Ce texte est un « article presslib’ » (*)
Je participe donc aux entretiens d’Auxerre sur le thème de l’argent, présidés par Michel Wieviorka, qui se terminent ce soir dans la ville ancienne du même nom.
Hier, la journée avait commencé par ma présence comme invité, de 7h00 à 8h30, sur France Bleu – Auxerre. J’ai eu le sentiment que ça se passait très bien durant l’émission, et j’en ai eu la confirmation durant la journée, venant de la part de plusieurs personnes qui avaient eu l’occasion de l’écouter. Particulièrement appréciée apparemment mon évocation de « Se réveiller un matin dans un monde sans argent ».
Ce sont deux dames jusqu’ici dont les interventions m’ont particulièrement impressionné : Dominique Méda et Laurence Fontaine.
Dominique Méda est revenue sur les thèmes de son ouvrage Au-delà du PIB : Pour une autre mesure de la richesse. On se demande dès ses premières observations : « Pourquoi ne lui a-t-on pas demandé à elle ? » On se rend compte ensuite, au côté corrosif de ses remarques relatives à l’ignorance du Comité Stiglitz-Sen pour des dimensions du bien-être comme les inégalités, l’environnement, la violence, la santé et l’éducation, que les démangeaisons dues à son poil-à-gratter auraient été jugées insupportables par les autres participants. Excellente question posée par l’oratrice : « Pourquoi ne pas avoir ouvert le débat ? »
Laurence Fontaine, elle, a approfondi quelques-uns des thèmes de son L’économie morale : Pauvreté, crédit et confiance dans l’Europe préindustrielle, en particulier, sur les rapports respectifs de l’aristocratie et du petit peuple avec l’argent, et surtout, sur la formation du prix entre acheteur et vendeur dans les transactions où ces « états » sont impliqués. J’ai entendu là de fort belles illustrations – empruntées à des récits d’époque – du modèle aristotélicien de la formation des prix selon le statut réciproque, principe que l’on peut résumer ainsi : le riche paie peu ou pas du tout, le pauvre paie le prix fort.
A noter encore, les « définitions des mots de la crise » présentées par Philippe Frémeaux d’Alternatives Économiques, toutes irréprochables sur le plan technique, présentées cependant dans différents styles allant du sérieux à la boutade, en passant par la charge politique, un mélange des genres qui provoqua plus d’un regard interloqué entre membres du public.
Quant à ma propre présentation sur le thème : « Qu’est-ce que l’argent ? », elle fut très bien reçue. Je ne m’avance pas à la légère : je le sais par la douzaine de personnes qui vinrent ensuite m’en assurer ; je le sais aussi par un événement tout à fait inhabituel – et je dois bien le dire, inouï pour moi – le fait que toutes mes interventions de la salle par la suite furent ponctuées par des applaudissements nourris. Enfin, la pile de « L’argent, mode d’emploi », impressionnante sur la table du libraire dans l’entrée avant mon intervention, fut tout aussitôt épuisée.
Je vous signale aussi la rencontre avec un fan enthousiaste et anonyme du blog, et sur le même registre, parmi les intervenants, Paul Soriano, le rédacteur en chef de la revue Médium en qui vous pourrez trouver un connaisseur érudit et incollable du blog de Paul Jorion.
Enfin, à ne pas rater si vous passez par Auxerre, l’exposition qui se tient au Musée-Abbaye Saint-Germain, sur le thème de l’affiche politique française consacrée à l’impôt et qui présente une impressionnante collection d’affiches, du début du XIXe siècle à Charlie-Hebdo. Deux découvertes pour moi : certaines affiches datant de 1910 pourraient servir d’illustration à mes billets, sans qu’on doive en modifier en rien le texte, aussi : que certaines affiches du parti communiste représentaient vraiment un bolchévique vengeur, un couteau entre les dents !
(*) Un « article presslib’ » est libre de reproduction en tout ou en partie à condition que le présent alinéa soit reproduit à sa suite. Paul Jorion est un « journaliste presslib’ » qui vit exclusivement de ses droits d’auteurs et de vos contributions. Il pourra continuer d’écrire comme il le fait aujourd’hui tant que vous l’y aiderez. Votre soutien peut s’exprimer ici.
13 réponses à “Les entretiens d’Auxerre 2009 : « L’argent », du 5 au 7 novembre”
Enfin, la pile de « L’argent, mode d’emploi », impressionnante sur la table du libraire dans l’entrée avant mon intervention, fut tout aussitôt épuisée.
Ces lecteurs ont bien de la chance.J’ai commandé votre livre à la FNAC le 26/10/2009 et à ce jour aucune date de livraison n’est annoncée.
Pour JBA:
J’ai pré-commandé « L’argent, mode d’emploi » vers le 10 octobre dans ma librairie de Pontoise.
Y allant vendredi dernier – le 30 – le livre m’attendait tranquillement sur le rayon des « commandes ».
Mon weekend commençait bien !!
Toujours rien de mon coté (j’ai commandé ca fait 9 jours), je suis aussi dans le 95.
Je réside prés d’Auxerre et n’ai pu me rendre à ces entretiens. J’en suis désolé.
Le programme et les intervenants sités me mettent au comble de la désolation.
Par contre la remarque: « un mélange des genres qui provoqua plus d’un regard interloqué entre membres du public » me fait sourire. Auxerre est une ville bourgeoise de province… Je n’en dirai pas d’avantage.
Merci Madame Fontaine (directrice au CNRS) pour expliquer au peuple, avec des mots simples, des évidences pas si évidentes que cela…
@Paul
Mon épouse (psychologue) n’aurait pas pu le dire mieux…
« L’argent mode d’emploi », puisque je n’en ai pas beaucoup… passons 🙂
J’en profite pour faire remarquer d’autres lacunes :
-« La mère » , de Maxime Gorky. Gorki étant l’un des premiers écrivains russes (voir son terrible et beau livre, « Enfance »), ce livre que certains qualifieront de « livre de combat », n’est pas disponible à la Fnac, et probablement non disponible chez l’éditeur. Voilà le grand cas que nous faisons de la culture. Autant ne pas rééditer Joyce, si l’on en arrive là.
-Ensuite, il a pas de livres sur des peintres tels que Veronèse, Titian, (avec de larges reproductions) et beaucoup d’autres. Voilà l’état de l’édition française, que le monde nous envie. A part éditer le dernier Clarck… n’est-ce pas ?
En tout cas, « la mère » de maxime gorki, rien de moins, est introuvable en france dans les librairies. De telles « disparitions » me laissent mal augurer de pans entiers culturels qui seraient cachés, ou en voie de disparition, organisée ou non, pour des motifs qu’on ne peut que supputer, et qui ne sont pas défendables.
Ici comme dans les centrales nucléaires et ailleurs, sévit une certaine baisse du savoir-faire, voire de l’éthique. La vie ressemble à un roman d’Orwell, avec un passé « aboli », en tout cas mystérieusement troué, mité, alors que l’abondance de livres laisserait penser que tout est là. Sorte de sentiment de décomposition du monde.
L
Cher Lisztfr cette remarque sur un passé mité fait vraiment écho chez moi et nécessite une réflexion plus approfondie.
Depuis quelques années déjà je pense que la disparition de la culture est trop importante à notre époque pour être fortuite.
On peut penser, sans être un adepte forcené de la théorie du complot, qu’il y a une organisation derrière ça.
L’homme actuel doit n’être qu’un consommateur sans esprit critique.
La culture et la conscience sont des freins à l’acte d’achat, supprimons-les!
C’est bien parti, mais je veux croire que ça ne marchera pas!
La mère est disponible chez AMAZON « sur stock »:
http://www.amazon.fr/M%C3%A8re-Maxime-Gorki/dp/2841092879/ref=sr_1_2?ie=UTF8&s=books&qid=1257670811&sr=1-2
Bonjour à vous.
Je n’aime pas les théories de complot, mais… :
http://fr.readwriteweb.com/2009/11/04/a-la-une/dictature-20-think-global-act-local/
Vous remarquerez que ce projet va bien plus loin que la simple défense du copyright qui a pour but de rentabiliser l’accés à la culture.
Il s’agit aussi de pouvoir supprimer toute information qui n’irait pas dans le « bon sens »…
J’ai beaucoup apprécié Méda moi aussi, en particulier ses travaux sur la valeur travail.
C’est évidemment un fait exprès de ne prendre que des incompétents dans ce genre de comités. Sait-on jamais, ils pourraient changer les choses si on prenait des gens qui cherchent réellement le bien commun.
Un envoi de Nikademus : Paulette Goddard dans Les Temps Modernes de Chaplin.
Incorrigible ringard, j’ignore Amazon et j’ai commandé « l’argent mode d’emploi »chez mon petit libraire de province.
Avec lui au moins je peux discuter et ça sent bon le papier neuf…C’était le 30 octobre, il avait déjà vendu le seul exemplaire qu’il détenait.
Ce matin en faisant le marché j’ai pu ramener un exemplaire de la nouvelle édition bleue qu’il avait enfin reçu…