Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Dans « La raison dans l’histoire » (1837), un ouvrage posthume composé à partir de notes de cours, Hegel observe que « … ce que l’histoire et l’expérience nous enseigne, c’est que ni les peuples ni les gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire, et encore moins agi selon ses leçons ». C’est vrai : s’il en avait été autrement, aucune civilisation ayant gardé le souvenir de celles qui l’ont précédée ne serait jamais morte.
Faute de tirer les leçons de l’histoire, les hommes n’ont cependant jamais cessé de tenter de la déchiffrer et quand on la lit, l’attention se porte de préférence, soit sur ce qui revient sous la même forme, soit sur ce que l’on n’a jamais vu auparavant. Il est bien sûr essentiel de saisir la proportion dans laquelle se présentent ces deux ingrédients : le même et le différent, et plus particulièrement dans les périodes de transition. On ne peut savoir où l’on va si l’on ne détermine pas d’abord si l’époque où l’on vit se situe davantage sous le signe de l’inédit ou sous celui de l’éternel retour. Dans le premier cas, les processus que l’on observe sont en voie d’achèvement, dans le second, ils sont destinés à se poursuivre. Il faut pour cela savoir distinguer les ruptures des continuités et si les premières l’emportent sur les secondes, l’époque est au changement radical. Et c’est pourquoi cette capacité à lire l’histoire est moins essentielle quand on est aux premiers temps d’une époque nouvelle que quand, comme aujourd’hui, une époque épuisée touche à sa fin.
Si l’on brise une chrysalide, on y découvre un liquide noirâtre et épais où l’on ne distingue ni la forme de la larve en train de se dissoudre, ni celle de l’insecte parfait qui émergera un jour. Les périodes de turbulence sont de cette nature. Saint-Just fut un jour acculé à reconnaître que : « La force des choses nous conduit peut-être à des résultats auxquels nous n’avions point pensé ». Peu de temps après cette admission il devait capituler sans combat devant la promesse d’une mort prochaine, reconnaissant son incapacité à comprendre encore le tourbillon qui l’emportait.
Si l’époque est au changement radical, il existe en son sein des « nervures » : des trajectoires rectilignes qui relient le passé au futur en passant par les points qui constituent la trame du présent. Le reste, ce sont les zones de ce qui demeurera le même mais qui, tant que durera la transition, participant à l’effervescence générale, n’en sera pas moins soumis à d’inquiétantes turbulences. Parvenir à déceler la présence de telles nervures, c’est lire l’avenir déjà inscrit dans le présent.
(à suivre…)
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
128 réponses à “Le capitalisme (I) – Les nervures de l’avenir”
Les historiens ressemblent à ces gens sourds qui entreprennent de répondre à des questions qui ne leur ont pas été posées.
Léon Tolstoï
Puisque on est enfin dans le sujet voir Ilya Prigogine maitre à penser en la matière.
Une perspective intéressante que celle que vous nous offrez. J’ai hâte de lire la suite. Avez vous perçu certaines de ces nervures que vous évoquez ?
Mais peut-on réellement les percevoir ? Il y a les évènements et il y a les hommes. Les deux ne marchent jamais totalement ensemble.
Enfin quoi qu’il en soit, on pourrait opposer à Hegel une autre interprétation : on apprend de l’histoire, mais on veut peut être profondément qu’elle se répette… Je repense alors à cette conception du temps cyclique et rassurante de l’éternel retour que l’on trouvait dans la majorités des tribus anciennes et dont Mircea Eliade fait la description dans « le sacré et le profane » : une nouvelle année, un nouveau monde, une nouvelle vie.
C’est peut être ce retour à la pureté que l’on recherche, ce temps renouvelé. On cherche à reprendre là civilisation là où elle en était avant, dans les temps anciens qu’on nous a raconté… On apprend donc de l’histoire, selon moi, mais on l’aime tellement qu’on veut qu’elle reprenne vie, avec ses héroïsmes et ses tragédies.
(Je suis persuadé qu’intimement la plupars des hommes politiques de la Vème république rêvent de lancer à nouveau l’appel du juin…)
Perspective,prospective,futurologie?
Quick & dirty (mot à mot)
Capitalism (I) – The veins of the future
In « Reason in History » (1837), a posthumous work composed from lecture notes, Hegel observes that « … what history and experience teach us is that neither peoples nor governments have ever learned anything from history, let alone acted on its lessons. It’s true: if it had been otherwise, no civilization having preserved the memory of those that preceded it would ever have died.
Failing to learn from history, men have however never stopped trying to decipher it and when we read it, the focus is preferably, either on what reappears in the same form, or on that we never saw before. It is of course essential to understand the extent to which these two ingredients arise: the same and the different, especially in periods of transition. We cannot know where we go if we cannot determine first whether the time we live in is more under the sign of the brand new or under that of the eternal return. In the first case, the processes that we observe are nearing completion, in the second, they are destined to continue. This requires distinguishing the ruptures from continuities, and if the first outweighs the second, then the change is radical. That is why the ability to read history is less important when one is in the early days of a new era than when, as now, an exhausted era is coming to an end.
If you break a chrysalis, you discover a dark, thick liquid which reveals neither the shape of the larva in the process of being dissolved, nor that of the perfect insect that will emerge one day. The periods of turbulence are of this nature. Saint-Just was once forced to admit that: « Perhaps the force of circumstance leads us to outcomes which we had not thought of. » Shortly after this admission, he was capitulating without a struggle before the promise of impending death, acknowledging his inability to understand the whirlwind that overtook him.
If the time change is radical, within it there exists « veins »: rectilinear trajectories that connect the past to the future through the points that constitute the fabric of the present. The rest are areas where things will remain the same but, for the duration of the transition, being part of the general effervescence, will nonetheless, be subject to disturbing turbulence. To be able to detect the presence of such “veins” is to read the future already inscribed in the present. (more …)
Il y a de longues années vivait un empereur qui aimait par dessus tout être bien habillé. Il avait un habit pour chaque heure du jour.
Un beau jour, deux escrocs arrivèrent dans la grande ville de l’empereur. Ils prétendirent savoir tisser une étoffe que seules les personnes intelligentes pouvaient voir et proposèrent au souverain de lui confectionner des vêtements. L’empereur pensa que ce serait un habit exceptionnel et qu’il pourrait ainsi repérer les personnes intelligentes de son royaume.
Les deux charlatans se mirent alors au travail.
Quelques jours plus tard, l’empereur, curieux, vint voir où en était le tissage de ce fameux tissu. Il ne vit rien car il n’y avait rien. Troublé, il décida de n’en parler à personne, car personne ne voulait d’un empereur sot.
Il envoya plusieurs ministres inspecter l’avancement des travaux. Ils ne virent pas plus que le souverain, mais n’osèrent pas non plus l’avouer.
Tout le royaume parlait de cette étoffe extraordinaire.
Le jour où les deux escrocs décidèrent que l’habit était achevé, ils aidèrent l’empereur à l’enfiler.
Ainsi « vêtu » et accompagné de ses ministres, le souverain se présenta à son peuple qui, lui aussi, prétendit voir et admirer ses vêtements.
Seul un petit garçon osa dire la vérité : « Mais il n’a pas d’habit du tout ! ». [ou dans une traduction plus habituelle : « le roi est nu ! »]. Et tout le monde lui donna raison. L’empereur comprit que son peuple avait raison, mais continua sa marche sans dire un mot.
Conte d’Andersen, légende espagnole
@Phil de Saint Naz dit :
3 mars 2010 à 06:37
votre conte m’evoque l’illusion Maoiste « du grand bond en avant ».
Conte à faire peur : Mao était nu mais personne n’a osé lui dire = 15 à 30 millions de morts de faim
@ Paul : Auriez vous lu le cycle de Fondation, par Asimov ? Vous y retrouverez les nervures que vous évoquez dans votre billet.
Reste à déterminer qui sera « la seconde Fondation », et la « troisième race » ….
Asimov déjà cité 2 fois plus haut.
Je suis content.
Fondamentaux
La vie induit continuité, adaptation, évolution par des interactions complexes avec et dans un environnement éco-systémique. Notre vie se développe sur la Terre dans un système stellaire centré sur le Soleil au sein d’une galaxie que nous appelons la Voie Lactée.
La modalité pour tenir conjointement les trois principes induits (continuité, adaptation, évolution) s’appuie sur la complexité croissante des composantes de la vie qui à la fois autonomise, individualise, diversifie, met en concurrence, organise et fragilise ces dernières, toujours dans un environnement qui constitue une ressource mais aussi une limite.
Toute entité composante de la vie participe en même temps à la continuité, à l’adaptation et à l’évolution, dans son autonomie, son individualité, sa diversification, sa mise en concurrence, son organisation et sa fragilité. Ceci est vrai, entre autres, pour une personne comme pour une société humaine.
Dans ce contexte on doit bien comprendre que la mort de chaque entité est une nécessité vitale pour permettre que l’entité organisationnelle de niveau supérieur continue, s’adapte et évolue en s’affranchissant des limites de ses composantes. Par exemple, les cellules humaines ont une durée de vie bien plus courte que celle de l’homme qu’elles composent ; leur renouvellement permet la continuité de l’être qui n’est ainsi jamais biologiquement tout à fait le même, son évolution par renouvellement et mutation de l’information cellulaire, son adaptation squelettique, musculaire et neuronale à l’environnement. Quant une cause extérieure, exploitant sa fragilité constitutionnelle, ne l’a pas fait avant, c’est une fragilité interne, par dérèglement du renouvellement de ses composants, qui est à l’origine de la mort de l’homme en tant qu’individu. Ce faisant, la société où il a vécu continuera, s’adaptera et évoluera par sa descendance qui est, de fait, affranchie de certaines des limites et rigidités de ses géniteurs (mentalités, connaissances, histoire, etc.).
Considérant la vie sur terre, deux limites font obstacles. La première a trait aux ressources mobilisables sur cette planète. La seconde est constituée par le confinement dans le temps (un milliard d’années ?) comme dans l’espace (plusieurs années-lumière ?) de son système stellaire.
En d’autres termes, la vie « lance » à l’humanité (ou successeurs…) deux défis fondamentalement incontournables. Premièrement, mobiliser au mieux toutes les ressources disponibles sur terre ou dans le système solaire pour y vivre un milliard d’années environ. Deuxièmement trouver, dans le même temps, les moyens de propager cette vie hors de ce système stellaire.
Les implications du « premier défi de vie de l’humanité » sont perceptibles en ce début de vingt et unième siècle, même si les modalités d’exécution sont rien moins qu’évidentes. Celles du « second défi de vie de l’humanité » relèvent encore du roman de science-fiction ; on peut cependant envisager plusieurs voies de recherche comme transporter des colonies humaines (ou successeurs…) vers des exo-planètes, disséminer des « briques de vie » (acides aminés ?) vers tous les systèmes stellaires de la galaxie (et au-delà ?), sélectionner sur des millions d’années une nouvelle espèce « humaine » ayant des capacités plus adaptée aux voyages intra-galactiques voire extra-galactiques (les galaxies aussi sont « mortelles »), mettre au point un programme pour former et faire évoluer d’éventuelles sources de vie intra-galactiques autres, se confronter à d’autres formes de vie extra-terrestres, générer les mutations génétiques nécessaires pour échanger réciproquement avec ces autres formes, etc.
De ces projections abyssales, mais inéluctables dans la continuité du vivant, découlent plusieurs conclusions simples et actuelles, c’est-à-dire dont la valeur résiste à toute durée prévisible. Une recherche scientifique coordonnée mais « tous azimuts » est essentielle à l’activité humaine. La diversité, la concurrence et la compétition des hommes, des cultures, des civilisations, des organisations etc. sont parmi les fondements de l’évolution de l’humanité. Tester la fragilité de celles-ci est un des moyens pour réguler la répartition des ressources limitées, comme le fait instinctivement un prédateur vis-à-vis de ses proies potentielles. La coopération et l’association collaborative entre entités de même niveau sont des schémas efficients pour faire évoluer l’organisation d’une entité de niveau supérieur, qu’il s’agisse de cellules, d’hommes, d’espèces etc. La compassion solidaire pour une entité de même niveau reste la seule morale qui tienne, tant qu’elle conduit à affermir l’organisme du niveau supérieur. Une entité qui se fige sans plus être capable d’évoluer et de se ramifier meurt et doit par conséquent être détruite (delenda est..) si elle empêche l’évolution d’autres entités. Rien de cela n’est bien nouveau, mais repréciser ces fondements ne semble pas un devoir inutile.
Pourquoi ne regardez-vous pas l’horizon ?
En posant là votre regard, les choses perdent leur confusion et ce qui lie passé, présent et avenir apparait plus clairement…
Je n’adhère pas à cette métaphore de la métamorphose.C’est une séquence génétiquement programmée qui aboutit toujours au même résultat.Je ne parle pas des bidouillages savants style OGM pour lesquels il peut y avoir des incertitudes,ni des accidents chromosomiques ou génétiques qui donnent ( rarement ) un avantage compétitif,question d’échelle de temps.
Interdisons les métaphores et les smileys…
Bonjour à tous,
Assez bizarre d’entamer le capitalisme par le revers de l’histoire. Mais bon, essayons..
« tirer des leçons du passé »
Le passé est impalpable. Il passe par la passation d’information qui se produit avec intérêt ou non.
Il ne se retrouve pas dans les gènes qu’après des millénaires comme l’instinct.
La réédition de l’expérience de Milgram mise dans un autre contexte de jeu que nous avons pu avoir avec l’émission de télé, prouve que celle-ci passe au-dessus de toute morale.
« aucune civilisation gardé de souvenir ne serait jamais morte »
Récemment j’ai passé du temps à étudier les raisons des disparitions des civilisations. Il n’y a pas que les souvenirs, il y a aussi l’évolution qui ne fait pas une copie du passé et qui apporte des surprises. Des zones de turbulences climatiques, des invasions qui ne sont pas dans l’agenda. Le passé est une base, mais il ne donne pas l’assurance. Les climatologues le savent très bien, eux qui se réfère à une base de données des cas du passé.
Prédire le futur avec le passé, oui, dans les grandes lignes.
Le présent, lui, n’existe que dans l’instant, donc n’existe que le temps d’entrer dans le passé.
Donc, il faut en profiter très vite.
« …lire l’avenir déjà inscrit dans le présent. »
J’ai déja entendu ça quelque part…
Ah, oui, M.Proust: « A la recherche etc… »
Hegel, toujours dans « La raison dans l’histoire » :
cela a déjà été dit mais je dois avouer que ce texte me paraît un préliminaire à un travail de Psycho-histoire.
Par une coïncidence (mais existe-t-il des coïncidences ?), je me suis mis à relire depuis janvier le cycle de la Fondation (série de livres écrits par Isaac Asimov), livres que j’avais lu durant mon adolescence.
Quelle formidable avancée que la Psychohistoire (si seulement cette « science » pouvait exister) !
Mais cette nouvelle lecture, confortable car j’avais quelques souvenirs de la fin, me laisse un goût ambigu : malgré toutes ses connaissances, Asimov s’est limité à son domaine de prédilection, et a construit un monde très cohérent du point de vue scientifique (même si cela reste de la science-fiction), mais absolument pas cohérent sur d’autres plans dont celui de l’économie, de la monnaie, de la linguistique…
Je viens de terminer (hier soir) Seconde Fondation. Dans ce livre, cela fait maintenant plusieurs siècles que l’Empire Galactique unique s’est effondré. Et pourtant ? l’ensemble des habitants parlent toujours la même langue… et paie avec la même monnaie (qui la produit ? sur quelles bases ? etc…).
Cette naïveté ferait sourire les concepteurs ou habitués de ce blog.
Et même si je suis loin d’atteindre leur savoir en cette matière, elle m’a fait sourire aussi…
Pour revenir à ce beau texte, je vais essayer d’apporter ma petite pierre à ce travail, sous la forme d’un complément, et d’une question en forme d’ouverture…
Le complément est simple : Ce constat ne me paraît pas aborder un élément important et complémentaire, pour qui veulent étudier l’histoire, qui est que cette histoire ne connaît pas seulement une succession de phases de développement et de transition, plus ou moins critique.
Mais également, ces cycles ou alternances de phases, difficile à distinguer pour les contemporains, ne se déroulent pas à une vitesse identique.
La question de phase de ralentissement ou d’accélèration de l’histoire est toute aussi importante que celle de distinguer dans une phase confuse (chaotique au sens scientifique du terme serait plus exact), les nervures qui serviront de lignes-guides (« guidelines ») pour l’avenir.
Or, ces variations de « vitesse » sont autrement plus complexes à distinguer (puisque notamment une vitesse nécessite de se comparer à quelque chose d’autre), analyser.
Et si la question de la phase de transition fait souvent écho (qui peut nier aujourd’hui que nous sommes dans une telle phase ?), c’est par la vitesse de son déroulement, si difficile à appréhender, que l’on peut expliquer le fait que tant de gens intelligents et informés soient si facilement « dépassés ».
Voilà le petit complément que je me proposais d’ajouter modestement (je peux développer si vous voulez, et c’est bigrement intéressant si l’on se penche sur les évènements de ces derniers mois).
En ce qui concerne la question en forme d’ouverture, elle est simple. Au-delà des « nervures » vsisibles, souvent liées aux contingences de l’époque, des croyances, de l’état d’avancement des connaissances, si l’on prend la peine de se plonger plus avanat, on se heurte presque toujours (il faut aller assez loin parfois), sur la question du sens de l’histoire.
L’Histoire n’a pas un sens, mais elle a du sens (ce n’est pas de moi, mais j’y adhère). Or, pousser dans cette voie, c’est nécessairement plonger dans la question du Bien et du Mal, pierre d’achoppement de toutes les théologies, et réglée de manière si insatisfaisante par Rome…
Je ne vais pas développer trop longtemps (sinon vous risquez de solliciter mon internement d’office alors que je vous très bien, je vous l’assure…) :
Où tout cela nous mène-t-il ?
Cela peut-il mal/bien finir ?
Ces questions peuvent sûrement paraître trop abstraites à certains (c’est sûr que quand on garde les yeux rivés sur les réserves d’or de la banque centrale chinoise… c’est important aussi par le stemps qui courrent, je le reconnais). Et pourtant elles sont essentielles, car selon la réponse que l’on y apportera, le sens que l’on donnera aux nervures qu’une étude approfondie de ce flot continu et infini d’informations, toutes anodines et toutes importantes, sera totalement différent.
J’espère que ces quelques phrases maladroites ne seront pas trop hors-sujet.
Cordialement
CM
Peut-on arrêter les libéralisateurs qui pensent que le marché doit être un principe fondateur de tout ?
http://www.lemonde.fr/opinions/article/2010/03/02/les-marches-predictifs-une-innovation-intelligente_1313330_3232.html
Arrestation pour cause de nihilisme éthique et manque de sensibilité et d’intelligence… Je pense pas que ça passe, hélas…
« Pour dépasser ces contraintes, et permettre à la société – car il s’agit bien d’intérêt général – de bénéficier de cette nouvelle et précieuse source d’information, une évolution de la réglementation est nécessaire, à l’instar de ce que demande le Statement on Prediction Markets, une pétition signée outre-Atlantique par vingt-cinq intellectuels américains (dont quatre Prix Nobel). »…. Car il s’agit bien d’intérêt général ! Mais bien sûr ! C’est évident !….
« Nous aussi devrions y réfléchir sérieusement. Ne laissons pas, en effet, nos préjugés faire obstacle à l’introduction d’un outil novateur permettant de mieux connaître l’économie et la société. Osons le progrès, et libérons l’information ! »
Traduction : ne laissons pas une place indéscente à nos convinctions profondes, personnelles et sensibles, à notre intelligence humaine, mais assumons notre mort sociale ! Osons détruire le présent au profit de l’avenir ! Vive les pierres qui parlent !…
La macroéconomie est par essence collectiviste et infradéterministe dans sa méthodologie.
Les macroéconomistes commettent le péché de croire qu’ils peuvent déduire des principes de politique monétaire d’observations accumulées sur le passé, alors que l’on sait que dans le domaine de l’action humaine ces corrélations ne fonctionnent pas.
C’est ce qui conduit à l’échec actuel de toutes ces règles de politique économique .
Elles présentent le défaut rédhibitoire de chercher à résoudre un problème tout en ne tenant pas compte des raisons logiques pour lesquelles ces moyens-là ne peuvent pas y apporter de solution.
Vous ressignaler cet entretien récent avec Amartya Sen:
« Je n’aime pas ce mot «capitalisme» et ne l’utilise pratiquement jamais. Je ne crois pas qu’il y ait un ancien et un nouveau capitalisme. Il y a une économie de marché qui s’est développée pendant plusieurs siècles, et qui a néanmoins permis beaucoup de choses, notamment la création de la sécurité sociale, des systèmes de retraite, de l’Etat-providence. »
Chacun a un role à jouer
Ce n’est pas « l’économie de marché » qui a permis « la création de la sécurité sociale, des systèmes de retraite, de l’Etat-providence. »
C’est le rapport des forces au lendemain de la seconde guerre mondiale, qui a fait que les financiers, craignant plus que tout la contagion socialiste (communiste !), ont été obligés (rapport de force) de lâcher du lest au profit du salarié, pour « acheter » la paix sociale.
C’est ce rapport de force qui vient de s’inverser, au détriment dudit salarié, comme on peut le vérifier chaque jour….
Le capitalisme règle la sphère de la production et la redistribution du surplus. L’économie de marché règle la distribution des marchandises et des services. Mr. Sen n’a pas aperçu ça ?
ça y est, on y est :
http://www.lefigaro.fr/tauxetdevises/2010/03/01/04004-20100301ARTFIG00630-la-livre-sterling-attaquee-.php
« D’après le Financial Times, près de 6,1 milliards de dollars ont été placés à court terme sur la livre durant la semaine du 23 février, via le Chicago Mercantile Exchange souvent utilisé par les hedge funds. Leur pari serait gagné si la situation du pays motivait une dégradation de la note triple A dont bénéficie Londres. »
Next one … is USA !!
« Puisque nous ne tenons aucune certitude,
ne restons pas assis, en proie à l’inquiétude.
Heureux, tenons en main notre verre de vin,
mais évitons l’ivresse, avec son hébétude. »
Courage et santé,camarades!
http://fr.news.yahoo.com/69/20100302/tfr-h1n1-le-maire-de-villeurbanne-dtaill-b8d393e.html
Je propose que nous adressions tous une facture à l’Etat concernant le stress que nous subissons du fait de sa mauvaise gestion de nos affaires et de la dégradation des conditions de vie.
Il n’y a pas que de la dette dont doivent être responsables nos politiques, celle ci est la conséquence et non la cause, la cause, c’est la dégradation des conditions de vie à tous les niveaux :
travail, éducation, civisme, environnement, la liste est longue.
Je propose donc de facturer : le manque à vivre.
aliénation
avaient-ils dit
y compris à gagner ce qui manque
Nous devrons facturer l’état , or c’est l’état c’est nous.
Au lieu de facturer il faut « présenter la note » aux « hommes » de l’état des différents partis responsables;hommes et femmes heureux de nicher dans les lambris pourvu qu’ils puissent jouir de la notoriété.
Pour avoir fréquenté un temps ces « gens » je vous assure que peu échappent au travers qui consiste à jouir et à ne s’occuper que de faire durer cette jouissance, hors de toute aspiration à améliorer le sort de leurs électeurs.
Parfois la démagogie électoraliste les pousse fugitivement à travailler à faire ou faire voter les lois dictées par des intérêts « supérieurs ».
Supérieurs à eux-mêmes pour quelque raison qu’ils font mine de ne pas savoir, car ils chuchotent en l’évoquant.
Supérieurs mais jamais compassionnels.
Les gens heureux doivent-ils rembourser une certaine somme ?
Hegel observe que « … ce que l’histoire et l’expérience nous enseigne, c’est que ni les peuples ni les gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire, et encore moins agi selon ses leçons »
Quel phrase définitive, donc fausse…mais citée histoire de faire réagir, bien sur !
histoire avec un H ?
Les civilisations disparues étaient imparfaites, donc transitoires, mais ont contribué aux suivantes…
L’inédit existe-t-il? et l’éternel retour aussi ? C’est souvent la perspective qui décide. Dans une fusion des civilisations, le monde est un patchwork de larves, de chrysalides et de papillons …
Je reste un optimiste mortel qui aime cette toile qui nous relie vers un futur de papillon…
« Si l’époque est au changement radical, il existe en son sein des « nervures » : des trajectoires rectilignes qui relient le passé au futur en passant par les points qui constituent la trame du présent. Le reste, ce sont les zones de ce qui demeurera le même mais qui, tant que durera la transition, participant à l’effervescence générale, n’en sera pas moins soumis à d’inquiétantes turbulences. Parvenir à déceler la présence de telles nervures, c’est lire l’avenir déjà inscrit dans le présent. »
La seule nervure que je perçoive, commune à toutes les sociétés ayant historiquement « duré » ou existant encore aujourd’hui, c’est la reproduction sociale des populations qui les composent, c’est à dire leur capacité à se régénérer au niveau qu’exige d’elles la politique de leurs gouvernants ou la survie sur un « marché ». Mais il ne s’agit pas d’une trajectoire rectiligne (sauf dans un modèle graphique qui en aplatit les sinuosités parfois très marquées), loin s’en faut. L’incapacité à assurer cette reproduction sociale explique pratiquement la chute de tous les empires, romain ou soviétique et, aujourd’hui, états-unien (avec ses appendices européen et asiatique).
Le fait radicalement nouveau, du moins à l’ère moderne, est la possibilité qu’a la finance de « dissoudre » potentiellement les états-nations qui existent depuis des siècles en les attaquant de front par le biais d’une circulation viciée de l’argent. En ce sens, la finance n’a qu’une fin: la destruction de la gestion par des entités politiques organisées et apparemment « autonomes ». La finance veut tout envahir et tout détruire pour parvenir à ce résultat. Ce n’est pas un hasard si l’on appelle Goldman Sachs « Government Sachs » par dérision. Il ne fait guère de doute que, si la finance réussissait, ce serait la fin de la civilisation telle que nous la connaissons depuis des siècles. A la place nous aurions des financiers juchés sur leurs monceaux d’or (c’est une façon de parler…) et « administrant » les populations asservies non par des régimes politique nouveaux, mais par des régimes policiers (fascistes ou simplement dictatoriaux, en fonction des besoins locaux). Etant donné qu’un tel système ne pourrait survivre un tant soit peu que par la généralisation systématique du crédit jusqu’à l’épuisement définitif des populations qui le sustentent, on est en droit de dire qu’il s’agit d’un système GENOCIDAIRE. A la différence d’Auschwitz, de l’Arménie ou du Rwanda, ce génocide ne consisterait pas en une éruption brutale de sauvagerie ciblant une population donnée, mais une atteinte portée contre tous les peuples et dont l’aboutissement prendrait un certain temps.
Au vu de ce contexte, on peut s’étonner que des « turbulences » violentes — et très menaçantes pour la finance — ne se soient pas déjà produites. Mais on en a des signes avant-coureurs, qui marquent peu à peu la prise de conscience des peuples de l’avenir qui leur est promis en l’absence d’un sursaut salvateur. (Par exemple: dans un article publié aujourd’hui, le Huffington Post fait état d’une révolte estudiantine américaine contre l’augmentation brutale des frais de scolarité, d’abord limitée aux divers campus de l’université de Californie, mais se propageant rapidement au-delà.) A l’inverse, il n’est pas automatiquement exclu que, fragmentés à l’extrême, ces peuples (qui se croyaient politiquement libres hier encore) ne se résignent pas au rôle de boucs émissaires incapables de s’unir contre cet ultime oppresseur. Je ne parierai pas, pour ma part, sur l’échec du premier terme de l’alternative…
J’avais oublié de dire que l’ultime oppresseur génocidaire, une fois son oeuvre accomplie, n’a plus qu’à se suicider. Ou que, pour reprendre l’image de Rabelais, tel Picrochole, il termine sa vie en marchand de sauce verte vendant sa maigre camelote sur le trottoir. Ce dernier destin suppose naturellement qu’on ne lui ait pas tranché la tête auparavant…
Oui, bien sûr, mais en attendant la métamorphose « les gens » continueront à devoir parer au plus pressé, ne devront-ils pas?
Sauf que le plus pressé :
C’est de dire STOP
C’est s’arrêter sur le bord de la route rien que pour contempler l’horreur du trafic, tous ces gens qui gâchent leur vie à courir esclaves modernes d’un temple de la consommation qui tire à sa fin mais dont ils ne savent sortir et qui va tous les achever s’ils ne finissent par dire NON.
STOP à cette société débile où on ajoute toujours plus d’administratif sans rien contrôler pour autant, STOP à ce mode de vie où ils veulent transformer nos écoles en camps disciplinaires sous haute surveillance pour cacher le déficit d’ambition qu’ils ont pour nos jeunes
NON à toujours plus vite, toujours court terme, toujours plus de gaspillage
NON à une seule valeur aujourd’hui : l’argent
NON à l’homo économicus bien corvéable et consommable
STOP à ce monde de fous qui nous entraine à sa dérive, arrêtons contemplons une journée de soleil et prenons tous conscience de la stupidité où nous nous sommes tous laissé entrainé non pas par nécessité mais par une propagande bien organisé qui nous fait croire à nous le nombre que nous sommes minoritaires et que nous ne pouvons que subir les dictats du marché aux mains d’une élite sans aucun scrupule.
Nous sommes tous le marché et nous pouvons tous dire NON, NON nous ne voulons plus courir pour l’argent, nous ne voulons plus de ce Dieu Argent, nous voulons remplacer l’humanité au centre et non la monnaie.
Je n’ai jamais vu un billet banque sourire ni même un gros chèque, je n’ai jamais vu des fonds placés sur des supports rendre heureux celui qui les possède c’est même plutôt le contraire c’est des soucis à gérer, mais j’ai souvent vu des sourires gratuits.
C’est le sourire que nous devrions placer sur l’autel quand nous aurons démis d’argent de la place qu’il a usurpé.
@Liervol
L’An 01, hmm…souvenirs, souvenirs.
Que des vieux copains d’une époque où l’histoire et la lutte des classes n’étaient pas encore décrétées mortes et enterrées! De Harakiri à nos actuels tristes perroquets qui pleurent….
Paul, avez vous pris le temps d’écouter les proposition du « Professeur » Lordon dans l »émission de Mermet.
N’est-il pas temps de créer des synergies dans notre petite Histoire, si nous voulons réellement raccrocher les wagons.
A quand un débat entre vous deux. Je suis sûr que ça décoifferait!
Pour interdire les paris, fermons les casinos!!! N’ayons pas peur des mots! L’imagination au pouvoir!
http://www.la-bas.org/article.php3?id_article=1871
Bonjour Paul, bonjour à tous.
A propos des historiens, Guillaume Durand de Mende ( XIIIéme siècle) rappelait leur proximité
étymologique avec les histrions – de istorein gesticuler! Sans offense car j’aime l’histoire, mais celà pourrait expliquer l’attitude des gouvernements envers l’histoire!!!
d’ Hegel: grand penseur mais un peu emm… à lire! pour comprendre ce qu’est l’aliénation par le travail, on a plus vite fait, et en s’amusant qui plus est- de VOIR tout le début des temps modernes de Chaplin, saltimbanque – histrion? – de génie qui expose parfaitement le sujet: la destruction de la culture brise le rapport à l’ espace temps et rend ainsi l’adaptation extrêmement douloureuse…
Il y a un documentaire de Depardon sur les sociétés secrètes africaines qui dans les années cinquante intégraient théâtralement/religieusement les comportements des occidentaux à leurs mythologies ce qui rendait » l’adaptation » possible sans trop de mal. Les non membres de ces sociétés restaient dans l’impossibilité radicale d’appréhender les comportements des blancs et en devenaient fous ….
Cordialement
@ Liervol,
avec vous de tout coeur et pour l’an 01 !!
@ Monsieur Jorion,
c’est trop bon !
Et on ne s’embarrasse pas d’un tas de considérations, théories… certes intéressantes mais qui se révèlent surtout (dommage) paralysantes….;)
L’An 01 est un grand film philosophique, et après les années 7O,
les années 80 :
http://video.google.com/videoplay?docid=5539613947839465921#
@ Domini CB
oui mais une philosophie ACTIVE, VIVANTE, VECUE… Ca change tout… 😀
Hegel : » … ce que l’histoire et l’expérience nous enseigne, c’est que ni les peuples ni les gouvernements n’ont jamais rien appris de l’histoire, et encore moins agi selon ses leçons »
Jorion : » Si l’époque est au changement radical, il existe en son sein des « nervures » »
Malgré ce que dit Hegel ne peut-on penser malgré tout qu’il y a une différence dans la manière dont ont réagi les gouvernements durant la crise de 29 et celle de 2008 ? En 29, l’action économique des gouvernements fut très marginale, voire absente. Ce qui n’a pas été le cas pour celle de 2008 durant laquelle les gouvernements sont venus renflouer les banques défaillantes. ( ici je ne juge pas leur action, simplement on peut noter une différence, qui n’est pas des moindres ). Donc parce qu’ils ont gardé en tête la leçon de 29, ils ont agi. Ce qui fait que les données du problème, entre 29 et 2008, ne sont pas les mêmes, ou peut-être se sont déplacées. Ce qui aurait pour conséquence des processus en cours différents. Ajoutons ceci : on peut se demander si les gouvernements en renflouant les banques n’ont pas simplement différé le problème dans le temps. Mais cette différ(a)nce ayant pour effet de créer une situation historique tout à fait singulière… qui fait que nous ne commençons que maintenant à marcher dans l’inconnu. ( Là où les Etats étaient « restés à l’écart » de la défaillance des banques en 29, ils ont acceptés, en 2008, de prendre sur leur dos cette crise. D’une certaine manière, la défaillance potentielle que devait connaître les banques en 2008 a été « externalisée » sur les Etats… )