvan
      yvan

      Vous n’êtes pas des masses explicites, Messieurs, mais le fait que la dette de la Grèce ne puisse plus être achetée par certains « opérateurs » n’est-elle pas un protectionnisme plus efficace que toute loi facilement contournable…???

      Hé hé… cher protectionnisme. Lorsque tu crées des débats à rallonge sur le blog 😉
      Et fort intéressants, d’ailleurs.

  23. Avatar de Winsor
    Winsor

    Mr Jorion,
    Il est drôle que vous fassiez le rapprochement avec Enron.
    Que je sache, Enron avait à l’époque obtenu les faveurs des politiques, en finançant les campagnes électorales des deux partis.
    Vous pensiez vraiment que les organes de surveillance internes n’avaient pas vu venir le problème ?
    Ah mais non ! Il a fallu l’intervention des politiques pour les tenir sagement en laisse. Les lois en vigueur engendrèrent des incitations perverses : les cabinets comptables ont fait ce qu’ils avaient à faire. Et arriva ce qui devait arriver…

    Rappelez-vous aussi l’affaire des « Savings and Loan » dans les années 80-90.
    Ce fut la même chanson : c’est l’accord passé avec les politiques qui rend les entrepreneurs aussi irresponsables.
    Après tout, c’est nos dirigeants qui décident ce qui est légal et ce qui ne l’est pas. Légitimez la fraude et vous verrez débarquez les plus grands brigands.

    1. Avatar de FreeDem
      FreeDem

      @ Winsor,

      Entièrement d’accord :
      « Après tout, c’est nos dirigeants qui décident ce qui est légal et ce qui ne l’est pas. Légitimez la fraude et vous verrez débarquez les plus grands brigands ».

      Je suis allé chercher un message qui m’avais marqué et que j’avais lu sur le forum
      LE SILENCE DES LOUPS (Décryptage d’un monde interdit aux moins de 16 dents
      http://www.pro-at.com/forums-bourse/bourse-17-30072.html (dernier message de la page 17)

      Voici un extrait de ce message, qui résumait une interview de Frédécric Lordon dans l’émission ARRET SUR IMAGE du 31/07/08 :

       » Frédéric Lordon, directeur de recherche au CNRS, économiste critique, auteur notamment de « Jusqu’à Quand ? Pour en finir avec les crises financières », invité de -et interviewé par- Maja Neskovic et Daniel Schneidermann)

      L’introduction de Maja donne le ton :
      « Avec la crise, j’ai cru qu’à la télé, dans les journaux, ça allait changer. Qu’on allait tous les virer, ceux qui étaient censés nous informer mais qui n’avaient rien vu venir, les experts qui se succédaient sur les plateaux pour nous dire que le marché ça s’autorégulait et qu’il ne fallait pas s’inquiéter. J’ai attendu l’émission spéciale en direct présentée par Marie Drucker, Arlette Chabot et Laurence Ferrari, où ils seraient tous tout nus et où on leur repasserait leurs déclarations de l’époque. J’ai attendu, attendu, et rien n’est venu. »

      Frédéric Lordon nous invite à nous poser la question de la responsabilité
      Les traders sont simplement des agents qui jouent dans le terrain de jeu de la finance
      Il faut se poser la question de ceux qui ont constitué le terrain de jeu de la finance
      Qui a fait quoi, quand et comment ?
      Il y a 2 catégories d’agents, dont il faut incriminer pour de bon la responsabilité :
      Ceux qui ont été les ingénieurs de la déréglementation financière et ceux qui en ont été les conservateurs symboliques.
      C’est-à-dire, d’un côté les politiques et de l’autre la galaxie des faiseurs d’opinions, des prescripteurs, éditorialistes, experts, etc…
      Que ce soit par omission ou par célébration, tous ceux qui étaient en position de poser des questions et qui, soit ne les ont pas poser, soit ont substitué leur propres apologies aux questions qu’ils auraient dus poser font partie de cette catégorie des responsables véritables.

      A propos d’une entente entre politiques et faiseurs d’opinions, qui aurait notamment empêché que le type de raisonnement qu’il a développé soit exposé au grand public, il dit :
      « …moi j’ai pas de réticences de principes avec les hypothèses de complot,…simplement pour les rendre passables dans le débat public, il faut leur trouver un autre nom.
      (…) qu’il y ait des actions concertées entre des fractions de ce qu’on appelle les Dominants, la chose me semble aller de soi. On pourrait nommer ces lieux ou ces catégories a priori différentes de personnes qui viennent d’univers distincts…les financiers, les politiques, les hauts fonctionnaires, les éditorialistes, etc…se retrouvent, se brassent (…) et qui là, pour le coup, font partie du même monde (…) il y a une sociabilité de ces élites là qui les a rendu quasiment indistincts d’un point de vue intellectuel ; donc des lieux de cette nature on peut en citer
      Et là, Daniel Schneidermann lui coupe la parole pour lui poser une question qui l’emmène ailleurs.
      Dommage !

      Ensuite F.L. revient sur les agents responsables de la crise avec une approche expliquant que s’il a sorti les financiers du diagnostic dans un 1er temps (cf. plus haut, son raisonnement sur le terrain de jeu), c’est pour les y faire revenir d’une toute autre manière que ce qu’on envisageait au départ.
      « Oui la finance à une responsabilité extraordinairement lourde à la fin des fins (…) dans la conformation du jeu (…) il y a une action concertée, une convergence vraiment parfaite qui a vu les pouvoirs publics (…) et les dominants du capital financier oeuvrer de concert à l’émergence d’une certaine configuration du capitalisme financier (…) »

      En fait, au cours de l’interview, il nous explique indirectement que les politiques, de tous bords confondus, ont appliqué ce que leur demandaient les Banksters, sous le regard approbateur ou silencieux des faiseurs d’opinions, tous ces gens se retrouvant par ailleurs dans des lieux et des circonstances qui leur confèrent un pseudo-statut d’élite.
      _____________________

      @ Paul,

      cela appuie ce que j’ai déjà exprimé :
      je comprend parfaitement votre tactique consistant à ne pas aborder trop frontalement ces aspects qui…disons, placeraient en porte à faux nos responsables, et provoqueraient rejet et rupture du dialogue.

      Mais parallèlement, la prise de conscience que le « décryptage » progresse dans la société civile contribue à créer un état d’urgence chez les « initiés » et donc un contexte qui vous est propice, Paul = cela les rend d’avantage ouverts aux propositions de solutions nouvelles, susceptibles de leur permettre de « sauver la face ».

    2. Avatar de claude roche

      @ Freedom
      Il se trouve que je fais partie de ceux qui se sont mis en travers de la tendance dominante , et bien avant M Lordon . Je l’ai payé au prix fort. Je peux vous dire que ce que dit Lordon est largement insuffisant et assez peu digne du titre qu’il met en avant.
      amicalement

    3. Avatar de Fredéric *
      Fredéric *

      Bonjour à tous,

      C’est la première fois que je prend la peine d’écrire sur ce blog – même si je le suis depuis 2007 -, donc tout d’abord: bravo! Vraiment bravo car ce blog est de haute tenue! L’attitude de Paul Jorion y est sûrement pour beaucoup.

      Maintenant, j’aimerai répondre à quelques billets que je viens de lire.

      @ tous
      Personnellement, je ne crois pas que notre époque soit plus immorale qu’une autre. Pour ceux qui en douteraient, rien que pour le XIXème siècle, je vous invite à relire Victor Hugo ou Honoré de Balzac. Le milieu des affaires de l’époque n’a rien à envier au milieu d’aujourd’hui… Les scandales financiers y étaient tout aussi nombreux. Il y a tout de même une différence… Aujourd’hui les conséquences de ces derniers sont planétaires et cela n’est pas rien.

      De mon point de vue notre époque se caractérise par une interpénétration forte entre le milieu des affaires, le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif. Ces deux derniers ne formant qu’un, à savoir le milieu politique (on est loin de la séparation des pouvoirs si cher à Montesquieu). De ce point de vue, on peut dire: retour à la case départ.

      Les plus pessimistes chercheront à forcer le trait (mais ont-ils vraiment tord?), en disant que cela nous ramène ni plus ni moins à l’Empire et à la République romaine qui soufraient tous deux des mêmes maux. La source du problème de l’Empire romain n’étant pas son statut comme le croyaient Tite-Live et Claude qui militaient pour le retour de la République mais bel et bien que les patriciens étaient en permanence en conflit d’intérêt entre leur position de parlementaire, leur position de propriétaires terriens, leur position d’affréteur et leur position d’officiers généraux. Le comportement de Rome ne trouve pas d’autres explications. Les plus cyniques diront que c’est justement ce rapprochement qui est la cause du succès de Rome. Peut-être bien… Mais ils oublient de dire que ce même rapprochement a été la cause de l’effondrement de Rome.

      Les plus optimistes remonteront uniquement au XIX siècle qui justement se caractérise en France, en Allemagne, au Royaume Uni et en Russie par cette interpénétration.

      Aujourd’hui, ce constat est vrai pour la France où les anciens directeurs de cabinet – tout parti politique de pouvoir sans exception – sont souvent présents dans les conseils d’administration des grands groupe du CAC40 quand cela n’est pas directement à l’executive board ce qui rapporte beaucoup plus (Capgemini, Société Générale, EDF, Veolia, …). Dans certains cas, plus rares, ce sont carrément d’anciens ministres qui n’hésitent pas à passer alternativement du public au privé: par exemple le cas de Thierry Breton PdG de France Télécom puis en qualité de ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie puis enseignant à Harvard puis DG d’ATOS Origin.
      Dans l’autre sens, le milieu des affaires est plus que bien représenté dans le milieu politique. Pour être honnête, cette fois la parité entre partis politiques n’est pas respectée: l’UMP est très majoritairement le parti qui trouve grâce à leurs yeux. La liste est longues mais à titre d’exemple: la famille Dassault, ou encore la très puissante et prolifique famille des héritiers Wendel (Alain Missoffe qui a épousé la fille d’Ernest Antoine Seillière comme ça on reste en famille, Jean-François Poncet, Josselin de Rohan, Yves Guéna, Françoise de Panafieu née Missoffe, Yves Guéna, etc) dont la gestion a été confiée au célèbre Baron Ernest Antoine Seillière. On remarquera au passage que le capitalisme français a une singularité: il s’agit d’un capitalisme largement familial et fortement aristocratique. De ce point de vue, le capitalisme français en est resté au XIX siècle comme aiment à le dire le milieu de la finance anglo-saxon (mais ont-ils vraiment tort?).

      Mais ce constat d’interpénétration, l’est encore plus dans d’autres pays comme les États-Unis, le Royaume Uni, la Chine ou la Fédération de Russie. Le cas des États-Unis et du Royaume Uni sont intéressants car le milieu des affaires à juger préférables que ces intérêts soient défendus par tous les partis de pouvoir (il n’y en a jamais eu que deux pour ces pays mais pas toujours les mêmes au Royaume Uni contrairement aux États-Unis). Aux États-Unis, cette interpénétration remonte à la révolution même. Cela fait dire à certain que le vers était dans le fruit dès le début… Attention aux amalgames, cela n’enlève rien aux autres vertus de ce pays. Pour le Royaume Uni, c’est beaucoup plus récent. L’abandon du Labor Party au profit du New Labor marque symboliquement ce point.

      Dans le passé, le plus souvent mais cela n’a pas été toujours le cas comme on l’a vu, ces forces se côtoyaient, se fréquentaient et avaient besoin mutuellement l’une de l’autre mais restaient séparées. Le politique se méfiait du monde des affaires, l’argent étant un puissant outil de contrôle. Et la méfiance du monde des affaires vis-à-vis des politiques (et on peut même remonter au moyen-age) était une condition sine qua non à sa survie (Les Rois Maudits de Maurice Druon illustre clairement ce point – même si l’auteur a pris quelques libertés historiques – les rapports entre la noblesse française et les banquiers lombards sont très bien décrits).

      Bref, tous les problèmes qui ont été évoqués plus haut (scandales financiers, absence de morale, vote de lois de connivence avec le monde de la finance, assimilation d’une somme d’intérêts privés à l’intérêt publique, …) par Paul Jorion et d’autres auteurs n’auraient ils pas une seule et même cause? A savoir l’interpénétration de ces deux milieux.

      Mais que faire pour empêcher cela? Par quel bout commencer? Pas facile à dire…

      La tâche est d’autant plus difficile que d’un côté les intéressés au maintien du système actuel – on pourrait même parler de régime – ne se laisseront pas faire. Il ne suffira pas de demander ou d’argumenter. De l’autre côté, tout mouvement révolutionnaire visant renverser le régime actuel ouvre la porte aux expériences les plus dangereuses. L’histoire abonde de ces révolutions qui tournent mal. La route est donc bien étroite…

      Le chemin de la vertu ne semble donc pas atteignable à court terme (ici la vie d’un homme). Peut-être faut-il se contenter de demi mesures visant à limiter la casse. Par exemple, ne serait il pas temps de mettre en œuvre pour la première fois une séparation des pouvoirs, principes de ce bon vieux Baron de La Brède et de Montesquieu? Cela pourrait rendre le contrôle des forces politiques plus difficile. Ce principe est suffisamment politiquement correct pour que personne ne cherche à le dénoncer. Mais quel serait le parti politique qui oserait le mettre en œuvre? Comment s’assurer que cette indépendance retrouvée des intérêts de l’État ne se traduise pas par un contrôle asservissant du monde de la finance (les États étant à court terme dans l’incapacité d’assurer leur finance dépendent de la finance. Difficile d’être vraiment indépendant dans de telles conditions)?

      Je n’ai pas les réponses. Les français jugent que les partis politiques actuels non plus. Je ne dis pas cela uniquement à cause du faible taux de participation aux dernières élections régionales. Le problème date et est plus profond.

      @ Winsor

      Une bonne partie de mon commentaire à votre propre commentaire (sic) est en fait déjà indiqué plus haut.

      On ne peut rejeter la faute sur les politiques et dédouaner le monde de la finance de toute responsabilité. Aujourd’hui ces deux mondes sont liés et fortement. Le monde de la finance y veille et réserve régulièrement des parts de gâteau pour les politiques. On ne leur offre pas les places en or qu’on leur offre pour leur bonne gestion des deniers publiques. Les politiques font ce que la finance leur demande de faire. Certains le font sous la contrainte, d’autres le font par intérêts personnels et d’autres encore car ils croient à la convergence des intérêts privés avec les intérêts publiques. Quoi qu’il en soit, ils ne sortent pas de l’orthodoxie financière et cela ne leur est pas autorisé.

      Ensuite, je ne mêlerais pas le monde des entrepreneurs et le monde de la finance car si il y a vraiment deux mondes clairement distincts c’est bien ceux-là. Ce qui ne veut nullement dire qu’il y aurait un monde des « gentils entrepreneurs » face à un monde des « méchants financiers ». C’est un autre débat, mais le monde des entrepreneurs montre bien actuellement qu’il peut également mal se conduire. Notamment, vis-à-vis de ses salariés. Mais on pourrait dire aussi vis-à-vis de ses actionnaires (eh oui la finance est de retour). Quoi de plus logique puisque tout est permis et que les sanctions ne sont qu’en mots jamais suivis d’actes.

  24. Avatar de daniel
    daniel

    Les questions morales sont pulvérisées;
    la haute finance ne mérite qu’ un cageot de tomates pourries.
    (On pourrait aussi bien préférer des oeufs punais).
    Chaque faillite montre son lot d’ irrégularités; il est
    tentant de croire que les banques/ hedge-fund encore
    vivant ne sont chacun qu’ une faillite frauduleuse en puissance
    et conclure:  » tous pourris! ». Et que les experts-comptables
    certificateurs des bilans ne sont que des mercenaires
    incompétents au même titre que les sociétés
    à bénéfices dites agence de notation.

    Est-il vraiment impossible d’ exercer des activités
    bancaires sans contourner des réglementations
    ou enfreindre des textes, dèja bien laxistes?
    Comment les gens qui participe de ce monde failli
    peuvent-ils dicter leur loi à la Grèce par exemple?
    Pourquoi nos gouvernants sont-ils aux ordres de ces
    incompétents ?

    En référence à http://www.pauljorion.com/blog/?p=9094,
    je pense que ces gens-là ne sont pas accessibles
    à notre raison- Ils ont, collectivement, une inaptitude
    à l’ intelligence rationnelle. Il ne sont pas « convaincables ».
    Un « amélioration » même la plus modeste passe
    par leur disparition. « ils » encombrent, comme des parasites.

    Rien n’est possible avec eux, y compris gagner de l’ argent;
    ne parlons même pas d ‘ « un monde meilleur ».
    L ‘angélisme est hors de propos quand on atteint ce nadir.

  25. Avatar de claude roche

    @ tout à fait d’accord pour ce rappel à l’exigence morale.. c’est nécessaire et à terme beaucoup moins inefficace que l’on croît
    Maintenant je voudrais attirer l’attention sur un point important et assez souvent masqué dans ces affaires Enron et L Brothers ( si tant est qu’ils soient coupables)
    Ce qu’il faut noter dans cette affaire ce n’est pas tant qu’il y ait des escrocs ( c’est une constante de la vie humaine). C’est que l’escroquerie ait été si difficile à identifier : une difficulté qui tient avant tout à la complexité croissante de la comptabilité et son écart croissant avec l’économie intuitive
    De ce point de vue on se fourvoit totalement en imaginant que dans cette affaire il y ait eu une immense collusion des autorités politiques et économiques. Pour avoir vécu de près des phénomènes similaires, il n’y a dans cette affaire que quelques personnes qui sont au courant , et qui se servent de l’opacité nouvelle de la comptabilité ( qui en temps « ordinaire » permettait de mettre ces manipulations au grand jour) . J’ai même vu un grand patron se faire rouler par son directeur financier …
    J’en profite pour répondre à FreeDem lorsqu’il pose la question : et la justice dans tout cela ?
    Freedom vous devriez connaître la réponse , elle est connue de tous .: la justice américaine a été exemplaire et même féroce, on aimerait qu’elle soit aussi inflexible en France
    amicalement

    1. Avatar de FreeDem
      FreeDem

      @ Claude,

      je suis navré mais les réserves de pétrole sont aujourd’hui insuffisantes pour me fournir assez de carburant pour allez vous rejoindre sur la lointaine planète où vous vivez.

      Je vais vous dire :
      Il n’y a eu escroquerie de la part de personne (ni Enron, ni L Brothers, ni Goldman Sachs, ni Madoff,…)
      Seulement de malheureuses erreurs dues à la complexité croissante de la comptabilité.
      Et la justice a bien été exemplaire = elle a su ne pas toucher aux malheureuses super-élites qui n’étaient ni responsables, ni coupables.
      Sauf pour le pauvre Madoff, mais que voulez-vous, il fallait bien faire un exemple pour calmer ce bon peuple avide de sang.
      Madoff n’est donc qu’un regrettable exemple d’inexemplarité qui ne remet pas en cause, j’en conviens, l’excellent diagnostic que vous nous avez exposé.

      Mais j’arrête là mes flatteries avant que des lecteurs ne se fourvoient en imaginant je ne sais quelle collusion entre nous.

    2. Avatar de daniel
      daniel

      Bienheureuse ‘complexité’, qui permet d’ ‘expliquer’ .
      Corruption ? c’est la complexité.
      Obscénité financière ? c’est la complexité!
      Complicité des certificateurs ? c’est la complexité!
      Aveuglement des (soit-disant) agence de notation, c’est la complexité!
      Incompétence professionnelle, c’est la complexité!
      Il est de toute importance d’invoquer la complexité
      pour l’ incompétence professionnelle.

      En imitant Coluche:  » c’est d’un complexe, j’te dis pas!
      Allez mon gars circule; y’a rien à voir. c’est complexe ».
      Moi, qui n’est AUCUNE expérience de la chose, je trouve
      que la complexité a bon dos. L ‘explication est un peu courte.
      En revanche, avec l’ opacité- c’est à dire la dissimilation,
      non certes la dissimilation involontaire, mais
      la tentative constante, réitérée et contraire
      aux obligations de sincérité et de loyauté, c’est à dire
      la tromperie – le début d’explication devient admissible.
      Nous avons bien à faire avec des personnages
      – et un système- professionnellement incompétent
      et failli.
      Je laisse de côté l’aspect si important
      d ‘impératif morale. L ‘affaire est trop basse,
      trop vulgaire, pour que cet aspect soit pertinent.

      Conclusion invariante: les banquiers et leurs associés sont indéfendables.
      La complexité ne passera pas.

    3. Avatar de claude roche
      claude roche

      @ merci à Freedom , et à Daniel .. d’illustrer les risques d’une situation comme la nôtres.
      Votre vision du Monde est simple et très optimiste : Ill y a d’un côté des « salauds  » comme disait Sartre et de l’autre côté les gens bien ( nous bien sûr). C’est un air très connu, et je me demande pourquoi nous aurions à nous secouer les méninges comme nous le faisons : il suffit de liquider les salauds et le tour sera joué .
      Qu’attendez vous donc ?
      Malheureusement je vais vous décevoir, mais la réalité est beaucoup plus complexe que ce que vous croyez. Ainsi dans l’affaire ENRON , puisque c’est d’elle qu’il s’agit, il y a eu une enquête et condamnations radicales : l’entreprise d’Audit ( Arthur Andersen) qui a été déclarée fautive , a du fermer ses portes ( pour la faute de quelques consultants). Il s’agissait du leader mondial avec 100 000 personnes et une valeur boursière de dizaines de milliards de dollars partis en fumée
      Cela ne vous suffit il pas. ? Il fallait fusiller les 100000 consultants ?
      amicalement

    4. Avatar de VB
      VB

      Bonjour,

      @ Claude Roche :

      Oui, je crois bien que le problème (un des problème) est précisément là : la complexité de la réglementation ne sert que la cupidité et la médiocrité au détriment de la bonne foi et « du sens de la vie » : les gens qui veulent avancer ne le peuvent plus, toute vision stratégique est nécessairement limitée (ab initio) par l’innombrable quantité de réglementation immédiate à ne pas enfreindre, alors que cela même devient parfois impossible avec des lois ou des principes légaux contradictoires.
      Qu’un patron se fasse « gruger » par son directeur financier n’a de quoi étonner personne, cela doit arriver de manière relativement fréquente.

      Cordialement,

    5. Avatar de Marc Peltier
      Marc Peltier

      Cher Claude Roche,

      D’accord avec vous, mais je ne résiste pas à la malice de relever que, chaque fois qu’il existe un mécanisme capable de faire « partir en fumée » une valeur boursière, c’est qu’il existait préalablement un mécanisme capable de transformer de la fumée en valeur boursière…

      Conservation des quantités, dirait Paul Jorion.
      😉

    6. Avatar de Crapaud Rouge
      Crapaud Rouge

      @Marc Peltier: excellent !!!

    7. Avatar de FreeDem
      FreeDem

      @ claude,

      Votre message d’hier à 18h23 m’a paru tellement « décalé », à la limite du surréalisme, que j’y ai répondu par l’humour.
      Votre message suivant, de ce matin, apporte la confirmation que vous n’êtes pas un pince-sans-rire et qu’il faut vous lire au 1er degré.

      Me prêter (et prêter aux opposants à vos idées) des raisonnements binaires et des sentiments émotifs primaires, n’est pas très constructif.
      Vous vous permettez cette assertion parfaitement subjective, dans laquelle je ne me reconnais absolument pas :
      « Votre vision du Monde est simple et très optimiste : Il y a d’un côté des « salauds » comme disait Sartre et de l’autre côté les gens bien »

      Ce à quoi je pourrais vous répondre, si j’étais dans l’optique de vous faire la leçon :
      « Si votre vision du monde est aussi déformée que la vision que vous nous exposez quant aux raisonnements que vous m’attribuez, alors vous êtes le phoenix des hôtes de ce blog ».
      Cette leçon vaut bien un fromage sans doute…
      Oui, je sais, ma formulation est d’une coupable complexité, mais j’ai cru noter que la complexité (de la comptabilité notamment) appelait chez vous des élans d’indulgence.

      Permettez-moi à mon tour une assertion :
      « Vous usez de procédés rhétoriques pour masquer l’inconsistance de vos arguments et la subjectivité de vos propos. A défaut d’être en mesure de présenter de solides arguments pour soutenir votre thèse, vous manipulez le lecteur en détournant les arguments adverses et en faisant passer vos contradicteurs pour ce qu’ils ne sont pas ».

      Illustration :
      « Malheureusement je vais vous décevoir, mais la réalité est beaucoup plus complexe que ce que vous croyez. Ainsi dans l’affaire ENRON, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, il y a eu une enquête et condamnations radicales : l’entreprise d’Audit ( Arthur Andersen) qui a été déclarée fautive, a du fermer ses portes ( pour la faute de quelques consultants). Il s’agissait du leader mondial avec 100 000 personnes et une valeur boursière de dizaines de milliards de dollars partis en fumée
      Cela ne vous suffit il pas. ? Il fallait fusiller les 100000 consultants ?”

      Comment en arrivez-vous à écrire pareille ineptie ?
      Mes propos pointent une caste d’élites quasiment intouchables, jonglant avec l’illégalité et l’immoralité. Ceci n’a pas pu vous échapper !
      L’affaire Enron est un énorme scandale d’Etat avec des ramifications au plus haut niveau.
      Pourtant, seuls quelques individus ont été inquiétés et condamnés…et la mise en faillite d’Arthur Andersen a eu pour principales conséquences d’obstruer l’accès à l’ensemble des dossiers que gérait la firme.
      On éteint les lumières, on sort en fermant la porte à clé et on pose des scellés avec l’inscription « en faillite, ne pas entrer ! »
      On peut même, alors, se demander si cette mise en faillite et le démantèlement qui a suivi n’a pas été « commanditée » par les hauts responsables mafieux.

      Vous vouliez démontrer, par cette fermeture, que la justice est bien passée, sévère et radicale ?
      = c’est une contre-vérité.
      Vous vouliez suggérer que ceux qui, comme moi, espèrent plus de justice, se seraient réjouis si les lampistes et l’ensemble des salariés avaient trinqués plus durement ?
      = c’est un étrange procédé.

      Et, en plus, avant cela, vous osez glisser dans votre texte, une formule qui sous-tend que les fautifs sont des consultants « …a du fermer ses portes ( pour la faute de quelques consultants)»

      Grossir le trait d’un côté, le minorer de l’autre, viser l’adversaire et non ses arguments…pas joli, joli.

      Que reste-t-il de votre argumentation une fois qu’on en a dévoilé l’artifice et remis les choses à leur place ?

      Il ne reste en fait que des relents de subjectivité sans rien de consistant derrière.

      Pardon si cela paraît dur mais quand je perçois ce type de manipulations, en plus chez une personne qui cherche à se poser en « sage »
      (« votre vision est simple », « la réalité est plus complexe », …) …

      Vive le débat sincèrement argumenté et à bas les mystificateurs.

      🙂

  26. Avatar de Onubre
    Onubre

    Un post sur les évolutions récentes de la valeur des patrimoines et leurs effets sur la reprise

    http://criseusa.blog.lemonde.fr/2010/03/14/les-evolutions-recentes-du-patrimoine-des-menages-americains-et-leurs-effets-sur-la-reprise/

  27. Avatar de Sheeple

    La banque Lehman Brothers a bénéficié de la complicité du Trésor américain et de la Fed pour masquer ses pertes, en détournant des outils financiers déjà louches…

    Le rapport de 2200 pages mentionné établit clairement que la crise financière qui ruine l’économie mondiale *n’est pas un accident*…

    Voici un interview décapant :
    http://www.dailymotion.com/video/xcl7sq_lehman-brothers-fraude-gigantesque_news

    1. Avatar de yvan
      yvan

      Effectivement, ce n’est pas un accident. C’est un château de cartes.

      Publier les mails d’AIG… quelle drôle d’idée?
      Pourquoi pas libellule ou papillon..??

      (je sens gros comme le château qu’il va y avoir des pertes « accidentelles » de sauvegardes de mails… Mouarffff !!!! )

    2. Avatar de liervol
      liervol

      Je n’ai jamais vu ce style d’intervention à la télévision française et c’est bien malheureux.
      D’ailleurs ça devrait passer au 20 heures mais chut ici on ne veut pas que le peuple en sache trop.
      Heureusement qu’il reste internet…

  28. Avatar de pineda
    pineda

    A l’opposé de la fraude et pourtant…: la science ! Celle qui nous amène à connaître la réalité (je n’ai pas lu le livre de M. Jorion !). La science pourrait nous ouvrir de nouvelles voies, faire naître de nouveaux espoirs. En particulier la physique et la recherche sur les particules : les fameux neutrinos (90 % de la matière de l’univers) : à ce sujet la redécouverte des travaux De Nikola Tesla et la remise en cause par le professeur Meyl (entre autres) de la limite de la vitesse de la lumière et des conceptions actuelles de la physique : voir cette video, première partie d’une série (les applications commencent à arriver pour le grand public : rechargement des appareils électriques à distance par exemple). Si nous pouvions exploiter cette énergie, nous aurions du « carburant » pour aller où nous voudrions dans l’univers ! Ca change un peu des salades de la mondialisation…

    http://www.youtube.com/watch?v=8EXHLsRgdI0

    1. Avatar de krym
      krym

      …et nous parlerions donc…d’universalisation ? pas sortis de l’auberge hein !

  29. Avatar de Crapaud Rouge

    Dans un tel cas de figure, (50 milliards planqués sous le tapis, triplement des risques malgré les « ennuis » avérés,…), la malhonnêteté, l’esprit de lucre ou « le système » ne font pas une explication. Me souvenant que, selon Maître Eolas en personne, la certitude de ne pas se faire prendre est une condition nécessaire du passage à l’acte, je suis tenté d’en conclure que les marchés devraient être sillonnés de gendarmes à col blanc.

    En attendant de trouver le moyen de financer ces anges gardiens du futur, la possible généralisation du cas Lehman Brothers à bien d’autres institutions financières pose la question du fonctionnement des marchés. Je trouve franchement rigolo de voir, d’un côté, les moyens ultra-sophistiqués qui sont mis en œuvre pour estimer l’évolution des valeurs, – des moyens théoriques et pratiques dont la rationalité ne feraient aucun doute -, et, de l’autre, des bilans, la majorité peut-être, complètement truqués, comme un combat de catch dans une foire de province. Nous voilà donc face à un système qui raisonne « juste », mais qui se montre incapable d’obtenir des données fiables. Croyez-moi, ils sont aussi ridicules que des spécialistes de l’évolution qui feraient confiance aux créationnistes…

    1. Avatar de liervol
      liervol

      Qui raisonne juste et c’est là justement que le bas blesse, car si on s’en tient à un raisonnement juste les profits ne sont pas ce qu’ils en espèrent d’où la fraude « pour gagner plus ».
      Il ne faut pas oublié que l’ensemble du système n’est ni plus ni moins que du Madoff, le risque systémique est à chaque coin des bilans…

  30. Avatar de Lisztfr
    Lisztfr

    Que va-t-il se passer dans un monde où le somment de la hiérarchie des valeurs et ceux qui sont censés les incarnés apparaissent comme foncièrement corrompus … ? Un monde où plus rien ne fonctionne, le regard se portant sur tout objet possible ne fait qu’enregistrer un dysfonctionnement, une matière à s’insurger … ? Il n’y a pratiquement que des problèmes partout… Donc la tentation est grande, pour solde de tout compte, de tout abolir. Je suppose que des militaires y songent… Il ne manque que l’occasion pour tout abolir, pour déclarer la fin de partie. Une occasion qui se fait attendre, un mal moins discernable que par le passé…

    Comment d’un monde corrompu peut naitre un système politique… ? d’une absence de croyance, une croyance … ?

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  1. @ Hervey Et nous, que venons-nous cultiver ici, à l’ombre de notre hôte qui entre dans le vieil âge ?

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