Billet invité.
Et si la crise que nous traversons actuellement marquait la fin d’une époque, celle de la croissance économique ? Non parce que le capitalisme aurait perdu la raison en se dévoyant dans une financiarisation devenue incontrôlable, ni même parce que des ressources naturelles de plus en plus rares imposeraient une limite infranchissable à l’expansion de l’économie (ce que nous ne contestons pas), mais plus prosaïquement parce que nos vieilles nations, dites industrialisées, arriveraient au terme d’un long processus de transition économique.
Telle est la thèse que nous souhaitons défendre. Pourquoi en effet, de tous les changements, aussi bien économiques que sanitaires, démographiques, sociaux ou politiques, qui ont marqué la transformation de notre société au cours des derniers siècles, la croissance des activités économiques devrait être le seul qui n’admette point de limites ? Les taux de mortalité et de natalité, dont la décroissance décalée est bien connue sous le nom de transition démographique, ne peuvent descendre jusque zéro, au même titre que les taux de fécondité.
Figure 1. La transition démographique
Inversement, les taux d’alphabétisation ou d’urbanisation ne peuvent évidemment dépasser la barre des 100%. On peut tout aussi bien évoquer d’autres limites à des phénomènes plus difficilement quantifiables : la marche vers l’égalité des sexes ne peut franchir la frontière de l’égalité absolue, de même que la démocratisation ne peut aller au-delà d’une répartition parfaite de l’exercice du pouvoir entre les citoyens (dans l’un et l’autre cas, ces représentations sont, il est vrai, bien sommaires). N’y aurait-il donc aucune borne au phénomène d’expansion de l’économie ?
Il existe très certainement des limites physiques, en termes de rareté des ressources naturelles et de dégradation de l’environnement, mais il semblerait qu’il existe d’autres facteurs, endogènes à la croissance même, qui expliqueraient pourquoi les pays industrialisés se dirigent inéluctablement vers une stabilisation de leur Produit Intérieur Brut (PIB). La croissance du PIB est un fait récent et l’analyse de son évolution historique ne permet pas de penser qu’il s’agit d’une caractéristique permanente de la modernité. La croissance de l’économie ne serait donc pas consubstantielle à la société industrielle, mais un phénomène transitoire, nécessaire à l’avènement de cette dernière. Les travaux de l’historien de l’économie Angus Maddison permettent de retracer l’évolution du PIB des pays industrialisés au cours des deux derniers siècles.
Figure 2. Évolution du PIB per capita des pays industrialisés 1820-2001
Les courbes montrent assez nettement une accélération de la croissance après la Grande Dépression des années 1930, puis, moins distinctement, un ralentissement à partir des années 1970. Les statistiques de l’INSEE indiquent ainsi que, pour la France, le taux de croissance annuel est passé d’une moyenne de 5,6% sur la période 1960-1974, à 2,3% pour les années 1975-2006. Cette évolution ne prendrait-elle pas la forme d’une courbe en S étirée, caractéristique d’une courbe de pénétration, traduisant le passage d’un état de stabilité à un autre ? C’est ainsi que prend forme notre modèle de transition économique, dépassant en l’englobant la seule notion de croissance économique.
Figure 3. Représentation schématique de la transition économique
La croissance ne serait qu’une étape provisoire, nécessaire au passage d’une société où les échanges économiques sont relativement rares, où l’essentiel des besoins est satisfait en dehors de l’économie marchande, à la société actuelle. Celle-ci, qu’on la qualifie d’industrielle ou de consommation, laisse en effet une part bien plus large aux échanges monétisés.
Mais pourquoi donc le PIB devrait-il croître de moins en moins vite, et même, à terme, s’arrêter ? Ne pourrait-il pas poursuivre sa croissance indéfiniment ? L’expansion de l’économie n’est en fait que le reflet de l’industrialisation de la société : plus on mécanise, plus on automatise, plus on rationalise la production, et plus celle-ci doit s’écouler par des circuits marchands. Plus le travail est spécialisé, et plus l’interdépendance monétaire entre travailleurs croît ; il faut en effet acheter tout ce que l’on ne produit pas soi-même. Or il semble bien que l’industrialisation de notre société atteint aujourd’hui ses limites : quand l’essentiel du parc de logements urbains est construit et équipé, quand le territoire est sillonné par un maillon serré de routes et d’autoroutes, quand presque chaque adulte possède sa propre voiture, la demande qui a dopé la croissance des dernières décennies s’essouffle et la production ne peut que croître moins vite, avec pour corollaire des taux de croissance du PIB moindre. Puisque nous vivons dans des pays qualifiés d’industrialisés, il est logique que le processus d’industrialisation marque le pas et que la croissance ralentisse. Le dynamisme des nouvelles technologies, lesquelles ont fortement contribué à la croissance de ces dernières années, ne changera pas fondamentalement la donne : les Technologies de l’Information et de la Communication (TIC) ne constituent que quelques % du PIB, trop peu pour générer une forte croissance de ce dernier.
La croissance économique ne serait donc qu’une phase transitoire d’un processus de mutation de l’économie, de passage d’une société où les échanges marchands sont peu nombreux à une autre où ils constituent la norme. Le ralentissement de l’accroissement du PIB serait donc tout à fait normal dans les pays les plus riches, au même titre que le seraient les taux de croissance très élevés de certains pays asiatiques : les deux ensembles économiques ne se situeraient tout simplement pas à la même étape d’un processus identique. La crise actuelle ne serait alors que la conséquence du refus d’assumer cette tendance vers la croissance nulle, laquelle implique une transformation en profondeur du mode de fonctionnement de notre société, fondé sur la perspective d’une croissance perpétuelle. Enfin, si les événements passés nous ont permis de construire ce modèle de transition économique, sa validité ne pourra être vérifiée que partiellement, compte-tenu d’autres facteurs, notamment énergétiques et écologiques, qui devraient jouer un rôle déterminant dans l’évolution de l’économie mondiale.
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Ce billet est le résumé bien imparfait d’un article éponyme où l’on trouvera les sources des données et graphiques présentés ci-dessus.
113 réponses à “Et si la croissance ne revenait pas ?, par Jean Chamel”
Bonjour,
Autrefois, et encore maintenant dans certains pays, l’organisation familiale etait telle que la tranche 20 – 45 ans faisait des enfants dont la garde etait confiee aux 45 – 65 ans qui s’occupaient egalement des rares 65-90 ans pendant que les 20-45 ans produisaient de quoi nourir tout ce monde.
Aujourd’hui, nous devons confier nos enfants a une creche payante et mettre nos vieux dans une maison de retraite payante.
Le gain n’est pas fameux pour les individus. En revanche, pour les chiffres de la croissance, l’encouragement de l’individualisme a bien fonctionne.
La rapidite des transactions a aussi ete un plus pour la croissance. Qui prend le temps d’acheter, de marchander, de choisir ? Le commerce sur le web, les moyens de paiement ont permis d’accelere les transactions.
Doit on mentionner les divorces et la liberte familiale comme moteur de croissance ?
Quand tous les echanges non marchands deviendront marchands, c’est sur que la croissance aura atteint ses limites. Et il y a des limites physiques aussi : combien de temps pouvons nous consacrer a ces echanges ? Il reste l’homme avec toutes ses insuffisances : peut il manger toujours plus ? Peut il consommer toujours plus ? Peut il connaitre plus de gens ? Peut il aimer plus ?
Il y a souvent des relations entre certaines grandeurs microscopiques et d’autres grandeurs macroscopiques. Ainsi, on doit pouvoir relier la taille d’un empire a la distance que peut parcourir un message/messager en une journee : a pied, a cheval, etc. Ou la taille d’un organisme a la distance que peut parcourir une molecule d’oxygene en son sein en une seconde : ce qui explique qu’une sauterelle soit plus petite qu’un elephant.
Ce serait effectivement tres interessant (meme passionnant) de voir si il peut y avoir une limite macroscopique a l’activite humaine liee aux limites microscopiques de l’etre humain. Dans les grandes villes, il y a toujours une vie de quartier par exemple.
J’avais souleve une autre question recemment finalement assez proche : quelle ditribution des revenus au sein d’une population permettrait de maximiser la valeur de l’argent au sens d’un maximum du PIB ? D’une certaine maniere, il y des limites psychologiques chez l’homme qui lui permettent d’accepter certains ecarts de fortunes, mais pas trop. Un genre de tension/force de rappel qui ramene a un equilibre et qui donne toute sa valeur a l’argent. Je n’ai pas tellement avance sur ce sujet.
Ceci n’est pas une réponse mais une approbation. Notre monde est limité, la croissance devrait l’être sans doute aussi.
La vraie question dans quelle type de phase nous trouvons nous ? Régression, ralentissement, ou fin ?
Sans compter qu’avec tous les produits chimiques que nous rejetons dans la nature, le développement des nano-produits, nous serons bientôt tous des femmes …
Le XY deviendra une denrée rare pour les XX 🙂
Pad quoi se réjouir!
Après plusieurs mois de mensonges du ‘politique’ des deux cotés de l’Atlantique la vérité éclate de plus en plus ..il n’y a aucune reprise…c’est un hoax…et la rechute en W est proche…..
Tous les indices du jour sont en berne et celui ci est le plus alarmant ….
La confiance du consommateur américain est tombé en février à son niveau le plus bas en 10 mois, ses anticipations sur le marché de l’emploi s’étant encore dégradées, selon l’indice du Conference Board. Lire la suite l’article
Cet indice ressort à 46,0 en février contre 56,5 en janvier, au plus bas depuis avril 2009.
Les analystes interrogés par Reuters l’attendaient à 55,0.
Le sous-indice des anticipations ressort à 63,8 contre 77,3 et celui de la conjoncture actuelle chute à 19,4 contre 25,2 en janvier, au plus bas depuis février 1983.
La proportion des consommateurs jugeant qu’il est difficile de trouver un emploi a augmenté à 47,7% contre 46,5% en janvier, tandis que celle de ceux qui jugent qu’il est au contraire facile de trouver un emploi tombe à 3,6% contre 4,4%.reuters
Ce que vous dites tombe tellement sous le sens que l’on se demande presque pourquoi cela doit être dit…
Et le pire, c’est que pour beaucoup, cela est encore, pardonnez-moi, » du Chinois »…
Je vous signale les ouvrages suivants (je ne suis pas actionnaire mais simple lecteur), quelques peu « underground » car non couverts par les gros médias, par ordre d’importance :
« La crise financière en 2008-2010 » par Loîc Abadie, Ed Valys
« 2008-2015: pourquoi l’or va battre la performance des actions.. » par Léonard Sartoni, ed Valys
» Economie et marchés financiers: perspectives 2010-2020″ par T.Béchu ed. Eyrolles
L’ensemble des cycles long terme y sont très bien décrits, avec des hypothèses crédibles; ce que vous décrivez y est déjà largement développé.
Je pense que les « gros » commentateurs, la dizaine que l’on voit partout et qui font leur propre « business » viennent y puiser quelques « idées », puis se perdent en conjectures selon leurs propres intérêts et ceux qu’ils défendent directement (banques, fonds, notamment)
Et si la croissance ne revenait toujours pas, comment pourrions nous de nouveau faire entendre les mêmes choses aux gens en société ?
Quelle grande erreur que de vouloir partout travailler principalement ainsi, et dans l’empressement de plus, du tout commerce sur terre, quelle grande puanteur quand même sur les marchés. Alors bonheur ou malheur de plus sur terre lorsqu’il n’y a plus guère croissance pour tous ? Et oui si la croissance ne revenait toujours pas, c’est sur elle ferait beaucoup moins la grande et la fière notre folle civilisation commerciale !
Que se disent encore les personnes les plus touchés par la crise et si au contraire nous avions fait grandement fausse route malgré toute les belles œuvres supplémentaires produites de nos mains ou de nos têtes pour en flatter, nous enorgueillir c’est sur tout cela n’augure rien de bon pour les autruches.
C’est vraiment pas croyable de voir encore aujourd’hui tant de gens si radins et pingres à la tête des autres quelle belle éducation, quelle belle moralité c’est sur une telle civilisation mercantile ne mérite guère mieux d’être prise en exemple, sortons au plus tôt de ces vaines valeurs si bien sur nous voulons vraiment moins en subir les autres méfaits de plus plus tard, est-ce vraiment bien le cas pour tous les premiers contradicteurs du capitalisme pas si c’est sur. A quoi bon changer demain de système si nous montrons toujours pas encore capables de comprendre certaines choses bien douloureuses.
Je suis convaincu qu’il en sera pas toujours ainsi dans l’histoire, bien évidemment les Marchands du temple ou du monde ne l’entendront pas du tout de cette oreille ! Le mot « commerce « n’a jamais libérer l’esprit du marchand encore moins d’un monde filant tout droit à la faillite matérielle, d’un autre résultat bien plus désastreux à venir et venant d’où cette fois-çi ?
Si seulement nous pouvions encore trouver le temps de nous arrêter, de dire stop cela suffit maintenant nous en avons réellement assez d’être traités comme des bêtes de somme, des sous hommes sous payés, encore trop occupés et conditionnés que nous sommes à ne vivre machinalement que pour ce genre de valeurs, en fait, pire même maintenant pour un plus nombre d’homme devant le journal du soir, à voir, à lire et à réclamer d’autres étiquettes de plus pour se sentir faussement en sécurité.
Paix et sécurité pour tous disaient-ils autrefois pour mieux endormir les gens. Qui irait encore sacrifier une place, un travail, un salaire, son confort, une idéologie, un parti, une marque,
une carrière pour que le monde change réellement de valeurs au bout d’un seul mois de jeûne commercial par exemple ? Ça bien sur nos vaines actuelles ne nous le feront jamais d’abord entendre, et le prophète fut attristé peut-être aurait-il mieux fallu qu’il garda tout cela pour lui dans son cœur, qu’il ne parlât pas et qu’il retourne de nouveau se taire dans le troupeau, au moins il pourra se dire qu’il aura tout essayé pour avertir un plus grand nombre de gens avant que les choses se précipitent et sans que nous puissions mieux y faire quoi que ce soit de moins dérangeant et plus commode pour l’éviter.
Et si la croissance ne revenait toujours pas que pourrions nous dire à nos enfants et dans les écoles de ce monde ? La seule croissance matérielle fait-elle toujours le bonheur des êtres ?
A part les rondeurs de ma bien-aimée, je ne suis pas en expert en courbe,je trouve néanmoins votre approche très passionnante .Il y a des limites infranchissables ,la vitesse de la lumière par exemple.Il n’y a que la connerie qui soit sans bornes
et le génie
Le génie du christianisme ?
non le génie du Mal
Approche effectivement très intéressante, il me semble que je suis assez sensible à celle-ci.
Il subsiste cependant un problème qui n’a été qu’effleuré dans cet article.
C’est le fait que les fortunes monétaires croissent selon l’accumulation des intérêts et des intérêts des intérêts, et ce fait génère symétriquement l’accoissement de l’endettement d’autant.
Dès lors, avec un PIB stable comme ici postulé à juste titre, la répartition du PIB sera toujours davantage inégalitaire comme nous l’observons objectivement.
La paix sociale reste gravement menacé dans ce contexte.
A mon sens, cette stabilisation du PIB ne pourra se maintenir dans des conditions paisibles que si nous en finissons avec ce mécanisme diabolique des intérêts.
Pour ce faire, il n’y a comme solution que la révision de l’ordre monétaire qui nous impose ce délire des croissances exponentielles et illimitées des grandes fortunes au détriment du partage.
Le signe monétaire tel qu’il est et que je qualifie de signe monétaire durable (SMD) impose sa loi perverse dans un contexte où tous les autres biens sont soumis à la dégradation temporelle. C’est pourquoi une croissance nulle n’est possible que si on introduit un signe monétaire marqué par le temps (ou SMT) qui supprimera la rente du capital et résorbera en même temps l’endettement excessif. Dans ces conditions, nous aurions un partage beaucoup plus satisfaisant des richesses désormais non croissantes.
Il me semble qu’il y a des précédents historiques à cette méthode ? Durant la révolution française ?
Continuez johannes, le clou n’est pas encore assez enfoncé !
Je dis presque la même chose dans mon article original. Allez y jeter un oeil, le lien se trouve en bas de mon billet.
euh,je ne vois pas la phase 4, »l’atterissage » ?!
sinon on va au crash à court de kerosene!
Pourquoi s’inquiéter si la croissance ne revenait pas ? Pourquoi s’en faire davantage ?
De toutes façons si le capitalisme ne marche plus, nous pourrons choisir un autre système à la carte, servons nous dans les bibliothèques, des autres livres d’économie par exemple des autres variantes du socialisme, du communisme, du capitalisme, du libéralisme ou alors un mélange des deux premiers ou des trois ou des quatre à la fois un peu de zeste de tout et cela devrait quand le même le faire au bout du compte, c’est juste que nous avons pas encore assez souffert et expérimenter pour l’homme.
C’est important de garder la foi, courage le bout du tunnel n’est peut-être pas encore pour demain pour nos petits pieds endoloris, sinon mon cher collègue n’auriez-vous pas plutôt une pince monseigneur et de meilleure qualité non manufacturé dans votre poche.
Eeeet siiiii la croiiiiisaaaaanccce ne reveeenaiiiiiiit touuuujouuurs pas ? Quel autre refrain je pourrais chanter dans la galèèèèèèèèèèère et à l’auuuutre.
Merci pour ce billet qui synthétise clairement ce que je pense confusément depuis pas mal de temps déjà!
Je me suis souvent demandé pourquoi cette idée semblait si dure à faire passer.
Pourtant, n’y a-t-il pas eu au 19eme siècle quantités de découvertes et de changements majeurs sans que l’on ne voie de courbe de croissance aussi prononcée que celle du 20eme?
Une des raisons à la résistance à ce modèle est peut-être dans ce qu’il implique de transformer notre système économique en un système essentiellement redistributif.
Cela n’est pas fait pour plaire aux quelques « fat cats » mondialisés, principaux bénéficiaires de la « trickle down » economics (et tenants du toujours plus… pour eux) mais peut-être pas beaucoup plus au reste de la population, pour qui cela pourrait impliquer une forme de stagnation sociale…
Ce qu’il nous reste encore à espérer, c’est malgré tout que la courbe reste à peu près en S (ou bien est-ce un fantasme d’habitant de pays riche?) plutôt que de se transformer en courbe en cloche sous le poids des contraintes écologiques (ou bien est-ce encore une autre fantasme d’habitant de pays riche?)
Intéressant, mais vous ne parlez que d’une toute petite partie de la population mondiale : les pays de l’OCDE prétendus « développés » comptent environ 18% de la population mondiale. Hors les autres 82% de la population mondiale ne rêvent que d’une chose : atteindre notre niveau de sur-consommation.
« Celui qui croit qu’une croissance exponentielle peut continuer indéfiniment dans un monde fini est soit un fou, soit un économiste. » Kenneth E. Boulding
Ne pas oublier non plus que cette croissance exponentielle n’a été possible que par l’énergie quasi gratuite. Que sont 200 ans à l’échelle de l’humanité? Une parenthèse « enchantée » ou plutôt « désenchantée » compte tenu de la sur-exploitation des autres ressources et des destructions environnementales qu’elle cause.
Les sorciers adorateurs de la techno-science prétendent que la technologie nous sauvera car on trouverait toujours de nouvelles énergies plus puissantes, plus performantes. C’est oublier un peu vite que ces mêmes sorciers nous ont toujours promis que les avancées technologiques permettront des réductions de consommation, alors que l’expérience prouve juste le contraire : on a constaté une augmentation totale de la consommation d’énergie (effet rebond, paradoxe de Jevons). Si on peut aller plus loin, plus vite, et bien on va plus loin et plus vite, rien ne nous arrête.
Bref, je crois que la phase 3 ne sera pas une stabilisation au même niveau « matériel » que maintenant, car c’est insoutenable physiquement, énergétiquement et environnementalement . Mais plutôt un retour à un niveau soutenable. On sera vite fixé : « les vingt prochaines années seront complètement différentes des vingt dernières années » Chris Martenson
Merci Fujisan, j’allais faire les mêmes remarques et citer le même lien !
Sûr que la croissance ne peut pas être éternelle, mais la conclusion me laisse perplexe : « La crise actuelle ne serait alors que la conséquence du refus d’assumer cette tendance vers la croissance nulle, laquelle implique une transformation en profondeur du mode de fonctionnement de notre société, fondé sur la perspective d’une croissance perpétuelle. » Je ne crois pas qu’une transition vers la croissance nulle puisse se faire à PIB constant. La transition implique probablement une chute préalable du PIB. Quant à ce « refus d’assumer » qui parle de la société comme d’une personne, il ne convient pas au sujet. Toutefois, la perspective d’avoir à se serrer la ceinture, après 3 décennies qui ont vu une toute petite minorité s’enrichir démesurément et la grande masse s’appauvrir, ne peut qu’être difficile à « assumer », en effet… Mais ce ne peut être qu’une conséquence, pas une cause. C’est bien « la crise » qui est la cause première de toute l’actualité.
Bonsoir,
Si la ressource n’est pas le problème, pouvez-vous m’expliquer pourquoi on a fait tant de foin autour des biofuels, pourquoi on se rue sur des réserves de mauvaises qualités voire des réserves qui nécessitent des investissements faramineux. Je pense que la fin de l’abondance en énergie est la première cause de ce que nous vivons, à savoir une incapacité à faire beacoup plus, ce qui pose problème si on veut couvrir le capital hypertrophié de nos sociétés hypercomplexes. Et puis demandons-nous ce qui réellement a de la valeur, le tangible ou le virtuel.
Mettons les choses dans l’ordre du point de vue du pétrole (oilposter.org).
– Les trente glorieuses correspondent à une accélération de l’exploitation pétrolière qui s’est elle-même traduite par une expansion inégalée de l’humain, c’est aussi la consécration de la mondialisation. L’économie est alors bénie par la loi des rendements croissants. Le productivisme est subsidié par une énergie abondante et peu chère. Hausse des investissements. Cela reste encore maintenant ce que l’on veut retrouver.
– Les trente piteuses avec une augmentation constante de l’exploitation pétrolière qui s’est traduite par la découverte de contraintes à l’expansion et l’augmentation de nombre d’exclus. Le Business As Usual est la recette magique sensée nous tirer d’affaire. La mondialisation devient la norme et de nouveaux acteurs entrent dans le jeu.
– Le plateau pétrolier (2004-2008) engendre une destruction de la demande par la hausse des prix et la baisse du pouvoir d’achat, l’endettement privé atteint ses limites. La demande se trouve contrainte et à la hausse de la consommation se substitue une redistribution du pouvoir d’achat à l’échelle mondiale. On ressent les premiers effets de la hausse des coûts l’énergie sur la plupart des denrées et ressources. Ceux qui n’ont plus de ressources sont les perdants.
– Crise économique et financière. Limite au crédit et limite à l’endettement des Etats. Evaporation d’une partie du capital qui est de moins en moins soutenu par une croissance future qui s’éloigne. Destruction de la demande via le rétrécissement économique généralisé et particulièrement dans les secteurs gourmand en énergie. Chute des investissments. Chute des flux.
– Décroissance et destruction de la demande. L’économie est soumise aux inconvénients des rendements décroissants. La question est : « Investit-on dans le passé ou dans le futur? Que veut-on? »
Pour appuyer mes dires, je parie que la découverte d’une nouvelle source d’énergie utilsable à terme qui apporterait au moins autant que le pétrole, changerait fondamentalement la donne, mais on ne l’a pas ! Alors si quelqu’un a une idée, cela arrangerait énormément de monde.
Et pour aller plus loin – lien entre Pétrole et PNB
http://www.jpods.com/HomeRisk.html
Voir mon post au sujet des « shale gaz » ou schistes bitumeux, sans doute encore un mirage.
http://www.pauljorion.com/blog/?p=8397#comment-59426
@Papimam.
L’association pour l’étude du pic du pétrole et du gaz (ASPO) a vu juste en associant ces deux énergies. Le gaz naturel permettra certaines alternatives à court terme alors que le pétrole, le sang vital de la mondialisation, se dérobe sous nos pieds.
Le taux de déclin du gaz naturel est plus élevé que le taux de déclin du pétrole ce qui risque de nous pénaliser doublement quand le pic gazier surviendra, celui-ci étant prévu quelques années après celui du pétrole. Le gaz de schiste n’est pas la panacée, il requiert l’utilisation d’énormes quantités d’eau, il faut en outre noter la courte durée de vie de cs types d’exploitation avec des taux de déclin des plus élevés. C’est en effet un mirage de plus qui permet d’entretenir l’illusion que tout va bien côté énergie.
Cela me fait penser à l’efficacité énergétique (cfr. le paradoxe de Jevons). On a l’impression d’aller dans le bon sens alors que l’on aggrave notre cas. Le gros problème de l’efficacité énergétique est qu’elle n’aide pas du tout à se défaire de la dépendance, bien au contraire, car elle se caractérise par toujours plus d’acteurs entrant en dépendance. Même si les nouveaux acteurs consomment moins que leurs prédécesseurs, la consommation totale augmente et les variations de prix / pénuries ont un impact croissant sur la société prise dans son ensemble.
Conclusion – Bien des choses nous donnent l’illusion de régler le problème alors qu’elles ne font que le postposer tout en l’aggravant.
Voilà une analyse très instructive, M. Chamel.
Je ne sais pas si vous vous considérez ou non comme appartenant à la tribu hétéroclite des décroissants, mais quoi qu’il en soit ce texte ajoute de l’eau à leur moulin. Moulin qui est aussi un peu le mien, d’ailleurs, même si ma décroissance personnelle se fait en silence et résulte de circonstances indépendantes de ma volonté.
Les arguments s’accumulent pour discréditer le dogme de la croissance : finitude du monde, pic pétrolier, mutation climatique, limites psychologiques de la capacité de l’être humain à endurer sa propre transformation en marchandise,… J’en passe certainement. Vous y ajoutez un élément de choix, d’une clarté aveuglante, qui ridiculise d’autant plus notre cadre théorique lié à une mauvaise compréhension de la notion de progrès attachée au quantitatif au détriment du qualitatif. Un cadre théorique génétiquement programmé à lâcher la proie pour l’ombre…
La comparaison que vous nous proposez entre la courbe en S de la prétendue croissance économique (« prétendue » parce que ne reflétant pas les externalités liées à la dégradation de tout ce qu’elle touche) et celle des indices de natalité et de fécondité est très parlante.
Merci beaucoup, votre texte a semé une pagaille stimulante parmi les quelques neurones que je suis parvenu à garder en vie.
Cela fait bien longtemps que la croissance du PIB ne vient plus que de l’inflation, à titre d’exemple il ne se vendra pas plus de voitures en 2010 au états unis qu’il ne s’en est vendu en 1981.
Octobre à novembre 2009, Jean Gadrey a édité 4 billets bien documentés illustrant « la baisse tendancielle des taux de croissance » qui confortent ce billet (les billets de JG ne sont pas référencés séparément, il faut donc faire l’effort d’aller à la date indiquée):
http://www.alternatives-economiques.fr/blogs/gadrey
Dans ce contexte, l’accroissement des gains financiers ne peut en effet se faire qu’en accroissant les dettes et les inégalités.
Il reste quand même des domaines qui ont de beaux jours devant eux, je pense aux énergies nouvelles et en particulier les énergies renouvelables de la mer pour lesquelles l’Ecosse met les bouchées doubles. Le bâtiment qui a un énorme champ de renouvellement ainsi que les transports. La révolution numérique stimule cette mutation. Mais il est toutefois probable que ces marchés émergents qui sont très prometteurs ne suffiront pas naturellement à redistribuer l’activité.
De mon point de vue, cette question de la redistribution de l’activité est un angle mort de la pensée politique.
Mais c’est pas l’activité qu’il faut redistribuer ce sont les sous !
A Louise,
Oui, bien sûr ce sont les sous, et je pense à une redistribution d’activité rémunérée, pas à du bénévolat. L’accès à une activité remunérée me semble essentielle, parce qu’elle apporte beaucoup plus que des sous, c’est pour ça que c’est important d’y penser.
A Paul Jorion,
je serais intéressée de lire sous votre plume, un développement sur ce dont vous faites l’éloge en Chine, à savoir l’annonce de l’augmentation des salaires et la question de la croissance comme ci-dessus traitée. Gagner plus pour alimenter la consommation pour relancer la croissance qui serait créatrice d’emplois? Je veux dire: indépendamment de considérations sur l’écologie, le travail ou la perte de sens…y a t il selon vous encore un avenir à la croissance, le plein emploi à temps plein…
Vous croyez vraiment qu’il n’y a pas d’autre finalité à une augmentation des salaires qu’une relance de la croissance ? Il y a plusieurs options : 1) vous n’avez jamais eu de problème de fins de mois, 2) vous sortez d’une grande école de commerce, 3) les deux. 😉
Pour être sérieux : on peut augmenter les salaires dans un contexte de non-croissance, voire de décroissance, en diminuant le revenu des investisseurs et celui des dirigeants d’entreprises (une solution, c’est vrai, rarement envisagée).
Même Henri Ford savait qu’il devait payer assez ses ouvriers pour qu’ils puissent acheter la camelote qu’ils fabriquaient.
« Gagner plus pour alimenter la consommation pour relancer la croissance qui serait créatrice d’emplois? Je veux dire: indépendamment de considérations sur l’écologie, le travail ou la perte de sens…y a t il selon vous encore un avenir à la croissance, le plein emploi à temps plein… »
Il faut savourer ce « indépendamment », une vraie perle, vous rendez-vous vraiment compte de ce que ce » indépendamment » implique ?
Indépendamment, c’est beau, c’est horrible.
quand j’étais petit, en ouvrant certaines encyclopédies, il m’arrivait de tomber sur les chiffres du pib par habitant en France et à ma grande surprise ce chiffre était largement supérieur au salaire moyen que j’estimais plus ou moins bien…depuis j’ai compris que la masse salariale tournait autour de 63% du pib en France (c’était 74% en 1981 et environ 68% à la fin des années 1960), donc oui théoriquement on pourrait et on devrait revenir aux niveaux du début des années 1970 s’il y avait moins de picsou…
Dans un contexte de décroissance durable (à l’échelle d’une vie), l’investisseur, le dirigeant de multinationales et même d’entreprise de quelques milliers d’employés disparaît…on reviendrait à une économie locale, la mondialisation oubliée, les théories macroéconomiques (et microéconomiques tant qu’on y est) du domaine de la curiosité historique et l’utilité de ce blog pourrait même être remise en cause ! 😀
@ Paul
Les investisseurs et les dirigeants d’entreprises ne veulent pas gagner moins. Ca c’est pour les subalternes et les pauvres. Voilà pourquoi ce n’est jamais envisagé…par eux.
A communication,
je ne sais pas ce que ça implique pour vous, je sais par contre quel sens à ce mot (indépendamment). Je suis du coté des objecteurs de croissance, pour une diminution drastique du temps de travail et l’instauration du revenu de subsistance, et ce, pour des question d’écologie, de réflexion autour du travail et de la perte de sens dans une société hyper consommatrice… Sauf que, militant à mon petit niveau pour les idées d’une asso comme Utopia (décroissantiste), je sais que c’est pas facile à faire passer comme message, sous ces angles là. C’est pourquoi je m’enquière auprès de Paul Jorion, sur le cheminement qui le conduit à proposer comme solution l’augmentation de salaire (et je ne peux que le suivre) , comme cela a été annoncé en Chine. Comme je l’ai écrit également, je suis sans emploi, donc cette mesure ne me concernerait pas.(crapaud rouge m’a répondu sur ce point) En fait, je vise l’idée dans les partis de gauche qu’il faut augmenter le pouvoir d’achat, pour relancer la consommation, pour créer de la croissance (même si je ne prête bien évidemment pas cette idée à notre hôte car il ne l’a jamais exprimée) et me demande si d’un point de vue strictement économique (admettons) cela a encore du sens ou pas. Ce que je cherche ce sont des billes pour contrer des arguments, sur le même terrain que mes détracteurs qui me répondent très souvent, avec condescendance que c’est irréaliste…
à lou
La question que vous posez me semble pertinente et la réponse de Paul Jorion aussi !
Je m’explique :
1/ Oui nous sommes devant une contradiction montée par le capitalisme : la relance par l’augmentation des salaires (par la demande)qui pousse à la consommation, à l’inflation qui reprend un part des augmentations, etc…
ou la relance par le développement des produits, la baisse des prix, (par l’offre) qui pousse au développement des capacités de production, à la surproduction, au gaspillage…
2/ Non cette contradiction n’est pas fatale ! Il y a un moyen de développer la consommation au profit de ceux qui n’en ont pas assez et de leur donner un pouvoir d’achat suffisant pour en profiter… c’est le développement des services publics (à la française, c’est-à-dire à but non lucratif et indépendants pour l’essentiel du budget de l’Etat) .
Par ce moyen (suppression de l’exploitation de la survaleur) le coût de la consommation est moins élevé et répond à des besoins que démocratiquement les citoyens ont décidé de satisfaire. Les salaires les plus bas peuvent ainsi augmenter et le pouvoir d’achat augmenter pour tous par le biais des services publics.
Pour ceux qui en douteraient, une étude des canadiens montre qu’il est plus profitable pour les classes moyennes de payer davantage d’impôts et de bénéficier en contrepartie des services publics (elles en profitent en effet davantage, relativement) : cf http://www.policyalternatives.ca/reports/2009/04/reportsstudies2191/?pa=BB736455
3/ Le même raisonnement peut être tenu pour la solidarité collective (sécu et retraites) qui profite à tous et donne du pouvoir d’achat en permettant ainsi à l’économie de tourner pour répondre aux besoins directs des gens (ils ne placent pas leur argent dans des bas de laine, ils consomment au fur et à mesure l’essentiel de leurs pensions ou indemnités).
C’est bien cette stratégie qui, mise en œuvre par le CNR à partir de 1944, a permis à la France, pays ruiné et vandalisé pendant 4 ans, de devenir en 20 ans une des premières puissances mondiales… Avec des conditions de vie que beaucoup nous envient (enviaient), aux USA et en GB particulièrement !
4/ Quant à la Chine, si depuis des décennies elle avait suivi un chemin démocratique de solidarité collective en mettant en oeuvre une sécu réelle et des retraites, peut-être qu’elle ne serait pas devenue l’arrière-boutique des USA mais qu’elle n’aurait plus autant de paysans pauvres et ne se demanderait pas comment « harmoniser » son développement… En France nous discutions alors de l’aménagement du territoire et des plans incitatifs que devaient suivre les investissements publics.
5/ Il est clair que le capitalisme ne peut contrer la baisse tendancielle du taux de profit qu’en tapant dans la caisse des solidarités collectives et en appauvrissant les plus pauvres, en abaissant les salaires dans l’ensemble du monde au niveau le plus bas. C’est cela que vont nous vendre Sarkozy-Fillon dès que les élections régionales seront passées (A propos ! Ne vous trompez pas de bulletin quand même !)
-Les records sportifs ont une limite naturelle;
on peut parler actuellement de transition vers un plateau
sans doute stable, pour l’ athlétisme.
-« […]Cette évolution ne prendrait-elle pas la forme d’une courbe
en S étirée, caractéristique d’une courbe de pénétration,
traduisant le passage d’un état de stabilité à un autre ?
C’est ainsi que prend forme[…] »:
Amusant. Cela ressemble à la production des « chartistes »
qui tripatouillent dans la divination multi-dimensionnelle.
Une courbe représentant graphiquement
un phénomène ne « prouve » rien en elle-même.
– Le graphique multi-pays est sans doute faux.
Il représente à partir de 1980 l’envolée des activités phynancières
sans beaucoup de substance réelle.
La croissance de l’Irlande est impressionante:
c’ était du vent.
Le crédo de la croissance permet de cacher
la montée de inégalités dans la distribution de
cette croissance. Si elle a une limite naturelle,
il deviendra rapidement évident à tous que
les pauvres subventionnent les riches.
La croissance ? mais c’est très simple,
c’est ce qui permet aux pauvres de garder
l’ espoir qu’ eux aussi pourront participer
au festin. Sans croissance, Perrette avec son pot au lait
n’ a aucune chance.
Je suis sans emploi donc l’augmentation des salaires, en effet, ne me concerne pas, et je ne sors pas d’une école de commerce. Bien évidemment que je souhaite à tous ceux qui ont un revenu insuffisant pour vivre qu’il soit augmenté. Donc en ça, je comprends que ce soit une solution que vous mettez en avant. pour ceux qui ont un boulot.
Exact ! C’est pourquoi certains préconisent, – et je suis plutôt de leur avis -, une diminution drastique du temps de travail, seul moyen de répartir vraiment les revenus.
Analyse très intéressante.
Il serait bon toutefois de mettre ces courbes en perspective avec le temps long de l’histoire.
Je pense notamment aux deux crises majeures de l’histoire européenne, celle du IIIe siècle et du XIVe siècle après J.C.
Est ce que la mesure de la croissance telle qu’elle est faite n’est pas obsolète alors que les services et l’information ont pris de l’ampleur par rapport aux consommations nécessitant des matières premières limitées limitant la croissance telle que calculée ?
Intéressant. Ca donne à réfléchir. Et à penser en-dehors du catastrophisme.
Je parierais néanmoins sur une décroissance du PIB avant la stabilisation, parce que je pense qu’on a du déjà dépassé le niveau soutenable à long terme.
Créons le hedge funds Paul Jorion !
« Et si la croissance ne revenait pas…? » Et alors ?
Ou est le drame ? Je considère bien vivre dans un monde fini et avec des revenus qui n’évoluent plus depuis quelques années.
La question qui se pose dès lors que l’on admet l’a-croissance c’est « comment nos dirigeants vont pouvoir régulièrement exploser les budgets dans se poser de question »?
Car des questions l’idée en pose : nécessaire révision de la répartition des richesses, amélioration de l’efficacité des consommateurs de budgets (l’Etat, Les collectivités) à financement constant, ré-équilibrage géopolitique pour que tout le monde en croque, économies d’énergie, transferts technologiques…
La croissance à surtout servie de tapis sous lesquels les politiques ont camouflés leur incompétence, permettant d’absorber les ecarts et les erreurs stratégiques. Auparavant c’est la guerre qui permettait de se sortir du marasme, ou les dévaluations. On ne peut plus ni l’une ni l’autre…
demandez aux yougoslaves, s’il est impossible de faire la guerre dans un monde post-hiroshima…
puis demandez vous si le démantèlement des états-nations se fait bien pour les raisons qu’on nous expose…
Nous sommes nombreux à avoir ce sentiment que nous avons atteint un sommet qui sera difficilement dépassé.
Ma conviction est que la croissance du PIB a été entretenue par la finance ces 30 dernières années, il serait sans doute intéressant qu’un futur prix Nobel tente de réunir les informations.
Pour simpliste, il me semble logique que dès que nous avons maison, voiture, frigo, Tv, nous passons de l’investissement au renouvellement, dès le moment où la natalité baisse, peu de nouveaux clients à installer si je peux parler ainsi…les 30 glorieuses correspondants à la reconstruction et à suivre avec le baby boum…
Ensuite la société investi depuis 2 siècles, souvent nos alimentations en eaux date de deux siècles, les pays en développement ont tout à construire, bien évidemment la croissance y est plus importante…
Cette réflexion est aussi Malthusienne, Malthus n’avait pas envisagé que la machine à vapeur donnerait l’automobile, l’électricité l’équipement de la maison…ce qui fait que le XX ème siècle lui donna tort…
Ce qui différencie notre société actuelle est que les gains de productivité ont atteint un tel niveau que le plein emploi n’est et ne sera plus…
Ajoutez à cela que nous devons nous mesurer à des chinois qui sont bien moins coûteux que nous, que nos entreprises ne sont pas protégés de ce différentiel infernal de coûts…
Bien évidemment la croissance est de force anémiée et elle l’est depuis une bonne trentaine d’année…
L’objet de ce blog, l’idée de M Jorion, même si à plusieurs reprises il a émis des idées très malthusiennes, est que la crise actuelle, celle de la finance, le monde tente de la guérir et donc sa réflexion n’est pas du domaine de Malthus…mais comment guérir le monde des erreurs de la finance.
J’ai une idée plus proche de la nature humaine, je ne pense pas que ce soit en empêchant les paris que nous résoudrons l’équation posée par cette crise, en fait je crois que notre société a supprimé le risque pour les puissants…
Etre politique, en France, en Europe, c’est avoir aussitôt des revenus et des retraites dorées, la finance a joué en pariant sur ses propres pertes, hors c’est le sauvetage d’AIG qui a permis à ce pari d’être gagnant…logiquement les banquiers devaient perdre ce pari stupide…ne pouvant eux-mêmes s’assrurer entre eux.
Les CDO ont été finalement supportés par les états à travers AIG et le reprise des dettes pourries par les banques centrales, ce faisant elles ont compris qu’elles n’ont plus de risques, ce n’est pas les paris qu’il faut interdire mais le paiement des assurances par d’autres que ceux qui devaient les assurer…
Les banquiers ont parié contre eux et entre eux, ce sont les états qui pensant que la disparition des banques ferait sauter la planète… il fallait donc nationaliser les banques sans dédommager les actionnaires… la question en fait est pourquoi cela n’a pas été fait…. et ce me semble les politiques continuent à laisser penser qu’ils paieront encore alors pourquoi se priver…
Maintenant on dit TBTF, je ne suis pas certain que cela soit la bonne idée, les dettes de la BNP a elle seule sont supérieures au PIB de la France, qui pourrait assumer la chute de la BNP…. personne…
Bref entre la non reprise de la croissance qui me semble bien évidente pour nos pays depuis de si longues années, les banquiers ne sont pas cons, dans ce monde qui file tel le titanic, tous les coups sont permis, je dirai que c’est le dernier grand banquet de la planète croissance…alors le champagne coule à flot sous forme de bonus…
Reste que nous pouvons espérer une découverte miraculeuse et c’est sans doute à ce niveau que l’aide des états à la crise sera si gravissime, les fonds perdus manqueront lorsque le pic de pétrole se révélera et qu’il faudra très sérieusement penser à réfléchir à la suite…
La perte de confiance de la société civile liée à toutes ces mauvaises nouvelles et décisions fera croire que la fin du monde est arrivée, c’est in fine ce qui me fait le plus peur, s’adapter à moins et compte tenu des gâchis de la société moderne est plausible mais restaurer la confiance du peuple vers les hommes qui nous gouvernent me semble hypothétique…
En ce sens le billet du début de semaine de M. Jorion sur la perte de confiance des américains sur les hommes qui les dirigent est si grave… lorsqu’il y a un sauve qui peut général, il faut une forte personnalité et bcp de respect des autres pour être écouté, actuellement mis à part Madame Merkel, je ne vois pas de personne crédible dans ce monde pour être entendue si cela devait se produire…
» je ne vois pas de personne crédible dans ce monde pour être entendue si cela devait se produire… »
Avec tant d’argent comme il est tellement plus facile de corrompre et d’influencer l’esprit de l’homme moderne. Quel est encore le moyen le plus rapide de nos jours pour faire de nouveau
le malin à l’antenne, remplir rapidement les caisses de certaines antennes ! Oh toi qui voulait tellement briller comme un astre politique, pourquoi as-tu laisser faire une telle ignominie de plus.
Et si la confiance et la croissance ne revenait toujours pas après un autre plus grand dégout de plus du politique ? Surtout lorsqu’on découvre que la plupart des grandes banques américaines
ou mondiales sont maintenant partout. Comment les liens se sont-ils tissés peu à peu entre l’administration américaine et les plus grands démons de la finance mondiale ? Quelle horreur !
« Ajoutez à cela que nous devons nous mesurer à des chinois qui sont bien moins coûteux que nous, que nos entreprises ne sont pas protégés de ce différentiel infernal de coûts… »
Laissez donc les chinois jouer avec leurs jouets en plastique.
voir Didier Super: http://www.youtube.com/watch?v=4oOwNELLCJ4
Bonjour
Je trouve votre article très interessant. J’aimerais pousser le raisonnement plus loin, et hors considérations energetique et ecologique. Ne pourrait-on imaginer qu’une fois atteint le stade de société industrialisé, une fois admis que l’innovation et le recyclage n’y contribue qu’à une faible part, le plus puissant facteur capable de produire de la croissance soit l’ »encouragement » des inégalités…
@ un intéressant changement de perpective *
La question que vous posez me semble intéressante à plus d’un titre : àla fois sur le fond et sur la forme
Sur la forme votre questionnement est typique de l’économie politique qui a toujours réflechi « aux limites » de l’univers marchand ( c’est Ricardo qui a le premier parlé de limites physiques à la croissance). Alors que les raisonnements de la science économique nous rendent aveugles à ces limites
Sur le fond ce que vous dites est à la fois évident et limité
EVIDENT car on voit bien que l’absence de reprise est en partie due à l’absence de perspective d’investissement productif (c’est très sensible dans l’innovation dans les NTIC – chose que je peux « révéler » maintenant)
PAR CONTRE vous ne voyez pas qu’un processus de réorientation des logiques d’investissement et de production est en cours dans les entreprises autour des thématiques du développement durable. On a longtemps pensé que c’ »était du flan’, ‘ un supplément d’âme pour Dir COM’, mais mes observations me montrent que la Crise fionancière accélère la pénétration de ce genre de problématiques ..
Lorsqu’il y aura effet de masse – si effet de masse il y a – il peut se dédégare quelque chose comme une tendance positive
Ceci dit FNUR a raison la mesure de la croissance et au-delà la mesure économique ( comptable) devient de plus en plus discutable
Cordialement
Je vous propose le PIBED (PIB équitable et durable) pour mesurer l’effet de nos efforts à améliorer notre condition économique moyenne. Il s’agit simplement du PIB pondéré par un facteur d’empreinte écologique et par un facteur d’équité.
http://solidariteliberale.hautetfort.com/archive/2008/06/27/pib-et-idde.html
Bien entendu, cette mesure est très imparfaite et aurait une certaine durée de validité, comme le PIB était significatif du développement jusque vers 1970 pour l’Europe et les USA.
Le Développement Durable n’est pas du flan, les chinois l’ont bien compris qui sont les leaders dans la production d’éoliennes, de panneaux solaires et de batteries pour voitures électriques. La nouvelle bulle verte, qui n’a rien d’écolo mais qui peut rapporter gros!
Bonsoir,
Je vous cite : »La croissance économique ne serait donc qu’une phase transitoire d’un processus de mutation de l’économie, de passage d’une société où les échanges marchands sont peu nombreux à une autre où ils constituent la norme. Le ralentissement de l’accroissement du PIB serait donc tout à fait normal dans les pays les plus riches, au même titre que le seraient les taux de croissance très élevés de certains pays asiatiques : les deux ensembles économiques ne se situeraient tout simplement pas à la même étape d’un processus identique. La crise actuelle ne serait alors que la conséquence du refus d’assumer cette tendance vers la croissance nulle, laquelle implique une transformation en profondeur du mode de fonctionnement de notre société, fondé sur la perspective d’une croissance perpétuelle. Enfin, si les événements passés nous ont permis de construire ce modèle de transition économique, sa validité ne pourra être vérifiée que partiellement, compte-tenu d’autres facteurs, notamment énergétiques et écologiques, qui devraient jouer un rôle déterminant dans l’évolution de l’économie mondiale. »
Commentaire : Je doute que la Grande Crise actuelle soit le résultat du passage d’une « d’une société où les échanges marchands sont peu nombreux à une autre où ils constituent la norme », tout simplement parce que pour qu’il y ait échange, il faut des choses à échanger et concrètement, je ne vois pas bien ce que les pays européens (et aussi les USA d’ailleurs) vont avoir à échanger (aux chinois) par exemple : ni énergie, ni produits finis ou semi finis issus d’une industrie moribonde, ni matières premières… Mis à part l’espoir d’une autosuffisance alimentaire…
Par ailleurs, la notion d’échange généralisée décrite ne peut se faire qu’avec de l’argent (l’argent a pour caractéristique une fongibilité absolue qui rend possible l’échange marchand de tout et n’importe quoi, évalués à son aune). Or, nous commençons à savoir ce qu’il va advenir de ce bel argent (c’est-à-dire la monnaie) concernant aussi bien l’euro que le dollar USA…
Alors, le « passage à une société où les échanges marchands constituent la norme », décrit ci-dessus, me semble être un postulat pour le moins incertain.
Cordialement,
C’est très intéressant de parler de crise en W : c’est en quelque sorte insinuer que tôt ou tard la croissance et la prospérité pour tous reviendront mais peut-être que l’on devrait plutôt parler de crise en VL avec une longue phase amorphe…
C’est très intéressant également de comparer croissance économique et transitions démographiques mais j’ai un seul hic : il y a dans d’autres parties du monde de la croissance économique…vous ne faîtes par ailleurs aucune hypothèse sur le fait que croissance économique et croissance démographique auraient des liens. La révolution industrielle au XIX ème siècle correspond à une forte croissance démographique (fort taux de natalité et taux de mortalité en chute libre) idem dans une moindre mesure pour les trente glorieuses et dans ce cas là on pourrait supposer que dans d’autres continents il y ait encore de la croissance, chose idéale pour les prédateurs de la finance qui ne font que rechercher des débouchés…et là on devrait non pas parler de croissance nulle mais même de décroissance donc de pays qui en vieillissant deviennent moins riche (en terme de valeur ajoutée) et donc j’ai du mal à me faire à votre idée où in fine le monde entier serait tout heureux avec une croissance nulle…j’ai du mal avec votre conception téléologique de l’histoire (le terme de limite m’a immédiatement mis la puce à l’oreille).
Une croissance négative dans une partie du monde pendant un long moment va forcément entraîner du fait des déséquilibres actuels d’autres déséquilibres et de nouveaux rapports de force et des nouvelles guerres, domination etc.
et finalement tout s’inverserait dans cinq cents ou mille années : un monde avec deux ou trois milliards d’habitants (à mon avis la population mondiale commencera à décroître entre 2050 et 2070), une Europe qui serait sous-développée, une Chine et une Afrique qui seraient mieux sorties du « second moyen-âge » qui a touché l’humanité etc etc etc…pourquoi pas des cycles plus ou moins périodique au lieu des limites enfin de compte ?
Tout est expliqué dans cet article, il n’y a besoin d’aucune raison supplémentaire pour expliquer la fin de la croissance :
http://contreinfo.info/article.php3?id_article=2983
Le facteur principal est la productivité, beaucoup plus important que tout autre facteur de par sa magnitude : Aucun autre facteur n’augmente autant que la productivité, il est par conséquent inutile d’évoquer d’autres causes.
Et la croissance n’a jamais eu lieu. Vous avez vu une croissance, ce n’était pas LA croissance; mais une tricherie à coup de dettes, et de trafiques en tout genres !
N’abusez pas des questions réthoriques… Non, une croissance indéfinie n’a jamais été envisagée par quiconque se mettait à penser. L’invalidité de l’hypothèse capitaliste est aussi évidente que le bleu du ciel.